Vous êtes sur la page 1sur 19

PRÉFACE

WHERE THE FUTURE IS


PAR ÉMILIE HACHE

À toutes ces merveilleuses femmes, puissantes, généreuses et déterminées :


Norma, Élisabeth, Brigitte, Dominique, Alecca, Marine, Catherine, Anne-
Hélène, Stéphane, Chloé, Anne-Sophie, Dabhia, Anne, Cécile, Maria-Eleo-
nora, Jenny, Eleni, Isabelle, Gaëlle, Rose, Vinciane, Blaga, Jelena, Soraya, Valérie,
Émilie, Lisa, Séverine, Camila, Giovanna, Benedikte…

Pour Dajana, Simon et George, where the Future is.

Tous mes remerciements à Isabelle Cambourakis, pour sa coniance et son


enthousiasme, ainsi qu’à Isabelle Stengers, pour ses relectures intransigeantes.

7
8
« Nous dansons, car après tout c’est ce pour quoi nous nous battons :
pour que continuent, pour que l’emportent, cette vie, ces corps, ces seins,
ces ventres, cette odeur de la chair, cette joie, cette liberté. »

Quand Starhawk publie Rêver l’obscur en 1982, elle vient de


participer, avec d’autres membres de son groupe d’ainité Matrix,
à un blocage géant contre la mise en marche en Californie de la
centrale nucléaire de Diablo Canyon, située à côté d’une faille
géologique. Le 15 septembre 1981, plus de 2 000 personnes se
réunissent pour bloquer le site de cette centrale ; certaines sont
arrêtées immédiatement, d’autres le sont au bout de plusieurs
jours. Un camp se forme juste à côté dans lequel de nouveaux
et nouvelles manifestant-e-s arrivent chaque jour pour participer
au blocage, soutenir celles et ceux qui s’y aventurent et accueillir
celles et ceux qui sortent de prison. Six jours plus tard, 5 000 per-
sonnes viennent aux portes de la centrale pour protester contre sa
construction et manifester leur soutien aux activistes. Quand la
mobilisation prend in, plus de 1 900 personnes ont été arrêtées
en deux semaines, certaines plusieurs fois1.
Ce blocage, organisé par l’Alliance Abalone, un mouvement
anti-nucléaire d’action directe non violent, anarchiste et fémi-
niste formé quelques années plus tôt, s’inscrit contre la course à
l’armement nucléaire liée à la guerre froide, qui s’est vu renforcé
par l’accident de la centrale nucléaire de hree Mile Island en
1979. Il constitua une expérience cruciale pour beaucoup de ses
1
Sur l’histoire de ces mouvements, voir Barbara Epstein, Political Protest and
Cultural Revolution: Nonviolent Direct Action in the 1970’s and 1980’s,
University of California Press, 1991. Voir également la chronologie de ces mobilisations
proposée en annexe de cette préface dans le poster en pièce jointe du livre.

9
participant-e-s, dont Starhawk, qui écrit dans le prologue de Rêver
l’obscur qu’il a informé sa « compréhension non seulement de la
théorie mais aussi de la pratique réelle du travail spirituel et poli-
tique2 ». Avant de devenir une activiste politique, Starhawk s’est
formée au sein du mouvement néo-païen introduit aux États-Unis
dans les années 1960, et plus précisément à l’une de ses branches
féministes radicales se revendiquant sorcière, la tradition Dianic
Wicca3, créant ses propres traditions comme sa propre organisa-
tion, dont elle avait présenté sa version dans un livre ayant connu un
immense succès trois ans auparavant, intitulé he Spiral Dance4. Si
ce premier livre comportait déjà une dimension politique en raison
de la « connexion naturelle entre un mouvement d’émancipation
des femmes et une tradition spirituelle fondée sur la déesse », Rêver
l’obscur tente de « relier le spirituel et le politique » de manière plus
explicite, accompagnant en cela le cheminement de Starhawk elle-
même, considérant, au vu du contexte politique, que la meilleure
façon d’honorer la déesse est de prendre part aux mouvements non
violents d’action directe5.

En allant chercher dans la religion des points d’appui pour


construire l’émancipation des femmes, le néo-paganisme fémi-
niste de Starhawk s’inscrit dans la longue tradition nord-améri-
caine des mouvements de libération enracinés dans la spiritualité
– les quakers, le mouvement des droits civiques ancré dans l’Église
noire, le mouvement noir nationaliste et ses liens avec l’islam, ou

2
Starhawk, Rêver l’obscur, prologue.
3
Anne-Marie Lassallette-Carassou, Sorciers, sorcières et néopaïens dans
l’Amérique d’aujourd’hui, Presses universitaires de Bordeaux, 2008.
4
Starhawk, he Spiral Dance, Harper & Row, San Francisco, Special 20th
Anniversary Edition, 1999 (1979).
5
Starhawk, he Spiral Dance, Ibid., Introduction to the Tenth Anniversary
Edition.

