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Chapitre 1 : L’existence d’un arsenal normatif de protection de l'environnement

Section I : Un dispositif normatif international consistant (Une reconnaissance de plus en


plus prégnante des impératifs environnementaux à l'échelle internationale)

Paragraphe I : Les normes universelles souples

Paragraphe II : Les normes régionales contraignantes

Section 2 : Un dispositif normatif national hétérogène

Paragraphe I : Les normes constitutionnelles

Paragraphe II : Les normes infra constitutionnelles

Chapitre II : L’existence de juridictions chargées de l’application des normes


environnementales

Section I : Les juridictions externes de protection de l’environnement

Paragraphe I : L’absence d’une juridiction internationale spéciale environnementale

Paragraphe II : Une compétence par le truchement des droits de l’homme

Section II : Les juridictions nationales de protection de l’environnement

Paragraphe I : La compétence des juridictions spéciales


Paragraphe II : La compétence des juridictions de droit commun

Chapitre III : Les recours non contentieux

Section I : Les recours administratifs

Paragraphe I : Le recours hiérarchique

Paragraphe II : Le recours gracieux

Paragraphe III : La saisine du CESE

Section II : Les modes alternatifs de règlement des conflits environnementaux

Paragraphe 1 : La primauté de la transaction dans la résolution des différends


environnementaux

Paragraphe II : L’existence d’autres modes non juridictionnels


Introduction

La compétition pour l’accès aux ressources naturelles par les technologies avancées a permis
de dompter la nature. Les appétits économiques d’une société de consommation et les
conséquences des changements climatiques exacerbent la vulnérabilité des écosystèmes. La
manifestation de cette dégradation continue et accélérée, apparaît de façon notoire par la
modification des écosystèmes planétaires et affecte la structure et le fonctionnement du
système écosystémique. La déforestation accrue, la dégradation de l’environnement et les
activités d’exploitation des ressources naturelles font peser une menace sérieuse sur les
populations et les écosystèmes.

Face à cette situation, une mise en garde de la communauté scientifique a donné lieu, dans les
années 1970, à une réaction politique dans le domaine de l’environnement. L’environnement
est désormais au cœur de toutes les préoccupations dans la perspective d’un développement
durable, autant pour les pays industriels les plus avancés que pour ceux qui sont en voie de
développement.

Quel peut être le rôle du droit dans la protection de l’environnement ?

Le droit, régulateur des politiques environnementales en facilite l’adoption et la mise en


œuvre. C’est peu dire que toute volonté de protection dans le domaine de l’environnement,
comme dans tout autre domaine, doit nécessairement s’appuyer sur des normes juridiques,
obligatoires et donc contraignantes. Ces normes peuvent prendre la forme de conventions
internationales ou de textes juridiques nationaux.

Le droit de l’environnement est l’outil par excellence pour prévenir les problèmes
environnementaux, pour réparer les préjudices subis ou pour réhabiliter des milieux. En
répondant aux besoins du développement durable par la gestion de l’usage des ressources par
les humains, le droit de l’environnement touche à toutes les activités humaines. Il repose sur
des principes fondamentaux tels que la préservation de la diversité biologique et la
conservation des ressources naturelles, la précaution, la prévention et l’évaluation des
conséquences environnementales de tout projet, la concertation et la participation de toutes les
parties prenantes, l’accès à l’information. Il repose également sur d’autres outils comme le
droit à l’environnement, qui implique en matière de justice environnementale, le droit à un
niveau de protection sans aucune discrimination. Son respect suppose donc l'existence aussi
bien de mécanismes procéduraux que d'un cadre de vie apte à en assurer une jouissance
effective.

CHAPITRE I : L’EXISTENCE D’UN ARSENAL NORMATIF DE PROTECTION DE


L'ENVIRONNEMENT

L’environnement bénéficie d’une protection juridique au niveau interne et


international. Au niveau international, plusieurs accords internationaux ont été signés. Les
conventions internationales les plus significatives ont été adoptées après la conférence de Rio
de 1992 afin de définir les actions à mener en vue de résoudre les problèmes
environnementaux globaux. Il existe d’autres conventions aussi importantes.

Dans l’ordre interne, le droit de l’environnement régit toutes les activités humaines. Ainsi,
l’environnement bénéficie d’une protection juridique. Aujourd’hui, presque toutes les
constitutions consacrent le droit à un environnement sain. Des textes législatifs et
réglementaires sont intervenus pour compléter les chartes fondamentales.

SECTION 1 :L’EXISTENCE DE SOURCES INTERNATIONALES SOUPLES

La prise de conscience de la fragilité de l’environnement alimentée par la survenance


de pollutions catastrophiques (BHOPAL), (TCHERNOBYL), a amené à partir de 1970, la
constitution d’un immense chantier. Plusieurs conventions internationales et directives ont été
signées en matière de protection de l’environnement à l’échelle universelle (Paragraphe I).
Au niveau régional, des normes juridiques obligatoires ont été adoptées (Paragraphe II).

Paragraphe 1 : UNE RECONNAISSANCE PRÉGNANTE DES IMPÉRATIFS


ENVIRONNEMENTAUX À L'ÉCHELLE UNIVERSELLE
Le droit international de l’environnement est né en 1972 à Stockholm. Depuis cette date, les
traités dans le domaine de l’environnement se multiplient. La position des traités dans le droit
national varie selon la conception moniste ou dualiste. Au Sénégal, l’article 98 de la
Constitution dispose que “les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès
leur publication, une autorité supérieure aux lois internes, sous réserve, pour chaque accord
ou traité, de son application par l’autre partie”. Autrement dit, les traités ou accords ratifiés
par le Sénégal s'imposent au législateur qui ne doit pas adopter de lois contraires. En tout état
de cause, l’engagement international ne doit pas comporter de clause contraire à la
Constitution. Le Sénégal a ratifié plusieurs traités et déclarations universels.

A- L’existence de normes universelles environnementales souples

Arriver à un traité international dans le domaine de l’environnement est souvent très difficile.
C’est ainsi que des règles plus souples ont été adoptées. C’est le cas des recommandations et
déclarations.

