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capitalisme

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Cet article fait partie du DOSSIER consacré à


la révolution industrielle
industrielle..

Le capitalisme est un système de


production dont les fondements
sont l'entreprise privée et la
liberté du marché. Il s'agit d'un
ensemble d'éléments solidaires
dont les relations permettent la
production, la répartition et la
consommation des richesses
indispensables à la vie d'une
collectivité humaine. Le
capitalisme est à la fois un système
économique, mais aussi un type
d'organisation sociale. C'est
aujourd'hui le système économique
dominant dans le monde, qui est à
l'origine du phénomène de
mondialisation.

1. QU'EST-CE QUE LE
CAPITALISME ?

Le capitalisme est un système composé de


plusieurs éléments. L'ensemble des auteurs
s'accordent à le définir à partir des
caractéristiques suivantes : le capitalisme repose
sur la propriété privée des moyens de
production, la division du travail, l'existence d'un
marché qui permet la régulation de l'activité
économique, l'objectif d'un profit individuel pour
les propriétaires du capital et la séparation entre
le capital et le travail. Il convient également
d'ajouter un certain état d'esprit, la présence de
certaines représentations collectives qui sont
inséparables du système capitaliste.

1.1. LE CAPITALISME EST FONDÉ SUR LA


PROPRIÉTÉ PRIVÉE DES MOYENS DE
PRODUCTION
Cette caractéristique est la plus souvent
évoquée pour définir le capitalisme. On entend
par moyens de production tout ce qui permet de
produire, c'est-à-dire les terres, les bâtiments,
les machines ou les outils qui, exploités par le
travail de l'homme, aboutissent à la réalisation
des biens et des services qui permettent la
consommation, et donc la survie, des
populations. L'histoire de la propriété est aussi
vieille que l'histoire de l'homme. C'est souvent
une histoire controversée, notamment entre
ceux qui possèdent les instruments de
production et ceux qui ne les possèdent pas.
L'un des premiers à défendre la propriété privée
est le philosophe grec Aristote (384-322 avant
J.-C.). Ce dernier considère que la propriété est
un des plaisirs de la vie et que l'homme se
soucie plus de ce qui lui appartient en propre
que de ce qui appartient à tout le monde. Saint
Thomas d'Aquin
d'Aquin, dans la Somme
théologique , synthèse de la pensée
aristotélicienne et de la pensée chrétienne,
reprend la même idée mais en préconisant la
charité auprès de ceux qui sont dans le besoin.
Le développement des villes, de l'artisanat,
l'apparition de la bourgeoisie sont liés à
l'existence de la propriété. Les révolutions
libérales de la fin du XVIIIe s., notamment la
Révolution française de 1789, consolideront le
rôle de la propriété privée. L'article 17 de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
(26 août 1789) précise que la propriété est un
droit inviolable et sacré.

1.2. L'ÉCONOMIE CAPITALISTE REPOSE


SUR LA DIVISION DU TRAVAIL
La répartition des tâches n'est pas spécifique
des sociétés capitalistes, néanmoins la division
des rôles productifs y est plus développée que
dans le cadre des systèmes économiques
antérieurs. Les sociétés rurales, qui ont précédé
l'instauration du capitalisme industriel, étaient
marquées par une faible différenciation entre les
fonctions de chacun. Le travail de la terre, le
temps des moissons supposaient la
collaboration d'un grand nombre d'hommes, de
femmes, d'enfants sans réelles spécialisations
professionnelles.

Adam Smith

La naissance du capitalisme industriel,


l'avènement de la manufacture se traduiront par
une division accrue des tâches entre les agents
productifs. À cet égard, l'exemple le plus célèbre
est sans nul doute la division du travail dans une
manufacture d'épingles à la fin du XVIIIe s., telle
qu'elle est décrite et commentée par Adam
Smith (1723-1790), dans la Richesse des
nations (1776). Dans cette entreprise, la
réalisation matérielle de chaque épingle est
divisée en dix-huit opérations distinctes. Cet
éclatement du processus de production permet,
et c'est sa raison d'être, une augmentation
substantielle de la production par
travailleur employé. En langage économique
moderne, on dirait que la division du travail
permet d'augmenter la productivité, c'est-à-
dire le rapport entre une certaine quantité de
produit et le nombre des travailleurs recrutés
pour la réaliser.
Par la suite, au XIXe s. et au XXe s., on assistera à
de nouveaux progrès dans la division du travail
avec les méthodes mises au point par l'ingénieur
américain Frederick Winslow Taylor (1856-
1915), à l'origine du « taylorisme » ou
« organisation scientifique du travail ».
L'industriel Henry Ford (1863-1947), quant à lui,
reprendra les idées de Taylor et ajoutera, dans
les années 1910, le principe du convoyeur. Ce ne
sont plus les ouvriers qui se déplacent autour
des véhicules automobiles en construction, mais
ce sont les moteurs qui défilent devant les
ouvriers. Il s'agit du principe du travail à la
chaîne
chaîne. Le système créé par Henry Ford, ou
modèle fordiste, a permis, d'abord aux États-
Unis puis dans tous les pays capitalistes
développés, l'apparition de la production et de
la consommation de masse.

