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Culture & Musées

Le cinéma, ou comment raconter la science au Palais de la


découverte en 1937
Florence Riou

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Riou Florence. Le cinéma, ou comment raconter la science au Palais de la découverte en 1937. In: Culture & Musées,
n°18, 2011. Le récit dans la médiation des sciences et des techniques. pp. 129-149;

doi : https://doi.org/10.3406/pumus.2011.1631

https://www.persee.fr/doc/pumus_1766-2923_2011_num_18_1_1631

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Résumé
e Palais de la découverte, inauguré en 1937 dans le cadre de l’Exposition internationale de Paris –
Les Arts et les Techniques dans la vie moderne –, a pour projet de diffuser et valoriser la
recherche scientifique en cours. Le cinéma est convoqué dans ce but. Ce texte propose, par
l’analyse notamment de films de vulgarisation scientifique présentés dans ce cadre, d’interroger la
place accordée à la narration et à la fiction dans ces films, et de tenter d’en dégager les
principales caractéristiques. C’est une science «vivante » , proche de celle faite en laboratoire,
qu’il s’agit de raconter au public. Deux types de médiations semblent alors s’opposer, convoquant,
ou non, le récit, et mettant plus ou moins en valeur l’imaginaire qui accompagne la science. Le
cinéma développe d’ores et déjà ses capacités à créer un lien entre la science et le public : ces
mises en récit restent à développer aujourd’hui.
Titre : Le cinéma, ou comment raconter la science au Palais de la découverte en 1937.

Resumen
El Palais de la découverte inaugurado en 1937 durante la exposición internacional de Paris,
denominada «Las Artes y las técnicas en la vida moderna » , tiene como objetivo difundir y
valorizar las investigaciones científicas contemporáneas. Y el cine forma parte de este proyecto.
Este artículo propone, mediante el análisis específico de unas películas de divulgación científica
presentadas en dicho contexto, examinar la importancia de la narración y de la ficción en aquellas
películas, e intentar destacar sus principales características. Se trata de una ciencia «viva » ,
cercana a la practicada en los laboratorios, y que va a ser contada al público. Dos tipos de
mediaciones parecen entonces oponerse, incluyendo, o no, el relato, y poniendo de relieve lo
imaginario que acompaña la ciencia. De aquí en adelante el cine desarrolla sus capacidades para
crear un lazo entre la ciencia y el público : actualmente falta fomentar dichas narraciones..
Título : El cine, o cómo contar la ciencia en El Palais de la découverte en 1937.

Abstract
Since it was launched during the Paris International Exhibition «Arts and techniques in modern life
» back in 1937, the «Palais de la découverte » has always striven to spread and promote on-going
scientific research. Cinema has helped and served this purpose. Through the analysis of films
dedicated to science for the general public, this document investigates the place given to narration
and fiction in these films, and tries to underline their main characteristics. In the manner of science
experimented within the labs, this is a truly «living » science, that is being brought to the public.
Over that period, two approaches prevail based on whether or not the focus is on narration and
fiction, elements capable of calling upon the imaginary quality that goes together with science.
Cinema has been building up its abilities to create that connection between science and the public.
Yet as today, these types of narration are remain to be developed.
Title : Cinema or the way of narrating science at the Palais de la découverte in 1937.
F l o r e n c e R i o u

LE CINÉMA,
OU COMMENT RACONTER LA SCIENCE
AU Palais de la découverte en 1937

E ntre les deux guerres, le


cinéma est employé comme
média de masse pour soute-
nir une politique ambitieuse
d’éducation sanitaire : Jean
Benoit-Levy, notamment,
réalise des films scientifiques
dont le récit repose sur des
ressorts fictionnels dans le
but de faciliter l’adhésion des
spectateurs et de transmettre
une éducation sanitaire. Les
travaux de Valérie Vignaux
attestent cependant du déclin
de ce type de vulgarisation au
début des années 1930 et la
relégation du modèle de trans­
­mission des connaissances
qui l’accompagne (Vignaux,
2009 : 82).
Ces films hygiénistes qui légitimaient le recours à la fiction sont en
effet délaissés au profit de films de vulgarisation valorisant l’acte de
recherche scientifique. Le Palais de la découverte, inauguré en 1937
lors de l’Exposition internationale – Les Arts et les Techniques dans
la vie moderne –, a justement pour projet de diffuser et valoriser
la recherche scientifique en cours. Le cinéma est le mé­dium con­vo­
qué dans ce but. Nous pouvons donc nous interroger sur la forme
que vont prendre ces films de vulgarisation scientifique et la place
accordée dans ce cadre à la narration et à la fiction.
La médiation des sciences et techniques au Palais de la découverte
relève d’une nouvelle muséologie, mettant l’accent sur la « science
vivante », celle qui se fait en laboratoire, selon l’expression de Paul
Langevin (Langevin, 1932 : 239) puis de Jean Perrin (Perrin, 1938),
à l’origine du projet. Dans ce contexte, objet d’une première partie,
nous verrons comment le cinéma va alors s’affirmer comme outil
de communication des sciences, définissant trois catégories de films :
de recherche, d’enseignement et de vulgarisation. Nous analyserons
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ensuite précisément comment la science va être racontée au public
du Palais de la découverte, en prenant l’exemple de trois films de
vulgarisation sur les mathématiques, la biologie et l’astronomie. À
une médiation relevant d’une forme de cours, simple transmission
d’un contenu à rendre intéressant, semble alors s’opposer une
médiation convoquant le récit, mettant en valeur l’imaginaire qui
accompagne la science et ne se limitant pas à une suite de dé­
monstrations à buts explicatifs.
En laissant place à la narration mais aussi à la fiction, une
vulgarisation des sciences par le film, telle que la défend Denis
Guedj (Guedj, 1994) aujourd’hui, se développe alors dans cet esprit.
Nous mettrons en perspective la place de la fiction et de la narration
au sein des films diffusés au Palais de la découverte en 1937. Ceci
pour interroger la façon dont les médiateurs opèrent aujourd’hui
et pour offrir une ouverture pour des recherches futures sur les
relations entre cinéma, science et diffusion.