Dans une volonté de généralisation de la protection de l’environnement, la communauté


internationale a adopté un certain nombre de textes plus souples sous forme de Déclaration
(Agenda 21 devenu Action 21). Ces textes ne sont pas contraignants pour les Etats même s’ils
ont une portée politique très importante. Ce sont des cadres ou encore des guides d’action ne
comportant pas véritablement de normes juridiques à caractère contraignant mais pouvant
servir de fondement à de futures conventions. L’aboutissement de cette normalisation par des
déclarations a été la tenue de la conférence de Rio en 1992, soit 20 ans après la conférence de
Stockholm et les accords de Paris en 2015, sans occulter aussi le protocole de Kyoto en 1997.
La déclaration de Stockholm de 1972 est le document fondateur du droit international de
l’environnement dont le principe 1 proclame que « l’homme a un droit fondamental à la
liberté, à l’égalité et à des conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la
qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être. Il a le devoir solennel de protéger
et d'améliorer l'environnement pour les générations présentes et futures ». C’est elle qui a fait
apparaître, pour la première fois, le terme de générations futures qui va orienter tous les
développements juridiques ultérieurs en matière d’environnement tant au niveau international
que national. C’est aussi à l'issue de ce sommet que va être créée la notion
d”écodéveloppement. Toutefois, elle se termine par un constat d’échec avec une communauté
internationale divisée entre ceux qui sont pour une priorité de développement et ceux qui sont
pour la question environnementale. Quant au sommet de Rio de Janeiro, il a posé 27
principes généraux du droit de l’environnement qui fixent les bases d’un nouvel ordre
environnemental mondial. En effet, la déclaration issue de cette conférence admet que les
pays développés acceptent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en
faveur du développement durable compte tenu des moyens techniques et des ressources
financières dont ils disposent. La conférence de Rio a largement contribué à l’émergence du
droit international de l’environnement dont l’objectif est de régir le traitement des questions
environnementales globales. Les conventions internationales les plus significatives ont été
adoptées après cette conférence afin de fixer le cadre et pour définir les actions à mener en
vue de résoudre les problèmes environnementaux globaux : réchauffement du climat, érosion
de la biodiversité, sécheresse et désertification. Le protocole de Kyoto pour sa part impose des
objectifs chiffrés avec un calendrier au moins pour les pays développés dans le cadre de
l’émission de gaz effet de serre. L’autre innovation de ce protocole a été la consécration du
principe selon lequel les Etats ont des responsabilités communes et différenciées. En effet, le
protocole établit une distinction entre deux voire trois blocs d’Etats : les Etats développés sur
lesquels reposent des obligations chiffrées assorties d’un calendrier, les pays en
développement sur lesquels ne pèsent aucune limite à leur émission de gaz à effet de serre, et
les pays en transition qui devront bénéficier du transfert de technologies propres, elles
doivent, pour atteindre une économie de marché, bénéficier d’une certaine latitude dans la
réduction des émissions. Premier accord universel et solidaire sur le climat, la COP21(les
accords de Paris) a décidé quant à lui de diminuer la hausse des températures à 2°c en limitant
l’émission de CO2. La COP a également promis une aide de 100 milliards de dollars aux pays
pauvres. Ce sommet a pour objectif la neutralité carbone d’ici la fin du siècle. Il a été ratifié
par le Sénégal le 21 septembre 2016.

La participation de l’Afrique dans la protection universelle de l’environnement peut se


regrouper en trois périodes. La première allant de la décolonisation à la conférence de
Stockholm est marquée par la méfiance des Etats africains à l’égard du discours écologique.
La seconde marque la prise de conscience de la nécessité de protéger l’environnement. Elle
est située entre 1972 au sommet de Rio de 1992. A partir de cette date, l’engagement de
l’Afrique de faire du principe de responsabilités communes et différenciées un levier dans les
déclarations et conventions en matière environnementales.

B-La multiplication des conventions internationales contraignantes protection de


l’environnement.
Le droit international protège à la fois le sol, l’air, les eaux et les ressources biologiques
contenues dans son écosystème. Les activités industrielles sont sources de dégradation
environnementale et en tant que telles il faut prendre les mesures préventives dont prônent le
droit international auquel l’Etat est partie. Ainsi, le droit de l’environnement international a
développé un large éventail de traités. C’est le cas par exemple de la Convention-cadre des
Nations-Unies sur les changements climatiques de 1992 dont l’objectif est de stabiliser les
concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute
perturbation anthropique dangereuse du système climatique et propose un canevas général qui
sera complété par d’autres conventions ou protocoles. Il existe d’autres traités qui
réglementent des domaines connexes à l’environnement. C’est l’exemple d’abord de la
Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982. Cette Convention, conclue à
Montego Bay le 10 décembre 1982, a pour objet de régler tous les problèmes concernant le
droit de la mer des pays côtiers exposés à la pollution marine. Cette convention est considérée
comme une des plus importantes qui réglemente entre autres l’activité de transport des
substances et l’exploitation des ressources halieutiques qui portent atteinte à l’environnement.
L’article 56 reconnaît à l’Etat côtier l’exercice de sa juridiction en ce qui concerne la
protection et la préservation du milieu marin. C’est d’ailleurs cette disposition que la justice
française a invoqué pour fonder sa compétence dans l’affaire Erika [1]. Ensuite, on peut noter
la Convention de Vienne pour la protection de la couche d’ozone du 22 mars 1995 et son
Protocole de 1997. Cette Convention fixe le cadre d’une action mondiale pour la protection
de la couche d’ozone. Elle a été ratifiée par le Sénégal le 19 Mars 1993. La protection de la
couche d’ozone passe par la réduction des produits chimiques ayant un impact sur celle-ci.
Les produits et les machines utilisés par les installations classées doivent tenir compte de ces
aspects environnementaux afin de respecter les engagements de l’Etat du Sénégal. Dans la
même veine, on peut citer le Protocole de Montréal relatif aux substances qui appauvrissent la
couche d’ozone adopté le 29 mai 1990 et ses amendements de Londres et Copenhague. Ce
protocole a été ratifié le 06/05/93 par le Sénégal. Il a pour objectif de réduire et d’éliminer la
production et la consommation des substances appauvrissant la couche d’ozone. Les
établissements classés doivent aussi respecter la Convention de Stockholm sur les Polluants
Organiques Persistants signée en mai 2001. Elle est aussi une source du droit international de
l’environnement. Son objectif est de protéger la santé humaine et l'environnement des
polluants organiques persistants qui possèdent des propriétés toxiques et résistants à la
dégradation. Le respect de cette convention impose aux industries qui doivent limiter au
maximum les produits entrant dans cette catégorie et éviter leur rejet dans des zones autres
que celles destinées aux déchets.

