Vous êtes sur la page 1sur 1

LAROUSSE !

Rechercher dans l'encyclopédie... "

Accueil > encyclopédie [divers] > capitalisme

capitalisme

Consulter aussi dans le dictionnaire : capitalisme

Cet article fait partie du dossier consacré à la


révolution industrielle
industrielle..

Le capitalisme est un système de


production dont les fondements sont
l'entreprise privée et la liberté du
marché. Il s'agit d'un ensemble
d'éléments solidaires dont les relations
permettent la production, la répartition
et la consommation des richesses
indispensables à la vie d'une
collectivité humaine. Le capitalisme est
à la fois un système économique, mais
aussi un type d'organisation sociale.
C'est aujourd'hui le système
économique dominant dans le monde,
qui est à l'origine du phénomène de
mondialisation.

1. QU'EST-CE QUE LE CAPITALISME ?

Le capitalisme est un système composé de plusieurs


éléments. L'ensemble des auteurs s'accordent à le
définir à partir des caractéristiques suivantes : le
capitalisme repose sur la propriété privée des moyens
de production, la division du travail, l'existence d'un
marché qui permet la régulation de l'activité
économique, l'objectif d'un profit individuel pour les
propriétaires du capital et la séparation entre le
capital et le travail. Il convient également d'ajouter un
certain état d'esprit, la présence de certaines
représentations collectives qui sont inséparables du
système capitaliste.

1.1. LE CAPITALISME EST FONDÉ SUR LA


PROPRIÉTÉ PRIVÉE DES MOYENS DE
PRODUCTION
Cette caractéristique est la plus souvent évoquée pour
définir le capitalisme. On entend par moyens de
production tout ce qui permet de produire, c'est-à-dire
les terres, les bâtiments, les machines ou les outils qui,
exploités par le travail de l'homme, aboutissent à la
réalisation des biens et des services qui permettent la
consommation, et donc la survie, des populations.
L'histoire de la propriété est aussi vieille que l'histoire
de l'homme. C'est souvent une histoire controversée,
notamment entre ceux qui possèdent les instruments
de production et ceux qui ne les possèdent pas. L'un
des premiers à défendre la propriété privée est le
philosophe grec Aristote (384-322 avant J.-C.). Ce
dernier considère que la propriété est un des plaisirs
de la vie et que l'homme se soucie plus de ce qui lui
appartient en propre que de ce qui appartient à tout le
monde. Saint Thomas d'Aquin d'Aquin, dans la Somme
théologique , synthèse de la pensée aristotélicienne
et de la pensée chrétienne, reprend la même idée mais
en préconisant la charité auprès de ceux qui sont dans
le besoin. Le développement des villes, de l'artisanat,
l'apparition de la bourgeoisie sont liés à l'existence de
la propriété. Les révolutions libérales de la fin du
xviiie s., notamment la Révolution française de 1789,
consolideront le rôle de la propriété privée. L'article 17
de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
(26 août 1789) précise que la propriété est un droit
inviolable et sacré.

1.2. L'ÉCONOMIE CAPITALISTE REPOSE SUR


LA DIVISION DU TRAVAIL
La répartition des tâches n'est pas spécifique des
sociétés capitalistes, néanmoins la division des rôles
productifs y est plus développée que dans le cadre des
systèmes économiques antérieurs. Les sociétés rurales,
qui ont précédé l'instauration du capitalisme
industriel, étaient marquées par une faible
différenciation entre les fonctions de chacun. Le travail
de la terre, le temps des moissons supposaient la
collaboration d'un grand nombre d'hommes, de
femmes, d'enfants sans réelles spécialisations
professionnelles.