L E S A N N É E S 193 0 :
N OU V E AU C ON T E X T E
D E D I F F U S I O N
D E S S C I E N C E S

L a vulgarisation scientifique, après avoir


connu son apogée à la fin du xix e siècle, tend à s’essouffler après
la Première Guerre mondiale. Un fossé se crée entre deux régimes
de savoir, que dénonce Bernadette Bensaude-Vincent : d’un côté
ceux qui créent le savoir dans l’intimité du laboratoire, de l’autre ceux
qui le consomment, amateurs, professeurs ou érudits : la science
populaire semble devenue une « vulgaire marchandise » (Bensaude-
Vincent, 2000). Un mouvement de grande ampleur se développe
alors dans l’entre-deux-guerres, initié par des scientifiques, afin
de changer ce regard parmi le grand public. C’est dans un même
idéal éducatif républicain que sont conçus les grands projets de
vulgarisation : publications, encyclopédie, universités populaires,
expositions. S’il peut être aujourd’hui considéré comme le « para-
digme de la muséologie scientifique contemporaine » (Eidelman,
1988 : 176), le Palais de la découverte annonce aussi l’émergence
d’un nouveau média pour la science. Une véritable stratégie d’expo­
sition se met en place, qui s’appuie sur une volonté de mettre en
scène les principales découvertes scientifiques et à laquelle s’inves­
tissent Jean Perrin et Paul Langevin. Quels en sont les principa­les
caractéristiques ?

Donner à voir une « science vivante » grâce au film

Dès 1935, Perrin conçoit le Palais de la découverte comme un


« musée moderne de la science vivante », « un laboratoire en
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activité » (Perrin, 1935), donnant aussi à voir le réel étudié par la
science. Langevin appelle les scientifiques à participer à la diffu-
sion de leur savoir, à sortir de leur laboratoire et des problèmes
propres à leur discipline : le contenu et la forme de la diffusion
doivent évoluer. L’accent est mis sur le nouveau – méthodes nou-
velles, recherches en cours, dernières données du savoir –, ceci
afin de casser l’image d’une science « morte et définitive » : « L’his-
toire des idées nous fait apparaître la science comme vivante ;
c’est elle que nous devons enseigner plutôt que la science morte
des résultats techniques dans laquelle se confine trop souvent
l’enseignement scientifique. » (Langevin, 1932 : 239.)
Une pédagogie attractive, où il s’agit de faire comprendre plu-
tôt qu’apprendre ou simplement exposer, est élaborée par les sa-
vants eux-mêmes : ils manipulent devant le public, commentent
leurs films de recherche, invitent le public à participer, à toucher…
Le cinéma, tout en étant un outil d’investigation de plus en plus
présent dans les laboratoires, est alors perçu comme le moyen de
diffusion capable de faire le récit d’une découverte, capable aussi
de donner à voir directement une « science en mouvement » au
public, grâce aux images que celle-ci élabore. Les images asso-
ciées aux découvertes scientifiques ou techniques, telles que les
rayons X, l’image par image, la cinématographie ultra-rapide, sont
donc indissociables de la présentation du travail du chercheur,
mais vont aussi être mises au service des films d’enseignement et
de vulgarisation. Propres à développer un véritable imaginaire
poétique et narratif, ces images inédites alors pour le public sont
autant de fenêtres ouvertes sur de nouveaux mondes sous-marins,
microscopiques, ou révélant des phénomènes trop rapides ou trop
lents pour l’œil humain. Mais le cinéma fait aussi partie de ces
« dispositifs visibles » revendiqués par Paul Valéry afin de pouvoir
au mieux « suggérer des travaux essentiellement invisibles » (Va-
léry, 1936), comme les mathématiques.
Aussi sera-t-il « présent partout dans l’exposition » (Léon, 1935),
ceci sous toutes ses formes et plus particulièrement au sein de la
classe 1 des découvertes scientifiques1. Dès lors nous pouvons
nous interroger sur la façon dont les films vont accompagner et
mettre en vie le travail du chercheur ou la science elle-même.
Mais cela nécessite au préalable une classification des différents
types de films présents à l’Exposition.

Classification des films scientifiques

Le cinéma scientifique est constitué de films contenant des


images de science ou parlant de celle-ci. Jean Painlevé2 en est le
fervent défenseur, et élabore dès 1929 une classification des films
en fonction des intentions initiales et du public visé.
Le film de recherche s’adresse à des spécialistes de la question.
Il contient des documents bruts qui ont – ou pas – donné lieu à
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des avancées scientifiques. Le film d’enseignement, à usage pédago­
gique, s’adresse quant à lui à un public pouvant aller de l’école
primaire jusqu’à l’université. Des choix sont faits, tant au niveau
de la réalisation que du montage, afin de le rendre assimilable et
le moins possible ennuyeux ; des schémas explicatifs, des séquences
animées par exemple, peuvent être ajoutés. Enfin, le film de vulgari­
sation s’adresse à un public étranger à la question traitée. Il peut
donc sensibiliser et retenir l’attention du spectateur par une forme
plus travaillée, plus artistique, mettant en jeu toutes les ressources
du langage cinématographique : « … le côté plastique, anecdotique
et rythmique doit dominer pour ne point lasser l’esprit du spectateur,
prêt à s’échapper… » (Painlevé, 1929 : 15). Pour qu’un film garde
la qualification de « scientifique », il doit être conforme aux résultats
scientifiques, mais aussi faire appel au raisonnement du spectateur,
dans sa présentation, son commentaire, sa cohérence, ceci afin de
faire comprendre un phénomène tant dans ses causes que dans
ses effets… Comme les films d’enseignement, les films de vulgarisation
peuvent s’appliquer, souligne Painlevé en 1931, « aussi bien à la
sociologie qu’à la chirurgie, à la géométrie, à la biologie, à la chi­
mie, à la sculpture, à la géographie, à la physique, etc. » (Painlevé,
1931 : 492).
Lors du passage de la recherche à la vulgarisation scientifique,
se développe alors, au sein des films de l’Exposition de 1937, un
nouvel élément de médiation.

