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LEBAI

LDÉROGATOIRE
AUSTATUTDESBAUX
COMMERCIAUX

I
mmobi
l
ier
IMMOBILIER

Le propriétaire de locaux commerciaux et son locataire peuvent écarter l’application du


statut des baux commerciaux en concluant un bail de courte durée, encore dénommé « bail
dérogatoire ».
Quelles précautions les parties doivent-elles prendre pour ne pas s’engager durablement ?
Qu’est-ce qui distingue le bail de courte durée de la location saisonnière ?
Quelles précautions doit prendre le bailleur à l’expiration du bail pour qu’il ne dégénère pas
en bail commercial ?
Ce livre blanc, extrait de l’édition 2019-2020 du Mémento Baux commerciaux qui vient de
paraître, répond à ces questions.

BAIL DE COURTE DURÉE

SECTION 1 Généralités

3000
Le bail de courte durée a été conçu par le législateur pour être un « bail à l'essai » devant
déboucher sur un bail commercial. Il permet au bailleur de ne pas s'engager à long terme avec
un locataire dont il ne sait rien ; réciproquement, il donne la possibilité au locataire de vérifier
la qualité de l'emplacement loué pour l'exercice de son commerce.

Précisions
La durée maximale d'un bail de courte durée a été allongée par la loi du 18 juin 2014 car il a été
constaté que la durée initiale n'était pas toujours suffisante pour tester la rentabilité d'une activité
commerciale ou artisanale, tout particulièrement dans la période actuelle d'incertitude pour le commerce
(Rapport AN n° 1739 relatif à la loi 2014-626 du 18-6-2014).

DÉFINITION

3010
L'article L 145-5 du Code de commerce offre la possibilité aux parties qui remplissent les
conditions requises pour que leur bail soit soumis au statut des baux commerciaux de conclure
un bail dérogeant aux dispositions de ce statut.
Pour éviter les fraudes à la loi, l'article L 145-5 enferme cette faculté dans des limites très
précises : le bail doit être conclu lors de l'entrée dans les lieux du locataire pour une durée
maximale de trois ans (n° 3300 s.).
L'expression « bail dérogatoire » est souvent utilisée par les praticiens pour désigner un bail
conclu en application de l'article L 145-5.
Attention
La formule « bail précaire » est malvenue et doit être évitée car la précarité est absente de ce
type de bail et peut prêter à confusion avec la convention d'occupation précaire. Or, le bail
dérogatoire n'est pas une convention d'occupation précaire. Il se distingue également de la
location saisonnière.

DISTINCTION AVEC LA LOCATION SAISONNIÈRE

DÉFINITION

3020
Une location est dite « saisonnière » lorsque la convention confère la jouissance des locaux
pour une saison (C. com. art. L 145-5, al. 4).
La notion de « saison » ne suppose pas nécessairement une durée de trois mois mais
correspond plutôt à la saison touristique laquelle varie selon le lieu de situation de l'immeuble
loué.

Illustrations
Le caractère saisonnier a été admis pour une location consentie du 15 mars au 30 septembre,
dans un local en Vendée (Cass. 3e civ. 7-11-1990 n° 89-12.065).
La même solution a été retenue pour une boutique située à Juan-les-Pins au motif qu'il existe
sur la Côte d'Azur deux saisons touristiques bien distinctes pour des raisons climatiques et
balnéaires (Cass. 3e civ. 22-7-1987 n° 86-12.858 : Bull. civ. III n° 150).

3025
Le locataire ne doit plus avoir la jouissance des locaux à l'expiration de la saison. En effet, si
les locaux sont mis à sa disposition de façon continue, la location n'est pas saisonnière au
sens de l'article L 145-5, al. 4 du Code de commerce et ce, même si le fonds n'est exploité que
de façon saisonnière (Cass. 3e civ. 1-3-1972 n° 70-14.539 : Bull. civ. III n° 147 ; CA Nîmes
11-6-1997, 1e ch. A : Loyers et copr. 1999 n° 37). Dans un tel cas, le bail est soumis au statut
des baux commerciaux.
En revanche, la conclusion entre les mêmes parties de plusieurs baux saisonniers successifs
portant sur le même local ne fait pas obstacle à la qualification de « location saisonnière ».

