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Introduction

1. En 1881 les troupes françaises occupent la province de Tunis, mettant fin à


trois siècles de tutelle ottomane sur cette partie du Maghreb. Husayn meurt le 27 juin
1887, soit six ans après la conquête coloniale de la Tunisie par la France. (p 9)
2. L'auteur exprime son intention de ne pas ignorer la période coloniale ni les
effets traumatiques et violents qui en découlent encore aujourd'hui. L'ouvrage dont il est
question se veut un plaidoyer pour une histoire croisée du Maghreb moderne et
contemporain. Cette approche historique ne se limiterait pas au point de vue des
administrateurs coloniaux européens, mais engloberait également les perspectives des
sujets et des dignitaires maghrébins. L'auteur souhaite mettre en lumière les intérêts et
les attentes de ces individus, qui se reconnaissaient encore dans l'empire ottoman
jusqu'à la chute finale des sultans d'Istanbul au début des années 1920. En d'autres
termes, l'auteur plaide pour une narration historique qui prend en compte les multiples
facettes et les voix diverses de cette époque, au-delà de la seule perspective coloniale
européenne, en mettant l'accent sur l'histoire partagée du Maghreb et en donnant voix
aux acteurs locaux et à leur complexité dans ce contexte.
3. Dans son approche, l'auteur suggère que le nord de l'Afrique ne devrait pas
être simplement considéré comme la périphérie d'un empire, qu'il soit colonial ou
ottoman. Au contraire, cette région est présentée comme un lieu riche et dynamique où
se croisent et se confrontent différentes ambitions impérialistes.
4. L'auteur met en avant l'importance des migrants maghrébins qui se sont
installés en Europe au cours du dernier siècle. Contrairement à une vision qui les
considérerait comme des acteurs secondaires de l'histoire européenne, l'auteur souligne
qu'ils ont joué un rôle significatif non seulement en raison de la colonisation, mais aussi
en lien avec les histoires anciennes de leurs propres sociétés. Les migrants maghrébins
ont leur propre histoire, parfois partagée avec l'Europe, et ils ont des motivations et des
actions qui s'inscrivent dans une histoire coloniale, mais également au-delà de celle-ci.
L'auteur suggère également que les périodes coloniales ont été des moments
cruciaux dans l'accès à la modernité. Cela pourrait signifier que, pour les sociétés
maghrébines, la période coloniale a été un point tournant où des changements
significatifs dans la société, l'économie et la culture ont eu lieu, souvent dans le contexte
de l'influence européenne. Ces transformations ont influencé la trajectoire des migrants
maghrébins et ont contribué à façonner leur histoire et leur expérience, à la fois en
relation avec l'Europe et en dehors du cadre colonial.
5. Cet ouvrage retrace le parcours et les actions d’un groupe de tunisiens exilés
autour de la figure de Husayn Ibn Abdallah, mais les chapitres qui suivent ne sont pas
seulement consacré à l’histoire de la Tunisie. Ils visent aussi à replacer les notables et les
exilés tunisiens au sein de l’Empire /Ottoman, en Méditerranéen et au Maghreb.
6. Le terme Maghreb émerge au début de la période médiévale dans les ouvrages
géographique du califat abbasside. La jazirat Al-Maghrib (l’île du Maghreb) désigne un
ensemble de terres quai insulaires situées l’Atlantique et les deux mers : la mer
Méditerranée et une mer de sable : le Sahara.
7. Après le reflux de l’Empire Ottoman, les autorités coloniales françaises,
espagnoles et italiennes préfèrent l’expression « Afrique du Nord ». (p 17)
8. Ce livre a surtout pour ambition de réinterpréter, dans le temps, l'expansion
coloniale française et européenne dans une partie du Maghreb à la lumière d'une
culture provinciale ottomane.
9. L'auteur indique que le texte explore des aspects peu connus ou inattendus de
la transition impériale, passant de l'Empire ottoman à l'ère coloniale. Cette exploration
est effectuée à travers l'étude de cas d'un individu spécifique : Husayn Ibn Abdallah, qui
était à la fois un esclave affranchi et un ancien général. L'auteur se concentre sur ce
personnage pour examiner les changements et les défis qui ont émergé pendant cette
période de transition impériale, offrant ainsi un aperçu de la manière dont les individus
ont été affectés par les changements politiques et sociaux qui ont eu lieu lors du passage
de l'empire ottoman à la période coloniale.