10
encore les traditions spirituelles des Indiens-Américains6. Centré
autour d’une déesse immanente et non d’un dieu (mâle, exclusif
et transcendant), ce néo-paganisme se veut une véritable « recréa-
tion7 » bien plus qu’une réactivation d’une tradition passée, mettant
radicalement en cause l’idéologie patriarcale présente notamment
dans la religion chrétienne. Se nommer « sorcière », c’est tout à la
fois « s’identiier aux victimes qu’ont faites de tout temps la miso-
gynie et la persécution religieuse […] et rendre aux femmes le droit
d’être fortes, puissantes et même dangereuses8. » Toutes insistent sur
ce qu’une telle religion a (eu) d’extraordinairement émancipateur –
pour leur estime d’elles-mêmes, pour réévaluer leur corps comme
quelque chose qui compte, pour s’autoriser à penser, à expérimenter
une forme de pouvoir, etc.9 Si la présence des néo-païennes fémi-
nistes au sein des mobilisations anti-militaristes fut si importante,
sans rapport direct avec leur nombre, c’est précisément en raison des
rituels comme des diférentes techniques de groupe qu’elles appor-
tèrent et partagèrent avec les autres manifestant-e-s. C’est ce lien
intime entre spiritualité féministe et pratique politique tenant à
6
Starhawk, Rêver l’obscur, préface à l’édition française de 2003 [cf. Appendice E].
7
Starhawk, « Witchcraft as Goddess Religion », in Charlene Spretnak (ed. by), he
Politics of Women’s Spirituality, Anchor Books, 1982.
8
Starhawk, Rêver l’obscur, préface à l’édition française de 2003. En annexe de ce
livre, Starhawk a écrit l’un des premiers chapitres sur l’histoire de l’éradication des
sorcières s’appuyant sur les travaux d’autres chercheuses féministes et activistes (Mary
Daly, Margaret Murray, Barbara Ehrenreich et Deirdre English) qui ont été les
premières à s’intéresser à cette histoire du point de vue des victimes, en rupture avec les
rares textes académiques qui, jusque-là, s’étaient fait les héritiers de leurs bourreaux.
Sur cette histoire et la clariication de nombreuses inexactitudes, notamment sur son
caractère massif (et non anecdotique), ainsi que sur son origine liée à la mise en place
du capitalisme, voir également Silvia Federici, Caliban et la sorcière. Femmes,
corps et accumulation primitive, traduction de l’anglais par le collectif Senonevero,
revue et complétée par Julien Guazzini, coédition Senonevero/Entremonde, 2014.
9
Outre le livre de Starhawk, on peut citer Merlin Stone, When God Was a
Woman, Mariner Book, 1976 ; Mary Daly, Gyn/Ecology, Beacon Press, 1978 ;
Susan Griin, Woman and Nature, he Women’s Press Ltd, 1978 ; Charlene
Spretnak, he Politics of Women’s Spirituality, op. cit.

11
une même volonté de changement et d’émancipation que cherche
à faire sentir Starhawk dans Rêver l’obscur, à travers un entremê-
lement de récits de leur participation à diférentes mobilisations
politiques et l’explicitation, par des mots ordinaires déroutants de
technicité non académique, de leurs diférentes pratiques à partir
desquelles elles cherchent à devenir capables, ensemble, de fabri-
quer un nouveau sens du possible.
Prendre part aux mouvements d’action directe non violente
pour la paix, aux mouvements altermondialistes ensuite, comme
aux mouvements de lutte contre le réchaufement climatique
aujourd’hui, constitue autant de façons de pratiquer la magie. Cet
« art (craft) de la transformation », comme l’appellent Stengers et
Pignarre dans l’un des rares textes de rélexion et d’intervention
politique s’intéressant à ces sorcières néo-païennes10, est un art de
transformation de soi et du monde, passant notamment par le lan-
gage, se pratiquant à plusieurs et au moyen de rituels. Et en ces
temps politiques très sombres du début des années 1980, où une
partie de la population était littéralement terrorisée par la menace
d’une guerre nucléaire et le possible anéantissement de leur monde,
les rituels néo-païens, loin de minimiser cette peur et le désespoir
qui lui était souvent associé, portent au contraire toute leur atten-
tion sur eux. Le premier acte de magie de ces écoféministes néo-
païennes fut de créer, au sein de ces mobilisations, des espaces – des
cercles – dans lesquels puisse se dire publiquement cette peur. Le
fait même de la faire exister collectivement transforme cette émo-
tion personnelle, ‘incapacitante’, en un problème politique, mais
donc immédiatement aussi, en une source possible d’émancipation
collective. C’est ce que veut dire « rêver l’obscur » : laisser monter/
afronter l’obscur ensemble pour ne pas être dévoré par lui. Toutes
les manifestations, blocages, parades, discours de ces années-là sont
animés par cette façon nouvelle de faire de la politique, et expéri-

