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SERGE SAADA- 19-09-2014

Le spectateur mobile

Introduction

Cette étude s’appuie sur les actions menées au sein de l’association nationale
Cultures du Cœur et plus spécifiquement de sa formation à la médiation
culturelle destinée au champ social et des actions de médiation conduites dans le
cadre de projet d’action culturelles sur des territoires diversifiés.
Depuis1998, l’association nationale Cultures du Cœur a pour mission de faciliter
l’accès aux équipements culturels et aux structures culturelles et sportives pour
les plus démunis. L’action se situe à l’interface de 9500 partenaires culturels et
7500 relais sociaux. Les partenaires culturels en convention avec Cultures du
Cœur s’engagent à proposer des invitations vouées à être relayées par les 7500
structures sociales et associatives relais de notre action.
Les quatre principes fondateurs de l’association - gratuité, autonomie des
publics, libre choix des sorties et la mise en place dans les structures sociales
d’une permanence de préparation et de retour de sorties- définissent aussi bien la
base de notre partenariat avec les acteurs sociaux qu’ils constituent des axes de
travail pour ces derniers.
Cependant, on réalise que sur le terrain de son exercice, la gratuité ne suffit pas
à décider un public à fréquenter un lieu culturel, que le travailleur social doit
faire preuve de conviction pour que ces publics ne réduisent pas « gratuit » à
« sans valeur », qu’il n’est pas aisé de mobiliser les publics lorsque l’action
sociale est prioritaire.
D’autre part, l’autonomie des publics se gagne dans le temps, et un libre choix
de sortie s’exprime rarement au début d’une relation avec une structure sociale.
C’est pourquoi nous avons mis en place, en 2004, une formation à la médiation
culturelle destinée au champ social.
S’il n’est pas d’emblée formé pour être médiateur culturel le travailleur social
est confronté à plusieurs dilemmes : Comment susciter ce désir de sortie sans
l’orchestrer ? Comment être force de proposition pour une sortie, quand on a une
visibilité réduite de l’offre culturelle et de ses contenus ? Comment s’improviser
médiateur culturel, quand les seuls outils dont on dispose sont ceux de la
médiation sociale ?

Nous questionnerons dans un premier temps la place de l’action culturelle dans


l’action sociale, nous interrogerons les contradictions auxquelles peut être
confronté le médiateur. Les actions de terrain conjuguées avec un dispositif de

1
sortie voué à autonomiser les travailleurs sociaux et leurs publics, sont à même
de faire émerger des principes et des techniques de médiation culturelle, des
modes opératoires de l’accompagnement des publics. Dans un troisième temps
nous proposerons un model possible de la médiation culturelle dans le champ
social. Compte tenu de la diversité des sorties suscitées par le dispositif de
Cultures du Cœur et de notre implication spécifique dans ce domaine, nous nous
appuierons ici principalement sur des exemples issus de sorties au théâtre.

De l’émergence d’une parole libre à l’affirmation d’un esprit critique

Toute réflexion sur les publics issus du champ social nécessite de préciser que la
diversité même des missions sociales, des conditions, des formes d’isolement ou
de précarité des personnes qui fréquentent une structure sociale, nous conduit à
les considérer d’abord comme un reflet de notre société. S’il est une spécificité
de ces publics c’est qu’ils nous renvoient résolument à nous mêmes.
La permanence culturelle de préparation et de retour de sorties dans les relais
sociaux a comme objectif de susciter une parole libre sur chaque proposition
artistique, une parole libérée de tout discours officiel ou promotionnel.
Peut-on vraiment susciter de tels espaces dans les théâtres sans qu’ils soient liés
à une démarche promotionnelle du lieu, à l’accroissement de sa fréquentation ou
au renforcement de son identité ? Les publics peuvent-ils aisément laisser libre -
cours à leur esprit critique dans le cadre d’une action de médiation culturelle
initiée par un théâtre ?
Au fil des sorties, on découvre toujours chez les publics des capacités à investir
les pratiques les plus diverses, une mobilité physique, intellectuelle, psychique
qui se gagne avec le temps dans la multiplicité même des sorties.
Des facultés d’interprétation, de symbolisation, qualités qui ne demandaient
qu’à être activées nous indiquent que, dans des cadres désinhibants, en
confiance, les publics, quels qu’ils soient, disposent des moyens d’aimer ou de
rejeter un spectacle, d’en isoler des éléments, de faire vivre une palette du
spectateur à travers les nuances de leur perception.
L’objectif premier de ces permanences est apparemment simple, il vise à
instaurer un temps de partage entre les bénéficiaires du dispositif. L’enjeu se
complique lorsqu’il s’agit d’intégrer ces permanences au temps de travail des
acteurs sociaux, de leur donner une régularité, une justification qui excède le
simple droit aux loisirs et au plaisir. Les travailleurs sociaux doivent alors
justifier de l’action culturelle dans un cadre social et parfois défendre les
pratiques culturelles comme un levier d’insertion ou d’intégration sans toujours
disposer de mode d’évaluation ou d’indicateurs précis.
Cela dit, si cette action n’était vouée qu’à nous réapprendre la sociabilité, on en
mesurerait vite toutes les limites. La figure du médiateur qui annoncerait en
préambule d’une séance : « Va au théâtre, c’est bon pour toi » serait tout aussi
limitée.