3030
La nature de la location résulte naturellement des clauses du bail ; en cas de litige, il
appartient au juge du fond de restituer à la convention des parties son exacte qualification
compte tenu des circonstances de fait (Cass. 3e civ. 13-3-1973 n° 71-12.566 : Bull. civ. III n°
188 ; Cass. 3e civ. 15-1-1992 n° 88 P : RJDA 3/92 n° 222).
L'ensemble des décisions présentées ci-dessous repose sur des appréciations de fait
souveraines, de sorte qu'il serait imprudent d'en dégager des idées directrices applicables dans
tous les cas d'espèce. Néanmoins, il semble que, d'une manière générale, la nature et la durée
des contrats liés à l'exploitation (électricité, gaz) ainsi que l'imputation des charges diverses
sont retenues comme éléments de preuve. Par ailleurs, le fait que le bailleur tolère notamment
la présence de matériel pendant la période hors saison n'entraîne pas une requalification du
contrat en bail commercial.
Illustrations
Cas où la qualification de location saisonnière a été retenue

Une cour d'appel a pu décider qu'un locataire de locaux commerciaux n'avait bénéficié que de
locations saisonnières exclues du statut des baux commerciaux dès lors qu'elle a constaté que
le locataire avait signé des engagements de locations saisonnières de six mois du 1er avril au
30 septembre, étant spécifié que la location prendrait fin automatiquement à l'expiration du
terme fixé, et que, s'il avait été laissé dans les lieux après la saison, c'était en vertu d'une
simple tolérance du bailleur.
Cass. 3e civ. 13-11-1979 n° 78-13.149 : Bull. civ. III n° 200.

Après avoir constaté que la convention passée ne conférait au locataire que la disposition d'un
emplacement du 15 juin au 15 septembre de chaque année et que le dépôt de matériel en
dehors de la saison était seulement toléré par le bailleur, une cour d'appel a pu en déduire
l'existence d'une location saisonnière, alors même que le locataire s'était assuré pour toute
l'année.
Cass. 3e civ. 22-5-1986 n° 84-16.400 : Bull. civ. III n° 74.

Caractérise l'existence d'une location saisonnière la cour d'appel qui relève les éléments
suivants : hors saison, les lieux étaient effectivement libérés de marchandises ; les clefs
étaient remises en fin de saison, le locataire les récupérant en début de saison suivante ;
l'accès du locataire aux locaux à la suite d'une tentative de vol, la présence hors saison de
l'enseigne et du mobilier, voire de quelques marchandises, relevaient d'une simple tolérance
en raison des bonnes relations entre les parties ; les modalités de souscription des contrats
d'abonnement téléphonique ou d'assurance étaient sans incidence sur l'occupation réelle qui
n'était pas annuelle.
Cass. 3e civ. 13-7-1999 n° 1271 D : RJDA 11/99 n° 1050.

A légalement justifié sa décision la cour d'appel qui a déduit des constatations suivantes
l'existence d'une location saisonnière : le locataire n'exploitait son commerce de vente de prêt-
à-porter que de Pâques à septembre ; la galerie dans laquelle était implanté ce commerce était
fermée entre-temps ; un constat d'huissier dressé en octobre avait établi que le local était vide
de marchandises ; le fait que le locataire, qui avait loué les lieux pendant vingt ans, ait gardé
les clés entre deux saisons et réglé à l'année les abonnements de téléphone et d'électricité ne
constituait pas une mise en possession mais une simple tolérance du bailleur qui avait pris la
précaution de lui faire signer un écrit en ce sens.
Cass. 3e civ. 19-4-2005 n° 542 F-D : RJDA 10/05 n° 1076.

A caractérisé l'existence d'une location saisonnière la cour d'appel qui a relevé les éléments
suivants : le locataire n'avais jamais pris plus de vingt-six heures hebdomadaires de location
du court de tennis sur les cent cinq heures offertes à la location pendant les périodes extra-
scolaires ; quatre places de parking et un bureau avaient été mis à sa disposition pendant les
heures louées ; le locataire payait un loyer annuel sans supporter aucune charge locative ; la
commune intention des parties était de conduire des relations exclusives de toute propriété
commerciale ; le locataire n'était que l'un des clients de la société exploitante du court de
tennis et seule titulaire d'un bail commercial.
Cass. 3e civ. 27-11-2007 n° 06-18.176 F-D.