10
Isabelle Stengers, Philippe Pignarre, La Sorcellerie capitaliste, Le Seuil/Les
Empêcheurs de penser en rond, 2003.

12
mentent la force de ces rituels néo-païens eux-mêmes très inluen-
cés par les pratiques féministes d’empowerment et les techniques
d’organisation horizontale des anarchistes. Nommer la peur, nom-
mer ce qui rend chacun.e d’entre nous impuissant-e, puis nommer
ce qui nous rend puissant-e, est un acte de magie et un acte poli-
tique pour les uns-e-s, un acte (uniquement) politique et féministe
pour les autres. Il reste que s’est inventée là une manière inédite de
faire de la politique, répondant à un besoin partagé par toutes de
faire prise sur cette chape de plomb11.

Si le terme d’écoféminisme12 n’apparaît pas dans Rêver l’obscur,


ce livre ayant été écrit au moment même où ce dernier s’inventait,
les écrits de Starhawk tout autant que son activisme politique
font partie de ce qui constitue, tout à la fois et de manière insé-
parable, un courant d’idées et un ensemble de mobilisations poli-
tiques, qui a émergé au sein de ces mouvements anti-militaristes,
articulant enjeux anti-impérialistes, environnementaux et fémi-
nistes. Les écoféministes avancent le fait qu’en raison des rapports
sociaux dans lesquels les femmes sont inscrites majoritairement

11
Comparez la description du rituel imaginé par le groupe de sorcières néopaïennes
de Starhawk suite à l’élection de Reagan (Rêver l’obscur, chapitre 9) avec celle de
la manifestation Women’s Pentagon Action (Y. King, If I Can’t Dance in Your
Revolution, I’m Not Coming, in A. Harris and Y. King (ed. by), Rocking the Ship
of State: Toward a Feminist Peace Politics, Westview Press, 1989), comme aussi
avec les ateliers proposés par une autre activiste anti-nucléaire, Joanna Macy, décrits
dans Despair and Personal Power in the Nuclear Age, New Society Pub., 1983.
12
Ce néologisme fut inventé par la féministe française Françoise d’Eaubonne et
traversa l’Atlantique grâce à la théologienne féministe américaine Mary Daly en
1978 qui l’introduisit dans son livre Gyn/Ecology, mais c’est la conférence de mars
1980, « Women and Life on Earth: Ecofeminism in the Eighties », à l’origine de
la Women’s Pentagon Action quelques mois plus tard, qui it véritablement entrer ce
terme dans le lexique politique et théorique américain. Françoise d’Eaubonne, Le
Féminisme ou la Mort, Horay, 1974 (traduit en anglais en 1981) ; la déclaration
unitaire prononcée à l’occasion de cette manifestation a été publiée sous le nom de
« United Statement of the Women’s Pentagon Action », in L. Caldecott and S. Leland
(eds), Reclaim the Earth, he Women’s Press Ltd, 1983.

13
dans nos sociétés, ces dernières font l’expérience qu’une culture
qui se construit contre la nature est une culture violemment miso-
gyne, cette dernière justiiant son rapport de prédation à l’égard
de l’une sur le dos de l’autre et inversement, imposant de mener
de front ces diférentes luttes13. « Les technologies militaires, écrit
Ynestra King, autre activiste écoféministe majeure de ces mouve-
ments anti-nucléaires, sont connectées avec le viol, le génocide,
l’impérialisme, la famine, l’absence de domicile, l’empoisonne-
ment de l’environnement14. » Loin d’essentialiser les liens his-
toriquement construits entre les femmes et la nature, mais sans
pour autant faire comme s’ils n’existaient pas, les écoféministes
proposent de les penser comme une « position privilégiée15 ». On
peut entendre par là l’idée d’un rôle spéciique des femmes dans
les luttes écologiques lié à la place socialement construite occupée
par ces dernières dans nos sociétés. Cette notion de « position
privilégiée » fait écho à la théorie du point de vue situé, théorisée de
manière contemporaine par Sandra Harding et Donna Haraway,
philosophes féministes des sciences16, airmant qu’en raison des
rapports sociaux de genre qu’expérimentent les femmes, elles
seraient susceptibles de faire plus facilement le lien entre rapports
de domination de genre, rapports de domination de la nature et
rapports de domination de classe. Il ne s’agit ici ni de romantiser
l’expérience, ni de créer une catégorie homogène des ‘femmes’,
ou encore de penser ce « savoir situé » comme quelque chose de
spontané, mais d’insister sur le fait que l’expérience compte, même

13
Carolyn Merchant, he Death of Nature, Harper One, 1990 (1980).
14
Ynestra King, « Toward an Ecological Feminism and a Feminism Ecology », in J.
Rothschild (ed. by), Machina Ex Dea, Pergamon Press, 1983.
15
Mary Mellor, « Women and Nature : a Privileged Standpoint ? », in Feminism
and Ecology, op. cit.
16
Sandra Harding, he Science Question in Feminism, Cornell University Press,
1986 ; Donna Haraway, « Savoirs situés : la question de la science dans le féminisme
et le privilège de la perspective partielle » (1988), in Donna Haraway, Manifeste
cyborg et autres essais, Exils Éditeur, 2007.