2
Les permanences les plus stimulantes réinterrogent les œuvres, en nuancent les
effets, retrouvent toute la saveur de l’esprit critique dans un monde ou tant de
gens parlent à notre place. Restaurer cette circulation d’une parole libérée des
conventions d’un lieu, ou d’une pratique, est déjà un enjeu dont n’ont pas
toujours consciences les publics.
Dans ce cadre la médiation socio-culturelle retrouve toute sa dimension
politique, car, dans les centres sociaux, elle invente un espace nouveau où les
œuvres sont aussi là pour permettre de parler de soi et de sa condition.
Médiation sociale et médiation culturelle se réunissent alors autour d’un
« pouvoir dire » et d’un « pouvoir faire » des publics concernés. Dans cette
volonté de remettre en mouvement l’individu, d’inscrire la sortie culturelle dans
un parcours plus large que celui de la simple fréquentation, il s’agit de reprendre
du pouvoir sur sa vie et d’affirmer ce pouvoir dans l’espace public. Dans ce
cadre les compétences du travailleur social en matière de mobilisation et
d’accompagnement des publics sont à même d’enrichir la médiation culturelle.
Les valeurs même du travail social peuvent la conditionner.
Les travailleurs sociaux les plus impliqués dans la conduite de sorties ou
d’actions culturelles utilisent intuitivement les outils de la médiation sociale sur
le terrain de la médiation culturelle et cet usage demande un certaine
inventivité : « Il y a quelque chose de l’artiste dans le travailleur social en ce
sens qu’il crée une œuvre relationnelle qu’on ne peut pas expliquer par les
seules règles techniques. Ce qui « inspire » un changement social, un mieux-être
chez une personne ou un groupe en difficulté, est sans doute plus précieux que
ce qui le « fabrique ». Le résultat du travail social est plus important que le
travail lui-même, et l’auteur, celui qui a inspiré toute l’entreprise, bien plus
important que le réalisateur effectif. Le travailleur social à en commun avec
l’artiste une possibilité de combiner harmonieusement l’utilité et l’expression
créatrice. » 1
C’est la capacité du travailleur social à inventer les dispositifs et les conditions
d’ « une œuvre relationnelle » qui va déterminer les qualités même de son
accompagnement des publics dans les lieux culturels. La volonté de proposer ou
de susciter le désir de se rendre dans un théâtre s’interrogera aussi sur la place
que les artistes d’aujourd’hui laissent au spectateur et notre capacité à l’occuper
et à la questionner.
« Là où je marche ça m’appartient » disait l’auteur dramatique Bernard-Marie
Koltès en parlant de ses personnages, il est surprenant de réaliser à quel point
cette phrase peut prendre tout son sens dans l’accompagnement des publics issus
du champ social.
La libre circulation dans les lieux culturels est toujours liée à une autre mobilité,
celle de l’esprit, de l’interprétation, d’un imaginaire qui s’autorise à être formulé
en public.
1 Rapport du conseil supérieur du travail social, Le travail social aujourd’hui et demain, presses de
l’EHESP, Rennes, 2009, p.60.

3
La fréquentation répétée de ces permanences dans les retours de sorties évoque
une forme d’agilité reconquise des publics, une appropriation graduelle des
contenus des spectacles proposés, une émancipation partagée entre encadrant
social et bénéficiaire du dispositif.
Dans ce cadre l’expression même d’un désir de spectacle ou d’un point de vue
qui dépasserait le « j’aime ou j’aime pas » fissure tout ce qui semblerait
immuable pour l’individu, une perception limitée qu’il aurait de lui-même, de
ses capacités critiques, de ses compétences à investir en liberté un espace et un
temps de partage qu’il ne s’autorise pas toujours. La conquête est territoriale,
psychique, imaginative. Il s’agit d’occuper le terrain d’une proposition culturelle
avec tous ses sens : « Les deux types de dispositif (participation et médiation)
mènent à des questions similaires : comment donner une place au spectateur
sans le déterminer ? On ne peut pas opposer simplement le couple
activité/action au couple passivité/manipulation, mais il faut réfléchir aux
moyens de décrire la possibilité pour le spectateur de « prendre place », c’est à
dire de prendre une place qui ne lui aurait pas été donnée. »2