10. Nous avons rencontré Husayn pour la première fois lors du travail de recherche
mené pour une thèse sur les mamelouks au service des gouverneurs de la province
ottomane de Tunis entre le xvI et la fin du xixe siècle. ( p 21 définition de mamelouk à la
même page). Comme d'autres mamelouks, il fut acheté sur les marchés d'Anatolie,
accueilli et éduqué à Tunis pour y être promu administrateur des beys.
11. Ce qui est en revanche remarquable chez Husayn, ce sont les conditions de son
décès et les épisodes qui s'ensuivirent. Husayn n'est mort ni dans la Tunisie colonisée ni
dans d'autres parties de l'empire encore sous tutelle ottomane. Il est décédé six ans
après l'établissement du protectorat français sur la Tunisie, en 1887, à Florence, en
Toscane. (p 37)
12. Ce livre se distingue, cependant, des autres biographies « micro-globales » en ce
qu'il ne s'attache pas seulement à reconstituer la vie de Husayn, qui ne constitue que les
trois premiers chapitres. Tout l'enjeu consiste dans les trois derniers chapitres à se situer
après sa mort, pour s'intéresser aux conflits et aux revendications autour de sa
succession, de 1887 jusqu'aux années 1920. Le cas Husayn ouvre aussi la voie à
l'exploration, à partir de leurs propres écrits, d'autres vies d'esclaves et d'affranchis au
Maghreb - d'origine caucasienne, comme Husayn, d'origine latine jusqu'en 1810, ou
hommes et femmes d'Afrique de l'Ouest asservis dans la même région jusque dans
l'entre-deux-guerres, élargissant ainsi la compréhension des dynamiques sociales et
culturelles de cette époque au Maghreb. (p 23)
13. Le premier chapitre retrace le parcours de Husayn de sa naissance au sud de la
Russie à son enfance d'esclave à Tunis au cours des années 1820, jusqu'à son installation
en Toscane à partir des années 1870 au fil de ses nombreux voyages à Istanbul, en
Europe, aux États-Unis en 1867 et dans le Caucase occupé par les Russes en 1869.
L'argument majeur de ce chapitre est de montrer qu'aucune des principales étapes de la
vie de Husayn ne peut être interprétée au seul prisme du colonialisme ou d'une
archéologie des nationalismes maghrébins naissants. (p 24)
14. Ainsi, a contrario de récits dominants, l'abolition de l'esclavage dans la région
n'est pas déterminée par les seules interventions impérialistes européennes dans le
monde musulman, ni même par un réformisme qui serait spécifique aux élites
tunisiennes.
Cette question de l'esclavage est aussi conditionnée par les transformations du
service d'État, et par l'émergence du fonctionnariat, qui affecte alors d'autres
administrations impériales dans le monde. Lui-même esclave affranchi, Husayn
intervient dans ces débats en faveur de l'abolition pour mettre en valeur son rôle de
serviteur d'État et non plus de serviteur personnel des gouverneurs de Tunis (p 24)
15. L'auteur examine le patrimoine de Husayn, composé de propriétés foncières, de
biens meubles et de crédits, dans le contexte colonial. Les sujets maghrébins sont perçus
comme des individus floués, privés de leurs biens et réduits à une misère matérielle
extrême par les colons. Cependant, l'auteur souligne que cette histoire de dépossession
ne doit pas faire oublier les transformations antérieures qui ont affecté la colonisation
foncière d'une grande partie du Maghreb.
En étudiant le patrimoine de Husayn, l'auteur révèle l'existence d'une histoire
complexe de recompositions majeures entre propriété publique et propriété privée. Ces
recompositions ne se limitent pas à la période coloniale, mais précèdent cette époque et
persistent même après l'ère coloniale, traversant ainsi les temps coloniaux et
postcoloniaux. Cette analyse met en lumière le caractère transimpérial des débats sur la
propriété et la dépossession, montrant que les transformations foncières étaient le
résultat de dynamiques complexes impliquant à la fois les systèmes impériaux ottoman
et colonial, ainsi que les changements sociaux et économiques internes aux sociétés
maghrébines.