En outre, il y a la Convention sur la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel,


adoptée à Berne le 19 septembre 1979 dont l’objectif est la protection de l’environnement
naturel et des ressources naturelles qui s’y retrouvent.

On peut ajouter à la longue liste des conventions internationales environnementales, la


Convention sur le mercure adoptée à Kumamoto au Japon, le 10 octobre 2013, et entrée en
vigueur en août 2017. Son premier article prévoit que l’objectif de cette convention « est de
protéger la santé humaine et l’environnement contre les émissions et rejets anthropiques de
mercure et de composés du mercure ». Son article 4 rappelle, à cet effet, les engagements des
États concernant la manipulation et l’utilisation du mercure et interdit l’importation ou
l’exportation des produits fabriqués à base de mercure pour une utilisation de masse. Elle
limite le recours ou l’abandon du mercure dans le processus d’extraction des ressources
minières.

Par ailleurs, on peut citer la Convention sur la biodiversité. Ouverte à la signature lors du
Sommet de la Terre à Rio de Janeiro, le 5 juin 1992, et est entrée en vigueur le 29 décembre
1993, elle a pour principaux objectifs la conservation de la diversité biologique, l’utilisation
durable de la diversité biologique et le partage juste et équitable des avantages découlant de
l’utilisation des ressources génétiques.

Enfin, il existe plusieurs conventions internationales environnementales relatives aux régimes


de responsabilité en cas de pollutions. Parmi ces conventions, on peut citer la Convention
internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les
hydrocarbures (1969) qui prévoit un régime de responsabilité sans faute à la charge du
propriétaire du navire, qui est obligé de contracter une assurance. En cas de faute commise, le
propriétaire doit intégralement indemniser les victimes. Il peut être exonéré si le dommage
résulte d’un phénomène naturel ou d’un cas de force majeure, ainsi que lors de périodes
d’hostilité ou du fait de négligence d’un tiers ou d’une autorité. Cette Convention est
renforcée par celle de 1973 relative la prévention de la pollution par les navires instaure des
règles universelles qui ont pour but de renforcer la sécurité à bord de tous les navires,
submersibles, engins flottants à l’exception des navires d’État affectés à des usages non
commerciaux. Avec l’exploitation des hydrocarbures au Sénégal cette connaitra surement une
application pratique par les juridictions.

Les traités environnementaux sont différents des autres types de traités, car ils ont des
caractéristiques qui répondent aux besoins spécifiques de la protection de l’environnement. Ils
sont contraignants. Il faut préciser que les conventions environnementales qui mobilisent le
plus la communauté internationale actuellement sont la convention sur les changements
climatiques et de la convention sur la diversité biologique, la convention sur la lutte contre la
désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse élaborée à Paris en 1994 et
la Convention de Bâle (1991) sur le Contrôle des Mouvements Transfrontières de Déchets
Dangereux et de leur Élimination, ratifié en novembre 1992 par le Sénégal.

Cet alignement aux conventions internationales relatives à l’environnement est posé par le
Code de l’environnement du Sénégal qui prévoit le droit à tout individu de vivre dans un
environnement sain dans les conditions définies par les textes internationaux. Dans presque
tous les secteurs, le Sénégal s’efforce de s’aligner aux normes internationales.

En dehors des conventions universelles, les Etats africains ont aussi adopté des normes
environnementales qui pour l’essentiel s’appliquent aux Etats signataires.

PARAGRAPHE 2 : LA RÉGIONALISATION DU DROIT DE L’ENVIRONNEMENT

Pour lutter contre les atteintes à l’environnement, les Etats ne peuvent limiter leurs
actions au cadre national, il leur faut surtout une approche holistique pour apporter des
réponses idoines aux problèmes environnementaux. Ce qui favorise une dynamique
d’intégration régionale (A) et sous régionale reconnues par la déclaration de Rio (B).

A: Les normes environnementales régionales

La déclaration de Rio peut être considérée comme le point de départ de la


régionalisation du droit de l’environnement. En effet, elle encourage une certaine
harmonisation des règles de protection de l’environnement. Ainsi, les Etats africains ont
adopté de nombreux textes juridiques environnementaux régionaux. Ces textes invitent les
Etats membres à prendre en compte les questions environnementales dans toutes les autres
politiques car la protection de l’environnement n’est pas seulement le fait de la politique de
l’environnement, mais de toutes les autres actions et politiques.

Au niveau continental, la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de


1981 est le premier traité international reconnaissant le droit de l’homme à l’environnement
propice à son épanouissement. Son article 24 proclame que : « Tous les peuples ont un droit à
un environnement satisfaisant et global, propice à leur développement ». Cette disposition
reconnaît alors la qualité de droit de l’homme au droit à l’environnement. Il s’agit d’un droit
collectif et individuel. Autrement dit, les associations tout comme les individus peuvent saisir
le juge en cas de violation de ce droit.

On peut citer la convention de Mapoto sur la Conservation de la Nature et des Ressources


Naturelles (2003) et celle de Bamako sur l’interdiction d’importer en Afrique des déchets
dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontaliers (1991) et la gestion des déchets
dangereux produits en Afrique. Les articles 3 et 16 de la Convention de Maputo reconnaissent
respectivement le droit de l’homme à l’environnement et certains droits procéduraux. Ainsi,
cette convention invite les Etats à adopter des mesures législatives et réglementaires
nécessaires pour assurer la diffusion d’informations sur l’environnement, l’accès du public
aux informations sur l’environnement, la participation du public à la prise des décisions
pouvant avoir un impact important sur l’environnement et l’accès à la justice en ce qui
concerne les questions liées à la protection de l’environnement et des ressources naturelles.