Les paradoxes de la médiation culturelle

Il n’est pas rare d’entendre un directeur de théâtre, un artiste ou un chargé des


publics, prétendre que la médiation culturelle est inutile. Les arguments avancés
sont nombreux. Les metteurs en scène sont des médiateurs : d’un texte, d’une
vision du monde, d’un point de vue. Les répétitions sont un travail de médiation
entre l’imaginaire d’un auteur et sa réification sur un plateau. Un spectacle est
un outil de médiation en soi. Il faudrait laisser aux publics le soin de
s’approprier seuls les propositions artistiques. Dans un article commun Marie-
Christine Bordeaux et Elisabeth Caillet précisent cette reconnaissance toute
relative des actions de médiation dans le milieu du spectacle vivant : « Dans les
autres domaines culturels relevant de l’action des collectivités publiques, la
médiation culturelle ou artistique est peu institutionnalisée, et se heurte, en
particulier dans le domaine du spectacle vivant, à des pratiques instituées qui en
excluent la possibilité (Bordeaux, 2011) »3

Pour bien des directeurs de théâtre il ne faudrait pas ajouter de la médiation à la


médiation. Une fois de plus, on réduit la médiation à sa dimension explicative
refusant de concevoir le territoire diversifié et créatif de son exercice. Si la
médiation se résumait à introduire de la clarté sur des mondes supposés confus,
elle serait tout aussi limitée que certaines mises en scène. Comme l’indiquent

2 Christine Servais, Relation Œuvre/spectateur : quels modèles pour décrire une réception active ? in
Nancy Delhalle avec la collaboration d’Aline Dethise ( sous la direction de), Colloque de Liège : Le théâtre
et ses publics, la création partagée, Besançon, Les solitaires intempestifs, 2013, P.182.
3 Marie-Christine Bordeaux, Elisabeth Caillet, La médiation culturelle : pratiques et enjeux théoriques in
Hana Gottesdiener et Jean Davallon ( sous la direction de). Cultures et Musées (Hors-Série) – La
muséologie : 20 ans de recherche. Arles, Acte Sud-Université d’Avignon, 2013, P.139.

4
Serge Chaumier et François Mairesse : « La médiation n’est donc pas
simplement transmission d’un sens, elle est production d’un sens par l’acte de
transmission même, et c’est en cela que le terme d’appropriation prend sa force,
c’est parce qu’il y a réintégration dans une transformation de soi. C’est un
processus dynamique de mise en effervescence. Brassage des contenus et des
interprétations, mais plus encore de l’interaction de ceux-ci avec l’intériorité
d’un individu qui s’en trouve interpellé. »4

Sur le terrain du théâtre, les points de vue contre la médiation se poursuivent : il


ne faudrait pas dédier au théâtre une vertu sociale, il pourrait y diluer son art.
Dans le pire des cas, on entend que les publics du champ social devraient
d’abord apprendre les codes du théâtre avant de s’immiscer dans une aventure
artistique. C’est ainsi qu’à la peur des publics peut correspondre la peur de les
accueillir. Pourtant, dans les enjeux d’une mixité assumée repose la dimension
politique de la médiation et sa capacité à dynamiser le contenu même des
œuvres proposées. Une mixité à même de dire que l’évidence apparente des
formes est toujours à questionner. Ainsi, la rencontre entre une œuvre et des
publics nouveaux – fussent-ils inexpérimentés- sera le jeu d’une intersubjectivité
fructueuse à même de faire évoluer les formes et les contenus. Nous devons
accepter qu’un public imprévu insuffle à nos salles de spectacle ainsi qu’aux
propositions artistiques, cette part d’intranquillité dont elles ont besoin.
Craindrait-on qu’une fois dans la salle, un public considéré comme dissonant
pour le théâtre, puisse perturber l’écoute attentive et ordonnée des habitués ?

Le cadre de l’accompagnement des publics dans un lieu culturel fait ressortir un


nombre important de positions ambivalentes du médiateur : Comment
reconnaître la culture de l’autre sans le réduire à ses origines, son identité ou ses
besoins ? Pourquoi emmener au théâtre des publics qui n’en manquent
visiblement pas ? Comment créer un espace de partage autour des œuvres en
s’affranchissant des réflexes scolaires ? Comment multiplier les modes
d’implication des publics sans les infantiliser ?
Cette ambivalence de la médiation est également à même de délimiter le champ
d’action du médiateur. Elle nous force à nous interroger sur les raisons pour
lesquelles nous choisissons un spectacle ou toute autre sortie, sur ce que nous
voulons partager avec un public, si nous dédions à la sortie théâtrale d’autres
missions que celle d’un loisir partagé.
Les contradictions que le médiateur rencontre sur le terrain de son exercice
peuvent cependant être stimulantes. Ces paradoxes forcent le médiateur à
conserver un état de veille dans le temps du projet. L’amplitude même de
l’ambivalence éveille ses capacités d’adaptation aux publics ou aux situations
les plus variées. Il pourra tour à tour décider de s’inclure dans une expérience de

