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Isis Daras

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Les faces multiples de la domination

Pierre Bourdieu a apporté à la sociologie un grand nombre de concepts comme celui d’habitus,
de capital, qui permettent de mieux saisir la domination parfois inconsciente et invisible qui peut
s’exercer entre différents individus et différentes classes sociales. Nous allons particulièrement
nous intéresser dans cette dissertation a la violence symbolique. Plus précisément à comment la
violence symbolique apparait dans le monde social.

Dans une première partie nous allons nous intéresser à la notion de violence symbolique émise
par Pierre Bourdieu. Puis nous allons voir la notion d’habitus, en prenons notamment l’exemple
de son œuvre « le bal des célibataires » paru en 2002. Ensuite dans une dernière partie nous
verrons la domination masculine et en quoi cette domination symbolique est devenue incorporée
et invisible.

I- La violence symbolique ; au cœur de la sociologie de Pierre Bourdieu

A) Qu’est-ce que la violence symbolique


La violence symbolique est l’une des théories majeures développées par Pierre Bourdieu.
Derrière ce nom, ce cache une réalité sociale pouvant opposer parfois des classes sociales.
Cependant qu’est-ce que réellement la violence symbolique. Lorsque nous parlons de violence
symbolique, nous parlons des inégalités de capital qu’ils peuvent exister entre les différentes
classes sociales. Pierre Bourdieu va en analyser trois, le capital culturel qui peut prendre trois
formes différentes soit incorporé qui signifie l’habitus culturel, puis le capital objectivé qui prend
la forme de possession culturelle, enfin une forme institutionnalisée qui se traduit par les
diplômes scolaires. Ensuite le capital social qui se traduit par le fait que l’individu ait un réseau
social développé ou non. Finalement le capital économique qui est sans doute le plus facile à
distinguer. Si nous prenons comme exemple la violence symbolique c’est qu’elle explique en
quoi la sociologie de Pierre Bourdieu est une sociologie basée sur la domination.
Indubitablement la violence symbolique explique la violence non physique qu’il peut exister
entre les différentes classes sociales ainsi cette dernière met en avant l’ordre social inégalitaire au
sein même d’une société. La violence symbolique permet de ce fait à maintenir une hiérarchie
sociale entre dominant et dominée. Le point le plus intéressant est le fait que les dominés vont
voir s’inscrire en eux cette violence au point de ne pas la contester, et de la valider
inconsciemment.

B) En quoi la violence symbolique fait acte de domination

La violence symbolique commence dès l’entrée a l’école d’un individu, en effet déjà à l’école les
inégalités sociales et la violence symbolique vont apparaitre. Notamment la différence de capital
culturel qu’il peut exister, « permet de faire passer des différences sociales pour
des attributs “naturels” de la personne et suscite fréquemment des réactions violentes de la
part des jeunes issus des milieux modestes : ils sentent confusément (...) qu’ils n’ont pas les
mêmes chances de réussite scolaire que les autres ; ils ne peuvent s’expliquer et, a fortiori,
expliquer à d’autres ce qui les rend violents1 », comme l’explicite ici Michel Staszewski, la
violence symbolique n’est pas seulement le fait que des individus aient un capital culturel plus
important que d’autres, mais c’est surtout le fait que les différences sociales sont vues comme
naturelles. De la sorte que ces inégalités ne soient pas vraiment contestées par autrui. Si l’école
est sans doute la première fois qu’un individu va expérimenter la violence symbolique, ce n’est
pas non plus la dernière fois. Bourdieu nous explique que « Tout pouvoir de violence symbolique
est tout pouvoir qui parvient à imposer des significations et à les imposer comme légitimes en
dissimulant les rapports de force qui sont au fondement de sa force 2  », tout au long de la vie
d’un individu, ce dernier va être confronté à la violence symbolique. Assurément tout individu
est différent et est capable de subir ou de faire subir de manière parfois inconsciente de la
violence symbolique. Si l’école et la possible suite des études d’un individu est aussi marquée
par cette dernière, c’est que la différence de capital culturel entre individus peut être souvent
irrattrapable. De plus, s’ajoutent à cela les normes et les comportements que l’on peut observer
dans les différentes classes sociales.

II- L’habitus et l’exemple du bal des célibataire.


1
Michel Staszewski, professeur à l’Athénée Royal de Jette et auteur de « Et si la violence à l’école
n’était pas une fatalité », Université libre de Bruxelles,

2
Bourdieu P., Esquisse d'une théorie de la pratique, Paris, Droz, 1972, p. 18
A) La notion d’habitus, l’enjeu principal de la violence symbolique

