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Les infections urinaires gravidiques

J.-C. Colau

Les infections urinaires gravidiques (IUG) sont parmi les complications les plus
fréquentes de la grossesse (6). Elles s’observent chez 2 à 11 % des patientes, et sont
au premier rang des pathologies infectieuses bactériennes.
Cette variabilité en fréquence est liée aux différentes caractéristiques des popu-
lations étudiées : grossesses normales ou pathologiques, aux méthodes de détection,
et à la fréquence de leur utilisation.
La diminution des infections hautes observée ces dernières années peut s’expli-
quer par la reconnaissance et le traitement des bactériuries asymptomatiques gravi-
diques (BAG).
Nous aborderons ici quelques questions spécifiques.

La grossesse favorise-t-elle les infections


urinaires ?
Apparemment oui : la plausibilité tient aux modifications gravidiques de l’appareil
urinaire, de l’urine et de la physiologie mictionnelle. Cependant, la médicalisation
de la grossesse et la pratique d’un dépistage systématique régulier constituent des
biais épidémiologiques évidents en ce qui concerne les BAG.
Les études cas témoins ne montrent pas d’augmentation de la fréquence.
On constate des particularités gravidiques spécifiques dans la composition
chimique des urines, dans l’anatomie du tractus urinaire (dilatations) et dans la
physiologie mictionnelle : hypotonie, stase.
La dilatation des voies excrétrices peut être liée à l’imprégnation lutéale, mais
aussi à la compression urétérale qui peut s’observer en deuxième moitié de gros-
sesse, en particulier en amont du détroit supérieur, et qui prédomine à droite.
Une plus grande fréquence des reflux vésico-urétéraux et des résidus postmic-
tionnels est également décrite.
130 Les infections urinaires

Enfin, les modifications immunitaires gravidiques pourraient expliquer que


certains germes restent présents dans la vessie sans générer de réponse tissulaire
inflammatoire (7).
Pour Golan, leur fréquence est essentiellement fonction des antécédents.
Le risque de présenter une infection symptomatique au cours de la grossesse est
corrélé à la positivité de l’examen des urines en début de grossesse (culture) et aux
antécédents infectieux.

Grossesse normale 5,9 %


Antécédents d’infections urinaires 18,5 %

Facteurs de risque
– Diabète ;
– Anémie ;
– drépanocytose… ;
– hypercalciurie, protéinurie ;
– immunodépresseurs ;
– infection vaginale associée (11).
Ainsi, la grossesse ne semble pas être cause d’un surcroît d’infections, mais
plutôt de moindres taux de guérisons spontanées des BAG avec un risque relatif
entre 3 et 4.
On peut déterminer précocement en consultation une population à haut risque
infectieux gravidique du fait d’antécédents infectieux prégravidiques (cystites réci-
divantes), de l’existence d’une pathologie urologique sous-jacente – connue ou
non – congénitale ou acquise, ou d’une simple BA dépistée en début de grossesse.

Existe-t-il une spécificité bactériologique des


infections urinaires gravidiques ?
Les espèces responsables des infections urinaires gravidiques sont les mêmes que
celles retrouvées en dehors de la grossesse : entérobactéries Gram négatif : 90 %,
dont Escherichia coli largement majoritaire > 95 %.
Leur uropathogénicité est variable, et liée à :
– leur adhésivité urothéliale variable selon leur type 1 ou P (9) ;
– leur antigénicité :
- antigène O (sérotypes),
- antigène capsulaire (K) ;
– la présence d’une hémolysine, d’aérobactéiurie…
La grossesse pourrait favoriser le portage de bactéries peu virulentes (par sélec-
tion et/ou par une réponse immunitaire et inflammatoire moindre ?), contraire-
ment aux colibacilles porteurs de gènes de virulence qui représentent un risque
élevé d’adhésivité au haut appareil (type P) et sont responsables de pyénonéphrites

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