4 Serge Chaumier, François Mairesse, La médiation culturelle, Paris, Armand Colin, 2013, P.136.

5
sortie, ou être force de proposition, donner des indications sur un spectacle ou
laisser au public le choix de le découvrir.
La notions de parcours du spectateur prend tout son sens lorsque la médiation
culturelle s’interroge sur l’avant, le pendant et l’après d’une sortie ; un parcours
ou l’individu se renforce dans la multiplicité même des spectacles auxquels il
assiste, où il gagne en mobilité physique, intellectuelle, sensible, en s’autorisant
à investir des lieux que sa situation sociale ou d’autres représentations de lui-
même, lui interdiraient.
L’accompagnement des publics peut aussi être une question de style et sa
conception l’art d’imaginer de nouveaux dispositifs de relation aux propositions
artistiques. Dans la dynamique même de la médiation à laquelle nous croyons,
les questions de contenus, d’esthétiques et de citoyenneté sont inséparables,
voire réconciliées. De plus, le milieu théâtral ne peut ignorer que parmi les
médiateurs il y a aussi des artistes qui conçoivent en co-construction avec les
publics des parcours sensibles, des aventures de médiation à même de bousculer
les évidences d’une rencontre avec un spectacle, un acteur, un choix de
scénographie ou d’éclairage.

La médiation et la sortie au théâtre

«Je n’ai rien compris mais j’ai adoré »5

Une phrase entendue à plusieurs reprises et déclinée sous toute ses formes : « Je
ne vois pas où il veut en venir mais c’était très bien. »6 « J’étais ému mais je ne sais pas
vraiment pourquoi »7 « Je ne suis pas sûr d’avoir tout écouté mais je suis touché… » 8
Dans un ouvrage récent Marie-Christine Bordeaux et François Deschamps
définissent clairement trois modes fondamentaux à chaque projet d’éducation
artistiques : « L’expérience esthétique, qui s’accomplit dans la réception des
œuvres et dans l’intentionnalité esthétique du spectateur. L’expérience
artistique qui s’accomplit dans la confrontation personnelle à la forme, à la
difficulté de faire prendre corps aux choses par le biais des langages artistiques.
Enfin, l’expérience symbolique, car la culture n’est rien sans la relation et la
communication interpersonnelle, qui repose sur l’explicitation, la verbalisation,
la confrontation entre les interprétations et l’échange sur celles-ci, la relation

5 Propos tenus de spectateurs accompagnés lors de projet de parcours du spectateur avec des habitants de
Villetaneuse proposés dans le cadre des actions de Cultures du Coeur.
6 Propos tenus à l’issue d’une sortie à l’Opéra Bastille en septembre 2013 à l’occasion de la reprise de

L’affaire Makropoulos de Janacek dans une mise en scène de Krzysztof Warlikowski.


7 Propos tenu par une habitante de Villetaneuse à l’issue du spectacle Pinocchio de Joël Pommerat au

Théâtre de L’Onde à Vélizy-Villacoublay en Décembre 2012


8 Propos tenus par une habitante de Villetaneuse à l’issue du spectacle Seuls de Wajdi Mouhawad au

Théâtre National de Chaillot en mars 2013.

6
établie entre une danse et un texte philosophique, un objet et un poème, une
forme et un savoir. »9
Les propos de Christian Biet semblent y faire écho et pourraient contribuer à
définir une poétique de la relation 10 où des questions d’esthétique et de
réception rejoignent les valeurs de l’accompagnement des publics : « Car que se
passe-t-il lorsque le phénomène de comparution se réalise, lorsque les regards,
les conduites et les jugements s’entrecroisent, se complètent ou s’opposent ? Il
apparaît que l’art du théâtre - performance, représentation, texte confondus -
consiste à jouer à hésiter, est à hésiter, à présenter des propositions qui, si elles
apparaissent univoques, sont possiblement contrebalancées par une réception
contradictoire, ou à présenter des propositions elle-même contradictoires, que
les spectateurs peuvent juger lorsqu’ils le souhaitent, et dont d’autres
spectateurs peuvent contester, ou non, le jugement. Et l’on a dit que là était non
l’émancipation, non l’affranchissement des spectateurs, mais simplement leur
capacité, celle qu’ils ont toujours eue. Une capacité à juger, donc à débattre,
une capacité, en l’occurrence, propre à hésiter, donc à constater l’incertitude,
une capacité à proprement parler critique, d’abord fondée sur le mouvement
d’oscillation. » 11
Dans le cadre d’une sortie collective qui peut être conçue comme un projet, sans
doute faut-il garder à l’esprit que les publics ne sont pas là pour rendre compte
de l’intégralité d’un spectacle, sans doute aussi doivent-ils entrer dans une salle
avec cette idée qu’ils n’aimeront peut-être qu’un acteur, un passage ou même un
instant du spectacle. Le champ du ressenti est plus vaste, et même dans le cadre
d’un rejet du spectacle l’espace critique s’affine, s’élargit, s’affirme. Les publics
développent alors intuitivement des modes de perception des plus subtils,
s’autorisent à considérer comme des émotions la perplexité ou leur indécision
sur l’appréciation d’un spectacle. Les publics en confiance dépassent les
jugements tranchés pour investir un champ du ressenti bien plus nuancé. Le
plaisir du spectateur n’est plus réductible à l’identification à un comédien ou à
un récit et son ennui à l’incompréhension.
Nous sommes toujours frappés par la capacité des néophytes à parler
spontanément sur la valeur objective d'un jeu d'acteur, d'un choix de
scénographie, d'un éclairage. D'une certaine façon les publics moins habitués
regardent à l'oeil nu un spectacle et sont à même de remettre en cause des choix
artistiques que nous oublions de voir lorsque nos attentes sont trop définies,
lorsque notre connaissance d’un texte ou d’un artiste nous placent d’emblée en
quête d’une symbolique, d’un point de vue, d’un traitement de mise en scène,
d’une comparaison avec d’autres spectacles. Les moins habitués peuvent alors

