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1. Introduction
Pierre Bourdieu est le principal théoricien de la théorie des champs qui sont des sous-
espaces sociaux au sein desquels les individus entretiennent des rapports de domination et de
dépendance en fonction de la dotation en capitaux (symbolique, social, culturel, économique).
Par le concept de champ, il entend que les acteurs sociaux appartiennent à plusieurs domaines
de la vie sociale et leurs stratégies dans un domaine, ou un champ, est fonction de rapports de
forces qui le régit, qui en crée les contours. Ce concept de champ est différent de celui
d’appareil. La notion d’appareil est une machine infernale, programmée pour réaliser certaines
fins. Le système scolaire, l’Etat, l’Eglise, les partis, ne sont pas des appareils, mais des champs.
Dans un champ, des agents et des institutions sont en lutte, avec des forces différentes, et selon
les règles constitutives de cet espace de jeu, pour s’approprier les profits spécifiques qui sont
dans ce jeu. Ceux qui dominent le champ ont les moyens de le faire fonctionner à leur profit ;
mais ils doivent compter avec la résistance des dominés. Un champ devient appareil lorsque les
dominants ont les moyens d’annuler la résistance et les réactions des dominés.
C’est ainsi que Pierre Bourdieu a insisté sur l’importance des facteurs culturels et
symboliques dans les mécanismes de reproduction. Les classes dominantes sont les principaux
bénéficiaires du système d’enseignement par exemple. Si celui qui appartient à la classe
favorisée dispose, dès sa petite enfance, de tous les atouts en termes d’habitus et de capitaux
(culturel, social, économique, symbolique) pouvant lui permettre de réussir assez facilement
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ses études, particulièrement celles supérieures, tel n’est pas le cas pour celui qui est issu des
classes défavorisées qui en est moins pourvu dès son enfance. L’appartenance à une classe joue
selon Pierre Bourdieu un rôle déterminant dans l’apprentissage du savoir au point que celui qui
ne réussit pas, ce n’est pas parce qu’il n’est pas doué, mais parce que son origine sociale
renforce ses chances d’échec. On parle d’handicap social pour les pauvres et de dons sociaux
pour les classes aisées.
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Tout au long de son parcours, Raymond BOUDON a été influencé par des auteurs (Max
Weber, Vilfrédo Pareto, Talcott Parsons, entre autres). Sur ce, leurs courants de pensée ont
fortement contribué à l’élaboration de l’individualisme méthodologique. Ainsi dit, cette théorie
sociologique s’appuie de :
l’utilitarisme de l’économie politique classique de John Stuart Mills qui stipule que
l’individu est rationnel et se décide toujours selon ses intérêts ;
l’interactionnisme de Talcott Parsons qui postule l’idée que la conduite humaine est
motivée par les significations que trouve l’acteur dans le monde qui l’entoure ;
les positions épistémologiques de Karl Popper pour qui le principe de la rationalité est
avant tout une approximation de la réalité ;
Vilfrédo Pareto qui, dans sa théorie des actions non-logiques, estime qu’un
comportement est rationnel quand les moyens utilisés par un individu sont en adéquation
avec les buts qu’il s’est fixé.
Selon Raymond Boudon, la notion d’individu désigne en sociologie une propriété que
certains sociologues tiennent pour caractéristiques de certaines sociétés et particulièrement des
sociétés industrielles modernes. Dans ces sociétés, l’individu est considéré comme une unité de
référence fondamentale, à la fois pour lui-même et pour la société. C’est l’individu qui décide
de son métier, qui choisit son conjoint. Il assume "en toute liberté" ses croyances et ses opinions.
Son autonomie est plus grande dans les sociétés "traditionnelles". A ce niveau, Raymond
Boudon reprend la dichotomie qu’Emile Durkheim faisait des sociétés dans lesquelles règne la
solidarité mécanique des sociétés qui développent la solidarité organique. Dans les premières
catégories, la marge de manœuvre de l’individu sur la communauté est très réduite, alors qu’elle
est beaucoup grande dans les secondes. On pourrait en quelle sorte dire que les sociétés
industrielles sont par essence de type individualiste.