Adam Smith

La naissance du capitalisme industriel, l'avènement de


la manufacture se traduiront par une division accrue
des tâches entre les agents productifs. À cet égard,
l'exemple le plus célèbre est sans nul doute la division
du travail dans une manufacture d'épingles à la fin
du xviiie s., telle qu'elle est décrite et commentée par
Adam Smith (1723-1790), dans la Richesse des
nations (1776). Dans cette entreprise, la réalisation
matérielle de chaque épingle est divisée en dix-huit
opérations distinctes. Cet éclatement du processus de
production permet, et c'est sa raison d'être, une
augmentation substantielle de la production
par travailleur employé. En langage économique
moderne, on dirait que la division du travail permet
d'augmenter la productivité, c'est-à-dire le rapport
entre une certaine quantité de produit et le nombre
des travailleurs recrutés pour la réaliser.
Par la suite, au xixe s. et au xxe s., on assistera à de
nouveaux progrès dans la division du travail avec les
méthodes mises au point par l'ingénieur américain
Frederick Winslow Taylor (1856-1915), à l'origine du
« taylorisme » ou « organisation scientifique du
travail ». L'industriel Henry Ford (1863-1947), quant à
lui, reprendra les idées de Taylor et ajoutera, dans les
années 1910, le principe du convoyeur. Ce ne sont plus
les ouvriers qui se déplacent autour des véhicules
automobiles en construction, mais ce sont les moteurs
qui défilent devant les ouvriers. Il s'agit du principe du
travail à la chaîne
chaîne. Le système créé par Henry Ford,
ou modèle fordiste, a permis, d'abord aux États-Unis
puis dans tous les pays capitalistes développés,
l'apparition de la production et de la consommation de
masse.

1.3. LE CAPITALISME, EN TANT QUE SYSTÈME


ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE PRODUCTION,
EST RÉGULÉ PAR LE MARCHÉ

Bourse des valeurs de New York

Aussi les expressions « économie capitaliste » ou


« économie de marché » sont-elles souvent
considérées comme synonymes. Le marché est un lieu
qui permet la confrontation de l'offre et de la demande
de produits. Le marché peut être de dimension locale,
nationale ou internationale. Les transactions peuvent
porter sur des marchandises, par exemple
l'automobile, des services comme le travail humain ou
des produits financiers comme les actions qui
s'échangent à la Bourse
Bourse, appelée également « marché
financier ». Sur tous ces marchés, une certaine
quantité de produits est proposée aux acheteurs à un
certain prix. Ces produits constituent l'offre. Les
intentions d'achat des consommateurs constituent la
demande.
Le marché permet la régulation de l'activité
économique. Il est au cœur de l'économie libérale.
Adam Smith, toujours dans la Richesse des nations,
montre que le marché fonctionne comme une sorte de
« main invisible » qui guide les intérêts individuels
vers la satisfaction des besoins de la collectivité. Celui
qui cherche à s'enrichir ne peut aboutir dans son
projet qu'à la condition que ses produits puissent
répondre aux attentes de ceux qui les achèteront. Si
les produits ne correspondent pas à la demande ou
s'ils sont d'un prix trop élevé, les consommateurs
bouderont les produits proposés et notre producteur
fera faillite. C'est ainsi que le marché permet de passer
de la recherche égoïste du profit individuel à la
satisfaction du plus grand nombre. Adam Smith entend
par marché un marché où règne la concurrence.
C'est grâce à la concurrence qui s'exerce entre les
producteurs que les consommateurs peuvent
bénéficier de produits de qualité, à des prix attractifs.
Selon l'économiste américain Paul Anthony
Samuelson (né en 1915), prix Nobel d'économie en
1970, le marché assure également la régulation de
l'économie dans la mesure où il permet de trouver des
réponses aux trois grandes questions qui se posent en
matière de production, de répartition et de
consommation des richesses.
– Tout d'abord, le marché permet de répondre à la
question : « que produire ? » Les entreprises, qui
réalisent les biens et les services, les proposent aux
consommateurs sur le marché. Les consommateurs,
par leurs achats, ou leur absence d'achat, vont ainsi
manifester leurs préférences à l'égard des entreprises.
On parle alors de souveraineté du consommateur sur
le marché.
– La deuxième question est « comment produire ? »
Les quantités de facteurs de production disponibles
sur le marché (la terre, le travail humain, le capital
technique), de même que le prix des facteurs de
production constitueront autant d'informations
précieuses pour les chefs d'entreprise. Si les hommes
qui désirent travailler sont en quantité insuffisante par
rapport aux besoins des firmes, le chef d'entreprise
substituera l'emploi de la machine au recours à la
main-d'œuvre. Il agira de même si le prix du travail est
trop élevé par rapport aux frais d'installation et
d'entretien des machines.
– Le marché permet de répondre à la troisième
question : « pour qui produire ? » La production est
alors destinée à tous ceux qui possèdent un pouvoir
d'achat suffisamment important pour se procurer les
biens et les services auxquels ils aspirent.