1.3. LE CAPITALISME, EN TANT QUE


SYSTÈME ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE
PRODUCTION, EST RÉGULÉ PAR LE
MARCHÉ

Bourse des valeurs de New York

Aussi les expressions « économie capitaliste » ou


« économie de marché » sont-elles souvent
considérées comme synonymes. Le marché est
un lieu qui permet la confrontation de l'offre et
de la demande de produits. Le marché peut être
de dimension locale, nationale ou
internationale. Les transactions peuvent porter
sur des marchandises, par exemple l'automobile,
des services comme le travail humain ou des
produits financiers comme les actions qui
s'échangent à la Bourse
Bourse, appelée également
« marché financier ». Sur tous ces marchés, une
certaine quantité de produits est proposée aux
acheteurs à un certain prix. Ces produits
constituent l'offre. Les intentions d'achat des
consommateurs constituent la demande.
Le marché permet la régulation de l'activité
économique. Il est au cœur de l'économie
libérale. Adam Smith, toujours dans la Richesse
des nations, montre que le marché fonctionne
comme une sorte de « main invisible » qui guide
les intérêts individuels vers la satisfaction des
besoins de la collectivité. Celui qui cherche à
s'enrichir ne peut aboutir dans son projet qu'à la
condition que ses produits puissent répondre
aux attentes de ceux qui les achèteront. Si les
produits ne correspondent pas à la demande ou
s'ils sont d'un prix trop élevé, les
consommateurs bouderont les produits
proposés et notre producteur fera faillite. C'est
ainsi que le marché permet de passer de la
recherche égoïste du profit individuel à la
satisfaction du plus grand nombre. Adam Smith
entend par marché un marché où règne la
concurrence. C'est grâce à la concurrence qui
s'exerce entre les producteurs que les
consommateurs peuvent bénéficier de produits
de qualité, à des prix attractifs.
Selon l'économiste américain Paul Anthony
Samuelson (né en 1915), prix Nobel d'économie
en 1970, le marché assure également la
régulation de l'économie dans la mesure où il
permet de trouver des réponses aux trois
grandes questions qui se posent en matière de
production, de répartition et de consommation
des richesses.
– Tout d'abord, le marché permet de répondre à
la question : « que produire ? » Les
entreprises, qui réalisent les biens et les
services, les proposent aux consommateurs sur
le marché. Les consommateurs, par leurs achats,
ou leur absence d'achat, vont ainsi manifester
leurs préférences à l'égard des entreprises. On
parle alors de souveraineté du consommateur
sur le marché.
– La deuxième question est « comment
produire ? » Les quantités de facteurs de
production disponibles sur le marché (la terre, le
travail humain, le capital technique), de même
que le prix des facteurs de production
constitueront autant d'informations précieuses
pour les chefs d'entreprise. Si les hommes qui
désirent travailler sont en quantité insuffisante
par rapport aux besoins des firmes, le chef
d'entreprise substituera l'emploi de la machine
au recours à la main-d'œuvre. Il agira de même
si le prix du travail est trop élevé par rapport aux
frais d'installation et d'entretien des machines.
– Le marché permet de répondre à la troisième
question : « pour qui produire ? » La production
est alors destinée à tous ceux qui possèdent un
pouvoir d'achat suffisamment important pour se
procurer les biens et les services auxquels ils
aspirent.

