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Trésors monétaires XXV - Étude - Éditions de la Bibliothèque nationale de France

RÉSUMÉ

FRANÇAIS ENGLISH

Le trésor de Gisors, découvert en 1970 à l’extérieur de l’enceinte du château, formé


de deniers d’argent du xiiie siècle, est l’un des plus importants de son époque.
Enfermé dans un sac déposé dans un chaudron métallique, il regroupait pour
l’essentiel des parisis royaux et baronniaux, des deniers rémois et, à part, dans une
bourse de cuir, des esterlins, recueillis jusque vers 1240-1245. Il donne l’image
d’une circulation monétaire sans grande évolution dans le nord-ouest du royaume
depuis le début du siècle, fermée aux initiatives récentes qui mèneront dix ans plus
tard au développement du tournois et cependant consciente de la nécessité d’un
système monétaire plus complexe incluant la fabrication de multiples.

ENTRÉES D'INDEX

Mots clés : trésor monétaire, xiiie siècle, France, Gisors, deniers d’argent,
circulation monétaire, Parisis, esterlins, monnaies médiévales

Keywords : thirteenth century hoard, France, silver pennies, short-cross pennies,


monetary circulation

TEXTE INTÉGRAL

Récipient.

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H : 21 cm.
⌀ : 24 cm.
Pied : 7,5 cm.

Bloc de monnaie.

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Bloc vu du dessus.

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En creux, l’empreinte du sac contenant les esterlins.

Gisors, à la limite orientale du Vexin normand, fut âprement disputée entre


les souverains anglais et français durant le siècle. Elle fut cédée au roi
xiie

de France en 1196 ; Philippe Auguste mit la main sur le château en 1198.


Dès lors, la situation se stabilisa en faveur du roi de France. Gisors devint
chef-lieu du bailliage qui porta son nom, conserva son importance
stratégique mais ne connut pas de développement urbain remarquable.

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Faute d’être située près d’un carrefour de voies de communication ou


d’une rivière navigable, Gisors n’eut qu’une activité économique limitée,
profita surtout des fréquents séjours de Philippe Auguste et de Louis IX 1.
La raison du dépôt que nous allons examiner ne peut être cherchée dans
des faits historiques avérés. Son examen n’en présente pas moins d’intérêt.
Composé pour l’essentiel de plusieurs milliers de deniers parisis royaux
accompagnés de plusieurs centaines de proches imitations, de plus de
600 deniers rémois, de près de 900 esterlins, il comprend aussi un assez
large échantillon de diverses monnaies françaises et étrangères ; il enrichit
notre connaissance de la monnaie présente dans la moitié nord du royaume
avant les grandes réformes de Louis IX.

Historique
En mai 1970, des travaux entrepris dans la cour d’un immeuble situé 6 rue
des Frères Planquais à Gisors amenaient la mise au jour, à 60 cm sous le
sol actuel, d’un récipient rempli de monnaies anciennes. L’inventeur était
un ouvrier maçon portugais, M. Montilla. La nouvelle de cette découverte se
répandit rapidement. Claude Lorren fut envoyé à Gisors par le directeur de
la circonscription archéologique, Michel de Boüard, qui était en même
temps directeur du centre de recherches archéologiques médiévales de
Caen. Il emporta pour étude le récipient, une marmite tripode en bronze
abîmée par les coups de pioche et le contenu : 15 500 kg de monnaies
agglomérées en un bloc compact. Un premier examen montra que
l’ensemble avait été enfermé dans un sac en tissu dont les traces de fibre
se voyaient encore et que dans le fond du sac, mais n’occupant pas tout le
fond, avait été placée une bourse en cuir garnie de monnaies d’un type
particulier. Les monnaies furent envoyées pour étude au Cabinet des
médailles. Environ 4 kg y furent nettoyés. Cependant, l’ampleur et la
complexité de la tâche dépassaient les possibilités de l’atelier de moulage
et de restauration qui n’était pas outillé pour mener des recherches à
caractère scientifique. Aussi ce travail fut-il confié au laboratoire
d’archéologie des métaux de Jarville, près de Nancy, dirigé par Albert
France-Lanord. Au bout de quelques mois, en juin 1971, les monnaies
furent retournées au Cabinet des médailles. L’inventaire fut alors entrepris
par le propriétaire de la maison, madame Bertran, ancienne directrice
adjointe du lycée de Sèvres, et par moi-même. Cet inventaire achevé,
l’ensemble des monnaies fut partagé et la Bibliothèque nationale acheta la
part de l’inventeur. (no inventaire 1972-1316/1-5000). La part du
propriétaire ne fut dispersée que tout récemment.

Très vite, il était apparu que ce dépôt monétaire était constitué en majorité
de deniers d’argent du xiiie siècle d’origine française et britannique et qu’il
avait été caché vers le milieu du siècle. L’intérêt porté par les
xiiie

numismates anglais à cette découverte se manifesta très tôt, dès l’été


1970, et se traduisit par une étude minutieuse des monnaies d’origine
britannique (Angleterre, Écosse, Irlande) menée par John Brand plus que
par moi et parue dans The British Numismatic Journal de 1971-1972 2.
Quant à la partie continentale de cet ensemble, le catalogue n’en a pas été