14
si cette dernière n’est qu’une condition déterminante, ni suisante
ni nécessaire, et que toutes les positions ne se valent pas17. C’est
enin une façon de tenir compte du fait que les femmes sont les
premières touchées par la crise écologique, et d’expliquer que ce
sont aussi elles qui sont les premières sur le front des luttes éco-
logiques : faire de ces connexions entre les femmes et la nature
une « position privilégiée » est une façon d’inviter ces dernières
à transformer ces liens subis en outils de lutte et d’émancipa-
tion. Les activistes écoféministes ne disent pas autre chose. « On
peut, écrit encore King dans l’un des tout premiers textes écofé-
ministes, utiliser les connexions femmes/nature comme une posi-
tion privilégiée pour créer une culture et une politique diférente,
qui intégrerait des formes de connaissance intuitives/spirituelles
et rationnelles, embrassant à la fois la science et la magie, de telle
façon à être capable de transformer la distinction nature/culture
elle-même et imaginer et créer une société libre et écologique18. »
Si, durant ces années de mobilisation, ce sont les mêmes per-
sonnes qui écrivent et militent (Starhawk, King, Spretnak, Macy,
Sturgeon19…), à partir des années 1990, parallèlement à la in du
mouvement anti-nucléaire, l’écoféminisme s’institutionnalise et
l’histoire des mouvements anti-militaristes à laquelle il appartient
est court-circuitée au proit de sa seule origine théorique formée

17
Chiara Boniglioli, « L’écoféminisme entre matérialisme et utopie », www.
academia.edu/1252413/Leco-feminisme_entre_materialisme_et_utopie, 2007.
18
« We can use the women/nature connection as a vantage point for creating
a diferent kind of culture and politics that would integrate intuitive/spiritual
and rational forms of knowledge, embracing both science and magic insofar as
they enable us to transform the nature/culture distinction itself and to envision
and create a free, ecological society », Ynestra King, « Toward an Ecological
Feminism and a Feminist Ecology », in J. Rotschild (ed. by), Machina Ex Dea, op.
cit. Traduction de la préfacière.
19
Les textes écoféministes de ces années-là sont pour une grande part de la main
d’activistes, comme on peut le voir dans les multiples recueils réunissant une grande
partie d’entre eux : he Politics of Women’s Spirituality, op. cit. ; Reclaim the
Earth, op. cit. ; Rocking the Ship of State, op. cit.

15
par le néologisme d’Eaubonne20. Outre le fait de déconnecter ce
courant d’idées de son ancrage politique, ces articles sur l’écofémi-
nisme, au lieu de chercher à construire des liens théoriques, voire
une position commune entre les diférentes sensibilités à l’œuvre,
notamment matérialistes et néo-païennes, ont tendance à trans-
former ces dernières en oppositions irréductibles21. Comme l’écrit
la chercheuse et activiste féministe Joni Seager, depuis la in des
années 1980, l’écoféminisme est devenu un terme à propos duquel
on est sommé de se positionner « pour » ou « contre », appelant
surtout à se désolidariser de l’essentialisme supposé de l’écofémi-
nisme néo-païen22. Ce faisant, la plupart des articles académiques
ne rendent pas compte de ce qui s’est passé dans ces mouvements
politiques, en particulier, l’importance cruciale accordée à la ques-
tion des alliances politiques au sein d’un mouvement composé de
sensibilités très diverses (anarchistes, néo-païennes, matérialistes,
marxistes, chrétien-ne-s, lesbiennes, bouddhistes, etc.) et leur
capacité à se rassembler dans des mobilisations au style politique

20
Je suis redevable ici à l’analyse de Benedikte Zitouni et à son magniique travail
d’archives et de reconnexion de l’écoféminisme à son histoire ; voir « Planetary
Destruction, Ecofeminists and Transformative Politics in the Early 1980’s »,
Interface. A Journal for and about Social Movements, vol. 6 (2), November 2014.
Je m’en tiens ici au contexte américain, mais rappelons qu’à cette même période des
mobilisations écoféministes – et travaux de théorisation connexes – ont également
lieu dans d’autres parties du monde. Voir par exemple Heather Eaton, Lois Ann
Lorentzen, Ecofeminism and Globalization: Exploring Culture, Context and
Religion, Rowman and Littleield Publishers, 2003.
21
Voir par exemple, Karen Warren, « Le pouvoir et la promesse de l’écoféminisme »,
traduit de l’anglais par H.-S. Afeissa, Multitudes, n° 36, 2010 (1re publication en
1990) ; Val Plumwood, Feminism and the Mastery of Nature, Routledge, 1993 ;
ou encore Janet Biehl, Rethinking Ecofeminist Politics, South End Press, 1991.
22
Joni Seager, « Rachel Carson died of Breast Cancer: the Coming Age of Feminist
Environmentalism », Signs, vol. 28, n° 3, 2003. On peut noter, en revanche, à partir
des années 2000, un retour lui-même critique sur ces critiques de l’écoféminisme
des années 1990, en particulier leur focalisation sur l’essentialisme supposé de
l’écoféminisme. Voir la bibliographie chronologique écoféministe à partir des années
1990 en annexe, notamment Seager, hompson ou Godfrey.