La Convention d’Abidjan encore appelée Convention pour la Coopération dans la


Protection, la Gestion et la Mise en valeur de l’environnement marin et côtier de la Côte
Atlantique de la région d’Afrique de l’Ouest, du Centre et du Sud (sous l’égide du PNUE de
l’ONU) est entrée en vigueur en 1984. C’est un accord cadre juridique régional qui fournit des
actions de coopération nationale et régionale sur la protection et la mise en valeur des zones
marines et côtières. La conférence des parties a adopté deux instruments juridiques que sont :
la Convention pour la Coopération en matière de protection, de Gestion et de mise en valeur
de l’environnement marin et côtier de la Côte Atlantique de la région de l’Afrique de l’Ouest,
du Centre et du Sud et le Protocole d’urgence de lutte contre la pollution marine. Le premier a
été adopté en 2011 et le second en 2011 pour couvrir la lutte contre la pollution marine par les
navires et aéronefs, leurs opérations d’immersion en prenant « toutes les mesures appropriées
pour prévenir, réduire, combattre et maîtriser la pollution de la zone d’application de la
Convention (…) »1. Son article 8 prévoit que la pollution résultant d’activités liées à
l’exploration et à l’exploitation du fond de la mer et de son sous-sol est soumis aux mêmes
obligations2. La Convention d’Abidjan prévoit l’évaluation de l’impact sur l’environnement
« de manière à réduire au maximum l’impact néfaste que ces projets pourraient avoir (…) »
sur l’environnement marin et côtier de la Côte Atlantique de la région de l’Afrique de l’Ouest,
du Centre et du Sud.

On peut également ajouter à cette liste la Résolution relative à la Déclaration de


Niamey visant à garantir le respect de la Charte africaine dans le secteur des industries
extractives de 2017 qui est prise en application de la CADHP pour la reconnaissance de droits
de l’Homme face aux industries extractives. Cette résolution exige que les communautés et
les individus qui résident dans des zones affectées à la prospection et l’exploitation des
ressources naturelles soient dûment consultés, reçoivent toutes les informations relatives aux
activités de prospection et d’exploitation, dès le début du projet, et aient l’assurance que ces
activités sont menées dans le strict respect des termes convenus pour protéger leurs droits 3.
Elle demande aux Etats de mettre en place des organismes de réglementation dotés des
pouvoirs requis pour faire de telle sorte que les droits humains ainsi que les normes de
l’environnement soient dûment respectés et que les impacts écologiques et sociaux soient
atténués. Elle demande, en outre, aux Etats de mettre en place des mécanismes tant judiciaires
que non judiciaires de plainte, accessibles aux communautés touchées et dotés des moyens et
ressources nécessaires au traitement des affaires impliquant les industries extractives. La
résolution appelle les États à verser des réparations satisfaisantes aux communautés touchées
en compensation de tous les dommages matériels et non-matériels subis et à nettoyer ou
encore réhabiliter l’environnement en cas de dégradation de ce dernier.

La plupart des conventions africaines relatives à l’environnement ont été adoptées en


développant des compétences environnementales spécifiques. L’acte constitutif de l’UA
prévoit que le conseil exécutif assure la coordination et décide des politiques dans les
domaines d’intérêts communs pour les Etats membres notamment dans les domaines
suivants : protection de l’environnement, action humanitaire, réaction et secours en cas de
catastrophe. Le conseil a donc une double mission de coordination des politiques

1 Article 7 convention d’Abidjan


2 La pollution d’origine atmosphérique et transatmosphérique ; érosion côtière, zones spécialement protégées et même
coopération entre Etats et organisations internationales et régionales en cas de situation critique sont prévues.
3 Voir https://www.acdhrs.org/wp-content/uploads/2017/07/R%C3%A9solution-relative-%C3%A0-la-D
%C3%A9claration-de-Niamey-visant-%C3%A0-garantir-le-respect-de-la-Charte-africaine-dans-le-secteur-des-
industries-extractives.pdf, consulté le 12/04/2023.
environnementales et la possibilité de décider celles à mettre en œuvre. Si la mission de
coordination des politiques environnementales ne soulève pas de réelles difficultés, celle de
décider pose le problème de la valeur juridique des décisions prises.

B-Les normes environnementales sous-régionales

Au sein de l’UEMOA, un code minier communautaire a été adopté par le règlement


n°18-2003 CM du 23 décembre 2003. Ce code régit l’ensemble des opérations relatives à la
prospection, à la recherche, à l’exploitation, à la détention, à la circulation, au traitement, à la
possession à la transformation et à la commercialisation des substances minérales sur toute
l’étendue du territoire de l’union à l’exception des hydrocarbures liquide et gazeuses. Il
s’applique uniformément et de manière directe à l’intérieur des frontières des États membres.
Il a une force juridique contraignante indéniable. En effet, l’article 3 dudit texte précise que le
Code minier s’applique sur toute l’étendue du territoire de l’UEMOA, à toute personne
physique ou morale exploitant l’activité minière. Contrairement à la directive de la CEDEAO,
qui harmonise les principes de l’exploitation de l’activité minière, le Code UEMOA est un
texte qui s’applique directement et prioritairement aux États membres dans toutes les phases
de l’exploitation minière. Le même texte précise qu’il ne peut être suppléé par la législation
nationale dans les différentes phases d’exercice de l’activité minière que pour les opérations
non régies par le Code. Le code UEMOA, à l’exemple du Traité OHADA, consacre ainsi la
supranationalité des textes communautaires sur la législation nationale encadrant l’activité
minière.

