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INTÉRÊT DU SUJET • L’affirmation des droits des femmes est au cœur de la Déclaration
d’Olympe de Gouges. Au-delà, quels en sont les multiples enjeux ?
Vous répondrez à cette question dans un développement organisé en vous appuyant sur la
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, sur les textes que vous avez étudiés dans
le cadre du parcours associé et sur votre culture personnelle.
Analyser le sujet
Formuler la problématique
Construire le plan
Les titres en couleur ou entre crochets ne doivent pas figurer sur la copie.
Introduction
[Accroche] L’universitaire Martine Reid explique que la Déclaration des droits de la femme et de
la citoyenne d’Olympe de Gouges s’inscrit dans la longue histoire « de l’accession des femmes à
l’égalité. » [Explication du sujet] Comme son titre l’indique, cette déclaration, rédigée en 1791,
affirme que les femmes et citoyennes disposent de droits, à égalité de ceux revendiqués dans la
Déclaration de l’Homme et du Citoyen de 1789. Cependant, le texte ouvre sur d’autres luttes,
annexes ou plus vastes. [Problématique] Quelles causes Olympe de Gouges s’attache-t-elle à
défendre à travers la Déclaration ? [Annonce du plan] L’œuvre participe bel et bien au combat
pour octroyer de nouveaux droits aux femmes [I] ; mais elle contient également une critique
féministe virulente de la domination masculine [II] ; elle a enfin l’ambition plus large d’améliorer
la société tout entière [III].
■ La Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen est votée en août 1789 par les députés
réunis en Assemblée constituante. Deux ans plus tard, Olympe de Gouges imite la forme de
cette Déclaration tout en la féminisant : elle proclame ainsi en dix-sept articles « les droits
naturels, inaliénables et sacrés de la femme » (préambule). Aux « représentants du peuple
français », tous masculins, l’auteure substitue « les mères, les filles, les sœurs, représentantes
de la nation ».
■ Cette Déclaration est un pastiche évident de son pendant masculin : la forme juridique est
très similaire (préambule, articles, postambule), et nombre de tournures syntaxiques et
lexicales sont reprises quasiment à l’identique.
■ Cependant, les féminisations apportées au texte original prennent une portée critique :
l’article VI rappelle par exemple que « toutes les citoyennes et tous les citoyens » sont égaux
devant la loi, qui doit être « la même pour tous ».
■ L’égalité stricte entre les hommes et les femmes est proclamée dès l’article premier : « La
femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. »
CITATION
À propos des femmes, Marie de Gournay écrivait déjà au début du XVIIe siècle : « je me
contente de les égaler aux hommes. » (Égalité des hommes et des femmes, 1622)
■ Au nom de cette égalité, différents droits, à la fois juridiques et politiques, sont ainsi
revendiqués : « la liberté, la propriété, la sûreté, […] la résistance à l’oppression » (article II) ; la
liberté d’opinion et d’expression (articles X et XI) ; le droit de propriété (article XVII).
■ La sphère sociale est également prise en compte, notamment dans la nouvelle « Forme du
contrat social de l’homme et de la femme » proposée par Olympe de Gouges : les femmes
doivent pouvoir ainsi forcer un père inconstant « à tenir ses engagements » envers un enfant
naturel.
■ L’auteure n’hésite pas à renverser les valeurs traditionnelles : ainsi les prostituées doivent
être protégées « dans des quartiers désignés », car elles contribuent paradoxalement moins à
la « dépravation des mœurs » que « les femmes de la société ».
À NOTER
■ Les hommes sont rudement pris à partie dans le pamphlet qui précède la Déclaration : leur
« force » et leurs « talents » apparaissent comme de bien piètres excuses pour opprimer la
moitié de l’humanité. Leur violence est semblable à celle d’Arnolphe dans L’École des femmes
de Molière, rappelant à la jeune Agnès son devoir d’obéissance devant sa « toute-puissance ».
■ L’« empire tyrannique » des hommes sur les femmes apparaît comme une exception injuste et
cruelle au sein de la nature animale ou végétale, où pourtant les sexes « coopèrent avec un
ensemble harmonieux ».
2. Un appel à se « réveiller »
■ Cependant, la lutte pour ces droits ne peut aboutir que si les femmes prennent conscience de
leur « déplorable sort » et s’emparent de ces revendications afin de s’émanciper de la tutelle
masculine.
■ Pour cela, Olympe de Gouges n’hésite pas à « parler franchement » à la reine Marie-Antoinette,
afin de la convaincre « de donner du poids à l’essor des droits de la femme, et d’en accélérer les
succès ». Cette adresse d’une femme à une autre, au-delà de son statut royal, crée une sorte de
sororité apte à transcender les conventions sociales.
■ Le postambule élargit la destination du texte à l’ensemble des femmes. Il s’agit d’un appel
direct à l’éveil des consciences féminines : « Femme, réveille-toi ! » Le désir d’émancipation ne
peut venir que des femmes elles-mêmes, qui doivent abolir ce qui s’apparente à leur propre
esclavage vis-à-vis des hommes.
[Transition] Olympe de Gouges cherche donc à lutter contre une domination masculine qui lui
paraît injuste. Mais ce combat est mis en définitive au service d’un désir d’amélioration de la
société dans son ensemble.
■ L’auteure fait appel à la raison de ses lecteurs et lectrices, afin de les éclairer sur la réalité du
monde et de la société. La question de l’éducation des femmes s’affirme comme un enjeu
central, de même que la lutte contre l’intolérance. Il s’agit de lutter implacablement contre « les
tartufes, les bégueules, le clergé et toute la séquelle infernale » aux pensées obscurantistes.
■ Dans De l’éducation des femmes (1783), Pierre Choderlos de Laclos exhortait déjà les femmes
à s’émanciper en sortant de l’ignorance dans laquelle elles sont maintenues par les hommes, car
« comment pourraient-ils vouloir former des femmes devant lesquelles ils seraient forcés de
rougir ? »
■ L’objectif étant de parvenir à une société apaisée, il ne s’agit pas pour les femmes et les
hommes de se faire une guerre éternelle ; au contraire, l’article III rappelle que la nation consiste
en « la réunion de la femme et de l’homme ».
■ L’union libre et honnête de l’homme et de la femme, « égaux en force et en vertu », est aussi la
condition sine qua non d’une harmonie politique bien fragile, dans cette période bouillonnante
qu’est la Révolution française.
Conclusion
[Synthèse] Dans cette œuvre, Olympe de Gouges ne lutte donc pas seulement pour les droits
des femmes : elle les appelle aussi à s’émanciper du sort dans lequel elles sont maintenues, afin
d’en arriver à une nouvelle société plus juste, inspirée de la philosophie des Lumières.
[Ouverture] Cette lutte multiforme est poursuivie et amplifiée par les féministes françaises du
XIXe siècle, telles Flora Tristan ou George Sand, puis par le mouvement des suffragettes
britanniques au début du XXe siècle.