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publié et l’étude n’en a pas été faite bien que la possibilité en ait été offerte
à de jeunes chercheurs. Certains éléments ont servi à des recherches
menées en collaboration avec Jean-Noël Barrandon à l’occasion du colloque
consacré, sous l’égide du CNRS, à « La France de Philippe Auguste. Le
temps des mutations » en 1980 3. Les résultats en ont été exploités dans
les actes du colloque mais surtout dans les Cahiers Ernest-Babelon I : « Le
titre et le poids de fin des monnaies sous le règne de Philippe Auguste » en
1982 4 et rappelés dans la RN 2010 : « De Philippe Auguste à Charlemagne.
Recherches sur l’argent des monnaies en compagnie de Jean-Noël
Barrandon. » 5

Soucieuse de ne pas laisser cet effort se perdre, j’en ai parlé à Michel


Amandry qui a obtenu, par l’intermédiaire des services de la BNF, la saisie
informatique du catalogue jadis dactylographié. Cette heureuse initiative
débouche donc sur une publication, pour l’établissement de laquelle un
temps assez restreint m’a été accordé, de sorte que je livre aujourd’hui une
étude incomplètement élaborée en souhaitant qu’elle puisse servir à des
recherches plus pointues, tant pondérales que métallographiques au-delà
de celles que j’ai déjà mentionnées.

Nettoyage des monnaies


Il a été demandé au laboratoire de Nancy de dégager les monnaies de leur
gangue et de les nettoyer tout en respectant si possible la stratigraphie et
en mesurant les pertes entraînées par les nettoyages.

En un premier temps, des essais comparatifs furent réalisés sur quatre


petits blocs A, B, C, D, pesant respectivement 63,65 g, 69,93 g, 69,32 g,
46,32 g. Un rapport fut établi le 31 décembre 1970 6.

« Il fut observé que ces monnaies étaient d’argent fortement allié de cuivre,
jusqu’à 50 % et plus. Une partie du cuivre se présentait en une masse
minéralisée de carbonates (malachite) formés sur une couche d’oxydes
rouges (cuprites). Cette masse soudait fortement les pièces entre elles.
Pour décomposer les carbonates, éliminer le dépôt de cuivre et séparer les
pièces minces et fragilisées par le départ du cuivre, trois méthodes furent
essayées.

Les lots A et D ont été traités dans un bain d’acide ditique à 10 % à chaud
pour dissoudre les carbonates ; le cuivre a été éliminé dans un bain
d’ammoniaque puis dans un bain d’acide sulfurique à 5 % avec addition
d’eau oxygénée. Les pièces ont été peu altérées ; il n’y a pas eu de
dissolution de l’argent mais il a fallu séparer au scalpel les pièces empilées.

Le lot C a été traité dans un bain de sel de Seignette (tartrate de soude et


de potasse + soude caustique) ; le cuivre a été éliminé comme
précédemment. Là aussi, la séparation a été délicate malgré l’emploi
d’ultrasons.

0 Pour le lot B, la dissolution des carbonates a été réalisée dans un bain


d’acide formique à 30 % à chaud. Un grand nombre de pièces se sont
séparées d’elles-mêmes. Les autres ont été mises en électrolyse dans un
bain à 5 % de soude caustique en présence de zinc ; le cuivre a été éliminé

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comme ci-dessus.

À aucun moment, il n’a été constaté d’argent dans les bains mais des
traces de plomb ont été trouvées dans le bain final chargé de sulfate de
cuivre.

2 Il a été possible de mesurer la perte en sels de cuivre, carbonates et


oxydes, en ayant au préalable éliminé les matières étrangères : sable,
mortier, etc. Elle représente 0,585 g par pièce. Le métal perdu par pièce
serait d’environ 0,34 g.

3 Le degré de corrosion est très variable d’une pièce à l’autre.

4 Il est intéressant de constater qu’il n’y a pas eu de perte d’argent et que


l’usure des pièces ne s’est pas accrue au cours du traitement. » (extrait
d’une lettre du 31 décembre 1970).

5 Le lot B, après nettoyage, passa de 69,93 g à 34,7 g. Il était composé de


50 pièces complètes et de 5 pièces incomplètes. Ces dernières furent
comptées pour 3. Le poids moyen était de 0,654 g.

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6 Dans l’ensemble :

La masse traitée : 10 090 g

La masse des monnaies : 4 614 g

Le nombre de monnaies : 8 297

Le rendement global : 45,70 % du poids

Le poids moyen d’une pièce : 0,556 g

7 À cela s’ajoutaient les 4 kg nettoyés à Paris.

8 D’ores et déjà, on pouvait constater la diminution très nette du poids des


pièces après nettoyage et douter de l’intérêt d’une étude pondérale ; on
pouvait également s’interroger sur la fiabilité d’une recherche portant sur
la composition métallique des monnaies.
9 Les lots nettoyés à Nancy furent traités lot par lot. Les monnaies dégagées
de chaque lot furent dénombrées séparément et par atelier monétaire. Le

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détail n’en est pas rapporté ici mais consultable au Cabinet des médailles.

0 Ce travail ne fut pas inutile. Il s’avéra en effet que les monnaies contenues
dans la bourse de cuir étaient des esterlins et des moitiés d’esterlins
anglais, écossais et irlandais, tandis que le sac renfermait les deniers
d’origine continentale à l’exception d’une trentaine d’esterlins et de deux
demi-esterlins. Les lots de deniers contenaient tous une majorité de
deniers de type parisis issus des ateliers royaux de Paris et d’Arras et, dans
une moindre mesure, de l’atelier épiscopal de Reims. Aucun tri ne semble
avoir été pratiqué parmi ces deniers. À titre d’exemple, le lot B signalé ci-
dessus comprenait des deniers d’Arras (22), de Paris (17), de Reims (7), de
Montreuil (2), de Dreux (2) et un denier de Péronne, un de Saint-Quentin et
un d’Orléans (voir p. 345).