S’agissant de la CEDEAO, les articles 28 à 31 du traité constitutif révisé reconnaissent


à l’union des compétences en matière énergétiques et en matière de déchets et des ressources
naturelles. De plus, l’article 3 précise que l’action de la communauté portera entre autres sur
l’harmonisation et la coordination des politiques en matière de protection de l’environnement.
C'est la raison pour laquelle il a été mis en place une commission de l’agriculture de
l’environnement et des ressources en eau comprenant une direction de l’environnement
chargée de la mise en œuvre de la politique environnementale de l’organisation. La CEDEAO
ne cherche pas à se substituer aux politiques énergétiques nationales de chaque État membre,
mais d’harmoniser les politiques nationales d’exploitation des ressources minières au sein de
ses États membres, notamment sur les questions relatives à l’accès à l’activité minière et au
régime juridique du titre minier.
Ensuite, on peut citer la directive C/DIR 3/05/09 en date du 27 mai 2009 portant sur
l’harmonisation des principes directeurs et des politiques dans le secteur minier. Cette
directive a pour objectif d’assurer l’harmonisation des principes directeurs et des politiques
dans le secteur minier des Etats membres basés sur des normes standard de haut niveau de
responsabilité pour les compagnies minières et les gouvernements afin de promouvoir les
droits de l’homme, la transparence et l’équité sociale et de garantir la protection des
communautés locales et de l’environnement dans les zones minières de la sous-région. Elle
vise également à améliorer la transparence dans le processus de formulation et de mise en
œuvre de la politique minière dans la sous-région, promouvoir la participation et renforcer les
capacités des communautés minières et doter les Etats membres d’une politique minière et
d’un cadre juridique harmonisés. Cette directive fait peser des obligations aux Etats et aux
sociétés minières. Ainsi, pour les sociétés minières, avant d’entreprendre toute activité
minière, elles doivent obtenir les permis et approbations nécessaires auprès des autorités
compétentes de l’Etat chargées de la protection des forêts, de l’environnement, des autres
ressources naturelles, les ressources en eau, et de la santé publique dans le cadre de ses
activités minières. Elles doivent aussi mènent leurs activités conformément aux lois et
règlements nationaux, aux pratiques administratives et aux politiques relatives à la
préservation de l’environnement des Etats membres dans lesquels ils opèrent et se conformer
aux accords internationaux s’y rapportant, aux principes, objectifs et normes standards relatifs
à l’environnement, l’hygiène, la santé publique et la sécurité et en général mener leurs
activités de façon à contribuer à l’objectif global de développement durable. Les sociétés
minières, avant le début des opérations, doivent élaborer des plans de réhabilitation et de
fermeture des sites miniers ainsi que des plans pour l’après mine. Concernant les Etats, ils
doivent adopter des lois appropriées pour mettre en place des mécanismes de plaintes et des
audits pour le respect des obligations résultant de la présente Directive relatives à la
protection de l’environnement. Les Etats doivent ensuite mener des audits périodiques de
l’environnement pour s’assurer de la performance environnementale des opérations minières.
Ils doivent, en outre, veiller à ce que les détenteurs des droits ou titres miniers prennent les
mesures pour empêcher et gérer le déversement de cyanure, de mercure et autres substances
similaires, de substances nocives à la santé humaine et à l’environnement, ainsi que les autres
risques liés aux activités minières4. Enfin, ils doivent mettre en place un fond pour la
réhabilitation environnementale. En plus de ces obligations qui pèsent sur les Etats et les
sociétés minières, la directive prévoit qu’aucune donnée n’est considérée comme
4 Voir article 4 de la directive
confidentielle si elle est relative à la dégradation ou à la supposée dégradation de la santé
humaine, de l’environnement ou à la sécurité des travailleurs5.

Ces différents textes prévoient des voies de recours devant les instances communautaires en
cas de violation, de difficultés d’interprétation ou de mise en œuvre. Ainsi, toutes les
questions relatives à la violation de la directive précitée peuvent être portées à la connaissance
des États membres pour résolution. Dans le cas où, elles n’ont pu être résolues, elles sont
portées à la connaissance du Président de la Commission de la CEDEAO qui soumet les
plaintes à la Cour de Justice de La CEDEAO. La procédure d’examen des plaintes n’empêche
pas un Etat, un individu ou une partie prenante de porter l’affaire devant la Cour de Justice de
la CEDEAO ou d’invoquer la procédure d’arbitrage ou la compétence de toute autre
juridiction internationale telle que la Cour Africaine de Justice ou la Cour Africaine des
Droits de l’Homme.

D’ailleurs, depuis sa création, la Cour de justice de la CEDEAO a rendu plusieurs arrêts. C'est
le cas de l'arrêt SERAP/Nigéria. Dans cet arrêt, la Cour de Justice de la Communauté
Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a sanctionné l’incapacité du
gouvernement à promulguer des lois efficaces et à établir des institutions capables de
réglementer les activités des entreprises, associée à son incapacité à traduire en justice les
auteurs de la pollution, équivalait à une violation des obligations et engagements
internationaux du Nigeria en matière de droits humains » en soulignant que « la qualité de vie
des personnes étant déterminée par la qualité de l’environnement, le gouvernement avait
manqué à son devoir de maintenir un environnement satisfaisant et propice au
développement de la région du delta du Niger ».

L’harmonisation des politiques environnementales est, par ailleurs, très poussée dans
le cadre de l’Union Européenne avec des normes communautaires directement applicables. Le
droit de l’Union européenne est aujourd’hui une des principales sources du droit de
l'environnement en Europe. C’est en 1972 que les chefs d’Etat et de gouvernement réunis à
Paris avaient décidé de la création d’une politique environnementale communautaire, le Traité
de Rome comportant aucun article sur la question. C’est ce qui donne lieu à l’Acte Unique
intégrant la protection de l’environnement dans le Traité de Rome en 1987. L’entrée en
vigueur du Traité de Lisbonne intégra la question environnementale aussi bien dans le Traité
sur l’Union (Préambule, art.3.3 ET 21) qu’au Traité sur son fonctionnement (art. 191.1 et s. et
art. 11. Plusieurs directives interviendront pour compléter ce droit originaire. Si ce corpus
5 Voir article 13 de la directive
législatif européen est assez complet, sa mise en œuvre, en revanche, reste assez
problématique. C’est dans cette perspective qu’il faut rappeler la consécration de l’effet
direct des directives par le CE français sous certaines conditions lorsqu’il y’a expiration du
délai (CE ASS 20 octobre 2009, PEURREUX). Les principes énoncés dans cet arrêt : la
Haute juridiction a considéré que la transposition en droit interne des directives
communautaires revêt en outre le caractère d’une obligation constitutionnelle ; que, pour
chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national de garantir l’effectivité des droits que
toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques ; que tout justiciable
peut en conséquence demander l’annulation des dispositions réglementaires qui seraient
contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision
administrative, faire valoir qu’après l’expiration des délais impartis, les autorités nationales ne
peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer à faire application
des règles qui seraient incompatibles avec les objectifs définis par les directives ; qu’en outre,
tout justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non
réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’Etat n’a
pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transpositions nécessaires. La
prééminence de principe du droit communautaire sur le droit interne qui est l’un des piliers de
la légitimité conférée à l’organisation oblige les Etats membres à adopter des règles nationales
pour assurer l’effectivité des normes communautaires.