LE FIL M, MÉDI A
DE V U L GA R ISAT ION
S C I E N T I F I Q U E
À L’ E X PO SI T ION

L es trois types de films vont être utilisés pour


la médiation à l’Exposition, dans des contextes différents. Les films
de recherche, directement issus de laboratoires3, réalisés pas les
chercheurs eux-mêmes pour être supports d’analyse des phénomè­
nes, vont accompagner, donner sens et concrétisation aux activi-
tés des chercheurs. Des films d’enseignement accompagnent et
rendent vivantes les différentes sections, tandis que des films de
vulgarisation scientifique vont être présentés dans le cadre de la
section de cinéma, certains spécialement conçus pour l’Exposi-
tion, d’autres prêtés ou achetés par les sections. L’analyse compa-
rative de trois de ces films révèle diverses trames narratives, mises
en contexte ou trucages élaborés afin de faire partager un savoir
ou l’histoire d’une découverte.

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De L a Quatrième Dimension au Voyage dans le ciel 6 :
mise en contexte et trame narrative
dans deux films de vulgarisation

La Quatrième Dimension et Voyage dans le ciel figurent parmi


ces films de vulgarisation. Attachés aux mathématiques et à l’astro-
nomie, ils présentent des orientations différentes quant à la mise
en contexte et la trame narrative. Au sommet de l’abstraction et
de la théorie, les mathématiques posent d’emblée le problème de
leur présentation au public. Le mathématicien Sainte-Laguë4
cherche « des présentations qui frappent directement les visiteurs
par des formes concrètes » (Sainte-Laguë, 1934) et le cinéma lui
apparaît « l’un des moyens les meilleurs », capable de susciter
l’intérêt pour cette science. Il propose, dès 1934, la réalisation d’un
film illustrant la création intellectuelle : « L’idée qui naît, qui se
développe, qui aboutit… » (Sainte-Laguë, 1934.) La narration est
présente dans cette description, qui tend à vouloir faire vivre l’imagi­
nation et l’intuition du chercheur face au public, et surmonter par
la concrétisation l’obstacle majeur que représente l’abstraction.
Sainte-Laguë réfléchit à la mise en scène5 et cherche à concrétiser
la notion d’espace à quatre dimensions par des images telles celle
de « l’animal – temps » (Sainte-Laguë, 1935 : 11). Dans ce but, des
êtres et des choses à une, deux, trois puis quatre dimensions sont
successivement traités dans le film : la trame narrative est consti-
tuée d’une progression dans la complexité des situations expo-
sées au spectateur, avec une volonté de démonstration allant du
plus simple au plus compliqué. Se succèdent des saynètes expli-
catives liées à différentes hypothèses : « Imaginons une quatrième
dimension… », « Considérons une autre hypothèse selon laquelle
le temps joue le rôle d’une des dimensions… », « Ces hypothèses
correspondent-elles à la réalité, rien ne permet de l’affirmer
actuellement ».
Par comparaison, Voyage dans le ciel aborde la question de
l’astronomie de façon très différente. Le film débute par une pré-
sentation de l’observatoire, du travail des chercheurs, ainsi que
les outils d’observation replacés dans un rapide historique de
l’apport des techniques à cette science. Cette mise en contexte,
avant une plongée dans le sujet, humanise la suite du film. Cela
permet en effet au spectateur de donner un sens à la quête du
chercheur, de garder en mémoire le point de vue, le regard
adopté au début et ce, tout au long du film. Mais cela correspond
aussi à une pédagogie des sciences réclamant « une conception
dynamique s’appuyant sur l’histoire » (Langevin, 1932 : 232). C’est
une première différence avec le film La Quatrième Dimension, où
le contexte de recherche n’apparaît pas ; où le scientifique n’existe
que sous la forme d’une main qui déplace les objets pour simuler
un espace extérieur. Le moteur de la narration est par la suite,
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dans Voyage dans le ciel, un véritable voyage au cœur des connais-
sances de l’époque en astronomie, de planètes en planètes, puis
au travers de la galaxie. Zoom arrière : « Quittons la Terre… peu
à peu nous approchons de la surface bouleversée de la Lune,
première étape d’un voyage céleste… » Zoom avant : « Nous arri-
vons sur notre satellite. Voici ses montagnes annulaires, ses cimes
escarpées… » Ainsi le passage d’une planète à l’autre est motivé
par une volonté d’en savoir plus sur un point précis ; les connais-
sances sur Mars, Saturne, etc., sont mises en images grâce aux
reconstitutions.

De L a Quatrième Dimension au Voyage dans le ciel :


