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Chapitre 1

Introduction à l’économie

« Nous n’attendrons pas notre dîner de la bienveillance du boucher, du marchand de vin ou du


boulanger, mais bien de la considération qu’ils ont de leur propres intérêts. Nous nous adressons
non pas à leur humanité, mais à leur égoïsme, nous ne leur parlerons pas de nos besoins, mais de
leurs intérêts. » Adam Smith

I. Qu’est-ce que l’économie ?


Document 1
L'économie, science de la gestion de la rareté des ressources
L'économie s'intéresse donc à la façon dont les hommes s'organisent pour satisfaire leurs besoins
dans un monde de rareté des ressources.
Autrement dit la nature ne fournit pas gratuitement – sans effort de la part des hommes – et en
quantité illimitée tout ce dont les hommes ont besoin. Les hommes doivent travailler et s'organiser
pour maîtriser la nature.
C'est le sens premier du mot « économie », construit avec le préfixe « éco » qui veut dire
environnement, milieu, domaine, et le suffixe « nomie » qui signifie loi. C'est à cette conception
qu'il faut rattacher L'Économique, premier livre de la discipline, écrit par le grec Xenophoni, qui
décrit la façon dont un chef de famille gère ou exploite son domaine. Cette analyse est transposable
à la société tout entière. On appelle système économique ou mode de production, la manière
d'organiser la société sur le plan économique.
A. SILEM, Encyclopédie de l'économie et de la gestion, Hachette-Éducation.

Document 2
Des besoins illimités, des ressources rares
« Quoi », « comment » et « pour qui » produire ne constitueraient pas des problèmes si les
ressources étaient illimitées, si une quantité infinie de chaque bien pouvait être produite ou si les
besoins humains étaient complètement satisfaits... Il n'existerait pas de biens économiques, c'est-à-
dire de biens relativement rares, et il n'y aurait plus guère lieu d'étudier l’Économique, ou l' « art
d'économiser ». Tous les biens seraient des biens libres, comme l'air ou l'eau.
Dans le monde tel qu'il est, les petits enfants eux-mêmes sont supposés apprendre en grandissant
que « les deux » n'est pas une réponse acceptable lorsqu'il s'agit de choisir « lequel ». Certes, les
sociétés industrielles modernes donnent l'impression d'être riches par comparaison avec les nations
arriérées ou avec les siècles passés. Cependant, même la plus riche de ces nations, les États-Unis,
devrait être des centaines de fois plus productive qu'elle ne l'est présentement si elle devait assurer à
chaque individu un niveau d'existence aussi élevé que celui dont jouissent de nos jours un petit
nombre de privilégiés.
Il semble que les niveaux de production plus élevés remorquent invariablement des niveaux de
consommation plus élevés. Le public, a l'impression qu'il « a besoin » de chauffage à vapeur, d'eau
courante, d'éducation, de cinéma, de radio et de télévision, de livres, d'autos, de voyages, de
musique (de telle ou telle catégorie), de vêtements à la mode, etc. Le biologiste peut bien nous
affirmer qu'un homme peut se nourrir parfaitement avec une bouillie d'avoine claire, moyennant
quelques euros par jour, ce renseignement nous laisse aussi froids que celui d'après lequel les
éléments chimiques de notre corps valent à peine deux dollars. Quiconque a tenu un livre de
comptes familial n'ignore pas que les nécessités de l'existence, les impératifs absolus, n'ont pas
grand-chose à voir avec les besoins physiologiques minima de nourriture, habillement et logement
dont la satisfaction est indispensable pour entretenir la lumière vacillante de la vie.
P.-A. Samuelson, L'Économique, Armand Colin

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Document 3
L'économie, science des choix
Les agents économiques ont des objectifs que l'économie appelle des besoins, mais ils disposent surtout de
moyens limités (les revenus pour un ménage, le budget pour l'État, les recettes pour une entreprise) pour
les satisfaire. Si tous les biens désirés existaient en quantité illimitée dans la nature, il serait inutile de
s'interroger sur la façon de choisir tel bien plutôt que tel autre. L'idée de rareté est donc fondamentale pour
définir l'activité économique. C'est parce que les biens sont rares que la science économique existe. La
rareté permet aussi de définir un bien économique (c'est un bien rare), par opposition à un bien non
économique (exemple de l'air) qui existe en quantité illimitée. Un tel bien, disponible sans effort, est
appelé bien libre.
L'économie est donc la science des choix. Elle étudie la façon dont s'effectuent les choix des agents
économiques. La définition précise aussi que les choix se font d'une manière optimale, ce qui signifie que
les agents économiques font des calculs afin d'obtenir le maximum de satisfaction pour le minimum
d'effort ou le minimum de ressources utilisées.
J.-Y. CAPUL, 0. GARNIER, Dictionnaire d'économie et de sciences sociales, Hatier.

