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Les négociations aboutissent, en 1996, à la signature des accords de San Andres dont le
but était la reconnaissance des droits sociaux et culturels des peuples autochtones du
Chiapas.
Comme nous l’avons dit tantôt, le Chiapas est un État pauvre marqué par
l’analphabétisme, la dénutrition, la mortalité infantile, la carence d’équipements
domestiques (eau, électricité, etc.). Il n’a bénéficié qu’avec retard des acquis agraires de
la révolution mexicaine, en raison d’une oligarchie conservatrice surnommée la «
famille chiapanèque ». Jusqu’aux années 1970, dans les grandes propriétés, ils
existaient des formes d’exploitation de la main d’œuvre indigène proches du
féodalisme.
De ce fait, les luttes paysannes s’intensifient au début des années 1970. Les associations
paysannes vont recevoir l’aide de militants d’extrême gauches réfugiés dans la région
pour fuir les forces de sécurité
Ainsi, dans les années 1980, les élites du Chiapas utilisent les appareils d’État locaux et
nationaux pour intimider et assassiner des militants paysans. Cette pratique poussa
certains indigènes à vouloir se lever ; impliquant ainsi une lutte armée.
Toutes ces choses poussèrent le Commandant General du EZLN à faire une déclaration
à la Selva Lacandona et appelle aux armes : c’est le début de la période d’activité du
mouvement zapatiste.
Enfin, retenez que même si elle ne mène plus des actions très spectaculaires, la
révolution zapatiste reste bel et bien d’actualité. D’ailleurs, après les déceptions
émanant des accords de San Andrès, le mouvement a entrepris des efforts
d’autogestion. Ces stratégies aboutissent à la création en 2002 des fameux Caracoles
(escargots en espagnol). Il s’agit de municipalités entièrement gérées par les élites du
mouvement zapatiste. Les caracoles constituent ainsi des lieux offrant aux
communautés indigènes l’accès à des services sociaux de base : hôpitaux, écoles (en
langue autochtone), magasins pour les artisans, etc.
Ainsi donc, la révolution zapatiste aura joué un grand rôle dans l’évolution de l’histoire
politique et culturelle du Mexique. Moins révolutionnaire que d’antan, l’idéologie
zapatiste séduit aujourd’hui des milliers de personnes du Mexique et d’ailleurs.
Lutte contre le néolibéralisme : Connu lors du soulèvement du 1er janvier 1994, jour
de l’entrée du Mexique dans le protocole de l’ALENA, le mouvement zapatiste s’est dès
le début opposé au système capitaliste et refuser des politiques néolibérales.
Gouverner en obéissant : Les zapatistes croient dur comme fer au slogan Mandar «
obedeciendo » qui stipule que ceux qui gouvernent doivent le faire en obéissant au
peuple. De ce fait, ils ne doivent en aucun cas chercher à prendre le pouvoir, ni à se
laisser tromper par celui-ci.
Toujours de manière affinitaire, des communes s’associent pour former une zone
totalement autonome. Les communes envoient des délégués à l’assemblée de zone
qui, ne se réunissant que pendant quelques jours tous les deux ou trois mois,
désignent un conseil de bon gouvernement permanent. Il existe désormais douze
zones (régions appelées caracoles - escargots) contre cinq à l’origine.
Pour chacune des assemblées, les mandats sont de courte durée, deux ou trois
ans, non renouvelables. La rotation des charges empêche la professionnalisation,
tout le monde pouvant, devant, participer à la vie politique et à la production du droit.
Un va-et-vient constant s’établit entre le conseil de bon gouvernement, l’assemblée
générale de zone, les communes et villages sur un projet de décision. Le processus
de ratification peut prendre du temps. En l’absence de consensus, la décision est
mise au vote, la position minoritaire n’est pas écartée mais conservée pour,
éventuellement, compléter ou remplacer le choix majoritaire qui se révélerait
inadéquat. Tous les délégués doivent strictement respecter leur mandat et consulter
la base s’ils ne s’estiment pas mandatés sur la question soulevée. Ils sont
révocables et non rémunérés, la communauté mandante prenant en charge les
obligations familiales et professionnelles du délégué pendant l’exercice de son
mandat. Une fois la décision prise, les instances décisionnelles appliquent le principe
« gouverner en obéissant » (mandar obedeciendo). C’est-à-dire que l’organe qui
commande, y compris le bon gouvernement régional, ne fait qu’obéir au mandat
donné par les assemblées, lesquelles peuvent le rappeler à l’ordre à tout moment,
même une assemblée de village.
Ainsi, peut-on parler d’une société sans État avec une gouvernance néanmoins
solide et structurée. D’une démocratie directe complète où le législatif et l’exécutif
sont fondus dans les assemblées des autonomies et dans le conseil de bon
gouvernement, qui n’est justement pas un gouvernement mais un
autogouvernement. Sans constitution écrite, ni corpus de lois, mais plutôt avec un
droit coutumier en perpétuelle adaptation, les zapatistes avancent vers la meilleure
manière de faire vivre l’autonomie (1).