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Droit Commercial

Semestre 4
Sciences économiques et gestion
Professeur : Farouk ZERHOUNI

Leçon n°2 : L’acquisition de la


qualité de commerçant

L’application du droit commercial est en principe réservée aux personnes


physiques ou morales ayant la qualité de commerçant. Cette affirmation
traditionnelle ne peut toutefois pas rendre compte des distinctions de plus en plus
complexes de ce droit qui tend à influencer l’ensemble des activités
économiques1.

I. Les conditions juridiques de l’exercice du commerce

Pour devenir commerçant, il ne suffit pas d’accomplir des actes de commerce,


il faut également que des conditions tenant à la personne exerçant le commerce
soient réunies. Il s’agit d’une part de la capacité commerciale et d’autre part
du comportement et du statut de la personne qui exerce le commerce.

1. Les règles de la capacité commerciale

L’exercice du commerce est libre, cependant pour pouvoir l’exercer faut être
majeur compte tenu de l’importance des risques encourus par ce dernier.
La capacité pour exercer le commerce obéit aux règles du statut personnel2. Est
considéré comme mineur quiconque n’ayant pas atteint l’âge de la majorité. L’âge de

1
George DECOCQ & Aurélie BALLOT-LENA, Droit commercial, Dalloz, 8ème Edition, P 170 ;
2
En application de l’article 12 du code de commerce qui dispose que : « Sous réserve des dispositions ci-après, la
capacité pour exercer le commerce obéit aux règles du statut personnel. »

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majorité légale est fixé à dix-huit années grégoriennes révolues et ce, conformément
à l’article 209 du code de la famille.
Cependant, il en demeure que des personnes se trouvant exclues des professions
commerciales dans des cas bien précis tel qu’évoqué ci-dessous.

A. Les limitations tenant aux personnes

1. Les incapables majeurs


Ce sont les malades mentaux ou les faibles d’esprit qui font l’objet d’une
mesure de tutelle même s’ils sont âgés de 18 ans et plus. Il s’agit donc des
personnes âgées de plus de 18 ans et qui ne peuvent être capables en raison de
maladies mentales, de faiblesse d’esprit ou de prodigalité3.
Le principe est simple, seul un majeur peut être commerçant, cela signifie que le
mineur, ne peut être commerçant, de même que les majeurs incapables. Cette règle
est fondée sur un souci de protection des tiers et de l’incapable lui-même,
l’exercice du commerce créant des risques sérieux tant pour le commerçant que
pour son environnement.

a. Le mineur non émancipé


Un mineur non émancipé ne peut devenir commerçant ni même faire
occasionnellement des activités commerciales.
Il s’agit d’un enfant dépourvu de discernement et qui n’a pas atteint l’âge de douze
ans révolus. Il n’est pas admis à gérer son patrimoine et aucune autorisation ou
aucun procédé détourné ne peut lever cette incapacité. La sanction de l’incapacité
est que le mineur ne peut acquérir la qualité de commerçant et que les actes de
commerce, même isolés, conclus par le mineur sont nuls.

3
Voir article 217 et 2018 du code de la famille ;

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b. Le mineur émancipé :
La loi à savoir l’article 226 du code de la famille4 autorise le mineur à exercer
le commerce sous certaines conditions. Celui-ci doit être émancipé, il doit être
spécialement autorisé à exercer le commerce par son père ou par sa mère ou par
son tuteur. L'acte d'autorisation doit être enregistré et affiché au tribunal de
première instance du domicile commercial du mineur.

A partir de 12 ans révolus : le mineur peut effectuer des actes précis.


L’autorisation d’exercer le commerce doit être inscrite au registre de commerce.
L’autorisation d’exercer le commerce peut être révoquée à tout moment pour
motifs graves. A défaut d’une telle autorisation, le tuteur légal peut exploiter les
biens du mineur dans le commerce (actes de disposition sur les biens = vente,
échange, location, société, nantissement), qu’après autorisation spéciale du juge.

Il peut s’ajouter à cela l’émancipation par déclaration de majorité qui à partir


de l’âge de 16 ans. Le mineur, si son tuteur le juge apte à être affranchi de la
tutelle, peut être « émancipé après l’accomplissement des formalités légales
nécessaires ».

Il résulte de l’émancipation que le mineur prend possession de tous ses biens, qu’il
devient entièrement affranchi de la tutelle, qu’il est relevé de son incapacité, ce
qui revient à dire qu’il acquière la pleine capacité et la disposition de son
patrimoine.

4
L’article 226 du code de la famille dispose que : « le mineur doué de discernement peut être autorisé à prendre
possession d’une partie de ses biens pour en assurer la gestion à titre d’essai une autorisation est accordée, à cet
effet, par le tuteur légal ou par décision du juge chargé des tutelles, sur demande du tuteur testamentaire ou
datif ou du mineur intéressé. Le juge chargé des tutelles peut annuler l'autorisation de remise des biens, sur
demande du tuteur testamentaire ou datif, du ministère public ou d'office, en cas de mauvaise gestion, dûment
établie, des biens autorisés. L'interdit, autorisé à gérer une partie de ses biens, est considéré comme ayant pleine
capacité pour agir dans la limite de l'autorisation qu'il a reçue et pour ester en justice. »

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Par cette émancipation, le mineur devient majeur et peut exercer le commerce


sans aucune restriction.