 1. Définissez et illustrez les termes suivants :


 Besoins :

 Biens libres :

 Biens économiques :

2. Les besoins des individus sont-ils limités ?

3. Expliquez pourquoi on peut dire que l’idée de rareté est fondamentale pour définir
l’activité économique.

4. Expliquez pourquoi l’économie est la science des choix.

5. Énumérez les types de choix que doit effectuer un agent économique.

6. Définissez la notion d’économie.

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II. Les principaux courants de pensée économique
2.1. Le courant libéral classique, néo-classique et néo-libéral
Document 4
Adams Smith, fondateur de la pensée libérale classique
La supériorité du marché
Chaque individu travaille nécessairement à rendre aussi grand que possible le revenu annuel de la société.
A la vérité, son intention en général n’est pas en cela de servir l’intérêt public et il ne sait même pas
jusqu’à quel point il peut être utile à la société, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, comme en
beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans
ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour
rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel il travaille souvent d'une manière
bien plus efficace pour l’intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler.
Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient dans leurs entreprises de commerce, à travailler pour le bien
général, aient fait beaucoup de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas très commune
parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs discours pour les en guérir. L'homme d'État qui
chercherait à diriger les particuliers dans la route qu'ils ont à tenir pour l'emploi de leurs capitaux, non
seulement s'embarrasserait du soin le plus inutile, mais encore il s'arrogerait une autorité qu'il ne serait
pas sage de confier, ni à un individu, ni à un conseil ou à un sénat, quel qu'il pût être ; autorité qui ne
pourrait jamais être plus dangereusement placée que dans les mains d’hommes assez insensés et assez
présomptueux pour se croire capable de l'exercer.
A. SMITH, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations.

Document 5
Les devoirs du souverain : l’État gendarme
Le devoir du souverain qui consiste en la protection de la société de la violence et des agressions des
autres sociétés indépendantes peut se réaliser au seul moyen d'une force militaire.
Le deuxième devoir du souverain consiste en la protection aussi efficace que possible de chaque membre
de la société contre l'oppression et l’injustice.
Le troisième et dernier devoir du souverain consiste à ériger et maintenir des travaux publics qui, bien que
du plus haut intérêt pour la société, sont d'une nature telle que le profit ne peut jamais couvrir la dépense
d'un individu ou d'un petit nombre d'individus.
A. SMITH, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations

 1. Expliquez la phrase soulignée dans le premier texte : « en cela, comme en beaucoup d'autres
cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ».

2. Montrez qu’elle est l’origine de l’intérêt général pour A. Smith.

3. Expliquez la conception de l’État dans la théorie libérale. Précisez les fonctions de


« l’État gendarme ».

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2.2. Le courant marxiste
Document 6
L'histoire économique est l'histoire de la lutte des classes
L'histoire de toute société jusqu'à nos jours, c'est l'histoire de la lutte des classes, Homme libre et esclave,
patricien et plébéien, baron et serf, maître et compagnon, en un mot : oppresseur et opprimés, se sont
trouvés en constante opposition ; ils ont mené une lutte sans répit, tantôt déguisée, tantôt ouverte, qui
chaque fois finissait soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par
l'anéantissement des diverses classes en lutte.
K. MARX, F. ENGELS Le Manifeste du parti communiste

Document 7
Entretien imaginaire avec Karl Marx
S. & V. Économie : La mécanisation mène donc au chômage qui mène à une plus grande misère et à une
plus grande docilité de la classe ouvrière. Je ne vois pas en quoi cela pourrait contribuer à
l'effondrement du système capitaliste...
K.M. : La mécanisation est pourtant à l'origine de son affaiblissement. Les capitalistes sont en effet
obligés de payer leurs machines à leur juste prix. Ils ne peuvent exploiter la force de travail mécanique
comme ils exploitent la force de travail humaine. Et plus ils investissent dans des machines destinées à
économiser de la main-d'œuvre, moins ils font de profits. La concurrence obligeant tous les entrepreneurs
à s'engager dans une course à la réduction des coûts (et donc de la main-d'œuvre), la proportion de travail
(et donc de plus-value) contenue dans la production totale est irrémédiablement condamnée à se réduire.
Arrive un moment où les profits sont tellement réduits que la production n'est plus rentable. Et où la
baisse des revenus des travailleurs fait baisser la consommation. C'est ainsi que se déclenche la crise.
Les entreprises les plus petites vont disparaître dans la bataille. Les plus grosses vont récupérer des
moyens de production à bas prix et vont pouvoir imposer leurs conditions aux travailleurs.
Puis arrivera le moment du drame final. La concentration des moyens de production atteindra un degré tel
qu'elle deviendra incompatible avec la structure capitaliste. Cette structure volera en éclats, sonnant du
même coup le glas de la propriété privée. La classe ouvrière, disciplinée, unie et organisée […] prendra le
pouvoir et instaurera le système socialiste basé sur la planification de la production et caractérisé par
l'absence de classes sociales. La révolution, vous le voyez, est inévitable : c'est l'issue logique des
convulsions économiques auxquelles nous assistons périodiquement.
Science et Vie Économie, n° 53