1.4. L'ÉCONOMIE CAPITALISTE REPOSE SUR


LA RECHERCHE DU PROFIT
Le profit est le revenu de l'entrepreneur capitaliste.
Dans la théorie économique, le profit est distinct du
salaire, revenu du travail, et de la rente, revenu du
propriétaire foncier. Le profit est un résidu, c'est-à-dire
qu'il est égal au produit des ventes de l'entreprise
auquel on retranche l'ensemble des charges comme
les salaires, l'achat des matières premières et des
machines, les impôts et taxes. Pour l'économiste
autrichien Schumpeter (1883-1950), le profit est la
rémunération de l'entrepreneur dynamique. Le chef
d'entreprise qui met en œuvre une innovation innovation,
comme la création d'un nouveau produit ou
l'introduction d'une nouvelle méthode dans la
production, bénéficie d'un profit qui vient récompenser
le dynamisme dont il a su faire preuve. Ce profit est un
profit de monopole, mais à court terme. En effet, un
industriel qui installe seul sur le marché un nouveau
produit qui rencontre la faveur de l'ensemble des
consommateurs va accroître ses marges de profit.
Seulement, par un effet d'imitation, de nouveaux
entrepreneurs vont à leur tour se lancer dans la
fabrication du nouveau produit et, à moyen terme, les
profits vont baisser.

1.5. LE CAPITALISME SE CARACTÉRISE PAR LE


RAPPORT SALARIAL
En effet, les employeurs, c'est-à-dire les chefs
d'entreprise, sont juridiquement séparés des salariés.
Les uns disposent de leur force de travail qu'ils
vendent aux entreprises, les autres, propriétaires des
instruments de production, achètent la force de travail
à son prix de marché : le salaire. Il existe un marché
libre du travail qui réunit des hommes libres. Cette
distinction est importante dans la mesure où elle
permet de différencier le capitalisme moderne du
système économique des sociétés antiques et
médiévales où le travail était régi par le système de
l'esclavage ou du servage. Le rapport salarial est un
rapport contractuel. Un individu accepte, par contrat,
d'exercer une activité productive pour le compte d'un
employeur. Ce contrat de travail peut être rompu par
l'une ou l'autre des parties en présence dans le cadre
de la législation du travail.

1.6. ENFIN, L'ÉCONOMIE CAPITALISTE EST


FONDÉE SUR LA GÉNÉRALISATION DE
COMPORTEMENTS RATIONNELS D'UN POINT
DE VUE ÉCONOMIQUE

Max Weber

Le sociologue allemand Max Weber (1864-1920),


notamment dans un article qui fera date, L'éthique
protestante et l'esprit du capitalisme (1901),
montre que le capitalisme repose sur la rationalisation
des activités collectives. Weber entend par rationalité,
ou processus de rationalisation, l'adaptation d'un
ensemble de moyens en vue d'atteindre un objectif
déterminé. Dans les sociétés précapitalistes, les
difficultés économiques, comme par exemple
l'insuffisance des récoltes, étaient perçues comme
relevant d'une punition divine. Les pratiques
religieuses, le recours à la magie, l'invocation du
surnaturel étaient relativement fréquents. Les
« nouvelles mentalités collectives » qui vont naître au
xvie s., à la faveur de la diffusion du protestantisme
(Weber a démontré que les entrepreneurs protestants
ont su assimiler réussite commerciale et signe de
prédestination), auront comme conséquence
l'apparition d'attitudes et de comportements sociaux
plus rationnels. Ainsi, lorsqu'un entrepreneur
embauche des salariés en leur donnant des
instructions précises quant à leur travail, lorsqu'il se
procure les biens d'équipement nécessaires à la
réalisation de la production, il agit rationnellement à
l'endroit de son objectif prédominant, à savoir
produire des biens économiques en vue de les vendre
sur le marché. En même temps, il recherche par cette
activité l'obtention du profit le plus important
possible. Pour Weber, la rationalisation économique
s'incarne dans le capitalisme moderne.