16. Élargissant ces perspectives transimpériales, le troisième chapitre replace le
parcours de Husayn, sa fortune et les litiges autour de sa succession à la suite de deux
autres grandes affaires de patrimoine dans lesquelles il a été impliqué. Ces affaires
concernent deux dignitaires tunisiens exilés en Europe dans la seconde moitié du xix°
siècle. (p 25)
17. Les trois derniers chapitres du livre examinent les conflits autour de la succession
Husayn pour évaluer la capacité d'action de sujets colonisés musulmans et juifs
impliqués dans ces litiges.
18. Le quatrième chapitre est consacré aux conflits diplomatiques entre la France et
l'Empire ottoman et, dans une moindre mesure, avec l'Italie, autour de la succession
Husayn en 1887-1888.
19. Le cinquième chapitre, ce sont les revendications des quatre groupes de
particuliers intéressés à la succession Husayn qui sont tour à tour auscultées. (p 26)
20. L'ultime chapitre, sous forme d'épilogue, est consacré aux manières
dont cette succession fut résolue. (p 27)
21. Armé de ces savoirs, Husayn acquiert une position d'autorité parmi les savants et
les auteurs de son temps. Comme ses prédécesseurs mamelouks qui se targuaient de
leur bibliophilie, Husayn patronne des savants musulmans (les oulémas). Il fait l'objet de
poésies lau-datrices36. Il se pique de curiosité littéraire et se situe au carrefour de
multiples emprunts et échanges d'ouvrages.
22. Les historiens tunisiens ont fait de Husavn et de ses proches les précurseurs
d'une nation tunisienne. avec un agenda en tête, un amour de la patrie (hubb al-watan)
et une volonté partagée de réformer un pays mal en point.
Chapitre 1 : Husayn, l’homme des réformes ottomanes

1. L'expansion européenne sur la rive sud de la Méditerranée et, en particulier,


les conquêtes coloniales françaises au Maghreb à compter de la prise d'Alger
en 1830 ont sans aucun doute affecté la trajectoire de Husayn.
2. La vie de Husayn et de nombreux événements en Tunisie et au Maghreb au
XIXe siècle ne peut pas être entièrement expliquée en se concentrant
uniquement sur l'influence du colonialisme européen.
3. Il y a des réformes militaires et administratives mises en place dans l'Empire
ottoman au XIXe siècle, notamment la création d'une nouvelle armée
régulière de conscription en remplacement des anciennes troupes de
janissaires. Ces réformes coûteuses ont conduit à la réorganisation de la
collecte des impôts et à des changements dans l'administration. Les sultans
ont ordonné à leurs gouverneurs d'appliquer ces réformes dans les provinces
de Tunis et de Tripoli entre les années 1830 et 1860. Dans le cadre de ces
réformes et sous l'influence diplomatique européenne, certaines sociétés
islamiques ont commencé à débattre de l'abolition de l'esclavage et de
l'interdiction de la traite des esclaves. Dans les années 1840, les beys de Tunis
ont promulgué la fin de la traite et la possession d'esclaves africains. Pendant
cette période de transformation, des hommes influents, tels que Husayn, ont
réfléchi à la manière de mettre fin à l'esclavage, tandis que les réformes
militaires et administratives transformaient en profondeur les structures de
pouvoir à Tunis et dans l'Empire ottoman.
4. L'éloignement de Tunis l'amène enfin à fonder un nouveau type de foyer en
Toscane : dans le port de Livourne, il finance l'éducation de deux petites filles.
Au soir de sa vie, Husayn se retrouve à la marge des empires - ni en domaine
ottoman ni en domaine colonial français.
5. Husayn est né loin de la Méditerranée, aux marges de l'Empire ottoman, dans
une région au sud de la Russie appelée Circassie.
6. Comme bien d'autres garçons et filles circassiens ou tcherkesses, au moins
depuis le XVI siècle, Husayn est l'objet d'un véritable trafic humain : ses
parents se sont résignés à le vendre, ou bien l'enfant a été arraché à son foyer
durant les années 1820. Husayn n'a lui-même aucun souvenir précis de cette
séparation initiale.