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possèdent leur libre arbitre. Il pose le principe fondamental selon lequel toute explication d’un
phénomène social doit prendre pour un seul point de départ le comportement des individus,
leurs choix et leurs motivations face aux contraintes de leurs situations.
Raymond Boudon offre une image plus réaliste de l'acteur individuel, l'Homo
sociologicus qu’il essaie de définir est un être complexe, à la fois déterminé par des valeurs et
des intérêts, et agissant selon une certaine rationalité. S’il n'est pas un automate guidé par des
valeurs prédéterminées, ce n'est pas non plus nécessairement un maximisateur avide de pouvoir
et de profit. Raymond Boudon le situe dans cet entre-deux, entre rationalité individuelle et
déterminisme culturel. Par exemple, s’il est incontestable que l'acteur inséré dans un système
fonctionnel occupe des rôles, la variance entre les rôles et l'existence de sous-rôles font qu'il
n'est pas contraint de les exécuter mécaniquement.
Par ailleurs, à travers l'étude des systèmes d'interaction, Raymond Boudon en montrant
l'existence d'effets pervers (résultat non intentionnel de l'agrégation d'actions intentionnelles)
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fournit un cadre explicatif à la création de certaines normes et règles sociales. L'idée est que les
acteurs confrontés à des effets pervers mettent en place un cadre normatif pour les contourner.
Chaque acteur agit suivant une intention personnelle et il en découle une suspension de la
production du bien public. Cela oblige les acteurs à mettre en place des structures d'incitation
ou à bloquer l'accès au bien public (ce qui revient à le privatiser).
Raymond Boudon a ainsi appliqué les principes de sa théorie à son ouvrage intitulé
Inégalité des chances : la mobilité sociale dans les sociétés industrielles et publié en 1973. Si
les théories déterministes expliquent les échecs des enfants issus des classes défavorisées par la
place des parents dans la structure sociale, l’individualisme méthodologique se propose de
mettre en évidence les choix des parents liés aux représentations qu’ils se font des coûts et des
avantages des études longues. Il se propose de montrer comment l’agrégation de ces
comportements et de ces choix conduit aux régulations observées. Aussi, si les traditions
holistes (marxiste et durkheimienne) prêtent aux idéologies et aux consciences collectives une
forme de réalité et de postuler que ces systèmes de représentations participent à la détermination
des comportements individuels, l’individualisme méthodologique s’interroge sur les adhésions
des individus à des idées qui sont, scientifiquement, fausses. Raymond Boudon se propose de
comprendre comment les individus, à partir de leur position sociale, ou en raison de la
représentation qu’ils se font de leurs intérêts, adhèrent à des valeurs ou des idées qui sont, en
réalité, fausses.
Michel Crozier est né le 6 novembre 1922 et décédé le 24 mai 2013. Il est le principal
concepteur de l’analyse stratégique. Après avoir étudié les mouvements ouvriers en France en
1949, puis les syndicats américains en 1951, il s’est consacré à la sociologie des organisations
qui constitue, selon lui, la meilleure introduction à une connaissance générale des sociétés
contemporaines et de leurs crises. Il publia Le Phénomène bureaucratique en 1964, un ouvrage
dans lequel il met à nu les rouages organisationnels cachés et les relations de pouvoir qui
apparaissent comme le principal élément structurant de l’organisation. En 1977, Michel Crozier,
en collaboration avec Erhard Friedberg, au lieu d’adopter l’approche bureaucratique des
organisations, comme le faisait Max Weber, il initie une approche particulière des organisations.
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Ensemble, ils se proposent d’élaborer une théorie générale des organisations qui rend compte
de l’action collective qui se réalise dans toute organisation, à travers les relations de pouvoir et
les choix stratégiques des acteurs. Il s’agit d’une approche qui comprend et explique les
dysfonctionnements des mécanismes bureaucratiques et les raisons de leur inefficacité. C’est
une approche qui élargit les recherches antérieures et intègre davantage les principes de
l’analyse systémique permettant une approche plus dynamiques des systèmes. C’est une
approche qui, loin de reproduire l’organigramme, admettent que les relations de pouvoir
reposent sur des données implicites, notamment la maîtrise des zones d’incertitude. Michel
Crozier montre également comment la centralisation et la multiplication des règles aboutissent
à la constitution de « cercles vicieux bureaucratiques » qui rigidifient l’organisation. Il s’est
imposé comme le théoricien de l’Analyse Stratégique, approche qui désigne à la fois une
perspective sociologique spécifique et une méthode d’analyse des organisations.
