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CONDUITE A TENIR DEVANT UN CARDIOPATHE

PLAN

1- INTRODUCTION

2- CLASSIFICATION DES CARDIOPATHIES

3- PRISE EN CHARGE AU CABINET DENTAIRE

3-1 Risque infectieux

3-2 Risque hémorragique

3-3 Risque syncopal

Références bibliographiques

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1- INTRODUCTION :

La prise en charge d’un cardiopathe au cabinet dentaire peut être envisagée selon deux axes :

-Traitement de la symptomatologie bucco-dentaire ;

-Remise en état de la cavité buccale en vue d’une chirurgie cardiaque.

Qu’il s’agisse de l’un ou de l’autre, il est important d’établir un contact avec le médecin
traitant ce qui permettra de constituer un dossier du patient pouvant nous renseigner sur :

 le type de cardiopathie
 Les thérapeutiques en cours
 Le ou les risques liés à la prise en charge du patient :
 Infectieux ;
 Hémorragique ;
 Syncopal.

2- CLASSIFICATION DES CARDIOPATHIES :

2-1 Les cardiopathies congénitales :

2-1-1 Les cardiopathies cyanogènes :

 Trilogie de FALLOT ;
 Tétralogie de FALLOT ;
 Transpositions complètes ou incomplètes des gros vaisseaux (aorte et artère
pulmonaire).

2-1-2 Les cardiopathies non cyanogènes :

 Avec shunt : Le shunt est le passage de sang entre cœur droit et cœur gauche
 CIA : communication inter auriculaire ;
 CAP : canal artériel persistant.

 Sans shunt : Ce sont essentiellement les mal formations valvulaires


 Rétrécissement congénital de l’orifice pulmonaire ;
 La bicuspide aortique ;
 La coarctation aortique.

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2-2 Les cardiopathies acquises :

2-2-1 Cardiopathies valvulaires rhumatismales : Ce sont les séquelles du RAA

 Rétrécissements mitrale ou aortique ;


 Insuffisances mitrale ou aortique ;
 Maladies mitrale ou aortique.

2-2-2 Cardiopathies ischémiques : Par athérosclérose

 Infarctus du myocarde ;
 Angine de poitrine : Angor.

2-2-3 Troubles du rythme : Arythmies ou dysrythmies cardiaques

 Extra systoles ;
 Tachycardie et bradycardie ;
 Fibrillations ventriculaires.

2-2-4 HTA : Hypertension artérielle.

2-2-5 Autres cardiopathies :

 Les endocardites ;
 Les cardiomyopathies ;
 Les péricardites

3- PRISE EN CHARGE AU CABINET DENTAIRE :

3-1 Risque infectieux :

L’infection représente un risque de complication secondaire dans certains cas d’affections


cardiaques, la plus connue est l’endocardite infectieuse (endocardite bactérienne d’OSLER).

Il s’agit d’une manifestation à distance à porte d’entrée bucco-dentaire (27% d’étiologie


dentaire), elle fait suite à un acte bucco-dentaire invasif et la pathogénie retenue est la
bactériémie.

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3-1-1 Classification des cardiopathies selon le risque infectieux :

Selon :

- la conférence de consensus de la société de pathologie infectieuse de langue française

(SPILF) 1992

-Les recommandations de l’AHA : American heart association 1997

-L’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) 2003

Les cardiopathies sont classées selon le risque oslérien en :

 Cardiopathies à haut risque : Groupe A

-Les prothèses valvulaires ;

-Les antécédents d’endocardite infectieuse ;

-Les cardiopathies congénitales cyanogènes.

 Cardiopathies à risque modéré : Groupe B

-Les valvulopathies : rétrécissement et insuffisance mitrale ou aortique, tricuspides,


polyvalvulopathies, prolapsus mitral, bicuspide aortique ;

-Les cardiomyopathies obstructives ;

-Les cardiopathies congénitales non cyanogènes.

 Cardiopathies sans risque particulier :

-Les cardiopathies ischémiques ;

-Communication inter auriculaire ;

-Rétrécissement mitral ;

-Simulateur cardiaque ;

-Prolapsus mitral sans souffle ;

-Affection vasculaire périphérique ;

-Défibrillateur implanté ;

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-Cardiopathie hypertensive.

Selon les recommandations de l’AFSSAPS 2011 : On distingue

 Les cardiopathies à haut risque d’endocardite infectieuse :

-Les prothèses valvulaires ;

-Les antécédents d’endocardite infectieuse ;

-Les cardiopathies congénitales cyanogènes :

 Non opérées ;
 Opérées avec présence de shunt résiduel ;
 Opérées avec mise en place de matériel prothétique sans fuite résiduelle, seulement
dans les 06 mois suivant la mise en place.