Les trucages au service de la narration

La narration fait appel dans les deux films aux reconstitutions


et aux trucages ; l’intention de partage des connaissances justifiant
l’insertion de « reconstitutions sincères et justifiées » des faits
(Painlevé, 1938 : 8), tels les schémas animés et les maquettes qui
permettent de matérialiser des notions abstraites ou des phéno-
mènes inobservables. Ce recours permet en effet dans un cas la
concréti­sa­tion de notions mathématiques abstraites, tandis qu’en
astronomie il supplante le manque d’images réelles de planètes
dans la recherche.
Dans La Quatrième Dimension, l’hypothèse selon laquelle le temps
joue le rôle d’une dimension amène à imager notamment la tra­versée
d’un plan représentant le présent, par une orange. Le « phénomène
orange » qui s’ensuit pour un être vivant au présent se manifeste
alors sous la forme d’un disque se modifiant avec le temps. Un tru­
cage consiste alors à filmer image par image des sections d’orange,
et à reconstituer son évolution, vue du plan. L’exemple de l’orange
est successivement remplacé par celui d’une allumette qui se
consume, par un écheveau de laine dont la section représenterait
des atomes, puis par l’homme, dont la vieillesse n’est que la mani­
festation de cette quatrième dimension. L’utilisation de trucages est
mise à l’honneur mais semble simplement là pour essayer de
concrétiser les notions, de les faire passer en les rendant intéres-
santes en jouant sur la forme. Pour le journaliste Pierre Michaut
cependant, il s’agissait « moins de procéder à une démonstration
que de con­duire l’imagination du spectateur dans un monde irréel,
d’évoquer des aspects dont la représentation directe est impos-
sible » (Michaut, 1955 : 16). Cette section de mathématiques sera,
d’après la presse, « une de celle qui connut le plus vif succès,
notamment auprès des jeunes gens » (Rousseau, 1938 : 5). Sans
doute peut-on voir là un attrait, très relatif, face à la nouveauté
des trucages cinématographiques.
Pourtant, les trucages peuvent aider à une véritable narration,
quand ils gardent un lien avec la réalité humaine. Ainsi, dans
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Voyage dans le ciel, les trucages sont amenés de façon très diffé-
rente. Ils proposent un voyage d’une planète à l’autre, comme autant
d’éclaira­ges sur les savoirs ou hypothèses scientifiques en cours.
Maquettes de planètes ou faux paysages, ils représentent les hypo-
thèses que se font les chercheurs alors sur la surface de celles-ci
ou sur leur composition. En s’éloignant d’un réalisme trop figé
d’images réelles, ils permettent de laisser place à une imagination
plus personnelle, terreau pour une appropriation des notions. Ce
type de narration, porté par les trucages, convient parfaitement à
l’astronomie ; domaine, où, souligne aujourd’hui le chercheur Pierre
Léna, la réalité a sou­vent dépassé ce que l’imagination avait conçu
(2009 : 229-242) : la fiction permet ici d’explorer l’au-delà et d’envi-
sager des hypothèses, des mondes possibles.
Malgré une volonté de narration initiale, sensible par le présent
descriptif, par le recours au registre imagé, par les complications
progressives qui surgissent dans nos habitudes à considérer le
monde qui nous entoure, la mise en intrigue se fait difficilement
dans La Quatrième Dimension : le spectateur est très vite perdu
au sein d’un flot de paroles et d’images continues qui sont là pour
illustrer et démontrer une suite de faits et d’exemples basés sur
diverses hypothèses mathématiques. Les images ont pour simple
rôle le rattachement de notions abstraites au langage de la percep-
tion visuelle. Et, au final, ce film se cantonne à une vulgarisation
scientifique qui tend à communiquer des informations spécialisées,
desquelles le spectateur se sent très vite étranger : l’explication
linéaire a pris le pas sur toute intrigue. Le ton très monocorde, avec
un débit qui ne laisse pas de place à la réflexion, amplifie cette
impression. Quelle est la motivation du chercheur ? Qu’apporte
cette notion de quatrième dimension à la science ? Ici l’absence de
toute référence historique, humaine, s’appuyant sur les connais-
sances communes à l’époque, n’aide pas le spectateur à s’identifier
au problème, et donc à s’impliquer. Voyage dans le ciel va contri-
buer au contraire à la rencontre entre le public de l’Exposition et
l’astronomie. Le commentaire, bien que veilli dans la forme, laisse
le temps de la réflexion, la possibilité aux idées de vagabonder et
aux mots, simples, ou définis pas à pas, de s’inscrire dans une meil­
leure compréhension. Plus que de simples connaissances en astro-
nomie, c’est l’histoire de la quête du chercheur qui est ici sym­
bolisée, au sein des hypothèses scientifiques du moment. Une
poésie se dégage des images et du rythme du montage, et soutient
l’attention.
Dans le film de vulgarisation de biologie, où l’objet de la recherche
est vivant, la mise en récit va se présenter d’une manière toute
différente.

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L’Hippocampe ou la narration en biologie

La narration ne suit pas ici le cheminement de la pensée du cher­


cheur, mais la vie de l’animal, par éclairages ponctuels, et est guidée
par l’intrigue que constitue sa survie dans son milieu naturel.
Langage cinématographique, poésie et anthropomorphisme sont
convoqués pour capter et développer l’attention.
Cette approche contribue au succès du film L’Hippocampe 7
auprès du public, succès attesté dans les salles cinématographiques
dès mai 1935. L’intérêt du spectateur est éveillé par l’introduction
progressive et poétique dans un monde nouveau. Sélectionné pour
son « élégance » et sa forme particulière, l’hippocampe est la
véritable « vedette » du film. « Acteur » parmi sa communauté, il
se prête à différentes actions ; se déplace, rencontre, se reproduit,
naît, grandit… L’animal évolue, se transforme au gré des rencontres,
s’adapte à diverses situations : il existe réellement, indépendamment
de son observateur, et c’est cette vie qui constitue un véritable
champ dramatique en soi, porteuse de récits. À l’intérieur même
de cette matière scientifique, se jouent en effet de réelles histoires.
Objets d’études scientifiques, les hippocampes, par leurs différentes
réactions sont acteurs de leur propre survie dans le milieu naturel.
Les conditions nécessaires à leur existence sont ici au cœur de
l’histoire, au-delà de toute intention psychologique.
Afin de mettre en fiction ses observations, Painlevé scénarise
le contenu du film en différentes étapes, correspondant aux actions
observées, telles la locomotion, la reproduction, l’alimentation, etc.
Ces étapes ne sont pas forcément chronologiques et continues,
mais amenées comme autant d’études, systématiques et ponc­
tuelles sur le comportement animal. Pour maintenir l’intérêt du
public, plutôt que de forcer les animaux à jouer la comédie, à tuer
ou se faire tuer, Painlevé suit leur évolution, répond aux questions
qui nous viennent naturellement, sans nous assommer de con­
naissances inutiles. Les informations essentielles viennent en temps
voulu, comme dans Voyage dans le ciel. Mais il nous offre aussi
des gros plans et des vues de micro-cinématographie, telles celles
de la formation du bébé hippocampe, capables de réveiller une
grande émotion : l’intérêt pour cette vie aquatique se développe
naturellement.
En tirant du contenu scientifique la substance et la dramaturgie
de ses histoires, Jean Painlevé fait évoluer les limites entre les gen­
res : documentaire/fiction, science/imaginaire. Il joue avec les
codes admis qui, selon Geneviève Jacquinot, imposent à l’éducatif
d’être ennuyeux et au fictionnel d’être distrayant (Jacquinot, 1977),
et, ce faisant, réconcilie deux modes d’approche de la réalité. C’est
dans ce nouvel espace de création, entre science et fiction8, qu’il
désire établir un lien entre le grand public et la science en donnant
toute sa place au plaisir de la connaissance.
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Qu’ils tentent de décrire la recherche telle qu’elle se fait, ou
qu’ils mettent en scène le réel étudié par le chercheur, comme
L’Hippocampe, les films de vulgarisation scientifiques offrent l’image
d’une science attrayante et vivante. Grâce à ces films de vulgarisation,
entre autres, le public de l’Exposition va plébisciter le cinéma
scientifique. Une réelle rencontre a lieu dès l’ouverture de la salle
du Palais, fin août 1937 : « Quelques jours après son ouverture,
cette salle de deux cents places recevait une telle affluence qu’il
fallut fermer les portes avant le début de chaque séance et de nom­
breux visiteurs ne purent y pénétrer, bien qu’entre chaque projection
la salle fût évacuée. » (Bilan de la section de cinéma9, non daté.)
Mais il est nécessaire de mettre en perspective la nature et les
effets de la narration appliquée à ces films.