Dans l’analyse stratégique, l’incertitude est définie par rapport au renforcement du jeu
de l’acteur, c’est-à-dire comme une autonomie. Celle-ci provient soit de l’environnement
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extérieur, soit dans l’imprévisibilité du comportement des acteurs. Michel Crozier défend la
thèse selon laquelle, l’acteur n’existe pas au dehors du système qui définit la liberté qui est
sienne et la rationalité qu’il peut utiliser dans son action. L’acteur n’est jamais totalement
contraint dans une situation organisationnelle, il a une certaine marge de liberté. C’est cette
marge de manœuvre que Michel Crozier appelle zone d’incertitude. Ce faisant son
comportement est le résultat d’une stratégie rationnelle. Mais cette rationalité n’est pas pure,
elle est limitée. Alors, l’organisation ne peut pas être assimilée à un mécanisme ; c’est un
« construit social » élaboré pour répondre à des fins. Ce « construit social » engendre à la fois
des contraintes et aussi des zones d’incertitudes. Dans un tel système, l’acteur détient une marge
d’autonomie, créant ainsi une zone d’incertitude. Cette marge d’autonomie, plus ou moins
étendue selon les fonctions, permet à chacun de choisir ses stratégies pour majorer ses
avantages. Ce système engendre des relations de pouvoir, d’influence, de marchandage et de
calcul. Le contrôle des incertitudes donne du pouvoir, lequel pouvoir définit, caractérise et
conditionne toutes les relations sociales.
c) L’environnement extérieur :
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e) Le pouvoir
Le pouvoir est une relation et non pas un attribut des acteurs. Il est lié à la relation
d'échange, de négociation. C'est une relation qui vise un but, qui n'est pas transitive (elle est
directe, pas d'intermédiaire), et qui est réciproque, mais déséquilibrée. C'est un rapport de force
dont l'un peut retirer plus que l'autre, mais où l'un n'est jamais totalement démuni face à l'autre.
Il faut donc étudier le cadre spatial, temporel et social pour mesurer les atouts de chacun, ou les
contraintes qui pèsent sur eux. La possibilité de jouer sur plusieurs relations de pouvoir à la fois
est un plus. L'organisation régularise le déroulement des relations de pouvoir, en affectant la
capacité de jouer de ses membres et en conditionnant leur volonté en fixant des enjeux
suffisamment pertinents et importants. Les ressources d'un acteur ne sont pas toutes pertinentes
ni mobilisables. Les sources de pouvoir sont :
f) Le concept de stratégie :
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des régularités de comportements observés empiriquement. L’acteur développe des stratégies
dont les suivantes :
L'acteur n'a que rarement des objectifs clairs et encore moins des projets cohérents
(exemple : des conséquences imprévues de son action l'amenant à reconsidérer sa
position) ;
Son comportement est actif. Même s'il est toujours contraint et limité, il n'est jamais
totalement limité ;
Ce comportement a toujours un sens. Cette rationalité est liée, non à des objectifs clairs
et explicites, mais s'organise par rapport à des opportunités (contexte) et par rapport aux
comportements des autres acteurs ;
Ce comportement présente un double aspect: un aspect offensif, (la saisie d'opportunités
en vue d'améliorer sa situation) et un aspect défensif (le maintien et l'élargissement de
sa marge de liberté) ;
Il n'y a donc plus de comportement irrationnel : c'est là l'utilité du concept de stratégie.
« Derrière les humeurs et les réactions affectives, il est en effet possible à l'analyste de découvrir
des régularités, qui n'ont de sens que par rapport à une stratégie. Celle-ci n'est donc rien d'autre
que le fondement inféré ex post des régularités de comportements observés empiriquement. Il
s'en suit qu'une telle « stratégie » n'est nullement synonyme de volonté, pas plus qu'elle n'est
nécessairement consciente ». (Crozier, Friedberg, 1977:48).
g) Les projets de l’acteur sont rarement clairs et cohérents, mais le comportement n’est
jamais absurde. Il a toujours un sens dans le contexte et en fonction du jeu des autres
acteurs qu’il essaie de décoder ;
h) Chaque comportement est actif, il se décline comme une action et la passivité est une
forme de l’action.