16
inédit23.
Starhawk est revenue dans plusieurs préfaces sur les difé-
rentes critiques qui lui ont été adressées, notamment dans celle
qu’elle écrivit pour la première traduction française de Rêver
l’obscur. Outre la suspicion infondée et a priori d’une désafec-
tion politique liée à leur engagement spirituel, alors qu’elles ont
été de toutes les luttes, le point de désaccord principal – de rup-
ture même – porte, sans surprise, sur l’interprétation de cette
religion néo-païenne comme nouvel instrument d’oppression
des femmes24. Plutôt que chercher à défaire des certitudes vis-
cérales, on soulignera la complexité de la position des sorcières
néo-païennes, cherchant à produire une articulation critique de
la destruction de la nature et des rapports de domination entre
les sexes à partir de l’élaboration d’une religion néo-païenne s’ap-
puyant sur la igure de la déesse. De l’extérieur, cette dernière peut
en efet donner l’impression de passer par l’essentialisation de la
féminité comme par la revendication de liens privilégiés entre
une nature immanente et le sexe féminin. Mais c’est sans compter
le caractère éminemment pragmatique de cette religion, qui ne
demande pas plus de « croire » en la déesse25 qu’elle ne passe par
une essentialisation des diférences entre les sexes. Son pragma-
tisme comme aussi sa visée plus politique que théorique refuse
en revanche de faire le tri entre les écoféministes qui pourraient
tenir à cet essentialisme, celles qui l’ont expérimenté comme une

23
Voir sur ce point B. Epstein, « Feminist Spirituality and Magical Politics », in
Political Protest and Cultural Revolution, op. cit. ; Ynestra King, « Healing the
Wounds: Feminism, Ecology and the Nature/Culture Dualism », in Irene Diamond
and Gloria Orenstein (edited and with essays by), Reweaving the World, Sierra
Club Books, 1990.
24
Voir par exemple, Janet Biehl, Rethinking Ecofeminist Politics, op. cit. ; Val
Plumwood, Feminism and the Mastery of Nature, op. cit.
25
« People often ask me if I believe in the Goddess. I reply, « do you believe in
Rock ? » (…) We do not believe in the Goddess, we connect with Her », he Spiral
Dance, op. cit., p. 103.

17
première forme d’émancipation, et celles qui le rejettent26. Der-
rière ce refus de se désolidariser de positions essentialistes, il y a
notamment la volonté de « ne pas abandonner le corps » et l’aspi-
ration, tout au contraire, à se ré-approprier (reclaim) ce dernier
sur lequel s’est fait – et se fait toujours – l’essentiel de l’exploita-
tion et de la domination patriarcale. Cela passe par la célébration
de notre sexe, de notre utérus comme de nos seins constamment
dégradés, déréalisés ou encore transformés en objets de honte,
mais aussi par l’apprentissage d’une langue pour les dire27.

Beyond the End

Traduire Dreaming the Dark au début des années 2000, c’est


faire découvrir une des composantes cruciales des mouvements
anti-militaristes féministes des années 1980 aux militant-e-s
européen-ne-s des mouvements altermondialistes. C’est donner

26
Starhawk signale dans son introduction à une réédition de he Spiral Dance
qu’à l’époque de sa parution, elle concevait de manière réiiée les qualités féminines
et masculines, conception dont elle s’est depuis éloignée. Comme l’écrit Noël Sturgeon,
« des rhétoriques essentialistes dans la construction de collectivités politiques, dans des
situations circonscrites, peuvent être un outil de libération », in Ecofeminist Natures:
Race, Gender, Feminist heory and Political Action, Routledge, 1997, p.9 (cité dans
Chiara Boniglioli, « L’écoféminisme, entre matérialisme et utopie », art. cit.). Rappelons
par ailleurs que Starhawk précise dans le prologue de Rêver l’obscur qu’elle présente ici
sa propre vision de la religion néo-païenne sorcière, pouvant diférer sur certains points
de celle d’autres sorcières néo-païennes.
27
Sur l’importance de la question du corps chez les écoféministes, voir aussi l’article
d’Anne-Line Gandon sur Françoise d’Eaubonne, « L’écoféminisme, une pensée
féministe de la nature et de la société », Recherches féministes, vol. 22, n° 1, 2009,
en ligne sur www.erudit.org.