9Marie-Christine Bordeaux, François Deschamps, Education artistique, l’éternel retour ?, Toulouse,


Editions de l’attribut, 2013, P. 31-32.
10 Nous faisons ici référence à la formule de l’écrivain et poète Edouard Glissant.
11 Le spectateur/les spectateurs, Pour une posture critique de l’hétérogénéité, in Olivier Neveux et Armelle
Talbot (sous la direction de). Penser le spectateur, Théâtre public, n°208, P .91.

7
nous montrer des éléments du spectacle que nous n’avons pas toujours
questionné: « Ce comédien parle trop fort. Pourquoi sommes nous aussi
éclairés ? Les acteurs se donnent beaucoup de mal. Assis comme ça, je ne vois
qu’une partie du décor… Pourquoi applaudissent-t-ils encore ? » autant de
phrases entendues lors de sorties que l’on peut réduire à un manque de pratique
du théâtre mais qui nous renvoient à des données matérielles et objectives du
spectacle. Une écoute vive de ces spectateurs nous conduit à revisiter nos
habitudes, à les questionner à travers ce que voient les publics et que nous
n’aurions sans doute jamais vu sans eux.

Nous voudrions leur transmettre un goût du théâtre, en faire ressortir toute la


riche complexité, alors que leurs discours sont souvent à même d’en faire
ressortir une riche interprétation.
A l'issue du spectacle « Pinocchio », écrit et mis en scène par Joel Pommerat,
dans le cadre d’un accompagnement d’habitants de Villetaneuse 12 qui, pour
certains n’étaient jamais allés au théâtre, j’envisageais de faire un retour critique
sur la thématique : l’artifice d’un spectacle est-il un frein à l’émotion ?
Au tout début de la séance, une dame me dit: « J'avais vu le rayon laser qui
partait du côté droit de la scène, mais la scène entre Pinocchio et son père était
tellement forte que j'étais bouleversée quand même. » Avant même le début de
la rencontre, elle anticipait sur la séance affirmant avec des mots simples que les
effets du théâtre ne sont pas un frein à l’émotion.
Avancer que le discours spontané des publics est à même de remettre en cause
l’exégèse critique d’un initié serait exagéré, mais le médiateur doit constamment
être à l’écoute du potentiel des publics qu’il accompagne et rester en curiosité de
ce discours. Cette position du médiateur est certes assez proche de celle d’un
bon pédagogue mais sans objectifs de résultat définis elle le confronte à d’autres
questions : pourquoi emmener au théâtre quelqu’un qui n’en manque
visiblement pas ? Quelles sont donc ces valeurs que nous voulons partager avec
quelqu’un ? Cherche-t-on à combler un manque ? Sommes-nous dans un projet
d’émancipation ? Quelle position adopter dans le temps de l’accompagnement ?
Faut-il toujours prévoir une réciprocité d’échange avec des publics qui doivent
si souvent justifier de leur situation ?
Se poser les bonnes questions nous amène à définir ce qui motive notre
engagement, et, cet engagement restera très limité s’il ne se réduit qu’à une
volonté d’éducation, d’intégration, d’insertion ou d’élévation sociale

Les publics qui déclarent redouter la sortie au théâtre, désignent la diversité


même des propositions artistiques, leurs difficultés à se déterminer pour un
spectacle, le manque d’information.