En outre, l’analyse stratégique repose sur un certain nombre de principes sur lesquels la
capacité d’action de l’acteur est supposée reposer.
Au sein de l’organisation, les acteurs ont bien conscience des contraintes auxquelles ils
doivent faire face, mais ce sont eux qui vont construire sur le terrain l’organisation idéale. Par
exemple, la qualité est bien une contrainte qui s’impose à toutes les entreprises. La manière
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concrète dont cette qualité sera mise en œuvre dans chacune d’elles est, pourtant, construite par
le jeu des acteurs.
b) Les hommes n’acceptent jamais d’être traités comme des moyens au service de
buts que les organisateurs fixent à l’organisation :
Les intérêts des acteurs et ceux des organisateurs peuvent se recouvrir mais jamais
complètement. Aussi, les uns et les autres ne se considèrent-ils jamais comme des moyens au
service des buts de l’organisation. Non pas qu’il n’y ait pas de dévouement ou de sacrifices
consentis par les uns et les autres, les auteurs des Nouvelles approches sociologiques des
organisations (1996) souligne le cas d’une PME au lancement difficile où l’ensemble du
personnel a accepté d’augmenter son temps de travail sans contrepartie. Mais, cela ne va jamais
de soi et passe par de nombreux arrangements, souvent repris et négociés, ne traduisant jamais
une soumission fataliste, ni une adhésion spontanée.
Certes, il y a un cadre formel, des règles édictées ; il y a même des rôles attendus appris
patiemment tout au long du processus de la socialisation organisationnelle. Mais, l’acteur n’est
jamais complètement enfermé dans son rôle, en mettant à profit les ambiguïtés, les incohérences
et les contradictions qu’il recèle.
C’est à Herbert Simon que revient le mérite d’avoir posé les jalons décisifs pour
renouveler complètement le raisonnement sur la rationalité, en proposant le concept de
rationalité limitée. Il s’agit de raisonner avec « une logique à priori, selon laquelle l'homme,
dans une perspective synoptique, chercherait la meilleurs solution à tout problème. » Or, « l'être
humain est incapable d'optimiser. Sa liberté et son information sont trop limitées pour qu'il y
parvienne. Dans un contexte de rationalité limitée, il décide de façon séquentielle et choisit pour
chaque problème qu'il a à résoudre la première solution qui correspond pour lui à un seuil
minimal de satisfaction.» (Crozier, Friedberg, 1977:46).
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L’œuvre d’Alain Touraine (né le 3 aout 1925) puise ses racines dans les travaux de
Georges Friedman avec qui il a travaillé dans le domaine de la sociologie du travail, de Karl
Marx, de Georges Gurvitch et enfin de Talcott Parsons. Mais l’inspirateur de la théorie des
mouvements sociaux est Karl Marx selon qui, le combat proprement politique et parlementaire
est vain parce que l’infrastructure économique est déterminante en dernière instance et qu’elle
configure donc la superstructure. Or, le capital économique de l’individu est relatif à sa classe
sociale. La classe ouvrière est la classe révolutionnaire. Dans la théorie des mouvements
sociaux, les notions classes sociales et de la lutte des classes occupent une place centrale. Ces
classes, le plus souvent, apolitiques constituent une société civile ayant pour objectifs la défense
des intérêts d’une classe ou d’une nation.
La classe sociale est un concept clé dans la théorie des mouvements sociaux. Comme
chez Karl Marx, les classes sociales sont les acteurs caractéristiques des sociétés industrielles.
Mais, à l’image de ce que qu’a fait Darhendorf, Alain Touraine place le rapport de domination
et non d’exploitation au cœur des relations sociales. Il oppose la classe dominée à la classe
dirigeante à qui il assigne trois fonctions :
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elle impose son modèle culturel en faisant de sa conception de la créativité une vision
universelle.