A légalement justifié sa décision de retenir l'existence d'une location saisonnière la cour


d'appel qui a souverainement retenu les éléments suivants : les baux souscrits se définissaient
comme saisonniers et l'activité exercée était incontestablement saisonnière ; les factures
produites démontraient que, pendant l'hiver, le locataire exerçait une activité sur un site
différent ; hors saison, le local était fermé et en grand désordre, ce qui démontrait l'inutilité du
local entre deux saisons ; la simple tolérance du bailleur, qui n'avait pas exigé la restitution
des locaux à la fin de plusieurs saisons consécutives, avait pour seul intérêt d'éviter au
locataire d'avoir à déménager son matériel et ses restes de stock, sans pour autant donner à la
convention un caractère annuel.
Cass. 3e civ. 18-1-2011 n° 10-11.680 F-D : AJDI 2011 p. 211 note S. Porcheron.

Cas où la qualification de location saisonnière a été refusée

Une cour d'appel a pu retenir l'existence d'une location à l'année et non d'une location
saisonnière dès lors qu'elle a relevé que l'assurance payée par le locataire couvrait l'année
entière, que celui-ci s'acquittait du gaz et de l'électricité même pendant la morte-saison durant
laquelle il conservait la libre disposition du local et qu'il avait engagé des travaux de
réparation et de transformation incompatibles avec une location saisonnière.
Cass. 3e civ. 1-3-1972 n° 70-14.539 : Bull. civ. III n° 147.

Une cour d'appel a justement déduit des constatations suivantes que des baux qualifiés de
saisonniers constituaient en réalité un bail unique soumis au statut des baux commerciaux : le
locataire était resté en possession des clés du local depuis la signature du premier bail ; il avait
souscrit des abonnements annuels pour le téléphone et l'électricité et les relevés de ces
services attestaient de consommations pour les périodes situées en dehors de celles prévues
aux baux ; il avait souscrit une police d'assurance annuelle, engagé une employée par un
contrat à durée indéterminée ; des livraisons avaient été effectuées dans le local loué en
dehors des périodes contractuellement convenues et les loyers cumulés par année
correspondaient aux prix pratiqués habituellement dans le secteur pour des locations annuelles
soumises au statut.
Cass. 3e civ. 10-6-1998 n° 959 D : RJDA 8-9/98 n° 953.

Une cour d'appel a souverainement déduit des éléments suivants que les vingt-deux contrats
dits de location saisonnière qui avaient été successivement conclus pour six puis neuf mois
constituaient en réalité un bail soumis au statut des baux commerciaux conclu pour une
exploitation saisonnière : en dehors des périodes d'exploitation, le locataire entreposait des
marchandises dans les locaux dont il conservait la disposition toute l'année ; il réglait les
factures de téléphone, d'eau, d'électricité et d'assurance sur la période annuelle et s'acquittait
des taxes et charges sur la base d'un local loué à l'année ; la remise des clés au terme de
chaque période d'exploitation était manifestement fictive.
Cass. 3e civ. 15-2-2011 n° 10-14.003 F-D : RJDA 7/11 n° 608.

RÉGIME

3040
La location saisonnière est exclue du statut des baux commerciaux (C. com. art. L 145-5, al.
4). Elle obéit exclusivement aux règles prévues aux articles 1709 et suivants du Code civil.
Le maintien du locataire dans les lieux à l'expiration de la location à caractère saisonnier, le
renouvellement de cette location ou la conclusion d'une telle convention entre les mêmes
parties et portant sur le même local n'entraînent pas la formation d'un bail soumis au statut des
baux commerciaux (C. com. art. L 145-5, al. 4). C'est là une différence essentielle avec le bail
de courte durée (voir n° 3900 s.).
SECTION 2 Conditions du bail de courte durée

3300
En application de l'article L 145-5, al. 1 du Code de commerce, la conclusion d'un bail de
courte durée suppose que :
- la durée totale du bail ou des baux successifs n'excède pas trois ans (n° 3420 s.) ;
- le locataire et le bailleur aient voulu conclure un bail dérogatoire au statut des baux
commerciaux (n° 3520 s.).

A. Durée

3420
Les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du locataire, déroger aux dispositions du
statut à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à
trois ans (C. com. art. L 145-5, al. 1).

Précisions
Les dispositions issues de la réforme de 2014 s'appliquent aux baux dérogatoires conclus ou renouvelés
depuis le 1er septembre 2014 (Loi 2014-626 du 18-6-2014 art. 21, II). Les dispositions antérieures, qui
fixaient la durée maximale à deux ans, continuent de régir les baux et les procédures en cours à cette
date.