Date de l’enfouissement
1 Les monnaies royales françaises ne fournissent, pour la plupart, pas de
repère précis car il est difficile de distinguer parmi les pièces au nom d’un
roi Louis les émissions attribuables à Louis VI et Louis VII d’une part de
celles qui sont attribuables à Louis VIII et Louis IX de l’autre, séparées par
celles de Philippe Auguste (1180-1223) ; ces dernières peuvent en outre
avoir été immobilisées après la mort du roi comme ce fut le cas pour les
esterlins anglais, immobilisés entre 1180 et 1247. Cependant, quelques
deniers tournois au nom d’un roi Louis sont aujourd’hui considérés comme
fabriqués avant 1240/1250.

2 D’autres monnaies permettent de mieux délimiter l’époque de la cachette.

3 Les monnaies des archevêques de Reims sont en grand nombre, parmi


lesquelles 99 deniers de Henri II, archevêque de 1227 à 1240 ; le
monnayage fut interrompu à Reims après cette date.

4 Un denier d’Alphonse de Poitiers sortant de l’atelier de Riom a été émis à


partir de 1241, date à laquelle le frère du roi a reçu la Terre d’Auvergne en
apanage.

5 Quatre deniers germaniques au nom du prélat Conrad de Hochstaden pour


Cologne et Attendorn en Westphalie sont postérieurs à 1239. Sur la pièce
provenant d’Attendorn, l’archevêque ne porte pas encore le pallium qui lui
a été remis en 1244 seulement.

6 Le classement très fin des esterlins anglais indique que les plus récents ont
été frappés entre 1242 et 1247, date de création d’un nouveau type, à la
croix longue, qui n’est pas représenté dans ce trésor. Le petit nombre de
monnaies émises à partir de 1242 environ par rapport aux monnaies
antérieures présentes dans le trésor conduit à penser qu’elles sont arrivées
en Normandie plutôt vers 1242 que vers 1247. D’après les monnaies les
plus récentes, cet ensemble a été enfoui dans les années 40 du xiiie siècle,
probablement vers 1242-1245.

Valeur

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7 La valeur précise ne peut être établie mais, en ajoutant au nombre de


pièces décomptées la valeur supérieure attachée aux esterlins et demi-
esterlins, on obtient une estimation de l’ordre de 1 166 sous parisis ou 58
livres parisis, ce qui représenterait, quelques années plus tard, après la
création du gros tournois, un ordre de grandeur d’environ 1 500 gros
tournois. Ce calcul rapide, qui ne tient pas compte de la valeur relative des
deniers du royaume les uns par rapport aux autres (par exemple un denier
de Laon ne valait que la moitié d’un denier parisis), n’a pas d’autre
prétention que de donner une idée de ce que pouvait représenter cet
ensemble.

Formation
8 Il est bien délicat d’envisager la formation de cet ensemble déposé au pied
de l’enceinte de l’agglomération primitive bordée par un bras de l’Epte.

9 Au moins peut-on souligner que le propriétaire a eu le souci de le


préserver en le déposant dans un contenant solide, ce chaudron au volume
et à la forme bien adaptés. Il l’a enfermé dans un sac de toile sans oublier
un petit lingot d’argent déposé au fond. Les monnaies britanniques, dans
leur grande majorité, étaient enfermées dans un petit sac de cuir au fond
du chaudron mais on ne saurait dire a priori si ce regroupement résultait
d’un paiement effectué dans les îles ou sur le continent et conservé tel
quel, ou bien d’un tri opéré par le propriétaire. Le tri aurait souffert
quelques exceptions puisque des esterlins, en petit nombre, ont été
retrouvés dans le bloc au cours du nettoyage. Il n’est pas sans exemple de
rencontrer sur le continent un dépôt constitué uniquement d’esterlins
comme il ressort de la recherche menée par J. Yvon (cf. n. 14).

Traces de tissu.

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Traces du lacet de cuir.

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Petit lingot d’argent déposé au fond du récipient (échelle 2 : 1).

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0 Évaluer le temps mis à rassembler le tout repose sur la comparaison avec la


composition d’autres trésors du siècle. Comme nous le verrons plus
xiiie

loin, le propriétaire de cette somme tourne le dos à la Normandie, excluant


pratiquement ce qui est caractéristique de la circulation en Normandie
depuis la conquête de ce territoire par le roi de France au tout début du
siècle : le tournois royal. Les trésors qui peuvent être comparés à celui
xiiie

de Gisors donnent l’image d’une circulation de longue durée des monnaies


des souverains de la seconde moitié du siècle. Rien n’indique une
xiie

thésaurisation s’étendant sur de nombreuses années. La présence, parmi


les monnaies du trésor de Gisors, d’une centaine de monnaies de Reims
émises entre 1227 et 1240 étaie l’idée que les parisis ont pu être
rassemblés durant les règnes de Louis VIII et de Louis IX.
1 Quant à la destination de cet ensemble, la présence du petit lingot incite à
ne pas écarter l’hypothèse d’une relation avec un changeur ou même un
atelier monétaire.

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Inventaire sommaire
2 11 359 pièces
d. : denier
ob. : obole
L. : J. Lafaurie, Les monnaies des rois de France, I, Paris, 1951.
P.A. : F. Poey d’Avant, Monnaies féodales de France, 3 vol., Paris, 1858-62.