18
toute sa place à l’écoféminisme néo-païen28 parmi celles et ceux qui
célèbrent et cultivent l’événement de Seattle, (ré)airmant qu’un
autre monde est possible. Une décennie plus tard, ce possible est de
nouveau mis à mal par une crise inancière qui n’en init pas d’être
le prétexte à un hold-up généralisé des populations européennes
tout autant que par l’inertie proprement sidérante des diférents
gouvernements devant le bouleversement climatique en cours.
L’échec annoncé des prochaines négociations internationales sur
le climat, appelées de manière cynique ‘conférence de la dernière
chance’ par les mêmes personnes qui jouent à y croire parce qu’elles
considèrent qu’elles ne seront pas concernées par les conséquences
de cette crise, difuse un véritable climat de panique froide de plus
en plus paralysant. Si le type de peur difère devant une menace
nucléaire et une crise climatique, notamment par le caractère difus
et la relative lenteur de cette dernière, le sentiment de détresse qui
l’accompagne en revanche n’est pas moins fort.
Face à cela, se remémorer l’audace et la puissance de ces
femmes qui se sont rassemblées et ont occupé les diférents lieux
du pouvoir pour hurler leur peur comme leur rage suscitées par
l’irresponsabilité et la lâcheté de nos gouvernants, interrompant
le train-train quotidien du business as usual, est vital. Il ne s’agit
nullement de se tourner vers ces activistes sorcières et leurs rituels
comme vers un dernier refuge désespéré mais, au contraire, comme
vers des personnes qui ont réussi ensemble à inventer des façons
de ne pas se laisser détruire et à « fabriquer de l’espoir au bord du
goufre29 ». Il importe à ce titre de les maintenir vivantes, contre

28
Face à la diiculté d’introduire une telle pensée en France, on peut considérer la
postface de Stengers comme un véritable acte de magie, ayant réussi, par l’invocation
de certains auteurs minoritaires pouvant supporter la mise en contact avec ces
écoféministes néo-païennes, à leur ofrir une escorte puissante pour leur faire traverser
l’Atlantique. Isabelle Stengers, « Un autre visage de l’Amérique ? », in Rêver l’obscur,
postface.
29
Isabelle Stengers, « Fabriquer de l’espoir au bord du goufre », La revue internationale
des livres et des idées, mars-avril 2009.

19
leur dévitalisation dans des querelles académiques, contre notre
athéisme dogmatique incapable de comprendre la dimension
radicalement pragmatique de ce courant néo-païen, contre enin
notre culture militante en partie impuissante à prendre au sérieux
des danses et des chants. Il n’y a rien de plus sérieux aujourd’hui
que de devenir capable, à notre tour, d’inventer collectivement
des dispositifs qui nous protègent à la fois du désespoir et du
cynisme, comme des paroles qui suspendent le cours habituel des
choses et (re)créent du possible.

Si le premier acte de magie des écoféministes sorcières


consiste à nommer ce qui fait peur, ce qui rend impuissant-e, le
second consiste à nommer ce qui rend puissant-e, nommer ce
que l’on souhaite à la place : c’est ce que Starhawk appelle « créer
une vision ». « Nous faisons (work) de la magie en visualisant ce
que nous voulons créer30. » Après d’autres, Starhawk attache une
très grande importance aux récits qui structurent notre monde
moderne, des rêves de conquêtes et de progrès principalement,
et à la nécessité non seulement de les nommer, mais aussi d’en
inventer d’autres. On pourrait juger cet acte de créer une vision
un peu court, sans contrainte, c’est-à-dire aussi sans efet, mais ce
serait passer à côté de la diiculté de fabuler d’autres rêves aussi
intensément désirables que ceux nourris par cette idée insensée
de progrès, comme celle d’inventer d’autres rêves aussi puissants
que la puissance de nos rêves de conquête. Après tout, si nous
connaissons aujourd’hui cette crise climatique, c’est peut-être que
nous rêvons encore à ces rêves-là31… « La magie a souvent été
pensée comme l’art de faire devenir vrais les rêves : l’art de réali-
ser les visions. Mais avant de rendre réelle une vision, nous devons

30
Starhawk, Truth or Dare, Harper San Francisco, 1987, p. 8 (ma traduction libre).
31
Sur l’Anthropocène comme nouveau rêve de la modernité, voir Christophe Bonneuil
et Pierre De Jouvancourt, in E. Hache (dir.), De l’univers clos au monde inini,
Éditions Dehors, 2014.