POINT DE DÉPART DU BAIL

3425
Le point de départ du bail est « l'entrée du locataire dans les lieux », laquelle désigne la prise
de possession des locaux en exécution du bail conclu avec le propriétaire (Cass. 3e civ. 15-4-
1992 n° 651 P : Bull. civ. III n° 129 ; Cass. 3e civ. 30-3-2017 n° 16-10.786 F-D : RJDA 6/17
n° 392).

CALCUL DE LA DURÉE DU BAIL

3430
Pour calculer la durée du bail, il n'est donc pas tenu compte du temps de présence du locataire
dans les lieux avant le point de départ du bail. Ainsi, ne sont pas incluses dans la durée du bail
:
- la période pendant laquelle le locataire a occupé les lieux, avec l'accord du bailleur, afin d'y
réaliser des aménagements pour préparer l'exécution du bail (Cass. 3e civ. 10-5-1977 : Bull.
civ. III n° 197) ;
- la période pendant laquelle le locataire a occupé les lieux sans le consentement du bailleur
car elle constitue alors une occupation de pur fait (Cass. 3e civ. 5-1-1983 n° 81-14.178 : Bull.
civ. III n° 4 ; Cass. 3e civ. 30-3-2017 précité) ;
- la période pendant laquelle le locataire a occupé les lieux en tant que sous-locataire car le
propriétaire des locaux n'est pas partie au contrat de sous-location (Cass. 3e civ. 15-4-1992 n°
651 P : Bull. civ. III n° 129) ;
- la période pendant laquelle le locataire a occupé les lieux en tant que titulaire d'un bail
commercial (Cass. 3e civ. 1-2-2018 n° 16-23.122 F-D : RJDA 4/18 n° 301).
La durée du bail se calcule au jour près. Ainsi, un bail de 36 mois qui commence à courir le
1er janvier 2018 prend fin le 31 décembre 2020.
B. Volonté des parties

3520
La volonté de conclure un bail dérogeant aux dispositions du statut ne se présume pas.
Cette volonté peut être seulement tacite et résulter des circonstances de fait, mais elle doit
être claire et non équivoque. En pratique, les tribunaux reconnaissent rarement l'existence
d'un consentement tacite.

Illustrations
Il a été jugé que le seul fait de fixer pour le bail une durée inférieure à la durée légale
maximale ne suffit pas à caractériser un bail dérogatoire (Cass. 3e civ. 2-2-2005 n° 135 F-PB
: RJDA 5/05 n° 511).
L'accord tacite des parties de déroger au statut a toutefois été admis dans un cas où le bail
conclu pour la durée maximale autorisée était assorti d'une clause de non-concurrence
interdisant au locataire, à l'expiration du bail, d'exploiter dans un périmètre de 500 mètres et
pendant cinq ans un commerce similaire à celui exercé pendant le bail (Cass. 3e civ. 8-11-
1972 n° 71-13.008 : Bull. civ. III n° 588).
De même, la renonciation non équivoque du locataire au statut a été retenue dans les
circonstances suivantes : avant la conclusion de la convention, le dirigeant de la société
locataire avait envoyé un courriel au bailleur pour donner son accord à la signature du bail
pour un an ; la société locataire avait reconnu expressément, à l'expiration de la convention,
ne pas avoir droit à la propriété commerciale, au renouvellement ou au paiement d'une
indemnité d'éviction ; cette société avait une parfaite connaissance des droits auxquels elle
renonçait puisque les parties étaient liées par un bail commercial pour d'autres locaux (CA
Paris 17-2-2016 n° 15/10553 : RJDA 6/16 n° 423).

La volonté de dérogation peut également résulter d'une stipulation expresse du bail affirmant
clairement le choix des parties d'écarter l'application du statut des baux commerciaux. Afin
d'éviter toute difficulté d'interprétation de leur volonté, les parties ont intérêt à insérer une
clause en ce sens dans leur bail.