Seules ces cardiopathies nécessitent une antibioprophylaxie avant la réalisation d’actes bucco-
dentaires invasifs :

-Manipulation de la gencive : Détartrage

-Effraction de la muqueuse buccale : Sauf l’anesthésie locale et loco-régionale

3-1-2 Actes bucco-dentaires et risque infectieux :

 Actes invasifs :
 Mise en place de la digue ;
 Traitement des dents à pulpe vivante ;
 Détartrage avec ou sans surfaçage ;
 Sondage parodontal ;
 Extraction de dents sur l’arcade, alvéolectomie et séparation des racines.
 Actes non invasifs :
 Actes de prévention non sanglants ;
 Soins conservateurs ;
 Soins prothétiques non sanglants ;
 Dépose post-opératoire de sutures ;
 Pose de prothèse amovible ;
 Pose et ajustement de matériel orthodontique ;
 Prise de radiographie dentaire.

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 Actes contre-indiqués : Chez les patients à haut risque
 Anesthésie intra ligamentaire ;
 Traitement endodontique des dents à pulpe non vivante ainsi que les reprises de traitement
canalaire ;
 Traitement endodontique des dents à pulpe vivante en plusieurs séances ou sans champ
opératoire ;
 Amputation radiculaire ;
 Les transplantations dentaires ;
 Les réimplantations dentaires ;
 La chirurgie péri apicale ;
 La chirurgie parodontale ;
 La chirurgie implantaire et des péri-implantites ;
 La mise en place de matériaux de comblement ;
 La chirurgie préorthodontique des dents incluses ou enclavées.

3-1-3 Prévention du risque infectieux :

 Assurer une bonne hygiène bucco-dentaire.


 Antisepsie locale.
 Rechercher et éradiquer tout foyer infectieux.
 Un suivi bucco-dentaire est recommandé, avec fréquence de 04 à 06 mois.
 Antibiothérapie prophylactique en cas d’actes invasifs.

Protocole :

-En ambulatoire :

Adulte : 02g d’amoxicilline 01 heure avant l’acte

Enfant : 50mg/kg sans dépasser la dose adulte

En cas d’allergie aux B lactamines :

Adulte : Clindamycine 600mg 01 heure avant l’acte

Enfant : 20mg/kg à partir de 06 ans sans dépasser la dose adulte

-En cas d’anesthésie générale :

Adulte : 02g d’amoxicilline en perfusion IV de 30 min 01 heure avant l’acte et 01g par voie
orale 06 heures après

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Enfant : 50mg/kg en perfusion IV de 30 min 01 heure avant l’acte et 25 mg/kg par voie orale
06 heures après

En cas d’allergie aux B lactamines :

Adulte : 01g de Vancomycine en perfusion IV de 60 min 01 heure avant l’acte

Enfant : 20mg/kg en perfusion IV de 60 min 01 heure avant l’acte sans dépasser 01g

Cas du RAA avec complication cardiaque : Même protocole en utilisant un antibiotique autre
que les B lactamines.

3-2 Le risque hémorragique :

Le risque hémorragique est lié aux traitements antiagrégants plaquettaires, anticoagulants


ou antifibrinolytiques.

3-2-1Les inhibiteurs de l’hémostase :

-Hémostase primaire :

-Aspirine : 75 à 325mg

-Ticlopidine : 250 à 500mg/J

-Coagulation :

- Les anti Vit K : coumariniques : Sintrom, tromexane, coumadine

-L’héparine : Empêche la formation de fibrine

-La fibrinolyse :

-Les fibrinolytiques :

-Inhibiteurs de la fibrinolyse.

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3-2-2 Les cardiopathies à risque hémorragique :

 Les affections thromboemboliques : artérite chronique oblitérante des membres


inférieurs, thromboses veineuses, embolie pulmonaire ;
 Les cardiopathies ischémiques : Infarctus du myocarde et angine de poitrine ;
 Antécédents de chirurgie cardio vasculaire ;
 Les cardiopathies valvulaires : Porteurs de prothèse valvulaire compris ;
 Troubles du rythme.

3-2-3 La prévention du risque hémorragique :

Elle est envisagée à chaque fois qu’un acte bucco-dentaire sanglant est programmé.

Il est à noter que le médecin dentiste n’a aucun droit de demander à son patient d’arrêter ou de
modifier la posologie de son traitement anti coagulant, une étroite collaboration est obligatoire
avec le médecin cardiologue

Le cabinet dentaire doit être équipé de moyens d’hémostase dans le but de juguler une
éventuelle hémorragie

A) Patients sous antiagrégants plaquettaires :

-Demander un TS

-L’arrêt du traitement anti agrégant n’est pas justifié : Recommandations de la SFMBCB 2005

B)Patients sous anti coagulants :

-Demander un TP ou INR (international normalized ratio)

-Selon les recommandations de l’AHA :

 INR< 02 soit un TP> ou égal à 45% : Acte mineur, il n’ya pas lieu de modifier la
posologie du traitement en plus des moyens d’hémostase locale
 INR>02 soit un TP< 45% : S’il n’ya pas urgence, l’acte sera reporté et le patient adressé
au cardiologue pour modifier le traitement anti coagulant.