12 Projet de parcours du spectateur qui a été mené sur deux années (2012-2014) avec un groupe
d’habitants de Villetaneuse, à la demande du service culturelle de la Mairie de Villetaneuse et dans le
cadre des actions de Cultures du Coeur

8
L’hybridation des formes, le mélange des genres, ce que Pascal Jacob appelle
« un agrégat de forme » en parlant du cirque semble s’être diffusé à tous les arts
de la scène et contribuent aussi à la confusion des spectateurs. Les accompagner
à un spectacle est alors l’occasion de prendre conscience de tout ce que nous ne
regardons plus mais qui est accepté par les habitués : le rapport diffus entre la
scène et la salle, des accords tacites que nous avons intégrés, qui vont d’une
connaissance préalable du texte joué ou des comédiens, du parcours du metteur
en scène, autant d’éléments qui permettent aux publics habitués d’être dans
certaines dispositions et aux moins habitués de s’en sentir exclus.

Des projets menés avec des habitants de Sevran, de Goussainville, de Louvres


ou de Villetaneuse, les sorties effectuées lors de parcours de spectateurs, font
émerger une articulation possible de l’accompagnement des publics.
Ce modèle sur lequel tout médiateur peut s’appuyer tiendrait compte de trois
facteurs : les attentes des publics, les modes d’implication mis en place, et les
conditions d’accueil auxquels ils seront confrontés avant pendant et après le
spectacle.
Ce modèle que nous proposons ne peut fonctionner sans toutes les nuances
méthodologiques que suscite le terrain. Il définit une approche de médiation
possible, préconise un savoir faire de l’instant que chacun peut s’approprier et
faire évoluer à sa façon en fonction des publics, des projets et des lieux visités.

Tentative de modélisation

Si le médiateur culturel tient compte des attentes du public, il travaille sur le


degré de familiarité avec un lieu ou une pratique. Il peut ainsi identifier la plus
ou moins grande habitude que l’on a du théâtre, comprendre s’il y a une attente
ou des appréhensions spécifiques, mais aussi tenir compte des facilités que
certains publics peuvent entretenir avec une pratique. A ce titre, nous
n’oublierons pas cet éducateur qui nous indiquait que des publics d’Afrique sub-
saharienne préféraient aller au théâtre plutôt qu’au cinéma, et que certains
groupes avaient des facilités à apprécier les spectacles japonais et leur
dimension cérémoniale là où le public occidental vivait la lenteur du Nô comme
la source d’un terrible ennui.
La difficulté dans cette phase de la médiation est d’être force de proposition sans
écraser le désir de l’autre. Susciter une sortie mais laisser aussi une place à tout
désir spontané des publics.
Travailler sur ces attentes c’est aussi se faire une idée des représentations du
public, voire de les relativiser. Il s’agit d’identifier si ces derniers pensent que le
théâtre est un lieu figé, destiné prioritairement à des initiés, si une personne a
une disponibilité d’écoute réduite, si la longueur d’un spectacle ou la teneur
d’une thématique font peur.

9
Dans cette première étape, le médiateur met en jeu la culture de chacun, la
croise, la confronte, et la connaissance du milieu abordé intervient
prioritairement pour déconstruire tout préjugé que l’on peut avoir sur un lieu ou
un spectacle. Le risque serait d’enfermer les publics dans un savoir théorique sur
le théâtre avant de les avoir confrontés à une représentation.
Les attentes une fois identifiées le médiateur va passer à l’étape la plus créative
et délicate de la médiation : inventer des modes d’implication des publics.
Ces modes peuvent aussi bien être thématiques (Hamlet et son désir de
vengeance), liés à la sortie (prévoir un temps de retour après le spectacle),
pratiques (organiser une lecture de passages du texte)
Cette phase s’articule avec la première, car inventer des modes d’implication
c’est faire évoluer les attentes d’une personne. C’est dans ce cadre que le
médiateur se demande toujours s’il en dit trop ou pas assez.
Une sortie avec les habitants de Villetaneuse sur le spectacle « Seuls » de Wajdi
Mouawad nous a conduits à leur demander d’organiser une lecture sur les trois
premières séquences du spectacle. Une fois au théâtre, les personnes invitées
nous ont indiqué à quel point cette lecture préalable les avait placées dans une
position critique confortable, entre le souvenir qu’ils avaient de leur lecture,
l’imaginaire qu’elle avait suscité avant la représentation et la découverte de la
mise en scène. Nous avons alors délibérément décidé de ne pas aller plus loin
dans le texte, tant la deuxième partie du spectacle fonctionnait sur le mode de la
révélation.