Modèle
Clause excluant expressément le statut des baux commerciaux

« En toute connaissance de cause et suffisamment informées, les parties entendent soumettre


leurs engagements aux dispositions de l'article L 145-5 du Code de commerce, et
expressément déroger, en toutes ses dispositions, au statut des baux commerciaux édicté par
le Code de commerce. »

3525
Les parties n'ont pas besoin d'expliquer les raisons qui motivent leur choix en faveur du bail
dérogatoire.
SECTION 3 Régime du bail de courte durée

3700
Le bail de courte durée est un contrat de louage de droit commun régi par les dispositions du
Code civil (art. 1709 s.). Ces dispositions n'ont qu'un caractère supplétif ; les parties peuvent
donc organiser librement leurs relations locatives, à l'exception bien entendu de la durée du
bail.
Afin de donner à leurs relations une sécurité juridique satisfaisante, les parties doivent veiller
à établir un contrat aussi précis que possible.
La clause relative à la fin du bail doit faire l'objet d'une attention toute particulière : aucune
prolongation tacite ne doit être prévue, faute de quoi le bail pourra se transformer en bail
soumis au statut.

3705
Le bail dérogatoire n'est assujetti à aucune forme. La rédaction d'un bail écrit est cependant
indispensable pour des raisons évidentes de preuve du contenu du bail.
La convention locative peut être établie postérieurement à l'entrée en jouissance du locataire
(Cass. 3e civ. 25-6-1975 n° 74-12.877 : Bull. civ. III n° 218 ; Cass. 3e civ. 29-6-1994 n° 92-
18.042 : Loyers et copr. 1994 comm. n° 477) à condition que la rétroactivité soit stipulée.
Toutefois, afin d'éviter d'avoir à faire face à un éventuel refus ultérieur du locataire de
s'engager, il est préférable que le bail soit conclu au plus tard lors de l'entrée dans les lieux du
locataire.

3710
Un état des lieux doit être établi de manière contradictoire par les deux parties (ou un tiers
mandaté par elles) au moment de la prise de possession des locaux et lors de leur restitution.
À défaut d'état des lieux amiable, il est établi par un huissier de justice à l'initiative de la
partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire. L'état des
lieux doit être joint au contrat de bail (C. com. art. L 145-5, al. 5 et 6).

Précisions
Ces dispositions s'appliquent depuis le 20 juin 2014. Pour les baux conclus avant cette date, ces règles
s'appliquent à toute restitution d'un local dès lors qu'un état des lieux a été établi lors de la prise de
possession (Loi 2014-626 du 18-6-2014 art. 3, II).

3710
M.A.J
État des risques naturels et technologiques - Fourniture obligatoire - Non CA Paris 17-10-
2018 n° 17/00501, P. c/ SCI Isis RJDA 6/19 n° 409

SECTION 4 Situation à l'expiration du bail

CESSATION DU BAIL

3900
Le bail de courte durée est un bail à durée déterminée qui, en application de l'article 1737 du
Code civil, cesse de plein droit à l'arrivée du terme, sans qu'il soit nécessaire de donner
congé (Cass. 3e civ. 15-3-1972 n° 71-10.482 : Bull. civ. III n° 182).
Le locataire n'a aucun droit au renouvellement de son bail ; à l'expiration du bail, il doit donc
quitter les lieux sans pouvoir prétendre à une quelconque indemnité d'éviction.
Un état des lieux doit être établi (n° 3710).

LE LOCATAIRE EST LAISSÉ DANS LES LIEUX À L'ISSUE DU BAIL

4000
Si le locataire reste et est laissé en possession des lieux un mois après l'expiration du bail
dérogatoire, il s'opère un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux (C. com. art. L
145-5, al. 2). Cette règle s'applique même si le bail dérogatoire a été conclu pour une durée
inférieure à la durée maximale de trois ans (Cass. 3e civ. 8-6-2017 n° 16-24.045 FS-PBI :
RJDA 8-9/17 n° 534). Il n'y a donc pas tacite prolongation du bail dans la limite de trois ans.

4020
Pour que le statut s'applique au nouveau bail, encore faut-il, bien sûr, que les conditions
générales d'application du statut soient remplies. Il faut donc que le locataire dispose d'un
bail portant sur un immeuble ou un local et qu'il exploite dans les lieux un fonds de commerce
dont il est propriétaire (Cass. 3e civ. 5-7-1995 n° 1533 P : RJDA 8-9/95 n° 939 ; Cass. 3e civ.
16-6-2004 n° 749 F-PBI, Cie Foncière de la Macif c/ Sté Auchan France : RJDA 10/04 n°
1092 ; Cass. 3e civ. 24-6-2009 n° 08-14.674 FS-D : RJDA 1/10 n° 5). En revanche, son
immatriculation au registre du commerce à la date d'expiration du bail dérogatoire n'est pas
exigée (Cass. 3e civ. 30-4-1997 n° 675 PB : RJDA 6/97 n° 756 ; Cass. 3e civ. 25-10-2018 n°
17-26.126 F-PBI : RJDA 1/19 n° 2).
Pour une étude complète des conditions générales d'application du statut des baux
commerciaux, le lecteur se reportera aux n° 350 s. pour l'exigence d'un local, aux n° 33000 s.
pour la nécessité d'exploiter un fonds de commerce et aux n° 42010 s. concernant
l'immatriculation du locataire.