1.7. CONCLUSION
Ces caractéristiques qui permettent de définir le
système capitaliste se retrouvent dans l'entreprise
moderne. Ainsi l'économiste français François
Perroux (1903-1987), dans le Capitalisme (1948),
évoque l'entreprise comme le microcosme du
capitalisme. L'entreprise est l'institution cardinale du
capitalisme dans la mesure où elle associe la propriété
privée, l'initiative individuelle, la division du travail, la
séparation du travail et du capital à la recherche du
profit par des stratégies rationnelles. L'économie
capitaliste, régulée par le marché, est souvent
entendue comme une économie d'entreprises.

2. LES GRANDES ÉTAPES DU


CAPITALISME

2.1. INTRODUCTION
Le capitalisme n'est pas un système immuable dans
ses structures. Il se transforme au fur et à mesure de
l'évolution des éléments qui le composent, notamment
sous l'impulsion du progrès technique. Aussi distingue-
t-on un capitalisme commercial qui se met en place
vers la fin du Moyen Âge et qui perdurera jusqu'au
milieu du xviiie s. Un capitalisme industriel et bancaire
qui couvre le xixe s. Enfin le capitalisme contemporain,
ou néocapitalisme, qui apparaît vers la fin du xixe s.,
mais qui se développera surtout après la Seconde
Guerre mondiale.

2.2. LE CAPITALISME COMMERCIAL DES


TEMPS MODERNES (XVIe S., XVIIe S. ET
XVIIIe S.)

Quentin Metsys, le Prêteur et sa femme

Le capitalisme dit « commercial » apparaît vers la fin


du Moyen Âge. Pour l'historien français Fernand
Braudel (1902-1985), les premiers soubresauts du
capitalisme sont repérables à Venise dès le xive s. On y
trouve, en gestation, les éléments d'un nouveau
système économique qui progressivement
remplaceront ceux de la société féodale : des marchés,
des magasins, des foires, des changeurs et des
banquiers. La capitale de la Vénétie devient une
véritable plaque tournante pour toute une gamme de
marchandises qui proviennent d'Europe, des îles du
Levant ou des villes de l'Adriatique.
Les gouvernements ne seront pas en reste dans ce
mouvement de mutations et d'enrichissement
économiques. Les économistes de l'époque conseillent
les princes dans le but d'accroître leurs richesses et
celles de leurs sujets. Il s'ensuit une vague de grandes
expéditions par-delà les océans à la recherche de
nouvelles terres, suivies d'une période de colonisation
et aussi… d'exploitation des richesses des pays
conquis et des peuples colonisés. C’est par
l'intermédiaire de sociétés par actions – précurseurs
des sociétés de capitaux modernes –, que les riches
négociants ont pu financer leurs expéditions.
Cependant, le grand négoce est resté soumis pendant
toute cette période au contrôle des gouvernements
nationaux qui souhaitaient, au nom de la doctrine
mercantiliste
mercantiliste, préserver d'abord la richesse de l'État.
Le système des plantations au xvie s. n'en est pas
moins déjà révélateur d'une démarche capitaliste à
l'échelle mondiale. La création des plantations aux
Amériques a supposé des transferts de ressources d'un
continent à un autre. On parlerait aujourd'hui de
transferts de technologies et de savoir-faire, de même
que de migrations professionnelles. Il a été nécessaire
d'importer des plantes d'Afrique, on a usé du savoir-
faire portugais pour l'exploitation de la canne à sucre,
des colons ont dû quitter la vieille Europe pour le
Nouveau Monde. Enfin, comme il fallait une main-
d'œuvre abondante, les Occidentaux ont acheté des
esclaves africains : c'est la « traite des Noirs ».