7. a fin progressive de l'esclavage à Tunis et dans d'autres parties de l'Empire
ottoman est donc liée à la politique abolitionniste britannique.
8. À Tunis, la fin de la traite de jeunes hommes grecs, géorgiens et circassiens
entre les années 1830 et 1850 est aussi liée aux transformations profondes
de l'armée et de l'administration locales.
9. Dès 1831 les gouverneurs de la Tunisie ottomane mettent en place à leur tour
une armée régulière, composée de plus en plus d'hommes libres nés dans la
province de Tunis. En conséquence, ils ont moins besoin de s'appuyer sur des
esclaves ou des serviteurs mamelouks. De même, à la fin des années 1850,
lorsque ces gouverneurs s'engagent à créer de nouveaux tribunaux et des
ministères, ils puisent aussi parmi leurs sujets libres et éduqués.
10. Alors qu'ils sont peu à peu entourés, voire remplacés, par des sujets libres, les
mamelouks contribuent à façonner de nouvelles perceptions de l'esclavage.
Ils ambitionnent d'être reconnus comme des serviteurs de l'État.
11. Husayn affirme son soutien à l'abolition de l'esclavage, y compris aux États-
Unis, dans une réponse qu'il fait en 1864 au consul américain à Tunis qui le
sollicite à ce sujet. Il estime qu'il faut mettre fin à l'esclavage pour des raisons
économiques ; les pays dans lesquels règne la liberté des personnes et du
travail sont ceux où la prospérité est la plus évidente [...]. Et il n'en est point
meilleure raison que celle-ci : c'est que le travail de l'homme libre est plus
profitable à la société et plus béni de Dieu que le travail obligatoire de
l'esclave. Husayn ne se contente pas de transmettre au consul américain sa
réponse rédigée en langue arabe. Il la fait traduire en français et publier dans
une « demi-douzaine de journaux », dont L'Europe, qui paraît à Francfort en
juillet 186516
12. Le corps des mamelouks des gouverneurs de Tunis - auquel Husayn
appartenait - s'est éteint dans la seconde moitié du xix° siècle, car il était de
plus en plus difficile d'acheter des enfants esclaves, mais aussi parce que les
gouverneurs ont mobilisé dans leurs armées et administrations toujours plus
de sujets libres, nés dans la province de Tunis.
13. Au début des années 1860, Husayn, un dignitaire mamelouk en Algérie,
montrait un fort intérêt pour le régime du Second Empire français. Il avait des
affinités avec l'empereur Napoléon III et l'impératrice Eugénie, démontrées
lors de la visite du gouverneur de Tunis à Alger en 1860. Husayn était plus
proche de l'empereur et de l'impératrice que des Algériens colonisés.
14. En pratiquant d'autres langues et par ses voyages au long cours, Husayn s'est
éloigné de son pays d'adoption, de l'agenda des réformes, mais pas de leur
esprit ni d'une fidélité aux sultans en tant que représentants de la
communauté des musulmans.
15. Entre faveur et disgrâce à Tunis, il prend place dans des réseaux impériaux
ottomans qui s'étendent jusqu'en Europe. Il s'installe progressivement en
Toscane, près de Livourne, le port principal des échanges de biens et de
fortunes entre l'Europe et le Maghreb depuis le xvi° siècle. Ces moments de
flottements, de déplacements et d'exils sont cruciaux, car ils montrent dans
quel état des membres des élites tunisiennes ont accueilli l'occupation
française de leur pays à partir de 1881: après un effort de transformation et
de réforme, entre les années 1830 et 1870, ils se trouvent dans une forme de
désillusion, soldée par de nombreux échecs; dans l'éloignement avec un pays
que Husayn pensait avoir servi.
16. Avant même la conquête militaire de la Tunisie par la France, avant 1881,
Husayn se dit « exilé ». En 1878, il assimile son départ vers la Toscane à une
hijra.