 1. Expliquez la notion de lutte des classes.

2. Pourquoi, d’après Marx, « le capitalisme est son propre fossoyeur » ?

3. Expliquez la notion de « système socialiste basé sur la planification ».

4. Quel doit être le rôle de l’État dans un système socialiste ?

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2.3. Le courant keynésien
Document 8
Entretien imaginaire avec J.M. Keynes
Science & Vie Économie : La grande crise de 1929 ne nécessitait-elle pas une nouvelle approche en
économie ?
J. M. K. : Oui, car j'ai tenté de jeter les bases d'une théorie nouvelle, révolutionnaire. Elle est générale
dans la mesure où j'ai étudié le fonctionnement de l'économie dans sa globalité. L'économie classique est
un instrument puissant pour expliquer les comportements individuels du consommateur ou du producteur.
Elle s'avère en revanche incapable de rendre compte des phénomènes économiques d'ensemble. Ces
derniers répondant à une logique qui leur est propre, différente de la rationalité individuelle.
S. & V. Économie : Les classiques pensent au contraire que l'intérêt des individus concourt forcément à
l'intérêt général.
J. M. K. : Eh bien ! Les classiques se trompent ! Prenons un exemple. Chaque individu a intérêt à
épargner, car il accumule ainsi des richesses pour l'avenir. Mais si tout le monde suit le même
raisonnement, il en résulte un effet négatif pour l'économie d’un pays. Il y a en effet moins d'argent en
circulation pour acheter les marchandises produites, ce qui freine l'activité. L'intérêt général recommande
donc la dépense.
S. & V. Économie : Ce type de raisonnement vous a conduit, pendant la crise, à lancer des messages à la
radio exhortant les ménagères à dépenser, à gaspiller. Était-ce par simple goût de la provocation ?
J. M. K. : À l'époque, c'était effectivement scandaleux. La morale publique exaltait « la vertu » de
l'épargne et dénonçait le « vice de la dépense ». Épargner, c'était gagner à coup sûr les faveurs du ciel,
tandis que dépenser vous menait droit à l'enfer ! Quelle triste chose, pourtant, que l'abstinence !
S. & V. Économie : Vous n'avez guère été tendre pour les rentiers et les banquiers.
J. M. K. : Je n'aime guère les oisifs qui laissent dormir leur argent au lieu d'en faire profiter la
communauté. Quant aux banquiers, j'ai été jusqu'à les traiter de paralytiques du monde des affaires... Au
lieu d'aider les entrepreneurs en difficulté, ils préfèrent le plus souvent les étrangler et les acculer à la
faillite.
S. & V. Économie : On parle communément de révolution keynésienne. De quoi s'agit-il ?
J. M. K. : D'une façon radicalement différente de voir le monde. Les libéraux ont une vision idéale de
l'économie, toute empreinte de puritanisme. Ils considèrent qu'il existe un ordre naturel des choses, tel que
Dieu l'a déterminé, garantissant plein emploi et richesse. Pour eux, les crises ne sont que de simples
dérangements temporaires, vite enrayés grâce aux mécanismes du marché. Dès lors, tout étant pour le
mieux dans le meilleur des mondes, il faut bien se garder d'intervenir. Les libéraux préfèrent attendre
patiemment que la baisse des prix et des salaires ramène l'équilibre. Autrement dit, il faudrait se serrer la
ceinture. Cette diète forcée serait une sorte de châtiment divin venant sanctionner les excès des années de
vaches grasses. Absurde ! La « main invisible », l'équilibre automatique, le laisser-faire ne sont que
mythes et balivernes. Je pense au contraire que le capitalisme libéral conduit tout droit à la crise quand il
est laissé à lui-même. Seule une intervention franche et systématique de l'État peut éviter la catastrophe.
S. & V. Économie : Si j'ai bien compris, vous réinventez une vieille notion quelque peu oubliée depuis
Adam Smith, celle de la politique économique ?
J. M. K. : Qui, sinon l'État, est le plus apte à agir au nom de l'intérêt général ? Sa mission consiste à
réguler le fonctionnement de l'économie et, en temps de crise, à intervenir par tous les moyens pour
relancer la machine. Pour cela, il dispose de tout un arsenal de mesures envisageables : mise en chantier
de grands travaux, redistribution, politique fiscale, aides à l'investissement, contrôle des changes,
politiques d'aide à la consommation, etc. Le choix dépend évidemment de l'objectif visé.
S. & V. Économie : Trop d'État ne risque-t-il pas de tuer toute initiative privée ?
J. M. K. : II ne s'agit pas de supplanter l'initiative privée, mais de pallier ses insuffisances. L'État doit
impulser, orienter au niveau global. Je n'ai jamais été l'ennemi du profit et de l'entreprise individuelle.
Alix HOANG, Science & Vie Économie, mai 1985
 1. Relevez les points d’opposition entre Keynes et la pensée libérale.

2. Citez et expliquez les différents modes d’intervention économique de l’État préconisé par
Keynes.
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