Alain Touraine a développé également l’analyse du mouvement social. Il pense que pour
exister et se développer comme tel, un mouvement social doit avoir une vision claire de ce qu’il
représente (principe d’identité), de l’adversaire auquel il est confronté (principe d’opposition)
et des enjeux de leurs rapports conflictuels (principe de totalité). Les enjeux des conflits de
classe ne se limitent pas, comme le pense Karl Marx, aux moyens de production, mais aussi à
l’orientation ou au sens que la société donne à son développement, c'est-à-dire au modèle
culturel.
Pour Alain Touraine, un mouvement social est une « action collective organisée par
laquelle un acteur de classe lutte pour la direction sociale de l’historicité dans un ensemble
historique concret », c’est-à-dire lutte pour la détermination des grandes orientations culturelles
de la société. Pour lui, chaque société connait en réalité, un mouvement social et un seul qui
possède les caractéristiques suivantes :
Mais, nous vivons aujourd’hui la fin de la société industrielle et l’avènement d’une société
programmée dans laquelle :
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le pouvoir de gestion consiste à prévoir et à modifier des opinions, des attitudes, des
comportements, à modeler la personnalité et la culture, à entrer donc directement dans
le monde des valeurs au lieu de se limiter au domaine de la réalité.
l’enjeu des luttes n’est pas l’utilisation sociale de la technique, mais celle de la
production et de la diffusion massive des représentations, des informations et des
langages. La production de biens symboliques a pris la place centrale qu’occupait la
production des biens matériels dans la société industrielle, (Touraine, 1992).
Nous savons aujourd’hui que les hommes créent collectivement la société dans laquelle
ils vivent. Il n’existe pas d’organisation sociale qui ne soit pas l’œuvre des hommes. En
conséquence, les hommes sont en droit de la transformer. Mais, ces idées ne vont pas de soi.
Les membres de certaines sociétés (les sociétés primitives) estiment que l’ordre social leur est
donné par les dieux ou la nature et qu’ils ne doivent pas le modifier. Alain Touraine appelle
« historicité » cette capacité de la société à agir sur elle-même. En termes clairs, elle revoie à
cette capacité d’une société de construire ses pratiques à partir des modèles culturels qui
commandent les pratiques sociales, mais seulement à travers des rapports sociaux. Alain
Touraine rejoint Edward Palmer Thompson dans son analyse de l’historicité. Pour lui,
l’historicité n’est pas seulement l’inscription des sociétés humaines dans une histoire. Elle est
comprise comme étant la capacité des sociétés humaines de faire leur propre histoire par leurs
propres actions collectives. Elle suppose que, loin d’obéir à un « devenir nécessaire », d’être en
quelque sorte écrite à l’avance comme dans l’historicisme de Karl Marx. Cette histoire reste en
grande partie indéterminée pare qu’elle procède de l’action collective (comme les mouvements
sociaux) d’acteurs sociaux (comme les classes sociales) qui sont engagés dans des rapports
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sociaux (comme les rapports de classes) avec et surtout contre d’autres acteurs sociaux.
L’avenir dépend de l’issue, toujours, provisoire, de ces actions sociales, en particulier des
mouvements sociaux. L’historicité dépend de trois éléments :
La sociologie tourainiène des 1970 présente donc l’originalité de s’inscrire à la fois dans
une sociologie de l’acteur et dans une sociologie du conflit et de l’action. Mais après
l’effacement de la classe ouvrière puis des mouvements sociaux de contestation comme acteurs
sociaux, on peut se demander s’il existe un acteur central dans les sociétés développées de la
fin du XXème siècle ? Cette interrogation conduit Touraine à modifier profondément ses
analyses au cours des deux dernières décennies et à centrer son attention sur les conflits
opposant l’Etat à ses usages et à l’émergence du sujet. En somme, la sociologie de Touraine se
résume en quatre points :
3) les classes sociales sont les facteurs de changement social de la société industrielle ;
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La société a alors clairement conscience qu’elle n’a pas son origine dans quelque chose qui lui
est extérieur (Dieu, la nature) mais qu’elle se produit elle-même. Son historicité est donc forte.
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