4030
Pour éviter la naissance d'un nouveau bail soumis au statut, le bailleur doit faire connaître au
locataire sa volonté de mettre fin à l'occupation des lieux au plus tard un mois après
l'échéance du bail. De son côté, le locataire dispose d'un délai d'un mois pour quitter
volontairement les lieux.
Le délai d'un mois se calcule de quantième en quantième : lorsqu'il part le dernier jour du
mois, il arrive à échéance le dernier jour du mois qui sert de terme au délai (application des
art. 641 et 642 du Code de procédure civile). Par exemple, si le bail vient à expiration un 31
août, le bailleur peut notifier son opposition au locataire au plus tard le 30 septembre suivant

4040
Le bailleur peux exprimer formellement son refus que le locataire reste dans les lieux en
rappelant à celui-ci qu'il doit quitter les lieux au plus tard un mois après l'échéance du bail.
Afin de se ménager une preuve, il est conseillé au bailleur de prévenir le locataire par lettre
recommandée AR ou par acte extrajudiciaire (signification par huissier).
Une clause du bail prévoyant que le bail dérogatoire se finirait de plein droit à l'expiration du
bail serait insuffisante (Cass. 3e civ. 4-5-2010 n° 09-11.840 F-D, Douat c/ Estevez : RJDA 8-
9/10 n° 825).
Modèle
Sommation de déguerpir

Monsieur Roland Tourney


302 avenue de la Porte de Champerret
75017 Paris

Madame Sylvie Quidias


123 rue de la Coutellerie
75004 Paris

Paris, le 29 août 2019


Lettre recommandée avec demande d'avis de réception
Objet : Sommation de déguerpir

Madame,

Suivant acte authentique en date du 29 septembre 2016, je vous ai donné à bail dérogatoire
dans les termes de l'article L 145-5 du Code de commerce des locaux à usage de carrosserie-
peinture sis 123 rue de la Coutellerie à Paris (75004).
Ce bail dérogatoire au statut des baux commerciaux vous a été consenti pour une durée de
trois ans, commençant à courir à compter du 1er octobre 2016 pour se terminer de plein droit
le 30 septembre 2019.
Je vous rappelle que vous devez quitter les locaux au plus tard un mois à compter de
l'échéance, c'est-à-dire le 31 octobre 2019.
Je vous demande donc de libérer les locaux et de les restituer libres de tout occupant, matériel
et mobilier au plus tard le 31 octobre 2019. Faute de ce faire, je me réserve la possibilité
d'utiliser toutes voies et moyens de droit pour vous y contraindre et je solliciterai, le cas
échéant, votre expulsion.
Je vous prie d'agréer, Madame, l'expression de mes salutations distinguées.
Roland Tourney

4045
Si le bailleur a clairement exprimé son opposition à la poursuite des relations contractuelles,
le maintien dans les lieux du locataire un mois après l'échéance n'entraîne un nouveau bail
soumis au statut que si des actes postérieurs non équivoques de la part du bailleur peuvent
permettre de considérer qu'il est revenu sur sa décision.

Illustrations
Lorsque, avant le terme du bail, le bailleur a manifesté son opposition au maintien dans les
lieux du locataire, jugé que le bailleur qui, face au maintien dans les lieux du locataire, a tardé
à agir en expulsion et a entamé des négociations pour un nouveau bail, ne peut pas être
considéré comme ayant tacitement donné son accord à ce maintien dans les lieux (Cass. 3e
civ. 5-6-2013 n° 12-19.634 : RJDA 10/13 n° 772).
En revanche, si l'acte par lequel le bailleur a manifesté son opposition était teinté d'équivoque,
il peut en être déduit qu'en restant ensuite inactif, le bailleur a effectivement tacitement
accepté le maintien dans les lieux du locataire (Cass. 3e civ. 28-6-2011 n° 10-19.236 : RJDA
12/11 n° 1000).
4050
Lorsqu'un bail dérogatoire a été conclu avec plusieurs locataires, tous ceux qui restent dans
les lieux et sont laissés en possession sont liés par le nouveau bail soumis au statut, qu'ils
exploitent personnellement ou non le fonds de commerce (Cass. 3e civ. 23-5-2013 n° 11-
17.071 FS-PB : RJDA 8-9/13 n° 693). En revanche, les colocataires qui ont quitté les lieux
ne sont pas partie au nouveau bail (Cass. 3e civ. 6-4-2011 n° 10-11.846 FS-PB : RJDA 12/11
n° 999).