En dernier, il est important de signaler que cette autorisation doit être inscrite au
registre du commerce du tuteur, qu’il s’agisse de l’autorisation de l’expérience de
la maturité (à 12 ans) ou de la déclaration judiciaire anticipée de la majorité (à 16
ans).

c. La femme mariée :

Les conditions relatives l'exercice du commerce par la femme ont


énormément évolué au Maroc. La législation antérieure (art 6 du DCC) précise
que la femme ne peut faire le commerce sans le consentement de son mari.

Aujourd'hui, la femme mariée est complètement émancipée de ce point de vue,


elle peut donc exercer le commerce sans l'autorisation préalable de son mari et ce
conformément à l’article 17 du code de commerce qui précise que : « La femme
mariée peut exercer le commerce sans autorisation de son mari. Toute disposition
contraire est réputée nulle ».

d. Le mineur étranger
Lorsqu'un étranger n'a pas l’âge de majorité (18 années grégoriennes révolues)
requis par la loi marocaine et qu'il est réputé majeur par sa loi nationale, il ne peut
exercer le commerce qu’après autorisation du président du tribunal du lieu où il
entend exercer et inscription de cette autorisation au registre du commerce. Il est
statué sans délai sur la demande d’autorisation.

Ici on est devant deux hypothèses :

o A l’âge de 18 ans, tout étranger est réputé majeur et peut exercer le


commerce même si sa loi nationale prévoit un âge supérieur à 18 ans et ce,
conformément à l’article 15 du code de commerce marocain.

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o A moins de 18 ans, même s’il est réputé majeur par sa loi nationale, un
étranger ne peut exercer le commerce qu’après autorisation du président
du tribunal du lieu où il entend exercer le commerce. Bien entendu, cette
dernière doit être inscrite au registre du commerce.

2. Conditions liées à l’intérêt général

L’incompatibilité et la déchéance sont prévues dans un but de police et


d’intérêt général afin d’éviter l’exercice du commerce par certaines personnes
dont l’activité n’est pas désirable (b) ou afin de contrôler l’activité, voire de
restreindre l’accès à certaines professions (a).

a. Incompatibilités :
L'exercice du commerce est incompatible avec certaines professions telles que
celles :

➢ Les membres des professions libérales (avocats, médecins,


architectes, commissaires aux comptes, conseils juridiques …) ;
➢ Les officiers ministériels (notaires, huissiers) ;
➢ Les fonctionnaires publics (fonctionnaires de l’administration,
magistrats, militaires).
Il est à noter que la méconnaissance des incompatibilités entraîne des sanctions
pénales et disciplinaires (radiation du bureau). Mais les actes de commerce
demeurent valables et le contrevenant est considéré comme un commerçant de
fait.

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Certaines activités commerciales ne peuvent être exercées par des personnes


physiques mais seulement par des sociétés, telles, par exemple les activités
bancaires, les activités de recherche et d'exploitation d'hydrocarbure, etc

b. La déchéance commerciale

La déchéance est une mesure privative de la liberté d’exercer une profession


commerciale. En vertu de l’article 711 du code de commerce marocain, « la
déchéance commerciale emporte interdiction de diriger, de gérer, d’administrer
ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou
artisanale, et toute société commerciale ayant une activité économique ». Sont
ainsi concernées d’abord les personnes qui ont été condamnées à une peine de
prison, ou à une condamnation de plus de trois mois, pour escroquerie, abus de
confiance, ou de chèque sans provision, les personnes contre lesquelles est
prononcée une faillite personnelle.

La déchéance a un caractère sanctionnateur dans le but d’évincer les commerçants


qui ne respectent pas leurs obligations de toute activité commerciale.

Cependant, il demeure important de préciser que la déchéance n’est pas


obligatoirement perpétuelle. Les tribunaux qui condamnent le commerçant fixent
la durée de l’interdiction avec un minimum de cinq ans, si le jugement ne
prononce pas l’interdiction elle existe automatiquement sans limitation de durée.
Les personnes frappées d’interdiction peuvent demander à la juridiction qui les a
condamnés de les relever de l’interdiction ou d’en fixer la durée qui peut aller
jusqu’à dix ans.

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3. Les limites conventionnelles à l’exercice du commerce

En plus de ce qui a été exposés, il existe des limitations qui sont le résultat
d'une relation contractuelle.

Une des parties peut s'engager, par le biais d'une clause insérée dans le contrat, à
ne pas concurrencer l'autre partie en exerçant une activité déterminée.

Trois clauses peuvent être à l'origine de ces interdictions : non- rétablissement,


non-concurrence et d'exclusivité. La clause trouve son origine dans un contrat
ou elle est insérée.

II. Conditions liées à l’activité :

a. Les commerces réglementés

Certains commerces sont réglementés, une autorisation administrative, sous


forme d’agrément ou de licence, est nécessaire avant l’ouverture du commerce ou
l’exercice de certaines activités commerciales, tel que le transport public des
personnes qui est soumis à l’obtention d’agréments du ministère du transport.
C’est le cas aussi des pharmaciens, opticiens, laboratoires d’analyses médicales
mais aussi des banquiers, les intermédiaires d’assurance, c’est-à-dire des
commerces dont l’activité peut se révéler dangereuse pour la santé ou pour le
patrimoine du consommateur sans oublier que certaines de ces activités ne
peuvent être exercées que des personnes morales tel le cas des intermédiaires
d’assurances (agents d’assurances ou courtier d’assurances).

b. Les activités interdites


Certaines activités sont interdites pour des impératifs d'ordre public ou en raison
d'un monopole d'Etat ou l’interdiction d’un commerce qui est contraire aux
bonnes mœurs tel que le commerce des stupéfiants ou la vente d’armes.

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