Monnaies royales françaises

Philippe Ier (1060-1108)
Étampes L. 61, 1 d.

Orléans L. 68, 1 d.

Louis VI (1108-1139)
Château-Landon L. 102, 6 d.

L. 103, 12 d.

Étampes L. 112, 50 d.

L. 113, 7 d.

L. 114, 14 d.

L. 113 ou 114, 3 d.

L. 115, 20 d.

Orléans L. 130 ou 154, 214 d.

Pontoise L. 134, 99 d.

L. 133 ou 134, 4 d.

L. 135, 3 d.

Louis VII (1137-1180)


Bourges L. 145, 105 d.

Mantes L. 150, 23 d.

Paris L. 138, 3 d.

L. 139, 899 d. + 3,55 g

L. 140, 2 d.

L. 141, 143 d.

L. 142, 157 d.

L. ?, 45 d.

Pontoise L. 155, 7 d.

L. 156, 11 d.

Senlis L. 157, 5 d.

Louis VI ou Louis VII


Pontoise L. 134-5 ou 155-6, 1 d.

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Philippe II Auguste (1180-1223)


Arras L. 183, 771 d. + 3,19 g

L. 184, 3 848 d. + 4,66 g

L. 183 ou 184, 176 d. + 34,97 g

Bourges L. 166, 4 d.

Laon (évêque Roger de Rozoy : 1180-1201) L. 173, 24 d.

Montreuil L. 187, 308 d.

Paris L. 181, 1 989 d. + 18,07 g

L. 182, 3 ob.

Péronne L. 189, 136 d.

Saint-Omer L. 191, 51 d.

Tours L. 193, 2 d.

Louis VII ou Philippe II


Paris L. ?, 25 d. + 37,02 g

Louis VIII et Louis IX (1223-1266)


Tours L. 195, 8 d.

Monnaies françaises des prélats et barons


L. Maxe-Werly, Histoire numismatique du Barrois,
Bar Henri II (1214-1240)
Bruxelles, 1895, p. 17 ; 4 d.

Renaud de
Boulogne Dammartin (1191- P.A. III, pl. CLIV, 24 ; 118 d.
1212)

Bourgogne Hugues III (1162- Fr. Dumas-Dubourg, Le monnayage des ducs de


/Dijon 1192) Bourgogne, Louvain-la-Neuve, 1988, 6-2 ; 30 d.

Bretagne/
Anonyme P.A. I, pl. X, 2 ; 6 d.
Nantes

Bretagne/
Anonyme P.A. I, pl. X, 6 ; 7 d.
Rennes

Chartres Anonyme P.A. I, pl. XXXIV, 4 var. ; 1 d.

Robert de Mehun
Celles P.A. I, pl. XLV, 25 : 1 d.
(1198-1239

Robert II (1184-
Dreux P.A. I, pl. II, 25 ; 129 d.
1219)

Flandre/G J. Ghyssens, Les petits deniers de Flandre, Bruxelles, 1971,


and 311, B-2 ; 1 d.

Flandre/Lil
idem, 324, C-4 ; 1 d.
le

Monogramme
Le Mans P.A. I, pl. XXX, 1-3 ; 4 d.
d’Herbert

Étienne de la
Meaux Chapelle (1161- P.A. III, pl. CXXXIX, 25 ; 1 d.
1171)

Pierre Ier (1172-
P.A. III, pl. CXXXIX, 26 ; 3 d.
1174)

Hervé de Donzy
Nevers P.A. I, pl. XLIV, 18 ; 3 d.
(1199-1223)

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Ponthieu/ Guillaume III (1191-


P.A. III, pl. CLVI, 14-15 ; 106 d.
Abbeville 1221)

Thibaut III (1197-
Provins P.A. III, 5978 ; 2 d.
1201)

Thibaut IV (1201-
P.A. III, pl. CXXXVIII, 24 ; 14 d.
1253)

Samson (1140-
Reims P.A. III, pl. CXL, 21 ; 6 d.
1161)

Henri I (1161-1176) id. 22 ; 6 d.

Guillaume I (1176-
P.A. III, pl. CXLI, 1 ; 452 d.
1202)

Gui II (1204-1206) id. 3 ; 15 d.

Albéric (1207-1219) id. 4 ; 40 d.

Guillaume II (1219-
id. 5 ; 23 d.
1224)

Henri II (1227-1240) id. 6 ; 99 d.

Guillaume I ou II 40 d.

Indéterminés 6 d. + 2,66 g

Alphonse de Poitiers
Riom P.A. I, pl. L, 5 ; 1 d.
(1229/30-1271)

Tours Abbaye Saint Martin P.A. I, pl. XXXI, 15-16 ; 12 d.

