Dans une seconde partie du texte Simone Weil explique que
la révolution devient mensongère lorsqu’elle se définit comme une révolte contre le malheur inhérent à la condition ouvrière, et qu’aucune révolution n’abolira ce malheur. En effet selon l’auteure l’idée révolutionnaire et bonne et saine seulement lorsqu’elle se révolte contre l’injustice sociale. Pour Simone. Weil l’idée révolutionnaire est juste et équitable si elle a pour seul objectif de se révolter contre l’injustice l.8. Nous pouvons interpréter que la révolution ouvrière est propre à chacun c’est-à-dire que tout être se forge dans son âme sa propre idée de la révolution ouvrière. Mais pour S. Weil l’idée révolutionnaire admet une double facette. D’une part elle peut être juste et équitable, mais d’une autre part elle est utopique. Cette idée révolutionnaire est contrastée par le fait qu’elle finit par perdre son sens et devient un mensonge. Simone Weil formule une thèse qui nous explique que l’idéal révolutionnaire devient mensonger quand il promet de se révolter contre le malheur inhérent à la condition ouvrière l.9-10. En effet la conception de l’injustice est différente selon chaque individu, ce qui peut entraîner une volonté de domination sans limite sur l’ensemble de l’humanité. Ce qui était au début une lutte légitime pour l’amélioration des conditions de travail des ouvriers se transforme en un idéal révolutionnaire qui veut radicalement changer la société en renversant ceux qui sont à la tête de la société. Ce qui relève de l’absurde puisqu’en renversant les dirigeants de la société les ouvriers mettrons eux aussi en place un système tout aussi oppressif que le précédent voir encore plus. Elle continue son explication en énonçant le fait qu’aucune révolution ne peut abolir l’inhumanité de la condition ouvrière (l.10). Quand elle fait référence à l’inhumanité de la condition ouvrière, l’auteur dresse une critique du système d’organisation du travail, le fordisme où on a un travail à la chaîne, répétitif qui ne confère aucun prestige à la réalisation de ces tâches. En effet S. Weil affirme que la révolution n'est pas une réponse au malheur et qu’elle n’y changera rien, ce qui pousse à une remise en question de la révolution et la caractérise d’absurde et inutile car une question essentielle se pose, pourquoi faire une révolution quand on sait qu’elle ne mènera à aucuns changements. Nous pouvons illustrer le propos de l’auteur avec la création de camp de travail forcé « les goulags » (développés comme instrument de terreur et d’expansion industrielle). La mise en place des goulags reflète l’aboutissement logique de la révolution communiste qui montre encore une fois le comportement absurde de la classe ouvrière, dont le rêve qui était une société sans oppression s’est transformée en un véritable massacre faisant des millions de morts. L’auteur montre que cette dernière affirmation soulève un problème de taille dans la mesure où le mensonge révolutionnaire exerce la plus grande emprise sur la conscience ouvrière. La raison en est que ce malheur inhérent à la condition ouvrière est vécu d’une manière beaucoup plus violente que l’injustice sociale (l.10-12). Puis Simone Weil précise qu’il est courant de confondre le malheur avec l’injustice sociale qui sont pourtant deux réalités bien différentes pour les ouvriers. Rappelons la thèse de Simone Weil selon laquelle l’idée révolutionnaire est bonne et saine seulement lorsqu’elle se révolte contre l’injustice sociale. Nous pouvons nous demander alors quel est le fondement de cette thèse, et quel en est le destinataire ? Dans la troisième partie du texte S. Weil nous explique la conséquence qu’elle en tire qui est une critique de l’idée révolutionnaire chez Marx qui dit que la religion est l’opium du peuple alors que la religion alors que c’est essentiellement à la révolution que cette qualification convient. Qualifier la religion d’opium du peuple comme le faisait Marx pouvait être pertinent lorsqu’elle n’était plus fidèle à son message authentique mais, en réalité c’est bien davantage à la révolution que conviendrait ce qualificatif (l.13-15). La religion désigne l’ensemble des croyances et des rites collectifs ayant pour fonction de mettre en communication l’être humain avec une réalité transcendante et d’apporter des réponses aux questions fondamentale de son existence. Selon l’auteur la religion ne peut donc pas être qualifié « d’opium du peuple » car elle ne cherche pas à abolir le malheur dont l’humanité peut faire l’expérience, mais cherche à en accepter l’existence et lui donner du sens. Le véritable opium du peuple pour Simone Weil est en revanche l’espoir révolutionnaire. En fait la pensée marxiste repose sur une philosophie de l’histoire qui se présente comme une parodie de la religion. Dans la phrase suivante Simone Weil va même associer l’espoir de la révolution aux stupéfiants (l.15), pour montrer que les promesses illusoires que la révolution suscite dans la classe ouvrière agit sur leur conscience comme une véritable drogue qui leur fait oublier provisoirement le malheur essentiel de leur condition. Et Simone Weil en conclu de sa critique de l’idée révolutionnaire chez Marx, que les promesses que fait miroiter l’idéal révolutionnaire agissent toujours sur la conscience ouvrière comme une drogue puissante, par laquelle ils cherchent à s’évader du malheur inhérent de leur condition de travail. Elle montre que la révolution est au final un acte dangereux et dénonce l’idéalisme de Marx qui fait croire à une impossible révolution. Pour Marx la dictature du prolétariat est une conséquence nécessaire dans la lutte des classes et que celle-ci ne constitue qu’une transition à l’abolition de toute classes et à une société sans classe. Nous pouvons vite contredire les propos de Marx en mentionnant l’exemple de la révolution Russe, qui prend une toute autre tournure lorsque Lénine fait son arrivée en Russie pour en prendre le contrôle de l’Etat avec l’aide du mouvement révolutionnaire le plus radical, les Bolchéviks. Cela marque le début d’une guerre civile qui durera 4 ans entre les partisans de la révolution et toute catégories de personnes considérées comme des opposants politique qui refusent la terreur révolutionnaire des bolchéviks. La lutte des classes n’est donc pas une transition à une société sans classe mais au contraire, elle peut même parfois renforcer cette hiérarchie qui existe déjà entre les classes.
CCL : Dans cet extrait Simone Weil a commencé par affirmer
que l’idée révolutionnaire peut malgré tout être légitime à condition qu’elle se définisse comme une révolte contre l’injustice sociale pour ensuite soutenir que la révolution devient mensongère lorsqu’elle se définit comme une révolte contre le malheur inhérent à la condition ouvrière, pour enfin en tirer une conséquence critique de la thèse de Marx. Ainsi pour l’auteur il est clair que ce sentiment de révolte contre les injustices sociales que subissent les ouvriers va se transformer en un idéal révolutionnaire qui veut changer radicalement l’organisation de la société en renversant ceux qui détiennent le pouvoir. Cette thèse présente 2 enjeux principaux d’une part un enjeux politique en faisant référence aux régimes totalitaires avec l’impérialisme ouvrier et l’impérialisme national, et d’une autre part un enjeux religieux déterminant pour les ouvriers qui rentre en opposition avec celle de Marx, elle montre que la religion n’est pas l’opium du peuple. Mais que le malheur inhérent à leur condition sociale peut être mieux accepté s’ils parviennent à redonner une destination surnaturelle à leur fonction sociale. C’est dans la réalité matérielle de leur travail, aussi pénible qu’il puisse être, qu’ils peuvent retrouver la présence de Dieu.