1.4. L'ÉCONOMIE CAPITALISTE REPOSE


SUR LA RECHERCHE DU PROFIT
Le profit est le revenu de l'entrepreneur
capitaliste. Dans la théorie économique, le profit
est distinct du salaire, revenu du travail, et de la
rente, revenu du propriétaire foncier. Le profit
est un résidu, c'est-à-dire qu'il est égal au
produit des ventes de l'entreprise auquel on
retranche l'ensemble des charges comme les
salaires, l'achat des matières premières et des
machines, les impôts et taxes. Pour l'économiste
autrichien Schumpeter (1883-1950), le profit est
la rémunération de l'entrepreneur dynamique. Le
chef d'entreprise qui met en œuvre une
innovation
innovation, comme la création d'un nouveau
produit ou l'introduction d'une nouvelle
méthode dans la production, bénéficie d'un
profit qui vient récompenser le dynamisme dont
il a su faire preuve. Ce profit est un profit de
monopole, mais à court terme. En effet, un
industriel qui installe seul sur le marché un
nouveau produit qui rencontre la faveur de
l'ensemble des consommateurs va accroître ses
marges de profit. Seulement, par un effet
d'imitation, de nouveaux entrepreneurs vont à
leur tour se lancer dans la fabrication du
nouveau produit et, à moyen terme, les profits
vont baisser.

1.5. LE CAPITALISME SE CARACTÉRISE


PAR LE RAPPORT SALARIAL
En effet, les employeurs, c'est-à-dire les chefs
d'entreprise, sont juridiquement séparés des
salariés. Les uns disposent de leur force de
travail qu'ils vendent aux entreprises, les autres,
propriétaires des instruments de production,
achètent la force de travail à son prix de
marché : le salaire. Il existe un marché libre du
travail qui réunit des hommes libres. Cette
distinction est importante dans la mesure où
elle permet de différencier le capitalisme
moderne du système économique des sociétés
antiques et médiévales où le travail était régi par
le système de l'esclavage ou du servage. Le
rapport salarial est un rapport contractuel. Un
individu accepte, par contrat, d'exercer une
activité productive pour le compte d'un
employeur. Ce contrat de travail peut être rompu
par l'une ou l'autre des parties en présence dans
le cadre de la législation du travail.

1.6. ENFIN, L'ÉCONOMIE CAPITALISTE


EST FONDÉE SUR LA GÉNÉRALISATION
DE COMPORTEMENTS RATIONNELS
D'UN POINT DE VUE ÉCONOMIQUE

Max Weber

Le sociologue allemand Max Weber (1864-1920),


notamment dans un article qui fera date,
L'éthique protestante et l'esprit du
capitalisme (1901), montre que le capitalisme
repose sur la rationalisation des activités
collectives. Weber entend par rationalité, ou
processus de rationalisation, l'adaptation d'un
ensemble de moyens en vue d'atteindre un
objectif déterminé. Dans les sociétés
précapitalistes, les difficultés économiques,
comme par exemple l'insuffisance des récoltes,
étaient perçues comme relevant d'une punition
divine. Les pratiques religieuses, le recours à la
magie, l'invocation du surnaturel étaient
relativement fréquents. Les « nouvelles
mentalités collectives » qui vont naître au XVIe s.,
à la faveur de la diffusion du protestantisme
(Weber a démontré que les entrepreneurs
protestants ont su assimiler réussite
commerciale et signe de prédestination), auront
comme conséquence l'apparition d'attitudes et
de comportements sociaux plus rationnels. Ainsi,
lorsqu'un entrepreneur embauche des salariés
en leur donnant des instructions précises quant
à leur travail, lorsqu'il se procure les biens
d'équipement nécessaires à la réalisation de la
production, il agit rationnellement à l'endroit de
son objectif prédominant, à savoir produire des
biens économiques en vue de les vendre sur le
marché. En même temps, il recherche par cette
activité l'obtention du profit le plus important
possible. Pour Weber, la rationalisation
économique s'incarne dans le capitalisme
moderne.

1.7. CONCLUSION
Ces caractéristiques qui permettent de définir le
système capitaliste se retrouvent dans
l'entreprise moderne. Ainsi l'économiste français
François Perroux (1903-1987), dans le
Capitalisme (1948), évoque l'entreprise comme le
microcosme du capitalisme. L'entreprise est
l'institution cardinale du capitalisme dans la
mesure où elle associe la propriété privée,
l'initiative individuelle, la division du travail, la
séparation du travail et du capital à la recherche
du profit par des stratégies rationnelles.
L'économie capitaliste, régulée par le marché, est
souvent entendue comme une économie
d'entreprises.