17. Pour Husayn, comme pour d'autres dignitaires partis de Tunis, l'exil n'est pas
la conséquence d'une condamnation juridique ni d'une « mise au ban
temporaire ou permanente [...] à la suite de délits de droit commun ou
politique » qu'ils auraient commis. Les confiscations de patrimoine qui
accompagnent en général de telles décisions judiciaires n'affectent pas ces
dignitaires ottomans. Néanmoins, Husayn a compris qu'il était contraint de
quitter pour des raisons politiques une terre tunisienne où il a cultivé des
attaches et reçu une éducation. Il ne reconnaît plus l'administration
provinciale tunisienne qu'il a servie pendant près d'un demi-siècle. À la fin
des années 1870, ses proches, dont son protecteur Khayr al-Dine, ont perdu
le pouvoir; le gouvernement tunisien est passé sous la coupe du consul de
France, Théodore Roustan.
18. Ces expériences d'exil sont pourtant intéressantes en ce qu'elles montrent
des sujets colonisés qui s'organisent dans la clandestinité, lorsque
l'administration provinciale à laquelle ils étaient rattachés passe sous
occupation française.
19. Au XIXe siècle, Husayn, ses proches et d'autres musulmans ont participé
activement à un nouveau mouvement intellectuel crucial. Selon l'historien
Nile Green, ces individus ont redéfini l'Islam en tant que projet politique et
domaine de connaissances, principalement en Europe. Ils ont ensuite exporté
leurs nouvelles idées vers les terres musulmanes, remodelant ainsi la
compréhension de l'Islam. Ce processus ne se limite pas à un contexte
colonial ou à la collaboration avec des informateurs orientaux. Il englobe
également les expériences variées des musulmans installés en Europe,
demeurant largement inexplorées par les historiens contemporains.
20. À mesure que son exil se prolonge en Toscane, Husayn n'affirme pas qu'une
distance avec les chrétiens et une plus grande proximité avec la communauté
musulmane. Il en vient aussi à être convaincu que les juifs sont les principaux
responsables de son infortune.
21. Comment expliquer ce basculement vers l'antisémitisme dans ce moment de
transition entre tutelle ottomane et domination coloniale ?
22. Ces raisons sont liées d'une part au contexte des réformes ottomanes, d'autre
part à la colonisation française et à l'exil en Europe. (p 55.)
23. Husayn désire surtout qu'une partie de ses possessions revienne aux deux
filles qu'il a éduquées en Toscane : Emma/Amina et Maria/Myriam.
Chapitre 2 : Les richesses de Husayn : établir et protéger un patrimoine entre deux
empires.

1. L'ensemble de son patrimoine évalué à près d'un million et demi de francs.


Husayn a acquis la majeure partie de ses biens à Tunis et dans ses environs à
partir des années 1860, quand il accède aux plus hautes fonctions de
l'administration de cette province. En plus de deux modestes propriétés, il
possède un grand palais historique, la Dār Husayn, la « maison de Husayn », situé
près de l'une des principales portes de la médina, la vieille ville de Tunis.
2. Le deuxième chapitre explore un autre aspect de sa vie et de sa succession : son
patrimoine, la culture matérielle fin de siècle à laquelle il a pris part et sa
conception morale de l'économie et des transactions financières au temps des
impérialismes européens.
3. Les historiens de la colonisation au Maghreb ont souligné à quel point les
colonisés furent les victimes d'une très violente dépossession de leurs terres,
surtout en Algérie, puis en Tunisie et au Maroc.
4. Ce qu'il veut transmettre se situe à Tunis : son palais dans la médina, et ses terres
près du port de La Goulette.
5. Husayn sait qu'il vaut mieux perdre les rares objets qu'il détient dans ses
meublés florentins pour faire mieux fructifier l'essentiel de son patrimoine qu'il
gère à distance.
6. Selon l'interprétation d'un droit de conquête élaborée par des juristes
musulmans, le souverain - que ce soit le sultan à la tête de l'Empire ottoman ou
le gouverneur de Tunis à l'échelle de la province - est en charge de toutes les
terres, parce qu'il représente la communauté des musulmans. Dans cette logique
- et c'est un point primordial -, le souverain ottoman conserve la propriété
éminente (ragaba) sur les terres dites « miri3 ». Il ne concède sur celles-ci qu'un
droit de jouissance (tasarruf).

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