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La déclaration des droits de la femme et de la

citoyenne, Olympe de Gouges, préambule : analyse


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Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, Préambule,


Introduction
Olympe de Gouges (1748-1793) est une femme de lettres qui s’inscrit dans le
mouvement des Lumières par ses œuvres progressistes qui militent pour l’égalité.

L’heureux naufrage (1784), pièce à succès et à scandale, dénonce par exemple la


violence de l’esclavage qui enrichit l’aristocratie.

Elle participe pleinement à la Révolution française en promouvant notamment l’égalité


entre les hommes et les femmes.

Son féminisme combattif fait d’Olympe de Gouges une figure singulière et marquante
de la Révolution française.

La militante meurt guillotinée en 1793 pour avoir dénoncé les massacres menés au nom
de la Révolution.

Ce texte constitue le préambule (=introduction) à sa Déclaration des droits de la


femme et de la citoyenne (1791), son texte le plus connu.

Cette Déclaration d’Olympe de Gouges réécrit la Déclaration des droits de l’Homme et


du citoyen de 1789 pour énoncer les principes de l’égalité entre les sexes)

Dans ce texte introductif, Olympe de Gouges expose les buts de sa démarche.

Problématique
En quoi ce préambule justifie-t-il l’importance d’une constitution affirmant l’égalité entre
les hommes et les femmes ?

Annonce du plan linéaire

Dans la première phrase du préambule, Olympe de Gouges appelle les femmes à se


constituer en Assemblée nationale.

Puis, dans une deuxième partie, de « “Considérant que l’ignorance » à « et au bonheur
de tous”« , elle explique pourquoi une constitution égalitaire entre les sexes est
vertueuse.

Enfin, dans le dernier paragraphe du préambule, l’auteure introduit les articles de


droits auxquels elle aspire.

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I – Olympe de Gouges appelle à la constitution d’une Assemblée
nationale des femmes

(Première phrase)
Le préambule s’ouvre sur une énumération ternaire (=liste de trois choses) qui produit
un effet rhétorique, dans la lignée des textes rhétoriques révolutionnaires : «“Les mères,
les filles, les sœurs”».

L’autrice désigne ainsi toutes les femmes par périphrase (=désigner les choses
indirectement).

Ces périphrases insistent sur la solidarité de ces femmes. Elles sont en effet d’emblée
présentées comme formant une seule et même famille, une large entité source de vie et
de protection.

Ces périphrases soulignent également la puissance des liens qui unissent les femmes
aux hommes (mères, filles, sœurs).

Les femmes, de par leur importance, sont les « “représentantes de la nation” ».

L’apposition « représentantes de la Nation » permet à Olympe de Gouges de glisser du


biologique (la famille : mère, filles, soeurs) au politique (la nation).

Elle rappelle ainsi que les femmes, par leur importance dans la société, peuvent, autant
que les hommes, représenter la nation.

La notion de Nation est complexe et s’affirme à la Révolution française. La nation


désigne une collectivité d’individus s’accordant à coexister sous les mêmes lois et
les mêmes principes.

La nation constitue donc une organisation politique qui s’oppose à la monarchie de


droit divin, selon laquelle le pouvoir politique est organisée par un roi choisi par Dieu.

Or puisque les femmes sont « “représentantes de la nation », elle « demandent d’être


constituées en Assemblée nationale” ».

L’emploi du présent de l’indicatif (« demandent« ) indique la volonté de voir ce qui est


écrit mis en œuvre dans la société. Olympe de Gouges n’écrit pas pour l’avenir, mais
pour le présent, dans l’urgence même.

L’« Assemblée nationale » rassemble les individus élus pour représenter et défendre les
intérêts de la nation.

Olympe de Gouges reprend ainsi les pratiques révolutionnaires : le 20 juin 1789, eut
lieu le serment du Jeu de Paume. Des représentants du peuple se sont constitués en
Assemblée nationale pour défendre les intérêts du peuple. Mais lors du serment du Jeu

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de Paume, les députés étaient tous des hommes.

En demandant à ce que les femmes se constituent en Assemblée nationale, Olympe de


Gouges aspire à une Révolution dans la Révolution, afin que les femmes soient libérés
autant que les hommes de la tyrannie.

Olympe de Gouges justifie son projet par la suite.

II – Olympe de Gouges explique pourquoi une constitution


égalitaire entre les sexes est vertueuse

(Suite du premier paragraphe)

Olympe de Gouges considère « “que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de la


femme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des
gouvernements” ».

La gradation « “l’ignorance, l’oubli ou le mépris” » juge sévèrement la société qui


maintient volontairement (« le mépris« ) la femme dans un état de dépendance.

Il en résulte « “des malheurs publics » et « de la corruption des gouvernements”« .

D ’après l’autrice, ces désordres sociaux proviennent du mépris que subissent les
femmes. Son diagnostic considère la misogynie comme la maladie qui affecte tout le
corps social.

Après ce sévère diagnostic, Olympe de Gouges expose la solution : faire une


Constitution qui égalise la condition des sexes. Ainsi, les femmes « “ont résolu
d’exposer dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrées de
la femme”».

Cette énumération ternaire d’adjectifs (« “droits naturels, inaliénables et sacrées”« )


est importante. En évoquant les « droits naturels » de la femme, Olympe de Gouges
considère que la Constitution doit restaurer les droits établis par la nature, mais qui
ont été bafoués par les hommes.

Le rythme ternaire confère à ces droits une certaine sacralité.