2.3. LE CAPITALISME INDUSTRIEL DU XIXe S.


Au capitalisme commercial va succéder, dans le
courant du xviiie s., une nouvelle forme d'organisation
économique articulée autour de l'entreprise
capitaliste, de la concentration de grandes masses de
travailleurs et, surtout, de l'utilisation du progrès
technique. C'est en Grande-Bretagne que naît la
révolution industrielle qui va complètement
modifier les structures de l'économie européenne et
progressivement, par effet d'imitation, celles de
l'économie mondiale.
La première activité à être touchée par le progrès
technique est le textile. Les grandes innovations du
secteur textile comme la navette volante de John Kay,
en 1738, ou le métier à tisser de Cartwright, mis au
point en 1785, permettront d'accroître
considérablement la production de tissu à un moment
où la population européenne augmentait dans de
grandes proportions. Mais c'est surtout la machine à
vapeur de l'Écossais James Watt, mise au point entre
1769 et 1782, qui constituera la plus profonde rupture
avec les modes de production antérieurs. Utilisée pour
les transports terrestres et maritimes, la vapeur
remplacera les forces naturelles (eau, vent, force
humaine ou animale). Il s'ensuivra une augmentation
sans précédent de la production et de la productivité
du travail.
Parallèlement, on assiste à la création de l'entreprise
moderne. Celle-ci suppose, à sa tête, un entrepreneur
qui assume la mission de rechercher, dans son
environnement, les ressources productives (matières
premières, machines, main-d'œuvre), en vue de les
agencer dans le cadre de la combinaison productive et
de produire les biens et les services destinés aux
consommateurs. Comme le souligne l'économiste
Rostow, dans les Étapes de la croissance
américain Rostow
économique (1960), l'existence d'une classe
d'entrepreneurs est indispensable à l'émergence d'une
économie moderne.
Si l'entrepreneur investit, c'est-à-dire augmente son
stock de capital (machines, instruments de
production), il doit également embaucher des
travailleurs pour faire tourner l'entreprise. Dans le
système préindustriel ou précapitaliste, la production
manufacturière est tirée d'une activité artisanale
autonome, ce qu'on appelle le « domestic system » :
un donneur d'ouvrage remet des matières premières et
des outils à des travailleurs ruraux qui confectionnent,
durant la morte saison, des produits manufacturés.
Une fois les travaux réalisés, le donneur d'ouvrage les
récupère et rémunère le travail accompli. Avec
l'industrialisation, le « domestic system » disparaît au
profit du « manufactory system ». Celui-ci suppose le
rassemblement des ouvriers dans un même lieu à des
fins productives. Ainsi naît, dans le courant du xixe s.,
une nouvelle classe sociale : celle des ouvriers
d'industrie.
En même temps, le capitalisme va se développer en
dehors de l'Europe et connaître une expansion
internationale. L'extraction minière, le développement
de l'industrie pétrolière nécessiteront la création
d'entreprises multinationales pour alimenter le
continent européen en matières premières
énergétiques. Durant la phase industrielle du
capitalisme, la régulation de l'activité économique a
surtout été le fait du marché. L'État n'est pratiquement
pas intervenu, suivant en cela les recommandations
des économistes libéraux britanniques ou français.
C'est une période de « laisser-faire » qui consacre le
triomphe de l'initiative individuelle.