M I SE E N PE R SPEC T I V E

L’analyse de ces films nous montre une op-


position, au sein même de l’Exposition, entre deux façons de dif-
fuser la science, et donnant sa place, ou non, à la narration et la
fiction. Quelles en sont les caractéristiques et en quoi cela est-il
annoncia­teur d’une problématique plus large de la communication
des sciences au public ? Enfin, quelles pistes de réflexion et de
recherches l’exposition peut-elle apporter aujourd’hui ?

Le récit comme élément de médiation scientifique

Le film, à travers le récit d’une démarche de recherche ou d’une


découverte, est à même de faire ressortir l’intrigue, la tension
dramatique qui va interpeller et intéresser le spectateur. Mais au-
delà de la narration autour du travail du scientifique, Denis Guedj
(Guedj, 1994) va aujourd’hui plus loin en posant la similitude entre
l’acte de chercher et la mise en fiction. Il propose de se tourner
dès le départ, non pas vers le public, mais vers le sujet à étudier ;
de se considérer, non pas transmetteur fidèle d’une information,
mais enquêteur d’un sujet en mouvement. Ce faisant, le statut de
l’objet « contenu à vulgariser » devient « sujet possible d’un récit ».
Ce qui est transmis n’est plus une science détenant une vérité qui
s’oppose à la fiction, mais le lien secret qui relie la science telle
qu’elle se fait et la fiction telle qu’elle se dramatise. Les fictions
scientifiques, précise Guedj, proposent d’acquérir la confiance du
spectateur, non par la simple exhibition de documents, mais par
un travail de dramatisation, par la mise en œuvre d’une stratégie
de récit, et par la mise à contribution de toutes les ressources
cinémato­graphiques. Les scènes peuvent être ainsi conçues comme
des dispositifs d’expériences ; ce qui est le propre des fictions scien­
tifiques, par rapport aux autres fictions. L’invention de dispositifs
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doit faire émerger une dramatisation inhérente aux sciences, que
l’on ne connaît pas en amont, mais que l’étude de la nature nous
révèle. En cela, la mise en fiction est similaire à un travail de recherche
du scientifique en laboratoire : lui aussi invente des dispositifs
pour interroger son objet d’étude.
De même que dans les années 1930, Guedj remet en cause le
rôle du médiateur et du fossé supposé justifiant la vulgarisation.
Le réalisateur ne doit pas se poser en simple vulgarisateur qui
exhibe des documents de la recherche comme garants de l’au­
thenticité du message à faire passer. Loin de prises de vues dues
au hasard, il peut opérer un choix éclairé par une parfaite con­
naissance du sujet, recréer les conditions de scènes préalablement
observées, oser élaborer un scénario où la nature est la vedette
principale. Le réalisateur peut élargir la notion de documentaire
scientifique pour aller vers ce que Denis Guedj nomme « fiction
scientifique » ou « fiction vraie » : « Fictions, parce que les auteurs,
ici, ne sont pas des “rapporteurs” mais des “créateurs”, créateurs
d’histoires qu’ils mettent en scène. Vraies, parce que chaque fois
qu’il sera fait réfé­rence à un résultat, à une expérience, à une situa­
tion précise, etc., cela se fait en conformité avec la vérité scientifique.
Mais vraies également parce qu’elles tirent leur substance et
leur dramaturgie du contenu scientifique lui-même. » (Guedj,
1994 : 219.)
Cette définition10, qui associe la fiction à la création d’histoires,
a le mérite de ne pas opposer les notions d’imaginaire et de réalité,
de faux et de vrai. Elle souligne par là que toute représentation
humaine de la réalité extérieure n’est pas séparable d’une part
d’interprétation et donc d’imagination.
Dans le contexte de l’Exposition de 1937, deux types de cinéma
scientifique semblent alors s’opposer. L’un, tel un cours pédago-
gique, se voit transmetteur d’un contenu à vulgariser et à rendre
intéressant et restitue le message d’une science figée à un instant
donné, déten­trice de vérité. Cette science, plus proche de celle
que l’on enseigne, est bien représentée par le film La Quatrième
Dimension, dont le scénario a d’ailleurs été écrit par le professeur
Sainte-Laguë.
À l’inverse, sans chercher à simplement transmettre une infor­
mation, mais en créant une histoire, un personnage non humain,
le réalisateur peut susciter une interaction, éveiller l’intérêt du
spectateur et donc favoriser sa compréhension. S’il se tourne dès
le départ vers le sujet qu’il étudie, le réalisateur se place en tant
qu’enquêteur de science en mouvement, sujet possible d’un récit
propre à susciter l’intérêt. Les films comme L’Hippocampe et Voyage
dans le ciel se rattachent plutôt à cette démarche.
Au-delà de la richesse des sciences de la nature à proposer des
récits, la narration au sein du film de diffusion permet aussi de
rendre compte de la solidarité entre observation et interprétation
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en science, en mettant l’accent sur le nécessaire esprit critique vis-
à-vis de toute création d’image. De même que Paul Ricœur11 en
histoire, nous pensons donc que les modes explicatifs et les codes
narratifs, non seulement ne sont pas en concurrence, mais que
ces derniers, non confinés à l’événementiel, sont à même d’appor-
ter une note de lisibilité et de visibilité. À condition que la narra-
tion ne soit pas là pour combler les lacunes d’une argumentation,
dans un désir de convaincre et de plaire. Ainsi, en faisant des
acteurs non humains le sujet des films, en y introduisant une dra-
matisation inhérente à la démarche scientifique ou à la nature
observée, l’on introduit la dimension de fiction scientifique, d’ex-
pression émotionnelle de la réalité. D’autres types de procédés
narratifs existent, mettant en jeu le scientifique au sein d’une in-
trigue, ou proposant par exemple une mise en situation d’une
notion comme enjeu capable de résoudre des problèmes, ou en-
core rétablissant une mise en scène expérimentale.
L’empressement à constituer un programme attractif au sein de
la salle de cinéma, ceci trois mois avant la fin de l’Exposition, et
le recours aux films présentant une narration peuvent amener
deux réflexions. D’une part les films comme L’Hippocampe ou
Voyage dans le ciel semblaient nécessaires pour rallier à la cause
scientifique, le premier ayant déjà alors connu depuis 1935 un
succès auprès du public des salles cinématographiques. D’autre
part une médiation qui use de procédés narratifs, rend compte
de l’imaginaire ou du contexte qui accompagne la recherche,
semble rencontrer un meilleur accueil chez le public de l’Expo­
sition que celle qui se limite à vouloir transmettre un contenu
scientifique sous la forme de cours à rendre intéressant. Les prix
attribués en témoignent. Au concours du meilleur film français
scientifique, Voyage dans le ciel de Jean Painlevé et Phagocytose
du docteur Comandon arrivent ex æquo. Plébiscités par le public
de l’Exposition, ces deux films ont en commun l’imaginaire qu’offre
l’étude scientifique de la nature. Ce ne sont pas uniquement les
films qui sont ici récompensés, mais « l’ensemble de l’œuvre de
ces deux hommes qui font honneur non seulement au cinéma,
mais à la Science de notre pays » (Labbé, 1938 : 63), écrira Ed-
mond Labbé. Les films d’éducation sanitaire des années 1920 laissent
place aux films sur la recherche et les découvertes, et trans­posent
dans le même temps une mise en récit qui y a fait ses preuves.
Jean Benoit-Lévy se réoriente quant à lui vers des films de fiction12,
et La Mort du cygne, qui raconte la vie d’un petit rat de l’opéra13,
obtiendra le grand prix de la section du film français de l’Ex­
position.
Les années 1930, années riches et mouvementées, tenteront
donc une diffusion des sciences par le film qui interroge le côté
humain, vivant, de la science, en la mettant en scène par le récit
et la fiction. Cette approche historique peut aujourd’hui offrir
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des pistes de réflexion et de recherche sur le lien entre science,
cinéma et diffusion.