En gros, bien qu’intéressante, les normes communautaires ne sont pas toujours elles-
mêmes suffisantes pour garantir, en Afrique, le respect de l’environnement malgré
l’existence d’une jurisprudence prometteuse, pourtant, l’article 98 de la constitution
sénégalaise dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés par le
Sénégal ont, dès leur publication une autorité supérieure à celle des lois sous réserve pour
chaque accord ou traité de son application par l’autre partie.

SECTION 2: L'HÉTÉROGÉNÉITÉ DES SOURCES ENVIRONNEMENTALES


NATIONALES

Dans la quasi-totalité des Etats, le droit de chacun à vivre dans un environnement


équilibré et favorable à la santé est inscrit dans le niveau le plus élevé de l’édifice juridique.
En effet, ce droit fondamental de l’Homme bénéficie aujourd’hui d’une protection
constitutionnelle (paragraphe 1). A cela s’ajoutent les normes législatives et administratives
(paragraphe 2).

Paragraphe 1: Les sources constitutionnelles renouvelées

Au Sénégal et dans beaucoup d’autres États d’Afrique noire francophone, l’environnement


bénéficie d’une protection suprême par la Constitution.

A- La protection constitutionnelle de l’environnement au Sénégal

Dans les démocraties contemporaines, la garantie constitutionnelle du droit à un


environnement sain est considérée comme l’un des acquis majeurs du 21e siècle. Ce droit, une
fois garanti par les textes suprêmes, doit être assorti de recours au bénéfice des justiciables qui
peuvent d’ailleurs s’en prévaloir devant les juridictions. La consécration constitutionnelle
permet d’une part de faire obstacle à l’adoption des dispositions législatives ou d’actes
administratifs contraires au but de protection et de préservation de l’environnement et, d’autre
part, de garantir aux justiciables la possibilité de saisir les juridictions compétentes en cas
d’atteinte à leurs droits environnementaux. En effet, ce droit fondamental de l’Homme
bénéficie aujourd’hui d’une protection constitutionnelle à travers d’abord l’article 8 de la
Charte fondamentale du Sénégal garantit à tous les citoyens le droit à un environnement sain.
En consacrant le droit à un environnement sain, la Constitution du Sénégal identifie les
personnes morales et physiques chargées de sa protection. Ainsi, aux termes de l’article 25.2
« la défense, la préservation et l’amélioration de l’environnement incombent aux pouvoirs
publics. Les pouvoirs publics ont l’obligation de préserver, de restaurer les processus
écologiques essentiels, de pourvoir à la gestion responsable des espèces et des écosystèmes,
de préserver la diversité et l’intégrité du patrimoine génétique, d’exiger l’évaluation
environnementale pour les plans, projets ou programmes, de promouvoir l’éducation
environnementale et d’assurer la protection des populations dans l’élaboration et la mise en
œuvre des projets et programmes dont les impacts sociaux et environnementaux sont
significatifs ». Dans cette dynamique, le constituant précise à l’alinéa 2 du même article que «
L’exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et
de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population et
à être écologiquement durables ». Cette volonté élevée du constituant s’est traduite au niveau
législatif et règlement par l’adoption de certains instruments intégrant fondamentalement les
exigences de protection de l’environnement et de réalisation du droit à un environnement
sain. La nouvelle réforme constitutionnelle cite le Conseil économique, social et
environnemental parmi les autorités environnementales de la République 6. Cette disposition
renforce les mécanismes institutionnels de protection de l’environnement au Sénégal. Cette
consécration hisse le droit à l’environnement sain au rang de dignité constitutionnelle, c’est à
dire au rang de droit fondamental et opposable aux trois pouvoirs constitués que sont le
pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire mais aussi et surtout, dans les
relations horizontales entre individus.

Par ailleurs, la constitutionnalisation est renforcée par la référence faite dans le préambule à la
Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui consacre le droit à un
environnement sain pour les peuples, à l’attachement également du Sénégal aux droits
fondamentaux définis dans la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 et
dans la Déclaration universelle du 10 Décembre 1948. Ces deux textes garantissent
l’intangibilité du droit de propriété et des droits économiques et sociaux. Il est à rappeler que
le constituant sénégalais a fait du préambule une partie intégrante de la constitution. C’est
dans cette perspective que l’on comprend, en France, l’annexion de la charte de
l’environnement dans le préambule de la Constitution de 1958 7. L’ère de la Charte de
l’environnement (10 articles) constitue une révolution juridique en matière environnementale.
L’adoption de la Charte de l’environnement s’est enfin traduite par un renforcement de la «
démocratie environnementale », initiant un renouvellement du rôle du citoyen, comme
titulaire de nouveaux droits dans l’action publique environnementale mais aussi de nouvelles
responsabilités8. La Charte consacre une troisième génération de droits encore appelés « droits
de solidarité » et devoirs liés à protection et à la mise en valeur de l'environnement 9. Les
citoyens ont le devoir de participer à la préservation de l'environnement, de prévenir les
atteintes à l'environnement et d'en limiter les conséquences, et de réparer les dommages
causés à l'environnement.

Cette exigence d’inscrire la protection de l’environnement au plus haut niveau du dispositif


juridique n’est pas spécifique au Sénégal et à la France. En effet, elle est présente dans une
cinquantaine de constitutions dans le monde dont 11 dans les pays de l’UE et dans la quasi-
totalité des pays africains.