2.4. LE NÉOCAPITALISME DU XXe S.


L'évolution contemporaine du capitalisme, appelé
« néocapitalisme », se traduit par un certain nombre
de transformations qui vont affecter en profondeur les
structures économiques et sociales des pays
occidentaux. Certaines d'entre elles sont repérables
dès le dernier tiers du xixe s., d'autres prendront forme
après la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Indubitablement, le capitalisme a changé, qu'il s'agisse
de la taille des entreprises, du régime de la
concurrence ou de l'extension des marchés.
Parallèlement, on peut noter une plus grande
intervention de l'État dans l'économie.
L'une des principales modifications de l'économie
capitaliste, vers la fin du xixe s., concerne la taille des
entreprises. Si le capitalisme de la période industrielle
se caractérise par l'existence d'un grand nombre
d'entreprises petites et moyennes, le néocapitalisme
voit le triomphe de la grande entreprise. L'entreprise
moderne suppose la réunion de ressources financières
sans comparaison possible avec les mises de fonds des
premières unités de production capitaliste. Les
équipements sont de plus en plus coûteux, la
production est destinée à un nombre toujours plus
important de consommateurs. Le prix des biens
d'équipement, les dépenses de recherche-
développement ne peuvent être rentables qu'à partir
d'une certaine dimension en termes de parts de
marché. L'entreprise du xxe s. est, par ce fait même,
condamnée à la grande dimension dans un système
qui associe la production de masse à la consommation
de masse.
L'augmentation de la dimension de l'entreprise peut
s'effectuer par la croissance interne, par
l'investissement, c'est-à-dire l'accumulation du capital,
ou par la croissance externe, qui repose sur la réunion
de deux ou de plusieurs entreprises. Un chef
d'entreprise, plus dynamique que les autres, rachète
ou s'associe avec ses concurrents. Il s'ensuit que l'on
se trouve face à un nombre de moins en moins
important de firmes, mais ces dernières sont de plus
en plus grandes. Le cas extrême de ce processus est
l'apparition d'un monopole, c'est-à-dire une seule
entreprise face à une multitude de clients-
consommateurs. Les États ne sont pas restés passifs
face aux dangers occasionnés par une situation de
monopole. Ainsi les États-Unis furent-ils à l'origine
d'une législation antitrust (Sherman Act de 1890 et
Clayton Act de 1914).
La grande entreprise moderne présente également des
changements du point de vue de ses structures
juridiques et de l'organisation du pouvoir de direction.
Dès le dernier tiers du xixe s., le développement des
industries métallurgiques, de la chimie, de
l'exploitation pétrolière a supposé la réunion de
capitaux colossaux. Un seul propriétaire, ou un petit
groupe de propriétaires, ne pouvait disposer d'une
fortune suffisamment importante pour financer des
activités donnant naissance à de tels empires
industriels. Aussi le recours à l'épargne publique a-t-il
été nécessaire. Progressivement, un grand nombre
d'entreprises individuelles sont devenues des sociétés
de capitaux, notamment sous la forme de la société
anonyme. Les entreprises individuelles n'ont certes pas
disparu, mais leurs activités sont souvent orientées
vers le commerce, vers les services aux particuliers ou
vers la sous-traitance destinée aux grandes
entreprises.
La grande firme appartient à ses actionnaires, qui sont
essentiellement intéressés par une augmentation de la
valeur de leurs actions et la distribution de dividendes
(revenu de l'action). De surcroît, la grande majorité des
actionnaires n'a guère les compétences techniques
pour prendre en charge les destinées de la firme. Aussi
le pouvoir décisionnel dans la grande entreprise
moderne passe-t-il des propriétaires (les actionnaires)
à des managers recrutés en fonction de leur savoir-
faire en matière de gestion et d'organisation
d'entreprise. C'est ce que souligne l'économiste
Galbraith, dans le Nouvel
américain John Kenneth Galbraith
État industriel (1967), à partir d'une étude portant sur
l'évolution du capitalisme américain depuis la fin de la
Seconde Guerre mondiale.