Précisions
Un locataire en redressement judiciaire qui reste dans les locaux à l'expiration du bail dérogatoire est
lié par un bail soumis au statut des baux commerciaux même si, avant l'échéance du bail, son
administrateur judiciaire a demandé la résiliation du bail (Cass. 3e civ. 31-5-2018 n° 17-16.944 F-D :
RJDA 10/18 n° 944).

CONTENU DU NOUVEAU BAIL

4070
Le nouveau bail issu du maintien du locataire dans les lieux est soumis aux mêmes clauses et
conditions que le bail expiré (Cass. 3e civ. 6-11-2001 n° 1557 F-D : RJDA 1/02 n° 15).
Ainsi, lorsque le premier bail imposait au locataire d'exploiter personnellement le fonds de
commerce, le locataire n'a pas le droit de mettre son fonds en location-gérance au cours du
nouveau bail, sous peine de commettre une infraction au bail (CA Paris 16-1-1990, 16e ch. A
: Gaz. Pal. 1990 somm. p. 591 note Ph.-H. Brault). Bien entendu, les clauses de l'ancien bail
qui ne sont pas compatibles avec le statut deviennent caduques.
Par ailleurs, le cautionnement donné pour le bail dérogatoire ne s'étend pas, sauf mention
expresse en ce sens, au bail commercial qui lui succède (Cass. 3e civ. 28-11-2012 n° 11-
14.671 FS-D : RJDA 4/13 n° 301 ; Cass. 3e civ. 23-5-2013 n° 11-17.071 FS-PB : RJDA 8-
9/13 n° 693). Il en a été jugé ainsi dans un cas où l'acte de cautionnement visait « le bail initial
ainsi que le renouvellement de celui-ci et les conventions d'occupation qui lui succéderaient »
car la caution, non professionnelle du droit, n'était pas nécessairement informée de ce qu'un
bail commercial se substituerait au bail dérogatoire si le locataire se maintenait dans les lieux
(Cass. 3e civ. 23-5-2013, précité). En cas d'ambiguïté sur la portée de l'engagement de la
caution, le cautionnement est interprété par les juges du fond qui ont alors un pouvoir
souverain d'appréciation (Cass. 3e civ. 28-11-2012 et Cass. 3e civ. 23-5-2013, précités).
Quant au loyer du nouveau bail, il est librement fixé par les parties. Si celles-ci ne
parviennent pas à s'entendre sur son montant, il doit correspondre à la valeur locative (Cass.
3e civ. 14-12-2005 n° 1418 FS-PBI : RJDA 4/06 n° 388 ; Cass. 3e civ. 5-2-2008 n° 06-
21.999 F-D : RJDA 1/09 n° 7).

Précisions
L'action en fixation du loyer du nouveau bail est soumise à la prescription biennale de l'article L 145-
60 du Code de commerce dont le délai court à compter de la date à laquelle l'une des parties a
revendiqué l'application du statut (Cass. 3e civ. 7-7-2016 n° 15-19.485 FS-PBI : RJDA 11/16 n° 767).

CONCLUSION D'UN NOUVEAU BAIL

4075
Lorsque le premier bail dérogatoire arrive à son terme, les parties peuvent conclure un
nouveau bail dérogatoire, à condition que la durée totale des baux successifs ne soit pas
supérieure à trois ans (C. com. art. L 145-5, al. 1).
4080
À l'expiration de la durée maximale de trois ans, les parties ne peuvent plus conclure un
nouveau bail dérogeant au statut pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux (C.
com. art. L 145-5, al. 1).
Cette formulation laisse la possibilité aux parties de conclure un nouveau bail dérogatoire
(Avis Sén. n° 446 relatif à la loi 2014-626 du 18-6-2014) :
- soit en vue d'exploiter le même fonds mais dans un autre local appartenant au bailleur ;
- soit en vue d'exploiter un fonds différent dans le même local.