Thibaut IV (1201-
Troyes P.A. III, pl. CXXXVIII, 11 ; 5 d.
1253)

Vermandoi
s/ Éléonore (1183- P.A. III, pl. CLVI, 6 ; 153 d.
Saint- 1213) id. 7 ; 5 d.
Quentin

Monnaies étrangères

Angleterre
Henri II (1154-1189) et ses successeurs, Richard I (1189-1199),
Jean (1199-1216), Henri III (1216-1272) frappés de 1180 à 1247
Esterlins à la croix courte 824 coupés en 2 : 40

Londres 366 (classes I à VIII et imitations) 15 (cl. I, V-VII)

Canterbury 347 (classes III à VIII et imitations) 15 (cl. IV-VII)

Bury St Edmunds 29 (classes VI-VII)

Carlisle 1 (classe I)

Chichester 2 (classe V)

Durham 1 (classe IV)

Exeter 1 (classe I)

Lincoln 6 (classes I et V)

Lynn 1 (classe V)

Northampton/Norwich 13 (classes I et V)

Oxford 5 (classes I et V)

Rochester 2 (classe V)

Wilton 2 (classe I)

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Winchester 15 (classes I, V, et imitations)

Worcester 1 (classe I)

York 8 (classes I, III à V) 4 (cl. I, IV-V)

Rhuddlan 3

Indéterminés 18 (classes VII-VIII) 6 (cl. I, V,VII)

Imitations 3

Écosse
Esterlins à la croix courte

Guillaume le Lion, roi (1165-1214) Roxburgh 4 ex.

Sans nom d’atelier


8 ex.
(classes I-VI) :

Alexandre II, roi (1214-1249) Roxburgh 1 ex.

Empire
Liège Jean d’Aps (1229-1238) 2 ex.

Westphalie/Waldeck Adolphe Ier (1199-1249). Iserlohn 1 ex.

Westphalie/Dortmund Frédéric, roi des Romains (1218-1230) 2 ex.

Westphalie/Attendorn Conrad d’Hochstaden (1239-1244) 1 ex.

Cologne Henri Ier (1225-1238) 1 ex.

Conrad d’Hochstaden (1238-1261) : 2 ex.

1 ex. (faux monnayage)

Irlande
Esterlins à la croix courte

Jean, roi (1199-1216)

Dublin 11 ex.

Limerick 1 ex.

1 lingot d’argent : 2,44 g

3 Dans l’inventaire sont comprises 2 442 pièces abîmées, fragmentées :

Royales Baronniales

Arras : 1 101 Abbeville : 46

Bourges : 8 Bar : 3

Château-Landon : 6 Boulogne : 34

Étampes : 23 Chartres : 1

Laon : 18 Celles : 1

Mantes : 9 Dijon : 25

Montreuil : 100 Dreux : 29

Orléans : 49 Meaux : 1

Paris : 711 Nantes : 2

Paris ou Arras : 2 Nevers : 3

Péronne : 43 Provins : 14

Pontoise : 16 Reims : 85

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Saint-Omer : 21 Rennes : 6

Senlis : 3 Saint-Martin de Tours : 5

Tours : 3 Saint-Quentin : 71

Troyes : 3

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: 373 ex.)

Paris : Louis (265) - Philippe (446 ex.)

Sont comprises également, qui n’ont pu être identifiées en raison de leur état :

Angleterre

Short-cross pennies : 21 ex.

Id (coupés en deux) : 13 ex.

France

Monnaies royales : 271 ex.

Monnaies baronniales : 46 ex.

Trésor de Gisors. Lieux de frappe.

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Trésors contenant des esterlins à croix courte.

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Essai de comparaison avec d’autres


trésors monétaires et esquisse de la
circulation de la fin du xiie au deuxième
tiers du xiiie siècle
4 Le premier élément qui saute aux yeux est l’importance numérique de ce
trésor. Ce n’est cependant pas un exemple unique. Antérieurement, pour le
règne de Philippe Auguste, on peut citer un trésor de plusieurs milliers de
pièces à Caen, en Normandie 7, un trésor de près de 6 000 monnaies à
Vallon-sur-Gée, dans la Sarthe 8, un trésor de 7 000 monnaies d’argent à
Pontoise 9. En Vendée, deux dépôts contemporains rassemblaient l’un 12 à
15 kg de monnaies (Mareuil-sur-Lay) 10, l’autre environ 5 400 pièces
d’argent et des monnaies d’or (Le Poiré-sur-Velluire) 11. D’autres trésors
d’une trentaine d’années postérieurs, enfouis sous le règne de Philippe III,
à partir de 1270 étaient composés l’un de 8 000 pièces environ (La Feuillie
dans la Manche) 12, l’autre de plus de 13 000 (Courcelles-Frémoy en Côte-
d’Or) 13. Tant en Aquitaine qu’en Normandie, en Bourgogne ou dans le
domaine, il était possible de rassembler, entre 1180 et 1270, un grand
nombre de monnaies et donc des sommes importantes en espèces.

5 Un autre trait marquant est la présence en grand nombre d’esterlins. Là

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encore, le cas n’est pas isolé. Le trésor de Vallon-sur-Gée, déjà cité, en


contenait lui aussi près de 800. Deux autres trésors composés d’un demi-
millier d’esterlins, contemporains de celui de Gisors ne peuvent être pris en
compte car l’un au moins a été découvert hors des limites du royaume 14.