6 Loi constitutionnelle n° 2016-10 du 05 avril 2016 portant révision de la Constitution,


http://www.jo.gouv.sn/spip.php?page=imprimer&id_article=10799, consulté le 12/04/2023.
7 A. PERI, « La Charte de l'environnement : reconnaissance du droit à l'environnement comme droit
fondamental ? », in Petites affiches, n°39, 2005, p. 8.
8 Y. AGUILA, « Les acteurs face à la constitutionnalisation du droit de l'environnement », in Les nouveaux
Cahiers du Conseil constitutionnel, n°43, 2014, pp. 43-48.
9 J.-L. PISSALOUX, « La constitutionnalisation non sans risque du droit de l'environnement », in Gazette du
Palais, 2005, n°013, p. 3.
B-La consécration constitutionnelle de l’environnement en Afrique francophone

Les Constitutions modernes accordent une place importante à la protection de


l’environnement. En Afrique, on peut citer le préambule de la Constitution camerounaise de
1996 modifiée et complétée par la loi n°2008/001 du 14 avril 2008 qui prévoit que “toute
personne a droit à un environnement sain. La protection de l’environnement est un devoir
pour tous. L’Etat veille à la défense et la promotion de l'environnement. Le constituant
béninois est allé beaucoup plus loin dans la consécration constitutionnelle du droit de
l’environnement en intégrant d’abord la Charte africaine des droits de l’Homme et des
peuples qui reconnaît le droit à un environnement satisfaisant dans la Constitution. En effet,
aux termes de l’article 7 “les droits et les devoirs proclamés et garantis par la Charte
Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples adoptée en 1981 par l'Organisation de
l'Unité Africaine et ratifiée par le Bénin le 20 janvier 1986 font partie intégrante de la
présente Constitution et du Droit béninois”. Cette reconnaissance est renforcée par l’article 27
qui stipule que « Toute personne a droit à un environnement sain, satisfaisant et durable et a
le devoir de le défendre. L'Etat veille à la protection de l'environnement. La Constitution du
Bénin considère, enfin, comme crime contre la nation en cas de transit, d'importation, de
stockage, d’enfouissement, de déversement sur le territoire national des déchets toxiques ou
polluants étrangers et tout accord y relatif 10. L’article 27 de la Constitution ivoirienne du 8
novembre 2016 dispose que « Le droit à un environnement sain est reconnu à tous sur
l’ensemble du territoire national. Le transit, l’importation ou le stockage illégal et le
déversement de déchets toxiques sur le territoire national constituent des crimes
imprescriptibles ». La Constitution ivoirienne met à la charge de l’Etat, des collectivités
locales et des citoyens un certain nombre d’obligations. Ainsi, aux termes de son article 40,
« La protection de l’environnement et la promotion de la qualité de la vie sont un devoir pour
la communauté et pour chaque personne physique ou morale. L’Etat s’engage à protéger son
espace maritime, ses cours d’eau, ses parcs naturels ainsi que ses sites et monuments
historiques contre toutes formes de dégradation. L’Etat et les collectivités publiques prennent
les mesures nécessaires pour sauvegarder la faune et la flore. En cas de risque de dommages
pouvant affecter de manière grave et irréversible l’environnement, l’Etat et les collectivités
publiques s’obligent, par application du principe de précaution, à les évaluer et à adopter des

10 Voir article 29 de la Constitution


mesures nécessaires visant à parer à leur réalisation ». Par contre, celle togolaise, à travers
l’article 41 ne met qu’à la charge de L'État de veiller à la protection de l'environnement 11.

PARAGRAPHE 2 : LES NORMES INFRA CONSTITUTIONNELLES

Le Sénégal est un Etat qui regorge de ressources extractives, halieutiques et forestières


énormes. Ainsi, dès la fin des années 1970, le Sénégal s’est doté d’instruments juridiques et
institutionnels décolonisés relatifs à la protection de l’environnement. Ces normes protectrices
sont contenues dans le Code de l’environnement (A), et dans d’autres textes spéciaux destinés
à maintenir et à rétablir les équilibres écologiques nécessaires au développement économique
et au bien-être des populations (B).

A- Les normes environnementales générales posées par le Code de l’environnement

La protection constitutionnelle de l’environnement est complétée par le Code de


l’environnement. Au Sénégal, le Code de l’environnement est portée par la loi n°2001/01 du
15 janvier 2001 remplaçant et modifiant la loi n°83-05 du 28 janvier 1983 et pose les règles
générales relatives à la protection de l’environnement. L’adoption de ce code a été l’occasion
de compléter les dispositions constitutionnelles relatives à la protection de l’environnement.
L’objectif du Code de l’environnement est de protéger les sols, sous-sols, sites, paysages et
monuments nationaux, les formations végétales, la faune et la flore et particulièrement les
domaines classés, les parcs nationaux et réserves existantes, d’établir les principes
fondamentaux destinés à gérer, à protéger l'environnement contre toutes les formes de
dégradation afin de valoriser les ressources naturelles, de lutter contre toutes sortes de
pollution et nuisances, d’améliorer les conditions de vie des différents types de population
dans le respect de l'équilibre avec le milieu ambiant, de créer les conditions d'une utilisation
rationnelle et durable des ressources naturelles pour les générations présentes et futures ; -
garantir à tous les citoyens, un cadre de vie écologiquement sain et équilibré et de veiller à la
restauration des milieux endommagés. Ainsi, reprenant la Constitution, l’article 1er du Code
de l’environnement précise que tout individu a droit à un environnement sain dans des
conditions définies par les textes internationaux. Ce droit est assorti d’une obligation de

11 Voir article 41 de la Constitution


protection de l’environnement. À ce titre, l’obligation de protéger l’environnement incombe à
l’Etat, aux collectivités locales et aux citoyens. Le Code de l'environnement réglemente le
droit des installations classées, la préservation de la biodiversité, la réglementation des
prélèvements, la protection des espaces, les déchets, la lutte contre la pollution atmosphérique
et le changement climatique, la préservation de la ressource en eau et la protection des zones
côtières. Ce code est aujourd’hui abrogé par la loi n°2023-15 du 02 aout 2023 portant Code de
l’environnement. En effet, la loi de 2001-01 du 15 janvier renfermait des manquements,
notamment l’insuffisance des dispositions juridiques relatives aux substances nocives,
dangereuses et aux déchets dangereux, la faiblesse de la procédure d’évaluation
environnementale, l’inadaptation de la nomenclature des installations classées, la non prise en
compte de certains principes fondamentaux et son inadaptation avec certaines conventions
internationales. A travers cette nouvelle réforme, le législateur sénégalais a essayé de
combler ces manquements en renforçant le cadre définitionnel, en renforçant le cadre de
gestion des substances nocives et dangereuses mais aussi le dispositif de gestion des
ressources naturelles.