Attention
Cette rédaction de l'alinéa 1 de l'article L 145-5 pose question dès lors que le législateur a
laissé intact l'alinéa 3. En effet, celui-ci prévoit qu'à l'expiration de la durée maximale, un
nouveau bail soumis au statut s'opère en cas de renouvellement exprès du bail ou de
conclusion, entre les mêmes parties, d'un nouveau bail pour le même local. Or, pour la Cour
de cassation, l'alinéa 3 interdit la conclusion d'un nouveau bail dérogatoire dans le même
local, même si l'activité envisagée est différente de celle du bail précédent (Cass. 3e civ. 31-5-
2012 n° 11-15.580 FS-PB : RJDA 10/12 n° 831).
Se pose donc une réelle question d'interprétation puisque les deux alinéas visent des situations
de fait identiques et emportent des conséquences différentes.

4085
La condition d'identité du local n'est pas remplie lorsque les locaux loués en vertu d'un
nouveau bail dérogatoire sont de consistance différente de ceux loués en vertu d'un précédent
bail dérogatoire ayant lié les mêmes parties.

Illustrations
Le propriétaire d'un magasin a valablement pu consentir à un locataire, pour un loyer mensuel
de 10 000 francs (1 500 €), un bail de deux ans portant sur un emplacement situé à l'intérieur
de son magasin, après avoir loué pour deux ans au même locataire pour l'exercice du même
fonds de commerce un emplacement situé à l'extérieur de ce magasin pour un loyer inférieur
(Cass. 3e civ. 11-10-1977 n° 76-11.782 : Bull. civ. III n° 332).
De même, jugé qu'après avoir loué un magasin, un bureau et des emplacements de parking en
vertu d'un bail de courte durée de 23 mois, un second bail de même nature pouvait être conclu
entre les mêmes parties si étaient seulement loués les parkings (Cass. 3e civ. 15-3-1989 n° 87-
15.614).

Renonciation au bénéfice du statut

RENONCIATION DU LOCATAIRE

4130
Traditionnellement, il était admis que le locataire pouvait renoncer au bénéfice du statut des
baux commerciaux et conclure avec le bailleur une nouvelle convention dérogatoire. Cette
renonciation pouvait intervenir une fois que le locataire avait acquis le droit au statut, lequel
naissait du maintien en possession à l'expiration du bail dérogatoire (notamment, Cass. 3e civ.
5-5-1999 n° 736 D : RJDA 7/99 n° 766). L'adoption de la LME a conduit certains auteurs
(Ph.-H. Brault et J.-D. Barbier : Le statut des baux commerciaux 2009 p. 39) à se demander si
cette renonciation restait possible car l'article L 145-5 issu de cette loi autorisait la conclusion
de baux successifs mais dans la limite expresse de deux ans. Selon nous, rien dans la
rédaction de cet article n'empêchait le locataire de renoncer au bénéfice du statut, par
application des règles relatives à la renonciation à un ordre public de protection.
La question de la faculté de renonciation au bénéfice du statut se pose à nouveau depuis
l'adoption de la loi 2014-626 du 18 juin 2014. En effet, l'alinéa 1 de l'article L 145-5 a été
complété d'une phrase précisant qu'à l'expiration des trois ans « les parties ne peuvent plus
conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux ».
Il convient d'attendre une décision de la Cour de cassation pour lever toute ambiguïté sur ce
point.

RENONCIATION DU BAILLEUR

4150
Sous le régime antérieur à la loi 2014-626 du 18 juin 2014, la possibilité de renoncer à se
prévaloir du statut des baux commerciaux était reconnue au bailleur, à condition que cette
renonciation soit non équivoque (Cass. 3e civ. 24-11-2004 n° 1225 FS-PB : RJDA 2/05 n°
105 ; Cass. 3e civ. 17-10-2006 n° 05-18.669 F-D ; Cass. 3e civ. 23-1-2013 n° 11-25.465 FS-D
: RJDA 10/13 n° 772, 2e espèce). Depuis la réforme de 2014, se posent les mêmes
interrogations que pour la renonciation par le locataire (n° 4130).
MÉMENTO BAUXCOMMERCI
AUX
2019-
2020

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