Pistes de réflexion sur les relations entre cinéma,


science et diffusion

Derrière l’analyse lexicale du terme vulgarisation14 telle que la


propose Yves Jeanneret par opposition au terme popularisation
toujours utilisé en Angleterre se cache une problématique de la
communication des sciences au public, dans laquelle notre sujet
entre de plain-pied. Ce terme, dit-il, postule l’existence d’un fossé
entre science et public, et justifie ainsi la nécessité d’un médiateur
pour combler ce fossé. Or justement, l’Exposition de 1937 propose
une plus grande implication du scientifique dans la diffusion de
la science. Ce faisant, les questionnements, les doutes mais aussi
le contexte historique où sont inscrits le savoir ou la découverte
trouvent leur place légitime. Si la science est plébiscitée à l’Expo-
sition, n’est-ce pas justement grâce à cette prise en compte du
scientifique en tant qu’être humain, sensible dans les films où se
conjuguent curiosité, plaisir et connaissance ? Ces films intègrent
ainsi une vulgarisation qui cherche à dire le sens de la science au
sein du monde et de ses semblables, ce qui, rappelle Baudouin
Jurdant, devrait être son but (Jurdant, 1999 : 175).
Le lien entre science, fiction et narration reste à développer
dans ce sens. Certains films présentés aujourd’hui à la Cité des
sciences et de l’industrie de La Villette savent très bien mettre les
nouvelles techniques – image de synthèse, relief – au service de
la narration d’une aventure humaine et scientifique. La science
possède les capacités à renouveler l’imaginaire en déplaçant les
limites du visible, en proposant des récits scientifiques, ouverture
sur la nature ou encore fresques de l’aventure humaine15. Aujour­
d’hui, alors que la connaissance se construit dans une large mesure
par les images, elle reste source inépuisable de fictions, comme le
dit Jean-Claude Carrière, scénariste : « […] il n’est pas sûr que de-
main nous puissions, nous, trouver des histoires qui vont renou-
veler notre expression… Mais il est certain que la science, demain,
nous apportera des images dont nous n’avons pas encore l’idée »
(Carrière, 1994 : 216).
Mais si le film de science, au cœur même de sa structure, gagne
par une mise en récit, celle-ci peut aussi se faire autour de la
production de l’image de science elle-même, et constituer un
espace de rencontre entre la science et les techniques d’investigation
utilisées. Là encore, l’Exposition de 1937 peut nous inspirer. En
effet, la fabrication d’une image de science y était présentée et
mise en scène autour du travail du chercheur.
Par comparaison nous pouvons nous interroger sur le manque
– au sein de l’espace Image à la Cité des sciences de La Villette –
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d’informations concernant la fabrication des images de science et
des instruments utilisés dans ce but. Les films présentant divers
ralentis et accélérés, de croissance de l’herbe, d’une cristallisation,
d’un vol de pigeon… auraient gagné en intérêt par la présentation
de leurs méthodes d’obtention. Il en est de même pour le film
Le Relief de l’invisible qui offre des plongées impressionnantes
dans l’infiniment petit, au sein de différents objets. Si un making of
donne en aparté quelques informations sur la fabrication du film,
celles-ci sont trop succinctes, ne contextualisent pas suffisam­ment
les images produites, et surtout ne renseignent pas sur l’apport
de ces images à la recherche, de laquelle elles sont complètement
déconnectées. Un peu plus loin, un très beau montage de films
scientifiques nous offre des vues de plantes en accéléré, de cristaux,
de balles qui explosent au ralenti… Là encore, bien que l’espace
soit intitulé Images de science, décryptage, aucune information
sur le contexte de recherche, la pratique du chercheur, l’instrument
utilisé. « Regardez cette image… » nous dit-on simplement, comme
si celle-ci existait indépendamment de tout choix humain, et
n’importait que pour son esthétisme. Pourtant l’obtention d’images
de l’infiniment petit à l’infiniment grand, le cadrage, la mise au
point, le montage, tout comme l’interprétation qui peut être faite
de ces images sont autant de choix décisifs qui prouvent que toute
image porte les traces de sa construction par l’homme16. Il est
donc d’autant plus important de révéler au public des musées les
coulisses de la mise en forme des images utilisées en science, de
mettre la fabrication de l’image elle-même en récit. Ceci pour lui
donner le moyen de leur interprétation.
Le film peut aussi présenter le scientifique dans sa démarche
et retranscrire toutes les étapes clés, les impasses, doutes, pro­gres­
sions et échanges entre spécialistes, qui jalonnent la découverte.
La narration, sous forme d’enquête, mobilise ainsi directement les
acteurs de la recherche, les plus à même à communiquer l’intérêt
pour leur objet d’étude.