2. LES GRANDES ÉTAPES DU


CAPITALISME

2.1. INTRODUCTION
Le capitalisme n'est pas un système immuable
dans ses structures. Il se transforme au fur et à
mesure de l'évolution des éléments qui le
composent, notamment sous l'impulsion du
progrès technique. Aussi distingue-t-on un
capitalisme commercial qui se met en place vers
la fin du Moyen Âge et qui perdurera jusqu'au
milieu du XVIIIe s. Un capitalisme industriel et
bancaire qui couvre le XIXe s. Enfin le capitalisme
contemporain, ou néocapitalisme, qui apparaît
vers la fin du XIXe s., mais qui se développera
surtout après la Seconde Guerre mondiale.

2.2. LE CAPITALISME COMMERCIAL DES


TEMPS MODERNES (XVIe S., XVIIe S. ET
XVIIIe S.)

Quentin Metsys, le Prêteur et sa femme

Le capitalisme dit « commercial » apparaît vers


la fin du Moyen Âge. Pour l'historien français
Fernand Braudel (1902-1985), les premiers
soubresauts du capitalisme sont repérables à
Venise dès le XIVe s. On y trouve, en gestation, les
éléments d'un nouveau système économique qui
progressivement remplaceront ceux de la société
féodale : des marchés, des magasins, des foires,
des changeurs et des banquiers. La capitale de la
Vénétie devient une véritable plaque tournante
pour toute une gamme de marchandises qui
proviennent d'Europe, des îles du Levant ou des
villes de l'Adriatique.
Les gouvernements ne seront pas en reste dans
ce mouvement de mutations et d'enrichissement
économiques. Les économistes de l'époque
conseillent les princes dans le but d'accroître
leurs richesses et celles de leurs sujets. Il
s'ensuit une vague de grandes expéditions par-
delà les océans à la recherche de nouvelles
terres, suivies d'une période de colonisation et
aussi… d'exploitation des richesses des pays
conquis et des peuples colonisés. C’est par
l'intermédiaire de sociétés par actions –
précurseurs des sociétés de capitaux
modernes –, que les riches négociants ont pu
financer leurs expéditions. Cependant, le grand
négoce est resté soumis pendant toute cette
période au contrôle des gouvernements
nationaux qui souhaitaient, au nom de la
doctrine mercantiliste
mercantiliste, préserver d'abord la
richesse de l'État. Le système des plantations au
e
XVI s. n'en est pas moins déjà révélateur d'une

démarche capitaliste à l'échelle mondiale. La


création des plantations aux Amériques a
supposé des transferts de ressources d'un
continent à un autre. On parlerait aujourd'hui de
transferts de technologies et de savoir-faire, de
même que de migrations professionnelles. Il a
été nécessaire d'importer des plantes d'Afrique,
on a usé du savoir-faire portugais pour
l'exploitation de la canne à sucre, des colons ont
dû quitter la vieille Europe pour le Nouveau
Monde. Enfin, comme il fallait une main-d'œuvre
abondante, les Occidentaux ont acheté des
esclaves africains : c'est la « traite des Noirs ».

2.3. LE CAPITALISME INDUSTRIEL DU


XIXe S.