6 Si le trésor de Vallon-sur-Gée peut être comparé à celui de Gisors à la fois


par le nombre total de pièces et par le nombre d’esterlins, il en diffère
considérablement par l’origine de la plupart des deniers du royaume ; il
renferme une majorité écrasante de deniers d’Anjou, de Guingamp, de
Châteaudun, du Mans ; bref il est le reflet fidèle de la circulation dans
l’ouest du royaume sous les Plantagenêt à l’orée du xiiie siècle.
7 En revanche, le trésor de Gisors a un frère, caché dans une région bien
différente : au sud et hors du domaine royal, en Bourbonnais. Il s’agit du
trésor de Chappes, dans l’Allier 15. Formé de 640 monnaies seulement, il a
été enfoui une dizaine d’années plus tard, vers 1252-1255. Mais il est
composé essentiellement de parisis royaux (505 exemplaires) et de leurs
imitations (24 deniers). Six tournois royaux s’y ajoutent. Parmi les
monnaies baronniales, les plus nombreuses proviennent de Reims : 42
monnaies dont une majorité (31) au nom d’un archevêque Guillaume.
Trente-cinq monnaies proviennent de l’atelier voisin de Nevers qui n’est
pas représenté à Gisors ; il n’y a pas d’esterlins dans le trésor de Chappes.
Néanmoins, la parenté est évidente entre ces deux dépôts. Elle n’est pas
très surprenante si l’on considère que les sires et les dames de Bourbon,
les Archambaud puis leurs héritières, étaient de fidèles vassaux du
souverain capétien. On peut penser néanmoins que l’emprise du parisis
était bien réelle sur l’ensemble du domaine royal à l’exclusion des
territoires enlevés aux Plantagenêt et ce jusqu’au milieu du siècle, qu’il xiiie

y avait dans la circulation des espèces la même coexistence entre parisis et


tournois que dans les textes comme nous le verrons plus loin. Il est
d’autant plus étonnant que la création de la grosse monnaie, intervenue un
peu plus tard en 1266, ait été limitée au système tournois et n’ait pas été
étendue au parisis dès cette époque.

Quelle était la situation antérieure ?


8 La monnaie royale circule et est thésaurisée dans le domaine ; son aire
s’agrandit donc avec les conquêtes ou avec l’extension pacifique du
domaine vers le nord, l’ouest et le sud. Ce développement se manifeste par
la création d’une zone parisis qui, dès les années 1190, s’étend hors du
domaine au Vermandois, au Ponthieu, au Boulonnais et étouffe, dans le
royaume, le petit denier flamand ; au sud, la circulation du parisis s’étend
jusqu’à Bourges mais ne va pas au-delà ; à l’ouest, le tournois royal, à
partir de la conquête de la Normandie, se substitue à la monnaie de Saint-
Martin de Tours dont la présence est attestée sur la Loire et jusqu’en
Normandie et en Bretagne sans avoir la même importance que les
monnaies locales : angevin, mansois, guingampois.
9 Ainsi la monnaie royale se trouve-t-elle, avant l’annexion des terres
Plantagenêt de Normandie en 1203-1204, à Toury, en Eure-et-Loir 16, à
Pontoise dans le Val-d’Oise 17 et aussi, même si la datation est moins
18 19

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précise, à Noyon dans l’Oise , à Etampes dans l’Essonne , à Villorceau


dans le Loiret 20 et bien sûr à Bourges 21. À la même époque, ce sont les
monnaies d’Angers, du Mans, de Saint-Martin de Tours qui sont
thésaurisées en Normandie et parfois au-delà : à Bourg-Dun, en Seine-
Maritime 22 ; dans l’Orne à Saint-Fraimbault-sur-Pisse 23, à Larré 24, à
Saint-Denis-sur-Sarthon 25 ; dans le Calvados à Caen et à Hottot-en-
Auge 26 ; à Aviron dans l’Eure 27 et aussi à Cré dans la Sarthe 28 ; à Notre-
Dame d’Oé en Eure-et-Loir 29. En revanche, la pénétration de la monnaie
royale est extrêmement réduite et exclut le parisis. On dénombre un denier
sur 328 à Alençon dans l’Orne 30, 2 sur près de 6 000 à Vallon-sur-Gée
dans la Sarthe 31, 43 sur près de 1 300 à Châtillon-sur-Cher dans le Loir-
et-Cher 32, 12 sur 380 à Béganne dans le Morbihan 33.

0 À l’époque de l’enfouissement du trésor de Gisors, le Vexin n’a pas livré


trace d’une circulation antérieure typique des anciens domaines
Plantagenêt, constituée à partir de deniers d’Anjou et de deniers mansois
ayant cours pour deux deniers angevins puisque seuls quatre deniers
mansois ont été thésaurisés à Gisors. Quant à la Normandie, les éléments
de comparaison manquent jusqu’à présent car deux trésors seulement ont
été répertoriés et sont l’un et l’autre postérieurs de quelque trente années :
celui de La Feuillie déjà cité et celui de Caudebec-lès-Elbeuf 34 au sud de la
Seine (Seine-Maritime). Nous y reviendrons plus loin.

1 À l’Est, le trésor de Tours-sur-Marne (Marne) reflète l’implantation du


tournois dans cette région entre 1223 et 1245, en parallèle avec les
monnaies locales, en premier lieu avec le provinois 35. La parenté est plus
marquée avec les trésors enfouis dans le nord du royaume ou non loin de
là en Empire, à la même époque : Bérelles dans le Nord, Épagne dans la
Somme ou, un peu plus tard vers 1250-1270, Avesnes-sur-Helpe
également dans le Nord.

2 L’ensemble enfoui à Épagne, en Ponthieu, était formé de 72 pièces


seulement : monnaies de Louis VII, de Philippe Auguste issues d’un assez
grand nombre d’ateliers (Paris, Arras, Montreuil, Saint-Martin de Tours,
Laon), des deniers tournois de Louis VIII ou Louis IX ainsi que des monnaies
de Saint-Martin de Tours, de Saint-Médard de Soissons, du Mans, de
Boulogne ; la répartition des monnaies royales est, toute proportion
gardée, proche de celle de Gisors ; la présence de monnaies du Mans est à
noter et, encore plus, l’absence de monnaies du Ponthieu qui sont pourtant
les monnaies locales 36.