Manifestation de chômeurs à Chicago en 1934

Indépendamment des transformations qui ont affecté


le monde de l'entreprise, l'évolution du capitalisme
contemporain se caractérise également par une
croissance de l'intervention de l'État par rapport au
fonctionnement des seuls mécanismes spontanés du
marché et de la concurrence. La grande crise des
années 1930 et son cortège de chômage et de faillites
ont souligné l’incapacité du marché à s’autoréguler.
Dans sa Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de
la monnaie (1936), l'économiste britannique John
Maynard Keynes (1883-1946) préconise l'adoption de
politiques fiscale et monétaire réfléchies pour
stabiliser l'économie et assurer ainsi le retour au plein
emploi. En 1942, durant la Seconde Guerre mondiale, le
député libéral britannique William Henry Beveridge
rédige un rapport, Social Insurance and Allied Services.
Ce document sera à l'origine de l'« État providence »
ou « Welfare State ».
Parallèlement aux politiques économiques de soutien
de l'activité, de recherche de la croissance et de lutte
contre le chômage vont naître des politiques sociales
destinées à protéger les individus en cas de
détérioration de leurs conditions de vie (maladie,
vieillesse, chômage). Le capitalisme moderne n'est plus
seulement fondé sur la libre entreprise et le marché
concurrentiel, il est articulé à partir d'un système
d'économie mixte qui associe les mécanismes du
marché et l'interventionnisme étatique.
Ce système n’en met pas pour autant le capitalisme à
l’abri de toute épreuve. Dans les années 1970, il a
traversé une nouvelle crise, caractérisée par la
conjonction de deux fléaux, l'inflation et le chômage.
Jusque-là, les économistes avaient toujours considéré
qu'ils ne pouvaient pas sévir simultanément ; en effet,
le chômage était caractéristique des périodes de
récession, et l'inflation des périodes de prospérité.
Cependant, dans les années 1970, un taux de chômage
élevé a coïncidé, dans les pays industrialisés d'Europe
comme aux États-Unis, avec une forte inflation. À cause
de cette stagflation, les gouvernements ont été
confrontés à un dilemme, la lutte contre l'inflation
provoquant une recrudescence du chômage, et la
résorption du nombre des chômeurs relançant la
hausse des prix et des salaires.
Pour sortir de la crise, une solution a été de revenir
aux « fondamentaux » du capitalisme du laisser-faire.
Cette politique a particulièrement été appliquée aux
États-Unis, à partir de l’arrivée de Ronald Reagan à la
Maison-Blanche (1980), et au Royaume-Uni, dirigé
parMargaret
Margaret Thatcher
Thatcher(1979). Par delà ses succès et
ses échecs, cette politique a conduit au fil du temps à
l’hypertrophie incontrôlée des marchés financiers,
lancés dans une recherche du profit alliant prises de
risque inconsidérées et déconnection des réalités de
l’économie réelle. Le résultat de cette course à l’abîme,
alimentée par le faible coût du crédit, a été
l’effondrement de pans entiers de l’économie
américaine et, par voie de conséquence, l’entrée en
récession de l’économie mondiale à partir des années
2007-2008. Afin de relancer la croissance et d’enrayer la
hausse du chômage, les gouvernements occidentaux,
reniant pour certains leur credo économique libéral, se
sont engagés dans des politiques volontaristes de
soutien à l’activité, allant, comme au Royaume-Uni,
jusqu’à recourir à la nationalisation.

3. QUE FAUT-IL PENSER DU


CAPITALISME ?

Le capitalisme, en tant que système économique et


social, a été abondamment dénoncé, notamment par
Marx et les marxistes. La tradition keynésienne le
reconnaît comme efficace, à condition que durant les
moments de crise et de chômage l'État appuie le
marché. Les économistes libéraux, quant à eux, font
l'apologie du système capitaliste tout en rejetant
l'intervention de l'État.

Karl Marx

C'est le philosophe et économiste Karl Marx (1818-


1883) qui s'est montré le plus virulent à l'endroit du
capitalisme. Dans de nombreux ouvrages, en
particulier le Capital (1867), il condamne, sans
circonstances atténuantes, le capitalisme. Sur le
marché du travail, les propriétaires des moyens de
production, c'est-à-dire la bourgeoisie capitaliste,
achète la force de travail à un prix, le salaire, qui
s'avère inférieur à la valeur créée par les ouvriers.
Cette différence entre le salaire payé à l'ouvrier et la
valeur qu'il peut produire constitue ce que Marx
appelle la « plus-value ». Il s'agit d'un surtravail qui
caractérise l'exploitation par la classe dominante, celle
des propriétaires, de la classe des ouvriers. Pour Marx,
le capitalisme n'est rien d'autre que la domination des
forces du capital sur les forces du travail. Il appelle de
tous ses vœux le déclenchement d'un processus
révolutionnaire qui renversera la bourgeoisie en
supprimant la propriété privée des moyens de
production. La classe ouvrière, une fois parvenue au
pouvoir, prendra en main la conduite de l'économie et
permettra l'instauration du socialisme.
+

Vous aimerez peut-être aussi