Au capitalisme commercial va succéder, dans le


courant du XVIIIe s., une nouvelle forme
d'organisation économique articulée autour de
l'entreprise capitaliste, de la concentration de
grandes masses de travailleurs et, surtout, de
l'utilisation du progrès technique. C'est en
Grande-Bretagne que naît la révolution
industrielle qui va complètement modifier les
structures de l'économie européenne et
progressivement, par effet d'imitation, celles de
l'économie mondiale.
La première activité à être touchée par le
progrès technique est le textile. Les grandes
innovations du secteur textile comme la navette
volante de John Kay, en 1738, ou le métier à
tisser de Cartwright, mis au point en 1785,
permettront d'accroître considérablement la
production de tissu à un moment où la
population européenne augmentait dans de
grandes proportions. Mais c'est surtout la
machine à vapeur de l'Écossais James Watt,
mise au point entre 1769 et 1782, qui constituera
la plus profonde rupture avec les modes de
production antérieurs. Utilisée pour les
transports terrestres et maritimes, la vapeur
remplacera les forces naturelles (eau, vent, force
humaine ou animale). Il s'ensuivra une
augmentation sans précédent de la production
et de la productivité du travail.
Parallèlement, on assiste à la création de
l'entreprise moderne. Celle-ci suppose, à sa tête,
un entrepreneur qui assume la mission de
rechercher, dans son environnement, les
ressources productives (matières premières,
machines, main-d'œuvre), en vue de les agencer
dans le cadre de la combinaison productive et
de produire les biens et les services destinés aux
consommateurs. Comme le souligne
Rostow, dans les Étapes
l'économiste américain Rostow
de la croissance économique (1960), l'existence
d'une classe d'entrepreneurs est indispensable à
l'émergence d'une économie moderne.
Si l'entrepreneur investit, c'est-à-dire augmente
son stock de capital (machines, instruments de
production), il doit également embaucher des
travailleurs pour faire tourner l'entreprise. Dans
le système préindustriel ou précapitaliste, la
production manufacturière est tirée d'une
activité artisanale autonome, ce qu'on appelle le
« domestic system » : un donneur d'ouvrage
remet des matières premières et des outils à des
travailleurs ruraux qui confectionnent, durant la
morte saison, des produits manufacturés. Une
fois les travaux réalisés, le donneur d'ouvrage les
récupère et rémunère le travail accompli. Avec
l'industrialisation, le « domestic system »
disparaît au profit du « manufactory system ».
Celui-ci suppose le rassemblement des ouvriers
dans un même lieu à des fins productives. Ainsi
naît, dans le courant du XIXe s., une nouvelle
classe sociale : celle des ouvriers d'industrie.
En même temps, le capitalisme va se développer
en dehors de l'Europe et connaître une
expansion internationale. L'extraction minière, le
développement de l'industrie pétrolière
nécessiteront la création d'entreprises
multinationales pour alimenter le continent
européen en matières premières énergétiques.
Durant la phase industrielle du capitalisme, la
régulation de l'activité économique a surtout été
le fait du marché. L'État n'est pratiquement pas
intervenu, suivant en cela les recommandations
des économistes libéraux britanniques ou
français. C'est une période de « laisser-faire »
qui consacre le triomphe de l'initiative
individuelle.

2.4. LE NÉOCAPITALISME DU XXe S.


L'évolution contemporaine du capitalisme,
appelé « néocapitalisme », se traduit par un
certain nombre de transformations qui vont
affecter en profondeur les structures
économiques et sociales des pays occidentaux.
Certaines d'entre elles sont repérables dès le
dernier tiers du XIXe s., d'autres prendront forme
après la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Indubitablement, le capitalisme a changé, qu'il
s'agisse de la taille des entreprises, du régime de
la concurrence ou de l'extension des marchés.
Parallèlement, on peut noter une plus grande
intervention de l'État dans l'économie.
L'une des principales modifications de
l'économie capitaliste, vers la fin du XIXe s.,
concerne la taille des entreprises. Si le
capitalisme de la période industrielle se
caractérise par l'existence d'un grand nombre
d'entreprises petites et moyennes, le
néocapitalisme voit le triomphe de la grande
entreprise. L'entreprise moderne suppose la
réunion de ressources financières sans
comparaison possible avec les mises de fonds
des premières unités de production capitaliste.
Les équipements sont de plus en plus coûteux,
la production est destinée à un nombre toujours
plus important de consommateurs. Le prix des
biens d'équipement, les dépenses de recherche-
développement ne peuvent être rentables qu'à
partir d'une certaine dimension en termes de
parts de marché. L'entreprise du XXe s. est, par ce
fait même, condamnée à la grande dimension
dans un système qui associe la production de
masse à la consommation de masse.
L'augmentation de la dimension de l'entreprise
peut s'effectuer par la croissance interne, par
l'investissement, c'est-à-dire l'accumulation du
capital, ou par la croissance externe, qui repose
sur la réunion de deux ou de plusieurs
entreprises. Un chef d'entreprise, plus
dynamique que les autres, rachète ou s'associe
avec ses concurrents. Il s'ensuit que l'on se
trouve face à un nombre de moins en moins
important de firmes, mais ces dernières sont de
plus en plus grandes. Le cas extrême de ce
processus est l'apparition d'un monopole, c'est-
à-dire une seule entreprise face à une multitude
de clients-consommateurs. Les États ne sont pas
restés passifs face aux dangers occasionnés par
une situation de monopole. Ainsi les États-Unis
furent-ils à l'origine d'une législation antitrust
(Sherman Act de 1890 et Clayton Act de 1914).
La grande entreprise moderne présente
également des changements du point de vue de
ses structures juridiques et de l'organisation du
pouvoir de direction. Dès le dernier tiers du
e s., le développement des industries
XIX