C O N C L U S I O N

L a diffusion scientifique interroge aujourd’hui


la place que peuvent jouer la narration et la fiction au sein notam-
ment des créations audiovisuelles et muséographiques. L’histoire
nous rappelle que le film est convoqué en 1937 au Palais de la
découverte au sein d’une véritable stratégie d’exposition afin d’in-
téresser le public à la science. Il y est un instrument de médiation
créateur de lien entre la science et le public, grâce notamment à
la mise en récit et en fiction tentée au sein des films de vulgari-
sation scientifique, à la suite des films d’éducation sanitaire dans
les années 1920. Les spécificités du langage cinématographique
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sont requises dans le but d’interagir avec le spectateur : trucages,
identification au chercheur ou à l’objet d’études, mise en situation.
Autant de possibilités qui ressortent pour raconter une histoire de
science, illustrant l’idée qu’un « lien secret relie la science telle qu’elle
se fait et la fiction telle qu’elle se dramatise » (Bastide et al. : 1987).
Mais deux conceptions de la science à diffuser se révèlent : à
une science que Langevin qualifie de « morte », figée dans ses
certitudes et détentrice de vérités, s’oppose une science « vivante »
telle qu’elle se fait, avec ses doutes, ses incertitudes, mais aussi son
imaginaire, son histoire, à la recherche de connaissances nouvelles.
N’est-ce pas là l’enjeu qui se joue encore aujourd’hui dans la dif-
fusion scientifique ? A la lumière du passé, ne peut-on pas envi­sager
une diffusion qui place la découverte ou la technique dans son
histoire, réintègre la dimension humaine de la recherche, fait appel
à la curiosité et la passion, et implique son destinataire ? Autant
de mises en récits possibles, qui permettent au spectateur de
s’identifier, partager l’enquête et en comprendre les enjeux, tout
en créant sens et unité, et convoquent esprit critique et méthode
scientifique. Ces mises en récit restent encore aujourd’hui à déve-
lopper, pour aider à une véritable « mise en culture » de la science.
F. R.
Centre François-Viète d’histoire et d’épistémologie des sciences
et des techniques (ea 1161) – pahst

Manuscrit reçu le : 3 novembre 2010.


Version révisée, reçue le : 21 juin 2011.
Article accepté pour publication, le : 5 juillet 2011.