En cas d’urgence : Travailler en milieu hospitalier et garder le patient en observation

-Selon les recommandations de la SFMBCB 2006 l’INR doit être stable et inférieur à 04

 En pratique de ville : INR< ou égal à 03 pour les actes mineurs et moyens d’hémostase
 Lorsque l’INR> 03 : Travailler en milieu hospitalier

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-Avis des cardiologues :

 Hospitalisation et substitution de l’anti Vit K par l’héparine (HNF, HBPM) :


 Lorsque l’hypocoagulabilité recherchée par le cardiologue est importante : INR> 03
soit TP< 30%
 Lorsqu’il s’agit d’intervention importante
 Lorsque le risque de thrombose en per ou post opératoire est important : INR< 1,5
soit TP> 55%
 La réduction de la posologie d’anti Vit K lorsque l’hypocoagulabilité recherchée est
modérée : INR compris entre 02 et 03 soit un TP de 45% et 30%

En règle générale

 Contact avec le Médecin traitant.


 Bilan biologique(INR) réalisé dans les 24 heures précédant l’acte.
 Valeur de l’INR stable et inf à 4.
 Actes entamés en début de matinée et le début de semaine.
 Arsenal hémostatique local systématique.

3-3 Le risque syncopal :

3-3-1 Cardiopathies à risque syncopal important :

 Troubles du rythme ou de la conduction : Tachycardie paroxystique, bradycardie,


syndrome d’Adams-Stokes ;
 HTA ;
 Rétrécissement aortique serré ;
 Angine de poitrine et infarctus du myocarde.

3-3-2 Autres cardiopathies à risque syncopal :

 Cardiomyopathie obstructive ou hypertrophique ;


 Embolie pulmonaire ;
 Cardiopathie congénitale cyanogène : Tétralogie de Fallot ;
 Insuffisance cardiaque.

3-3-3 Prévention du risque syncopal :

 Assurer une bonne préparation psychologique du patient ;


 Prémédication sédative à base d’anxiolytiques pour certains cas ;

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 Respecter les rendez vous ;
 Prendre en charge le patient en matinée ;
 S’assurer que le patient n’est pas à jeun ;
 L’acte doit être le moins traumatisant que possible.

Du point de vue technique :

 Différer l’acte de 06 mois chez les patients ayant fait un infarctus du myocarde
 S’assurer que le patient est bien préparé
 Lorsqu’il s’agit d’extractions multiples chez un cardiopathe à haut risque infectieux :
regrouper les extractions et faire des sutures hermétiques
 Utiliser les solutions anesthésiques les plus faiblement dosées en vasoconstricteur
(02%)
 Eviter les anesthésies régionales du nerf alvéolaire inferieur au niveau de l’épine de
spix chez les patients ayant un risque hémorragique : Saignement et risque
d’hématome chez les patients arythmiques.

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Références bibliographiques

[1] ACAR J La prophylaxie prévient-elle l'endocardite infectieuse d'origine dentaire ?


Concours Méd 1991 ; 113 : 93-94

[2] BALTCH AL, SCHAFFER C, HAMMER MC , et al. Bacteremia following dental


cleaning in patients with and without penicillin prophylaxis. Am Heart J 1982 ; 104 : 1335-
1339

[3] BENDER IB, NAIDORF IJ, GARVEY GJ Bacterial endocarditis : a consideration for
physician and dentist. J Am Dent Assoc 1984 ; 109 : 415-420

[4] BONHOMME I, BRIANCON S, FAGNANI F. Evaluation économique exploratoire de la

prophylaxie de l'endocardite infectieuse. Rapport d'Experts 5e Conférence de Consensus

SPILF Paris 1992 ; 179-188

[5] BOUVET A Les endocardites lentes (maladie d'Osler). Origine et mécanismes de fixation
sur l'endocarde des germes peu pathogènes. Implications thérapeutiques. Actual

Odontostomatol 1979 ; 33 (127) : 493-502

[6] Circulaire du Ministère de la Santé Publique 2500 (59-24) du 10 juin 1959 relative à la

prévention du rhumatisme articulaire aigu et à la prophylaxie de ses rechutes, pp. 1-10

[7] Cour d'Appel de Colmar 24 juin 1975, note Le Tourneau, recueil Dalloz Sirey 1976 ; 249-
251

[8] DELAHAYE F, GOULET V, LACASSIN F, ECOCHARD R, SELTON-SUTY C, HOEN


B, BRIANCON S, ETIENNE J, LEPORT C. Incidence, caractéristiques démographiques,

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cliniques, microbiologiques et évolutives de l'endocardite infectieuse en France en 1990-1991.
Rapport d'Experts 5e Conférence de Consensus SPILF Paris 1992 ; 21-33

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