Pour bien saisir la notion préalable, il nous faut revenir sur une autre notion développée par
Pierre Bourdieu celle d’habitus. Tout d’abord, nous avons déjà vu antérieurement la notion de
capital, il nous faut maintenant revenir sur la notion de champs. Selon P. Bourdieu le monde
social est divisé en champ, ce dernier peut prendre plusieurs aspects comme religieux, politiques,
artistiques… Les individus vont subséquemment être classés selon le capital qu’il possède, une
forme de hiérarchie va alors se créer au sein même du champ. De plus va s’ajouter à ce champ un
habitus collectif, Bourdieu appelle « les héritiers », les agents dont l’habitus s’accorde
naturellement au champ, c’est-à-dire les fortement dotés dans le capital de ce champ. Plus
précisément l’habitus désigne un style de préférence que ce soit dans la façon de parler, de
s’apprêter ou encore dans le choix des livres ou de la musique. L’habitus est de ce fait intériorisé
inconsciemment durant la phase de socialisation. Dans Esquisse d’une théorie de la pratique
(1972), Pierre Bourdieu définit l’habitus comme étant « une loi immanente, déposée en chaque
agent par la prime éducation ». Cependant l’habitus n’est pas seulement une habitude assimilée
par l’individu mais il est à l’origine d’un sens pratique. Pierre Bourdieu définit ainsi l’habitus
comme étant des «  structures structurées prédisposées à fonctionner comme des structures
structurantes  3», c’est-à-dire Structures structurées puisque l’habitus est le produit de la
socialisation ; mais il est également structures structurantes car générateur d’une quantité infinie
de nouvelles pratiques. Finalement Bourdieu nous précise que l’habitus est au cœur de la
reproduction sociale.

B) L’exemple du bal des célibataires

Pour achever cette partie nous allons prendre l’exemple du bal des célibataires de Pierre
Bourdieu. C’est dans cet ouvrage que Pierre Bourdieu nous transmet deux de ces notions ;
l’habitus et la violence symbolique. Dans cet écrit, il nous expose les stratégies matrimoniales et
la généralisation du célibat exercé dans son Béarn natal. Il s’intéresse particulièrement au célibat
des aînés, il restitue ainsi le problème de la reproduction sociale dans le monde paysan. Les
stratégies matrimoniales dans la société Béarn sont d’une très grande importance car cette
dernière est l’occasion d’un échange économique pour les familles, ce qui leur permet de
conserver ou d’augmenter leur capital socio-économique. Lorsque nous lisons le bal des

3
Esquisse d’une théorie de la pratique (1972), Pierre Bourdieu
célibataires, nous constatons que deux grands principes sont à retenir. En premier lieu, les
stratégies matrimoniales opposent les cadets et les ainées. Lors du mariage ces derniers reçoivent
une dote calculée en fonction du patrimoine de la famille. La seconde opposition concerne la
distinction entre « mariages de bas en haut » et « mariages de haut en bas ». Si la société du
Béarn connait une crise du célibat, c’est sans doute l’attraction du monde citadin qui en est l’une
des causes. Les femmes et les cadets sont logiquement désignés comme « le cheval de Troie du
monde urbain » (p. 227), car ils apportent le regard citadin sur le monde paysan. Celui-ci inclut
la commune dans l’espace social, qui laisse une partie des paysans dans une position de dominés,
ceci va entrainer l’apparition d’une concurrence brutale. Bourdieu introduit alors sa notion de
violence symbolique pour nous expliquer la domination de cette classe par la venue du monde
urbain.

III- Une domination du genre au sein d’une même classe social


A) La domination masculine, une violence symbolique incorporer et invisible

S’il y a bien une domination incorporée et devenue invisible c’est la domination des hommes sur
femmes. La domination masculine s’entend par un habitus donnant aux femmes et aux hommes
des normes différentes. Bourdieu nous explique dans son écrit que « le monde social construit le
corps, à la fois comme réalité sexuée et comme dépositaire de catégories de perception et
d’appréciation sexuantes4 », il nous dit que la domination masculine s’applique aux activités
quotidiennes de manière structurée. La violence symbolique pour lui, est principalement le fait :
«  qui fait l’essentiel de la domination masculine  5». A la différence de la violence physique qui
peut apparaitre, la violence symbolique de la domination des hommes permet d’expliquer toutes
les formes de violences car elle n’est rien d’autre que l’ordre social établi. Les structures sociales
vont ainsi être influencées par l’organisation de l’espace, du temps mais aussi la division
sexuelle du travail.

B) L’exemple de la société Kabyle

Le cas de la société Kabyle nous fournit une image grossie, ou l’on peut différencier les
structures sociales qui fondent la vision du monde masculin. La domination peut prendre plus ou
moins de place suivant les sociétés, cependant dans la société Kabyle cette dernière reste très

4
(Bourdieu 1990, p.11)
5
(Bourdieu 1990, p.11)
visible. Dans cette dernière la division masculin/féminin constitue le principe de division du
monde social et symbolique. De la sorte, le système de valeurs masculin est toujours plus
important. Ainsi toutes les activités sont classées par sexes, le public et le privé, le dessus et le
dessous, le plein et le vide symbolise masculin ou féminin. Par exemple la répartition dans
l’espace, « Comme si la féminité se mesurait à l’art de « se faire petite » (le féminin, en berbère,
se marque par la forme du diminutif), les femmes restent enfermées dans une sorte d’enclos
invisible (dont le voile n’est que la manifestation visible) limitant le territoire laissé aux
mouvements et aux déplacements de leur corps (alors que les hommes prennent plus de place
avec leur corps, surtout dans les espaces publics) 6 ». Malgré le fait que cette division soit très
visible dans certaines sociétés, la violence symbolique de la domination masculine est visible
dans pratiquement toutes les sociétés même si elle est parfois mieux intériorisée.

Pour conclure, nous avons vu en quoi consiste la violence symbolique et comment s’inscrit-elle
dans le monde social. A travers plusieurs ouvrages, Pierre Bourdieu a réussi à nous faire saisir
l’enjeu de la domination symbolique.

6
Chapitre I - Une image grossie, L’incorporation de la domination Bourdieu

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