3 Deux trésors proviennent du Hainaut, donc de l’Empire.

4 Le plus ancien, le trésor de Bérelles, comprenait environ un millier de


monnaies : 978 examinées sur un total de 1 053 37. Les monnaies royales
appartenaient aux règnes de Louis VI et de Louis VII, de Philippe Auguste
mais seulement pour des ateliers du nord du royaume : Paris, Arras,
Montreuil, Péronne, Laon. S’y ajoutaient quelques deniers tournois de
Louis VIII ou Louis IX. Les monnaies des prélats et des barons étaient
également représentées : Saint-Martin de Tours, Reims, Champagne,
Ponthieu, Vermandois, Dreux. À la différence de Gisors, il contenait, ce qui
n’est pas pour surprendre, des monnaies de Valenciennes en grand nombre
ainsi que des deniers de Gand, Ypres, Alost, Béthune mais pas de monnaies

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anglaises.

5 Plus tardif, le trésor d’Avesnes-sur-Helpe est intéressant par la répartition


des monnaies royales : les plus anciennes remontent à Louis VI et Louis VII
mais les plus nombreuses (les trois quarts du trésor) sont des deniers
tournois de Louis IX ; les monnaies des prélats et barons proviennent de
tout le royaume ; s’y ajoute une variété de petits deniers de Flandre ainsi
que quelques esterlins anglais à la croix longue 38.

6 Ces deux ensembles montrent une circulation mixte en Empire dans une
région proche du royaume : le petit denier de Flandre ne chasse pas le
denier royal.

7 La comparaison des deux trésors d’Épagne et de Bérelles avec celui de


Gisors suggère que ce dernier livre l’image d’une circulation typique du
nord du royaume dans la première moitié du siècle mais l’examen du
xiiie

trésor d’Avesnes, plus tardif, montre que cette image est sur le point d’être
profondément modifiée par le triomphe du denier tournois au milieu du
xiiie siècle.

8 Cette domination du tournois se manifeste aussi en Normandie ce qui n’a


rien de surprenant. Les trésors déjà cités de La Feuillie et de Caudebec
renferment tous deux des monnaies royales du siècle et du xiiie siècle
xiie

mais la répartition est très différente de celle de Gisors : le tournois y est


prépondérant et a supplanté le parisis néanmoins présent (381 exemplaires
à La Feuillie). Quant aux monnaies des prélats et barons, on relève la
présence de monnaies des archevêques de Reims, de l’abbaye Saint-Martin
de Tours, comme à Gisors, et celle, importante, de monnaies du Mans à La
Feuillie. Le trésor de La Feuillie, comparable en nombre, renferme
également un certain nombre d’imitations de parisis (32 exemplaires). Il
semble donc qu’en Normandie le tournois laisse peu de place à la monnaie
parisis.
9 Les documents écrits proposent le même tableau. Les actes de Philippe
Auguste ne font plus mention de la monnaie angevine après 1204, c’est-à-
dire après la publication de l’ordonnance sur le cours des monnaies en
Normandie. C’est la monnaie tournois qui lui succède, dont on relève
37 mentions jusqu’à la fin du règne tandis que la monnaie parisis est
mentionnée 96 fois. Le fragment de compte du domaine royal de 1221
montre précisément que les recettes en tournois sont celles du domaine
conquis sur le roi d’Angleterre à partir de 1204 tandis que les régions
rattachées antérieurement comptaient vraisemblablement en parisis comme
dans le compte général de 1202-1203 39.

Du parisis
0 Le parisis a été fabriqué en abondance pendant plus de trente ans durant le
règne de Philippe Auguste. Mais qu’est-il advenu après la mort du roi en
1223 ? La date d’enfouissement du trésor de Gisors, de près de vingt ans
postérieure à la fin du règne, conduit à poser une nouvelle fois la question.
On attendrait des monnaies au nom des deux Louis qui se sont succédé :
Louis VIII (1223-1229) et Louis IX. Or, les parisis au nom de Louis sont

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antérieurs à Philippe Auguste. Des deniers semblables faisaient partie de


trésors enfouis au tout début du règne de Philippe Auguste, vers 1180-
1182 (Bourges, Pontoise, Villorceau). On distingue parmi eux deux types de
légende dans le champ du droit, FRA/NCO en deux lignes et FRA/OCN à
lire en boustrophédon. À l’intérieur de ces deux groupes, aucun classement
ne s’impose : emploi du E oncial ou romain ; grande croix de Saint-André
ou croisette en début de légende du droit ; signes additionnels dans la
légende. Tous ces détails se trouvent sur les monnaies de Louis VII
fabriquées à Paris mais aussi sur les deniers de Paris de Philippe Auguste.

1 L’atelier d’Arras a été ouvert par Philippe Auguste. Il n’existe aucune


monnaie d’Arras au nom de ses successeurs. Il est donc vraisemblable que
le monnayage du parisis a été immobilisé tant à Paris qu’à Arras au nom de
Philippe 40. Là encore, aucun détail propre à cet atelier ne permet de
distinguer les émissions contemporaines du règne de Philippe des
émissions postérieures. Les comparaisons effectuées avec les monnaies,
imitées du parisis, émises par Guillaume de Ponthieu, Isabelle de
Vermandois, Renaud de Dammartin ou Robert de Dreux dont les
fabrications ont cessé avant la mort du roi n’ont pas permis, elles non plus,
d’établir un ordre de succession dans les diverses variétés relevées. Force
est donc de considérer, pour le moment, le monnayage au nom de l’atelier
d’Arras comme un tout indissociable et d’admettre que l’administration
royale, en premier lieu le templier, frère Aymar, n’a pas jugé nécessaire de
substituer le nom du souverain régnant à celui de Philippe qui s’était
imposé jusque-là. On remarquera cependant que des émissions de petits
deniers virent le jour après la remise de l’Artois en apanage à Robert, frère
de Louis IX en 1237.