20
la voir. Nous devons avoir de nouvelles images à l’esprit, nous
aventurer dans un paysage transformé, raconter de nouvelles his-
toires32. » À cet égard, il est clair que la recréation de la déesse par
les écoféministes néo-païennes, comme la réactivation politique et
pragmatique de l’histoire de l’éradication des sorcières européennes,
fabrique une vision aussi puissante que radicalement diférente en
termes de monde. Il ne s’agit pas ici d’opposer au capitalisme une
nouvelle religion, mais de comprendre que cette vision engage, tout
à la fois, une critique du sexisme inouï de notre société, une mise
à l’épreuve de la très grande ambivalence de la modernité à l’égard
de la religion ainsi qu’un questionnement de ce à quoi/à qui sert le
savoir académique. Cette igure de la déesse est l’une des sources
de la Déclaration unitaire de la Women’s Pentagon Action, pre-
mière déclaration écoféministe déployant la vision d’un monde
« fait de sang et d’os » en opposition à notre monde « fait d’or et de
pétrole33 », qui fut, rappelle Starhawk, « l’une des premières étapes
du voyage qui a conduit à Seattle, à Gênes et au-delà34 ».

Starhawk en prolonge elle-même la vision dans un roman de


SF écrit quelques années après, intitulé he Fifth Sacred hing35.
Dans un futur proche, en 2048, sur cette même terre expérimen-
tale de Californie, les écoféministes néo-païennes n’ont pas disparu
mais ont créé une communauté non violente dans des États-Unis
désunis par la crise écologique qui fait rage. Elles ont réinventé
une agriculture locale permettant à chacun de se nourrir, choisi des
technologies reposant sur des énergies et ressources renouvelables,
imaginé l’organisation politique de leur communauté autour d’une

32
Starhawk, Rêver l’obscur, op. cit.
33
« Unity Statement of the Women’s Pentagon Action, USA », in Reclaim the Earth,
op. cit.
34
Starhawk, Rêver l’obscur, préface à l’édition française de 2003 [Appendice E],
op.cit..
35
Starhawk, he Fifth Sacred hing, Bentam Books, 1993.

21
imbrication de conseils de quartier et accordé une place impor-
tante aux rituels multiconfessionnels – néo-païens, juifs, musul-
mans, bouddhistes, chrétiens, etc. Starhawk cherche ici à donner
corps, par la iction, à la vision d’un monde qu’elle souhaiterait voir
advenir, proche du travail de rélexion et d’imagination des villes en
transition concernant la nécessité de se préparer à l’après-pétrole,
le féminisme en plus36. Lorsque cette communauté est attaquée par
la milice armée de la multinationale contrôlant le reste de la région
et souhaitant anéantir tout ce qui échappe à son pouvoir, Starhawk
choisit de raconter une possible victoire, même fragile, contre ce
devenir barbare, considérant que résister à ce dernier passe notam-
ment par peupler notre imaginaire d’autres avenirs.
Ce roman de Starhawk est étonnamment proche d’un autre
grand texte de SF écoféministe paru la même année, de l’écri-
vaine noire américaine Octavia Butler, intitulé La Parabole du
semeur. Cette histoire se passe également dans la première moi-
tié du XXIe siècle, dans une Californie dévastée, dans laquelle
certain-e-s essaient de reconstruire un monde habitable37. Mais
l’on est moins surpris de ces résonances si l’on songe que depuis
le début des années 1960 les auteures de SF (éco)féministes ont
multiplié nouvelles, romans et cycles romanesques questionnant
radicalement les mythes, les attachements comme les choix de
notre modernité, au prisme de leurs conséquences écologiques,
éthologiques ou encore féministes38. Les militant-e-s écologistes,
féministes, néo-païen-ne-s et athées qui ont participé aux blo-
cages de centrales nucléaires comme de bases militaires de mis-
siles nucléaires ont inspiré – tout autant qu’elles ont été nourries –
(par) la ré-invention féministe de traditions spirituelles pré-chré-
36
Rob Hopkins, Manuel de transition, traduit de l’anglais par M. Durand,
Ecosociété, 2010.
37
Octavia Butler, La Parabole du semeur suivi de La Parabole des talents, traduit
de l’américain par P. Rouard, Au Diable Vauvert, 2001 (1993).
38
Je renvoie ici à la bibliographie chronologique de science-iction écoféministe
que je propose en annexe.

