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Explication linéaire n°14: Déclaration des droits de la

femme et de la citoyenne : Préambule et 4 premiers


articles
Introduction:
Olympe de Gouges est une autrice engagée, dont les écrits reflètent ses nombreux
combats pour l'égalité et la justice non seulement entre les êtres humains, mais
aussi entre les hommes et les femmes. en 1791, Olympe de Gouges rédige une
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, texte engagé faisant pendant
à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, adoptée le 26 août 1789. Elle y
rappelle à l'Assemblée nationale la nécessité d'une réelle égalité entre les sexes
pour permettre un gouvernement et une société équilibrés. Ce texte est, ce qu’elle
nomme « Préambule » et les quatre premiers articles

Comment, à travers la réécriture d’un texte juridique, Olympe de Gouges


affrmet-elle un projet féministe mais aussi humaniste ?

Nous montrerons d’abord que ce texte est un préambule, puis les articles sont écrits
au féminin.

I. Premier mouvement : le préambule (l. 1-12)


A. Un début efficace (l. 1-2)
Ce préambule dessine le projet d'Olympe de Gouges : mettre au devant de la scène
les femmes, « représentantes de la Nation » (l.1), revendiquant leur liberté
d'expression. Le début du texte fait écho à l’ouverture de la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen , mais Olympe de Gouges remplace la formulation « Les
Représentants du Peuple Français » par une énumération ternaire : « Les mères, les
filles, les soeurs » (l.1). On remarque que l’autrice met en avant la dimension
familiale de la communauté féminine, qu’on pourrait rapprocher de la sororité. Cela
traduit sa volonté de rappeler aux hommes la place si proche occupée par les
femmes dans leur vie. De plus, l'emploi du terme « Nation », au lieu de « Peuple »,
invite les hommes à tenir compte davantage des acquis de la Révolution, qui
devraient les amener à accepter l’idée d’égalité. Olympe de Gouges unit ainsi les
femmes aux concepteurs du texte et en fait leurs égales selon la nature.
B. Un détournement accusateur et polémique de La Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen (l.2-10)
En remplaçant l’énumération « l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de
l’homme » par « l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de la femme » (l.2),
Olympe de Gouges met en valeur le fait que les femmes sont omises de la
Déclaration de 1789. Elle revendique une prise en compte des droits des femmes.
Les droits qui vont être énoncés par la suite sont caractérisés : « [elles] ont résolu
d’exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaltérables et sacrés
de la femme » (l.3-4). L’énumération d’adjectifs permet de caractériser les droits des
femmes et d’insister sur leur caractère fondamental. Tout d’abord, cette déclaration
doit rappeler les droits et les devoirs des femmes aux « membres du corps social »
(l.5), c’est-à-dire à toute la société. Par le parallélisme (« les actes du pouvoir des
femmes, et ceux du pouvoir des hommes »), elle donne une portée universelle à sa
déclaration. Le texte marque nettement la volonté polémique d’Olympe de Gouges,
par la comparaison établie entre les deux sexes.

C. Une fin de préambule provocatrice (l.10-12)


La périphrase « le sexe supérieur en beauté comme en courage dans les souffrances
maternelles » (l.10) fait référence aux expressions traditionnelles de « beau sexe » et
de « sexe faible » pour désigner les femmes : reprenant la première, elle dénonce la
seconde en rappelant les souffrances de l’accouchement qu’endure toute mère, ce
qui montre que les femmes ne sont pas un sexe si « faible » et fragile que ce que les
hommes veulent bien croire. Avec cette périphrase, l’autrice présente
malicieusement la prérogative féminine de l’accouchement comme le signe d’une
plus grande force. Olympe de G opère ici un rééquilibrage argumentatif : si les
hommes fondent leur supériorité sur la nature et la biologie , on peut prendre le
même parti en changeant de point de vue et voir que la nature favorise aussi le sexe
féminin sur les critères différents mais aussi biologiques de la maternité et de
l’esthétique. Elle en arrive ainsi à un éloge insistant des femmes

II. Des articles écrits au féminin (l.13-17)


A. Articles I et II
L’article I déclare le droit fondamental à la liberté et à l’égalité. C’est un droit naturel,
comme en témoigne l’emploi du verbe « naître ». Olympe de Gouges reprend l’idée
qu’il peut y avoir des différences sociales mais qu’elles se fondent sur son mérite et
son engagement social.
Par ces ajouts, le texte met en valeur un ton polémique et pointe du doigt les
incohérences et la condamnation de l'homme qui omet la femme.
L’article 2 propose une énumération des droits naturels et imprescriptibles de la
femme et de l’homme qui définit le modèle et les valeurs de cette nouvelle société :
« la liberté, la propriété, la sureté, et surtout la résistance à l’oppression ». Ces droits
sont caractérisés par l’adjectif “naturels” qui montre que la nature est égalitaire,
puisque les sexes y sont partout confondus. et l’adjectif « imprescriptible »,qui
insiste sur la dimension fondamentale de ces droits.

B. Article III et IV
Dans l’article III, Olympe de Gouges défnit la nation comme la réunion de la femme
et de l’homme. La négation restrictive « ne… que » (« la nation, qui n’est que la
réunion de la femme et de l’homme ») souligne cette nécessaire inclusion des
femmes dans la nation.
Dans l’article IV, la possibilité de « faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » (dans la
DDHC) est transformée en l’obligation de « rendre tout ce qui appartient à autrui »
signife que la femme a été privée injustement de son dû. L’accusation est soutenue
par un lexique violent : il s’agit de rendre aux femmes leurs « droits naturels » dont
elles ont été dépossédées par la « tyrannie perpétuelle » de l’homme. La domination
masculine apparaît ainsi comme le ferment de la division et de l’arbitraire.
Enfin, Olympe de Gouges réclame un changement en faveur des femmes : « ces
bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la raison ». En rajoutant
cette précision, Olympe de Gouges montre que la loi doit s’appuyer sur des principes
universels sous peine de continuer à exclure de son champ d’application les
femmes, les esclaves et toutes les marges de la société.

Conclusion:
un texte qui place les femmes en son cœur, soulignant de manière de plus en plus
explicite leur invisibilisation historique. Olympe de Gouges s’appuie sur le texte de
la DDHC presque mot pour mot, dans le but d’offrir aux femmes un texte défendant
leurs droits. On peut donc parler ici d’une réécriture critique, qui vise à souligner
l’exclusion des femmes, parfois malicieusement, mais le plus souvent avec
virulence. Olympe de Gouges n’a pas attendu la Révolution pour demander plus de
liberté pour les femmes, et pour proclamer leurs droits à être considérées comme
les égales des hommes. Même quand le pouvoir est placé entre les mains du peuple,
et même quand les femmes ont lutté à leurs côtés pour établir la république, son
texte montre que les hommes ne sont pas encore prêts à leur accorder une juste
place dans la vie politique et dans la société.

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