2 L’immobilisation du monnayage royal au nom de Philippe peut être


considérée dans le cadre plus large du mouvement qui porte les sujets du
roi à exiger de lui une monnaie stable, mouvement que Thomas Bisson a si
bien décrit 41. La conservatio monetae, assortie d’une taxe, est établie à
Orléans et à Étampes sous Louis VI, renouvelée sous Louis VII. Elle apparaît
à Paris sous Philippe Auguste et y est maintenue encore en 1278. À Saint-
Quentin, une confirmation de Philippe Auguste nous fait connaître les
engagements d’Aliénor de ne pas dévaluer sans le consentement de la
commune. En cas de nécessité, une renovatio pourrait intervenir à
condition de garder la monnaie stable et de laisser courir monnaies
anciennes et nouvelles 42.

3 Sur le titre de la monnaie parisis, tel que le trésor de Gisors permet de


l’appréhender, seules des analyses systématiques permettraient d’aller plus
loin par rapport à la recherche effectuée en 1980 43.

NOTES
1. F. Goisneau, « Gisors. la ville et le bailliage jusqu’à la fin du xve siècle », Mém.
de la Soc. hist. et arch. de l’arrondissement de Pontoise et du Vexin, t. XLIV,
1937, p. 117-211, t. XLV, p. 65-240.

2. Fr. Dumas et J. D. Brand, « The British Coins in the Gisors (1970) Hoard », BNJ
XL, 1971 (1972), p. 22-43.

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3. Fr. Dumas, « La monnaie dans le royaume au temps de Philippe Auguste »,


dans La France de Philippe Auguste. Le temps des mutations. Colloque… (Paris,
29 septembre - 4 octobre 1980), p. 541-574, 6 pl. (Colloques internationaux du
CNRS, no 602).

4. Fr. Dumas et J.-N. Barrandon, Le titre et le poids de fin des monnaies sous le
règne de Philippe Auguste, Sophia-Antipolis, 1982, 104 p. (Cahiers Ernest-
Babelon I).

5. « De Philippe Auguste à Charlemagne. Recherches sur l’argent des monnaies


en compagnie de Jean-Noël Barrandon », RN 166, 2010, p. 41-50.

6. Le dossier est au département des Monnaies, Médailles et Antiques.

7. J. Duplessy, Les trésors monétaires médiévaux et modernes découverts en


France, tome I (751-1223), Paris, BNF, 1985. Cité Dy, TmF I, 64.

8. Id., 365.

9. Id., 262.

10. J. Duplessy, Les trésors monétaires médiévaux et modernes découverts en


France, tome II (1223-1385). Paris, BNF, 1995. Cité Dy, TmF II, 203.

11. Id., 272.

12. Id., 138.

13. Id., 118.

14. J. Yvon, « Esterlins à la croix courte dans les trésors français de la fin du xiie et
de la première moitié du xiiie siècle », BNJ XXXIX, 1970 (1971), p. 24-60. Une
trentaine de trouvailles sont répertoriées. La carte présentée ici regroupe et
complète les deux cartes établies par J. D. Brand pour J. Yvon, p. 56.

15. Dy, TmF II, 89.

16. Dy, TmF I, 357.

17. Id., 262.

18. Id., 245.

19. Id., 132.

20. Id., 375.

21. Id., 51.

22. Id., 49.

23. Id., 303.

24. Id., 190.

25. Id., 299.

26. Id., 64, 165.

27. Id., 28.

28. Id., 115.

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29. Id., 365.

30. Id., 93.

31. Id., 365.

32. Id., 93.

33. Id., 38.

34. Dy, TmF II, 80.

35. Id., 391.

36. Id., 129.

37. Id., 48.

38. Id., 28.

39. Recueil des actes de Philippe Auguste, roi de France, t. I - IV, 1916-1979.
L’article de L. Delisle va bien au-delà des limites chronologiques indiquées dans
son titre : « Des revenus publics en Normandie au douzième siècle », B.E.C.,
1848-1849, p. 173-210, 257-289.

M. Nortier et J. W. Baldwin, « Contributions à l’étude des finances de Philippe


Auguste », B.E.C., 1980, p. 5-31. F. Lot et R. Fawtier, « Le premier budget de la
monarchie française », B.E.H.E., 1932, p. 259.

40. P. Guilhermoz et A. Dieudonné, « Chronologie des documents monétaires de


la numismatique royale des origines à 1330 et 1337 », RN 1930, p. 209-254. En
1225, Louis VIII donne à Henri Plastrard le droit de graver les coins des monnaies
parisis en deçà de la Loire, à l’exception de celles des pays du nord acquis par
son père dont l’artésien.

41. Th. N. Bisson, Conservation of Coinage. Monetary Exploitation and its


Restraint in France, Catalonia and Aragon (c. AD 1000 - c. 1225), Oxford, 1979.

42. Bisson, op.cit., p. 29-44 et 149-150.

43. F. Dumas et J.-N. Barrandon, op.cit., p. 32-46 et 72-76.

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