22
tiennes ainsi que (par) ces récits de science-iction (éco)féministes
imaginant et explorant des mondes bâtis très largement sur les
décombres de notre société patriarcale, accordant une très grande
attention à fabuler un après, tout à la fois non innocent et viable.
On peut aujourd’hui faire le pari que l’on devra compter, d’une
façon ou d’une autre, sur ces ictions écoféministes, tout aussi
marginalisées et peu prises au sérieux dans leur genre que l’éco-
féminisme néo-païen, dans l’émergence de mobilisations futures.
J’entends ici la science-iction (éco)féministe au sens que lui
donne Donna Haraway de Speculative Fabulation, considérant, à la
suite de Marleen Barr, la science-iction féministe comme appar-
tenant pleinement à la pensée féministe39. Barr défend l’idée que la
marginalisation de la SF féministe, due à la fois à sa critique de notre
société patriarcale et au régime de vérité de la modernité reléguant
la iction du côté de l’illusion, a eu pour efet de couper la rélexion
féministe d’un des pans de sa rélexion les plus intéressants et créa-
tifs. De même que des ictions scientiiques se sont substituées aux
démonstrations scientiiques manquantes pour faire sentir, et ina-
lement contribuer à fabriquer le monde dans lequel nous nous trou-
vons encore40, ces fabulations féministes, en multipliant les zones de
contact avec des sensations, des émotions, des valeurs comme encore
des perceptions distinctes, participent pleinement à rendre possible
un monde diférent, accompagnant et se nourrissant en retour de la
rélexion et des combats des écoféministes, et partageant avec elles
l’exigence d’un rapport à la vérité qui ne se sent pas tenu d’être idèle
à une réalité qui nous détruit, mais situant au contraire une approche

39
Marleen S. Barr, Feminist Fabulation, University of Iowa Press, 1992 ; Donna
Haraway, « Sowing Worlds: a Seed Bag for Terraforming with Earth Others », in
Margaret Grebowicz and Helene Merrick, Beyond the Cyborg: Adventures with
Haraway, Columbia University Press, 2013.
40
Frédérique Aït-Touati, Contes de la lune. Essai sur la iction et la science
modernes, NRF Essais, 2011.

23
responsable dans le fait de chercher à la modiier41.

La référence à Haraway, grande lectrice et ‘usagère’ de SF, peut


sembler ici inappropriée en raison de l’airmation célèbre par
laquelle elle conclut le Manifeste Cyborg, préférant, rappelons-
le, « être cyborg que déesse42 ». C’est peut-être au contraire le
moment de revenir sur l’immense malentendu qu’elle a généré
en tenant compte cette fois du contexte dans lequel Haraway
écrivait. Ce dernier permet en efet de comprendre en quoi cette
conclusion, aussi maladroite fût-elle, n’était ni une déclaration de
guerre, ni une entreprise de désolidarisation, quoi que ses lec-
trices, européennes notamment, aient pu en faire, déconnectées
de cette histoire. Ce texte, publié en 1985 et écrit au cours des
années précédentes, est contemporain des mouvements anti-
nucléaires féministes, mais donc aussi de l’écoféminisme néo-
païen et matérialiste avec le(s)quel(s) Haraway discute et crée
des alliances dans son Manifeste. Elle participera deux ans plus
tard à leurs côtés à la Mother’s and Other’s Day Action contre la
construction d’un site d’essais nucléaires dans le Nevada, au sein
d’un groupe d’ainité écoféministe « indiscipliné » nommé Sur-
rogate Others43. « Cyborg plutôt que déesse » alors, au sens où
les alliances supposent des positions hétérogènes, mais aussi au
sens de faire une place à la cyborg à côté de la igure de la déesse
– bien plus connue à cette époque en Californie que la cyborg – et
non à la place de, toutes deux, écrit Haraway, étant « liées l’une à
l’autre dans une danse spirale », toutes deux cherchant à inventer

41
Sur ce point, je me permets de renvoyer à mon article « he Futures Men don’t see »,
in Didier Debaise et Isabelle Stengers, Gestes spéculatifs. Actes du colloque de
Cerisy, Presses du Réel, à paraître en 2015.
42
Donna Haraway, « Manifeste Cyborg », in Manifeste cyborg et autres essais,
op. cit.
43
Voir Noël Sturgeon, Ecofeminist Natures, op. cit. et Donna Haraway, « Les
promesses des monstres », in Elsa Dorlin et Eva Rodriguez (dir.), Penser avec
Donna Haraway, PUF, 2012, p. 206 et sq.

24
une nouvelle façon d’occuper l’espace comme d’expérimenter une
nouvelle temporalité dans lesquelles nous ré-approprier (reclaim)
notre futur44.
Hériter aujourd’hui de manière vivante de l’écoféminisme,
de son histoire et de ses propositions théoriques, c’est pouvoir
à nouveau ne pas choisir entre la igure de la cyborg et celle de
la déesse, comme entre l’écoféminisme néo-païen et matérialiste.
C’est avoir la possibilité de se laisser afecter par les promesses de
régénération et de dépaysement de chacune tout autant que par
l’importance de leur alliance dans une politique de coalition. Le
combat ne fait que commencer et il risque d’être très long ; nous
avons besoin les unes des autres pour créer un monde que nous
voulons, et « espérer gagner ce combat d’une manière telle que
nous en sortirons avec une créativité et une compassion intacte,
sur une terre encore assez vivante et résistante pour guérir45. »

44
Donna Haraway, « Manifeste Cyborg », art. cit. ; Starhawk, he Spiral Dance,
op. cit., p. 216.
45
Starhawk, Rêver l’obscur, préface à l’édition française de 2003, op. cit..

25

Vous aimerez peut-être aussi