Il y a quelques années j’ai proposé à deux groupes distincts une sortie au Théâtre
des Bouffes du Nord. Je décidais de raconter l’histoire de ce théâtre,
indissociable de la personnalité du metteur en scène Peter Brook, qui avait
décidé de ne pas repeindre le théâtre et qui ne voulait pas faire oublier que la
salle avait brulé. Il voulait alors que le lieu puisse raconter son histoire avant que
le spectacle ne commence. Le premier groupe était ravi d’entrer dans ce théâtre
comme dans un musée, d’identifier les murs lézardés et d’habiter d’une certaine
façon cette histoire avant de découvrir le spectacle.
Quelques jours plus tard j’ai décidé, avec le deuxième groupe, de ne pas
raconter l’histoire du lieu. Une fois installé j’ai entendu trois personnes du
groupe dire : « On aurait pu nous emmener ailleurs que dans un théâtre qui a
brulé. »
D’une certaine façon, je réalisais que le médiateur était dans cette alternative :
en dire « trop » ou « pas assez », nourrir l’imaginaire et le désir des publics
qu’il accompagne, ou bien les laisser s’approprier un lieu ou un spectacle, pour
repousser le temps d’une restitution, évitant de les placer dans une réciprocité.
Pour une sortie au théâtre, le médiateur culturel auquel nous croyons, distille les
informations qu’il donne sur un lieu, un texte, une histoire, il propose en
quelque sorte une médiation « trouée » laissant ainsi une place à toute
appropriation libre de la part du public. Le silence, la place laissée à l’autre sont

10
encore à habiter : « Si l’artiste tend a exprimer quelque chose et que les
conditions pour le percevoir doivent être réunies pour nous permettre d’être mis
en présence avec ces propositions, les décryptage et les réinvestissement de sens
qu’ils nous permettent, les usages et les prolongements dans les vies de chacun
en sont l’autre visage. La médiation culturelle s’efforce de mettre en présence et
d’éclairer les relations que nous pouvons déployer avec les contenus, artistiques
ou scientifiques, et ce qu’ils produisent en chacun de nous. C’est par le partage
et l’échange que vont se concrétiser les modalités de la médiation culturelle. »13

Le troisième axe reste celui des conditions d’accueil et du rapport à l’espace


théâtral. Les limites de la médiation sont aussi liées aux barrières que se
construisent les publics lorsqu’ils ne peuvent s’imaginer franchir le seuil d’un
théâtre. Ils appréhendent alors une double convention : celle du lieu et celle des
habitués.
Pour les publics les moins habitués, la sortie au théâtre relève d’un cadre parfois
plus contraignant que celui d’autres lieux culturels (musées, lieux de patrimoine,
salles de concert). Pour les plus isolés, elle est encore vécue comme un effort qui
demande d’intégrer une série de conventions : l’acceptation du silence,
acceptation d’une durée, écoute et concentration, lieu confiné qu’il sera difficile
de quitter. Les conventions du théâtre de rue, la place accordée à la participation
des publics dans des projets théâtraux qui investissent l’espace public,
l’interpellation ou l’implication des publics dans le processus de création,
peuvent tout aussi bien être vécus comme des conventions.
La participation d’un public inclut comme élément de la dramaturgie dans un
espace où il ne sera jamais souverain est tout aussi contraignante pour certains
publics et, forcer un spectateur à monter sur un plateau ce n’est pas vraiment
susciter sa participation.
Tout lieu culturel peut, de par sa dimension patrimoniale ou historique, incarner
un barrage à sa fréquentation. Une série de représentations sur les opéras et les
théâtres les rendent encore inaccessibles.
Les travailleurs sociaux indiquent que dans un groupe ceux qui vont le plus
facilement au théâtre sont ceux qui y sont déjà allés dans leur jeunesse. Parfois,
la simple visite d’un lieu de spectacle peut mettre les publics dans des
dispositions d’écoute qu’ils n’avaient pas préalablement.
Pour les conditions d’accueil il importe d’être conscient que le comportement
des habitués peut dégager une esthétique en soi, que l’environnement direct, les
habitudes du lieu, les comportements des publics peuvent renvoyer les moins
habitués à leurs différences.
Certains accueils pour les publics qui bénéficient de la gratuité peuvent être très
mal vécus car encore stigmatisant. Une fois dans la salle, le public pourra aussi
appréhender avec une plus ou moins grande facilité cette inter présence entre

13 Serge Chaumier, François Mairesse, La médiation culturelle, Paris, Armand Colin, 2013, P. 52.

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des habitués ayant intégré tous les accords consentis entre la scène et la salle, et
un public novice qui peut vite conclure que le théâtre n’est résolument pas fait
pour lui.
Il faut toujours garder à l’esprit que la première sortie au théâtre peut être la
dernière, qu’il sera difficile de convaincre une personne de revenir voir un
spectacle lorsque la première expérience a été mal vécue. Parce que le théâtre
demande souvent un minimum d’engagement et d’acceptation de convention il
reste pour beaucoup une sortie à part.