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NOTES pour caractériser le cinéma de Jean
Rouch.
1. La classe 1 des découvertes scienti- 9. Aussi sur les deux millions et demi
fiques est présidée par Jean Perrin. de visiteurs que l’ensemble du Palais
Émile Borel et Paul Langevin en sont de la découverte va recevoir, 70 000
vice-présidents, et Sainte-Laguë, se- partageront, l’espace d’une séance,
crétaire. les intérêts, interrogations, promes­
2. Jean Painlevé, fils de Paul Painlevé, ses des scientifiques, via plus de
mathématicien et homme politique, 640 000 mètres de films projetés.
est scientifique, mais aussi cinéaste (Bilan de la section de ciné­ma, non
proche un temps de la mouvance daté.)
surréaliste. Il sera un fervent pro- 10. Il existe de nombreuses définitions
moteur du cinéma au service de la de la fiction, dont celle par exemple
science et réalisera, de 1925 à 1982, de Roger Odin, selon qui on est dans
près de 200 films, essentiellement la fiction quand on s’interdit de
de recherche, dont une quarantaine poser la question de la vérité (Odin,
destinée au public : L’Hippocampe 2000).
en 1935, reste le plus connu. 11. Paul Ricœur, rappelant que le lec-
3. Le propre du cinéma comme instru- teur du texte historique s’attend de
ment de recherche réside dans sa façon tacite à un « récit vrai » et non
capacité à mieux voir qu’avec l’œil ; à une fiction, conclut que ce pacte
de pouvoir enregistrer tous les phé- de lecture peut être tenu par l’écri-
nomènes, du plus lent au plus rapide, ture de l’histoire, mais jusqu’à un
à la limite du grossissement possible certain point. Il souligne la solida-
optiquement, en éclairage direct, rité entre interprétation et vérité en
réfléchi ou diffusé, lorsqu’il s’agit histoire, et rappelle que la preuve
d’ultramicroscopie. Il permet de faire documentaire relève dans ce do-
apparaître les composants très lents maine d’une logique probabiliste
ou très rapides d’un phénomène. liée au degré de fiabilité du témoi-
4. Sainte-Laguë utilise en effet depuis gnage (Ricœur, 2000 : 731-747).
1928 des films pour ses enseigne- 12. D’après la nouvelle de Paul Morand.
ments de géométrie au cnam. Ce 13. Jean Benoit-Lévy se réoriente aussi
en quoi il fait partie de cette géné- des films d’enseignement de la chi­
ration de précurseurs. rurgie et des « leçons » (Vignaux,
5. Deux autres films seront commandés 2007 : 116).
pour la section de mathématiques : 14. Voir à ce propos l’analyse d’Yves
De la similitude des longueurs et des Jeanneret (Jeanneret, 1994 : 11-20).
vitesses et Images mathématiques 15. Pour Paul Caro, le succès, aujour­d’hui,
de la lutte pour la vie. Ces films vont de certains films scientifiques à des-
être établis à partir de scénarios de tination du grand public, tient à ce
scientifiques : Sainte-Laguë pour le qu’ils abordent « des thèmes qui
premier, V. A. Kostitzin en collabora­ composent une sorte de récit my-
tion avec Vito Voltera pour le deu­xiè­me. thologique des origines de l’Homme
La réalisation est confiée à Achille ou de l’Univers, se substituant ainsi
Pierre Dufour. aux “Grand Récits” fondateurs, reli-
6. Film de 1935, noir et blanc, sonore, gieux ou historiques, pour composer
10 mn, produit par l’ics. Musique de une nouvelle fresque de l’aventure
Jean Yatove et Marceau van Hoore­ humaine » (Caro, 1986 : 66-73).
beeke. 16. Cette prise de conscience est d’au-
7. Réalisé par Jean Painlevé en 1935, le tant plus importante aujourd’hui qu’il
film a connu un grand succès public est difficile de faire la différence
à sa sortie en salle en mai 1935. entre une image virtuelle de nature
8. Expression du critique de cinéma scientifique, support d’interprétation
Jean-André Fieschi, en 1973, utilisée pour le chercheur, et une image de

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Vignaux (Valérie). 2007. Jean Benoit-Lévy
ou le corps comme utopie, une histoire
du cinéma éducateur dans l’entre-
deux-guerres en France. Paris : afrhc.

Filmographie

Derrien (Denis), Hazéra (Hélène) et al.


1988. Jean Painlevé au fil de ses films,
1re et 3e parties.

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Résumés

L e Palais de la découverte, inauguré en 1937


dans le cadre de l’Exposition internationale de Paris – Les Arts et
les Techniques dans la vie moderne –, a pour projet de diffuser et
valoriser la recherche scientifique en cours. Le cinéma est convo-
qué dans ce but. Ce texte propose, par l’analyse notamment de
films de vulgarisation scientifique présentés dans ce cadre, d’inter-
roger la place accordée à la narration et à la fiction dans ces films,
et de tenter d’en dégager les principales caractéristiques. C’est une
science « vivante », proche de celle faite en laboratoire, qu’il s’agit
de raconter au public. Deux types de médiations semblent alors
s’opposer, convoquant, ou non, le récit, et mettant plus ou moins
en valeur l’imaginaire qui accompagne la science. Le cinéma déve­
loppe d’ores et déjà ses capacités à créer un lien entre la science
et le public : ces mises en récit restent à développer aujourd’hui.
Titre : Le cinéma, ou comment raconter la science au Palais de
la découverte en 1937.
Mots-clés : Cinéma scientifique, mise en récit, Palais de la
découverte, Exposition de 1937, diffusion des sciences.

S ince it was launched during the Paris Inter-


national Exhibition « Arts and techniques in modern life » back in
1937, the « Palais de la découverte » has always striven to spread
and promote on-going scientific research. Cinema has helped and
served this purpose. Through the analysis of films dedicated to
science for the general public, this document investigates the place
given to narration and fiction in these films, and tries to under-
line their main characteristics. In the manner of science experi-
mented within the labs, this is a truly « living » science, that is being
brought to the public. Over that period, two approaches prevail
based on whether or not the focus is on narration and fiction, ele-
ments capable of calling upon the imaginary quality that goes to-
gether with science. Cinema has been building up its abilities to
create that connection between science and the public. Yet as today,
these types of narration are remain to be developed.
Title : Cinema or the way of narrating science at the Palais de
la découverte in 1937.
Key words : Scientific films, narration, Palais de la découverte,
1937 International Exposition, promoting sciences.

El Palais de la découverte inaugurado en 1937


durante la exposición internacional de Paris, denominada « Las
Artes y las técnicas en la vida moderna », tiene como objetivo
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difundir y valorizar las investigaciones científicas contemporáneas.
Y el cine forma parte de este proyecto. Este artículo propone,
mediante el análisis específico de unas películas de divulgación
científica presentadas en dicho contexto, examinar la importancia
de la narración y de la ficción en aquellas películas, e intentar des­
tacar sus principales características. Se trata de una ciencia « viva »,
cercana a la practicada en los laboratorios, y que va a ser contada
al público. Dos tipos de mediaciones parecen entonces oponerse,
incluyendo, o no, el relato, y poniendo de relieve lo imaginario que
acompaña la ciencia. De aquí en adelante el cine desarrolla sus
capacidades para crear un lazo entre la ciencia y el público : actual­
mente falta fomentar dichas narraciones..
Título : El cine, o cómo contar la ciencia en El Palais de la décou­
verte en 1937.
Claves : Películas de divulgación científica, narración, Palacio
del Descubrimiento, exposición internacional de 1937, difu­sión de
las ciencias.

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