métallurgiques, de la chimie, de l'exploitation


pétrolière a supposé la réunion de capitaux
colossaux. Un seul propriétaire, ou un petit
groupe de propriétaires, ne pouvait disposer
d'une fortune suffisamment importante pour
financer des activités donnant naissance à de
tels empires industriels. Aussi le recours à
l'épargne publique a-t-il été nécessaire.
Progressivement, un grand nombre d'entreprises
individuelles sont devenues des sociétés de
capitaux, notamment sous la forme de la société
anonyme. Les entreprises individuelles n'ont
certes pas disparu, mais leurs activités sont
souvent orientées vers le commerce, vers les
services aux particuliers ou vers la sous-
traitance destinée aux grandes entreprises.
La grande firme appartient à ses actionnaires,
qui sont essentiellement intéressés par une
augmentation de la valeur de leurs actions et la
distribution de dividendes (revenu de l'action).
De surcroît, la grande majorité des actionnaires
n'a guère les compétences techniques pour
prendre en charge les destinées de la firme.
Aussi le pouvoir décisionnel dans la grande
entreprise moderne passe-t-il des propriétaires
(les actionnaires) à des managers recrutés en
fonction de leur savoir-faire en matière de
gestion et d'organisation d'entreprise. C'est ce
que souligne l'économiste américain John
Galbraith, dans le Nouvel État
Kenneth Galbraith
industriel (1967), à partir d'une étude portant sur
l'évolution du capitalisme américain depuis la fin
de la Seconde Guerre mondiale.

Manifestation de chômeurs à Chicago en 1934

Indépendamment des transformations qui ont


affecté le monde de l'entreprise, l'évolution du
capitalisme contemporain se caractérise
également par une croissance de l'intervention
de l'État par rapport au fonctionnement des
seuls mécanismes spontanés du marché et de la
concurrence. La grande crise des années 1930 et
son cortège de chômage et de faillites ont
souligné l’incapacité du marché à s’autoréguler.
Dans sa Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt
et de la monnaie (1936), l'économiste
britannique John Maynard Keynes (1883-1946)
préconise l'adoption de politiques fiscale et
monétaire réfléchies pour stabiliser l'économie
et assurer ainsi le retour au plein emploi. En
1942, durant la Seconde Guerre mondiale, le
député libéral britannique William Henry
Beveridge rédige un rapport, Social Insurance
and Allied Services. Ce document sera à l'origine
de l'« État providence » ou « Welfare State ».
Parallèlement aux politiques économiques de
soutien de l'activité, de recherche de la
croissance et de lutte contre le chômage vont
naître des politiques sociales destinées à
protéger les individus en cas de détérioration de
leurs conditions de vie (maladie, vieillesse,
chômage). Le capitalisme moderne n'est plus
seulement fondé sur la libre entreprise et le
marché concurrentiel, il est articulé à partir d'un
système d'économie mixte qui associe les
mécanismes du marché et l'interventionnisme
étatique.
Ce système n’en met pas pour autant le
capitalisme à l’abri de toute épreuve. Dans les
années 1970, il a traversé une nouvelle crise,
caractérisée par la conjonction de deux fléaux,
l'inflation et le chômage. Jusque-là, les
économistes avaient toujours considéré qu'ils ne
pouvaient pas sévir simultanément ; en effet, le
chômage était caractéristique des périodes de
récession, et l'inflation des périodes de
prospérité. Cependant, dans les années 1970, un
taux de chômage élevé a coïncidé, dans les pays
industrialisés d'Europe comme aux États-Unis,
avec une forte inflation. À cause de cette
stagflation, les gouvernements ont été
confrontés à un dilemme, la lutte contre
l'inflation provoquant une recrudescence du
chômage, et la résorption du nombre des
chômeurs relançant la hausse des prix et des
salaires.
Pour sortir de la crise, une solution a été de
revenir aux « fondamentaux » du capitalisme du
Les séniors ne paient rien grâce à cette mutuelle
laisser-faire. Cette politique a particulièrement
Dentaire, optique, auditif, hospitalisation... 100% remboursés
été appliquée aux États-Unis, à partir de l’arrivée
En savoir plus
de Ronald Reagan à la Maison-Blanche (1980),
et au Royaume-Uni, dirigé parMargaret Margaret

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Thatcher
Thatcher(1979). Par delà ses succès et ses
échecs, cette politique a conduit au fil du temps
à l’hypertrophie incontrôlée des marchés

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