Conclusion

Dans le cadre d’un accompagnement social, la sortie culturelle est un projet en


soi. Les lieux culturels ne manquent pas d’emblée aux publics qui fréquentent
les structures sociales ; du moins ce manque ne peut pas s’exprimer
immédiatement dans un contexte qui n’est jamais facile à vivre.
Pour les personnes en précarité qui s’interdisent une sortie culturelle ou qui s’en
sentent éloignés, leur condition sociale et les moyens d’en sortir leur semblent
prioritaires. La proposition d’une sortie culturelle peut être perçue comme une
incongruité, au regard d’une précarité qui appelle d’autres urgences : manger, se
soigner, retrouver un toit, un travail, des liens sociaux.
Dans les situations les plus difficiles, les publics ne voient pas immédiatement
l’intérêt de se rendre dans un théâtre, un musée ou un lieu de concert et c’est
souvent, le savoir-être d’un animateur social et sa façon de présenter l’activité
culturelle qui détermineront l’esprit d’un projet.
La plus ou moins grande légitimité de l’action culturelle dans un cadre social va
décider de la fréquence des projets et du temps qui y sera consacré. C’est aussi
une confiance qui se gagne dans le temps aussi bien auprès des publics que des
directions des structures sociales.
La médiation culturelle à laquelle nous croyons, se fonde sur la reconnaissance
de la culture de l’autre comme préalable à toute sortie. Le travailleur social
n’intervient jamais sur un terrain vide de repères culturels. Son objectif est voué
à susciter un désir de sortie des publics, un désir qui est souvent là mais qui a du
mal à émerger dans le cadre parfois contraignant du suivi social.
En mettant en place des permanences culturelles de préparation et de retour de
sorties dans des structures sociales les travailleurs sociaux redéfinissent la
notion de médiation culturelle. Dans sa définition la plus limitée, le médiateur
culturel serait l’intermédiaire entre les œuvres et le public, dans une version plus
dynamique, il aurait comme mission de créer, d’alimenter, de pérenniser, voire
de restaurer ces espaces et ces temps de partage autour des œuvres.
Sans doute faut-il garder à l’esprit que les publics ne sont pas là pour rendre
compte de l’intégralité d’un spectacle, sans doute aussi doivent-ils entrer dans
une salle avec cette idée qu’ils n’aimeront peut-être qu’un acteur, un passage ou
même un instant du spectacle. Le champ du ressenti est plus vaste, et même

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dans le cadre d’un rejet du spectacle l’espace critique s’affine, s’élargit,
s’affirme. Les publics développent alors intuitivement des modes de perception
des plus subtils, s’autorisent à considérer comme des émotions la perplexité ou
leur indécision sur l’appréciation d’un spectacle. Les publics en confiance
dépassent les jugements tranchés pour investir un champ du ressenti bien plus
nuancé. Le plaisir du spectateur n’est plus réductible à l’identification à un
comédien ou à un récit et son ennui à l’incompréhension d’une proposition
artistique.
La médiation culturelle à laquelle nous croyons n’est pas une conciliation entre
les œuvres et le public, ni une action corrective visant à combler les prétendues
failles des publics conviés. Dès lors, comment éviter de poser d’emblée les
fonctions d’insertion et d’intégration par la culture qui peuvent renvoyer
l’individu à sa fragilité ? Le médiateur culturel ne cherche pas à résoudre notre
rapport à l’art ou aux œuvres et toute la difficulté et la diversité de son action
résident dans l’ambivalence même de sa position qui, dans le cadre de
l’accompagnement des publics nécessite de constants réajustements. Les
paradoxes sur le terrain de la médiation n’annulent pas ses principes, ils lui
confèrent une certaine plasticité, et c’est dans ces tensions parfois
contradictoires qu’il faut savoir se déterminer ou favoriser en fonction du terrain
et des personnes que l’on accompagne l’une des tendances proposées par le
paradoxe.

Bibliographie

BORDEAUX Marie-Christine, DESCHAMPS François, Education artistique, l’éternel


retour ? Toulouse, Editions de l’attribut, 2013.

CHAUMIER Serge, MAIRESSE François, La médiation culturelle, Paris, Armand Colin,


2013.

CERTEAU Michel De, L’invention du quotidien, Paris, Galimard, réed.1990.

DERRIDA Jacques, DUFOURMANTELLE Anne, De l’hospitalité, Paris, Editions Calmann-


Lévy, 1997.

GLISSANT Edouard, Poétique de la relation, Paris, Galimard, 1990.

HOGGART Richard, La culture du pauvre, Paris, Les éditions de Minuit, 1970.

Revues et ouvrages collectifs

Rapport du conseil supérieur du travail social, Le travail social aujourd’hui et demain,


presses de l’EHESP, Rennes, 2009.

Raison Présente, Pour une éthique de la médiation culturelle ? N°177, Paris, 1er Trimestre
2011.

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Théâtre public, Penser le spectateur, N°208, Montreuil, avril-juin 2013.

Cultures et Musées (Hors-Série) – La muséologie : 20 ans de recherche. Arles, Acte Sud-


Université d’Avignon, 2013.

Colloque de Liège : Le théâtre et ses publics, la création partagée, Besançon, Les solitaires
intempestifs, 2013.

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