En Afrique, beaucoup de pays ont également adopté un code de l’environnement. C’est le cas
du Burkina Faso avec la loi n°006-2013 AN du 02 avril. Cette loi vise à protéger les êtres
vivants contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et les risques qui gênent ou qui
mettent en péril leur existence du fait de la dégradation de leur environnement et à améliorer
leurs conditions de vie. A cette fin, toute personne peut porter plainte devant les autorités
administratives ou judiciaires compétentes afin de faire cesser les nuisances générées par les
activités qui troublent la tranquillité ou portent atteinte à la sécurité ou à la salubrité
publique12. Certaines infractions sont considérées d’ailleurs comme criminelles. C’est par
exemple, le fait de procéder à l’enfouissement ou au dépôt de déchets dangereux dans des
lieux autres que les décharges, les centres d’enfouissement techniques ou de stockage, les
centres de stockage qui sont réservés au type de déchets en cause 13. Il en est ainsi de même
pour transport, détention, le stockage, utilisation ou élimination des produits ou substances
chimiques en violation des règles posées ou encore le procéder à l’exportation ou au transit de
déchets dangereux14. Ces infractions criminelles ne peuvent faire l’objet de transaction par le
ministre chargé de l’environnement15. En dehors du ministère de l’environnement 16 et du

12 Voir article 5 de la loi 006-2013 du 2 avril 2013 portant Code de l’environnement du Burkina Faso
13 Voir article 142 du Code de l’environnement du Burkina Faso
14 Voir article 144 du Code de l’environnement du Burkina Faso
15 Voir l’article 116 du Code de l’environnement déjà cité.
16 Voir art.109 du Code de l’environnement
ministère public17, la loi burkinabé offre la possibilité aux associations de défense de
l’environnement18 de mener des actions en justice.

La Guinée s’est également dotée d’un nouveau Code de l’environnement qui, à l’instar de
celui du Sénégal et du Burkina Faso, fixe les règles de protection de l’environnement et les
règles permettant d’assurer un développement durable19.

B- Les règles environnementales contenues dans des textes spéciaux

Les dispositions environnementales contenues dans le Code de l’environnement sont reprises


par d’autres codes ou lois sectoriels afin de mieux encadrer l’exploitation des ressources
naturelles et ainsi éviter une dégradation de l’environnement.

Quant au Code pétrolier de 2019 remplaçant la loi de 98/05 du 8 janvier 1998, il constitue
également un dispositif important de promotion du développement économique et de
protection de l’environnement. Aux termes de l’article 53 du code pétrolier les opérations
pétrolières doivent être conduites conformément au code de l’environnement et ainsi qu’aux
textes nationaux et internationaux relatifs à l’hygiène, à la santé à la sécurité ainsi qu’à la
protection de l’environnement. Ainsi, les entreprises pétrolières doivent prendre des mesures
nécessaires relatives à la protection et à la prévention et à la lutte contre la pollution de
l’environnement, à la préservation des eaux du sol et du sous-sol et enfin au respect de la
réglementation applicable en matière d’hygiène et de santé.

Pour le code minier, il vise également une protection accrue de l’environnement à travers les
obligations environnementales incombant aux sociétés minières dans les différentes étapes de
l’exploration, de la recherche, de l’exploitation et de l’après exploitation. Ainsi aux termes de
l’article 102 de la loi n°2016-32 du 8 novembre 2016 relative au code minier, tout demandeur
de permis d’exploitation minière, d’autorisation d’ouverture et d’exploitation de carrière, ou
d’autorisation d’exploitation de petites mines doit préalablement au démarrage de ses
activités, réaliser à ses frais une étude d’impact sur l’environnement et la mise en œuvre du
plan de gestion environnementale conformément au code de l’environnement et aux décrets et
arrêtés y afférant. Mieux, le code oblige les détenteurs de procéder obligatoirement à la
réhabilitation des sites couverts par son titre minier. Par ailleurs, pour éviter ou anticiper des

17 Art.110 du Code de l’environnement


18 Art.111 du Code de l’environnement
19 Voir loi n°2019-0034 du 04 juillet 2019 portant Code de l’environnement en République de Guinée
défaillances de la société minière dans la réhabilitation des sites, l’article 104 oblige tout
titulaire de permis de recherche d’autorisation d’ouverture et d’exploitation de carrière
permanente, d’autorisation d’exploitation de petites mines, de permis d’exploitation minière
et de contrat de partage de production à ouvrir et à alimenter un compte fiduciaire auprès de
l’établissement public spécialisé et désigné par l’Etat. Au Sénégal, ce fond doit être déposé au
niveau de la caisse de dépôt et de consignation. Cette garantie est destinée à la réhabilitation
du site après exploitation.

Quant au code gazier, il permet aussi la préservation de l’environnement dans le cadre de


l’exploitation des ressources gazières. Au titre ces règles, le Code prévoit en son article 14
que “l’attribution d’une licence ou d’une concession pour les activités intermédiaires et aval
gazier, comportant la réalisation d’infrastructures gazières, est subordonnée à la réalisation
d’une évaluation environnementale préalable et à l’obtention d’une autorisation d’exploitation
au titre de la réglementation sur les installations classées pour la protection de
l’environnement”. Au moment de l’exploitation, les infrastructures gazières doivent prendre
des mesures nécessaires pour prévenir et lutter contre la pollution de l'environnement en
évitant le rejet ou la fuite de tout produit polluant dans le milieu, d’assurer, en cas de
pollution, la gestion, la décontamination, le traitement des déchets et la réhabilitation
conformément au plan de gestion environnementale et sociale. Enfin, elles sont tenues, après
exploitation, de remettre en état et de procéder à la réhabilitation des sites. Elles sont tenues, à
ce titre, de verser annuellement à la caisse de dépôt et de consignation une provision en vue
de constituer le montant du cautionnement pour la réhabilitation et la restauration.

Ces lois sont assorties chacune de décrets d’application et d’arrêtés ministériels. Enfin, les
contrats conclus par les pouvoirs publics pour l’exploitation des ressources naturelles et
minières constituent des sources d’obligations environnementales.

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