La locution conjonctive « afin que », comme le participe présent « Considérant que »,


témoigne de la dimension argumentative et juridique de ce préambule.

Olympe de Gouges souhaite que « “cette déclaration constamment présente à tous les
membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs. ”»
L’adverbe temporel « constamment » repris par son synonyme « sans cesse » insiste
sur le fait que l’égalité entre hommes et femmes est un principe qui nécessite un effort de
tous les instants. Ce principe doit devenir un des fondements de la nouvelle société.

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L’ensemble du « corps social » est concerné. Cette métaphore médicale souligne que
les français, en cessant d’être les sujets d’un roi dont ils contestent l’autorité, deviennent
les membres d’une même nation.

Or pour que ce nouvel état de fait fonctionne, chacun doit connaître et respecter ses
droits et ses devoirs. Ce préambule a donc une fonction pédagogique : introduire et
justifier les articles suivants.

La répétition de la locution conjonctive « afin que » montre combien Olympe de Gouges


cherche à être méthodique et exhaustive.

La deuxième phrase du préambule est longue, très structurée. Cette phrase complexe
est une période oratoire, qui suscite une vive impression sur l’auditoire par son ampleur.
Olympe de Gouges confère ainsi une force de conviction à son préambule.

Le parallélisme « “pouvoir des femmes » et « pouvoir des hommes” » inscrit l’égalité


femmes-homme dans le texte.

Olympe de Gouges appelle à une stricte égalisation des droits femmes-hommes


«“pouvant être à chaque instant comparés ”». Une fois encore, le complément
circonstanciel de temps « à chaque instant » crée un sentiment d’urgence et de
nécessité.

Le but poursuivi par Olympe de Gouges est également «“que les réclamations des
citoyennes, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent
toujours au maintien de la Constitution”».

La majuscule à « constitution » sacralise le texte juridique. Olympe de Gouges est une


révolutionnaire intègre qui reprend les principes clés de la révolution : ce n’est plus le
roi qui est sacré, mais la nation, dont les idéaux sont inscrits dans la constitution.

Les adjectifs « “simples et incontestables” » promeuvent la clarté de la constitution, dont


ce préambule est l’image : synthétique et général.

Mais la force de la constitution ne se limite pas à rendre possible la vie en communauté.

En effet, elle vise « “au maintien […] des bonnes mœurs, et au bonheur de tous.” » Cette
hyperbole lyrique témoigne de l’enthousiasme d’Olympe de Gouges : sa constitution
ouvrirait à un bonheur généralisé.

À l’époque, les femmes étaient vues comme fragiles et susceptibles de facilement


sombrer dans l’immoralité. Olympe de Gouges anticipe sans doute de possibles
objections en associant au contraire, dès le préambule, l’égalité hommes-femmes à la
moralité (« les bonnes moeurs » ).

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III – Olympe de Gouges introduit les articles de droits auxquels
elle aspire

(Deuxième paragraphe)
Le second paragraphe s’ouvre sur le connecteur logique « En conséquence », ce qui
maintient l’effort rhétorique de structuration.

Olympe de Gouges use d’une périphrase pour faire l’éloge des femmes : «“le sexe
supérieur en beauté comme en courage dans les souffrances maternelles”». Elle affirme
la supériorité des femmes sur les hommes, ce qui renverse avec audace la hiérarchie
alors admise.

Cette périphrase peut également surprendre dans un texte qui vise l’égalité hommes-
femmes car Olympe de Gouges s’appuie sur l’image traditionnelle de la femme,
gracieuse et maternelle, comme si elle ne parvenait pas totalement à s’extraire des
clichés qui entourent la féminité.

En évoquant l’accouchement, elle rappelle que ce sont les femmes qui donnent
naissance aux citoyens, ce qui constitue une boucle avec l’ouverture du préambule («Les
mères»).

Olympe de Gouges fait parler l’ensemble des femmes : «“le sexe supérieur […]
reconnaît et déclare”».

Le singulier (« “le sexe supérieur” » ) souligne qu’elle aspire à défendre toutes les
femmes, considérées comme une même entité.

Olympe de Gouges cherche à conclure son préambule de manière frappante en parlant


«“en présence et sous les auspices de l’Être suprême”». Elle en appelle donc à une
autorité supérieure, sacralisée, rationnelle et juste, soucieuse de l’égalité entre la
femme et l’homme.

Mais surtout, elle annonce « Les Droits suivants de la femme et de la citoyenne« . Son
projet est donc une réécriture de la Déclaration des Droits de l’homme et de Citoyen
de 1789 qu’elle juge inachevée et imparfaite.

Préambule de la déclaration des droits de la femme et de la


citoyenne, conclusion
Ce préambule a une fonction pédagogique : faire comprendre le projet égalitariste de
l’auteur avant de le détailler. Il s’agit donc de convaincre du bien-fondé de ce projet.

Pour ce faire, Olympe de Gouges s’inscrit explicitement dans la lignée de l’égalitarisme


de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qu’elle pastiche (=imiter,
souvent pour critiquer).

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Elle souligne en effet l’imperfection de de la DDHC de 1789 qui n’a pas tenu ses
promesses d’égalité à l’égard des femmes. Une nouvelle Déclaration est donc nécessaire
pour lutter contre la corruption de la société.

Ce préambule peut se lire en miroir du postambule, plus polémique, qui vise à insuffler
aux femmes l’énergie et la volonté de se battre pour leurs intérêts.

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