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RHUMATOLOGIE

Diagnostic microbiologique
des ­arthrites septiques
Drs STÉPHANIE D’INCAU a et STÉPHANE EMONET a,b

Rev Med Suisse 2018 ; 14 : 509-15

L’arthrite septique est une urgence médicale et souvent chirur­ ARTHRITE AIGUË : SEPTIQUE OU NON SEPTIQUE ?
gicale. Dès lors, il est essentiel de rapidement distinguer une Analyses standards : quelles évidences ?
­arthrite infectieuse d’une arthrite d’autre étiologie afin d’amé­
liorer le pronostic en termes de morbidité et même de mortalité. Lors de l’évaluation d’une arthrite aiguë, il s’agit dans un
Pour ce faire, de nombreux tests biologiques et microbiologiques ­premier temps d’établir la probabilité d’une atteinte d’origine
sont à disposition du clinicien. Encore faut-il choisir le bon et infectieuse. D’une façon générale, le clinicien va construire sa
l’interpréter correctement. Dans cet article, nous passons en suspicion d’AS (probabilité prétest) sur la base d’éléments
­revue les différents examens utiles (et moins utiles) au diagnos­ anamnestiques et cliniques. Les examens complémentaires
tic d’arthrite septique. Nous évoquons également la question de biologiques et synoviaux sont ensuite intégrés pour détermi-
l’utilisation de corticostéroïdes intra-articulaires en cas d’arthrite ner une probabilité post-test, afin de décider si une antibio-
aiguë. thérapie empirique est indiquée ou pas.

Il est donc essentiel de connaître la véritable valeur diagnos-


Septic arthritis diagnosis : the role of microbiology tique et discriminante (AS ou inflammatoire) de ces examens
Septic arthritis is a medical and surgical emergency. It is therefore complémentaires. Cette tâche est rendue difficile par le
essential to promptly differentiate an infectious from a non-infec- manque d’étude randomisée contrôlée sur le sujet. La plupart
tious origin in order to improve the prognostic (mortality and mor- des publications sont rétrospectives ou descriptives, sujettes
bidity). To do so the clinician needs not only to know which tests à de nombreux biais et pour lesquelles le gold standard n’est
are available but also how to adequately use them and interpret pas commun.
their results. In this article, we review the various tests in use for the
evaluation of acute arthritis, highlighting the most useful ones for Nous allons nous appuyer sur une récente revue systématique
the diagnosis of septic arthritis. We will also have a quick look at the prenant en compte 32 études6 et décrivant les caractéristiques
use of intra-articular injection of corticosteroid. anamnestiques, cliniques et biologiques des AS non gonococ-
ciques afin d’en quantifier les limites diagnostiques. Dans
cette revue, la meilleure estimation de la prévalence d’AS était
INTRODUCTION de 27 % de toutes les arthrites aiguës évaluées aux urgences.

L’incidence de l’arthrite septique (AS) d’articulation native A l’exception de la chirurgie articulaire récente (< 3 mois) et
dans la population générale en Europe de l’Ouest et aux Etats- la cellulite en regard d’une articulation prothétique, aucun
Unis est entre 2 et 10 cas/100 000 patients-année.1‑4 Ce chiffre élément anamnestique, clinique ou biologique de routine
est en augmentation en raison d’un plus grand nombre de (état fébrile, protéine C-réactive (CRP) et globules blancs
­patients dits « à risque ». Les patients souffrant de polyarthrite (GB) sanguins) n’augmente (ni diminue) significativement la
rhumatoïde (PR) sont particulièrement vulnérables avec une probabilité post-test d’AS. Les éléments anamnestico-clini­ques
incidence allant de 28 à 70 cas/100 000 patients-année.1‑4 étant si peu aidants, l’arthrocentèse est donc inévitable dans
L’AS bactérienne représente 8 à 48 % des cas de patients se la démarche diagnostique d’une arthrite monoarticulaire
présentant avec une mono ou polyarthrite aiguë selon les ­aiguë.
­critères diagnostiques utilisés et le setting (urgences, médecin
traitant, rhumatologue…).1‑5 Divers paramètres synoviaux étaient étudiés dans cette revue.
Tout d’abord l’inspection visuelle du liquide synovial avait
La mortalité de l’AS varie de 7 à 15 %, mais peut aller jusqu’à 30 une sensibilité de 95 % et une spécificité de 58 % pour dif­
à 50 % chez les patients polymorbides ou lors d’une atteinte férencier AS et arthrite inflammatoire. Concernant les GB
polyarticulaire (contexte d’endocardite). La morbidité est ­synoviaux (GBsyn), 3 fourchettes ont été identifiées :
également considérable puisque jusque 50 % des patients • < 25 × 109/l : diminue significativement la probabilité d’AS ;
­rapportent une diminution de la mobilité articulaire dans les • 25 × 109/l : zone grise ;
suites.1‑4 Un diagnostic fiable et rapide est donc nécessaire. • 50 x 109/l : augmente significativement la probabilité d’AS.

Les GBsyn ne sont pas suffisants à eux seuls pour exclure ou


affirmer une AS. De même, les polymorphonucléaires syno-
a Service des maladies infectieuses, HUG 1211 Genève 14, b Service de médecine viaux (PMNsyn), même > 90 % n’augmentaient pas significa-
de laboratoire, HUG, 1211 Genève 14 tivement la probabilité d’AS sur articulation native. Une colo-
stephanie.dincau@hcuge.ch | stephane.emonet@hcuge.ch ration de Gram sans germe visualisé ne doit donc pas, à elle

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seule, faire renoncer à une antibiothérapie en cas de suspicion l’utilisation d’un seuil > 0,5 ng/ml, à une sensibilité de 54 % et
d’AS. En effet, 7 études mentionnaient la sensibilité du Gram une spécificité de 95 %. Le rapport de vraisemblance positif
du liquide synovial, avec un taux de faux négatifs variant de 45 (RVP) était de 10,97 ; le RV négatif (RVN) de 0,49.
à 71 %. Finalement, la sensibilité des hémocultures dans
quatre études variait de 23 à 36 %. Le tableau 1 synthétise les La PCT pourrait donc se révéler utile dans l’évaluation des
performances des différents tests disponibles. ­arthrites aiguës. Cependant, plusieurs réserves doivent être
émises, en particulier en cas d’insuffisance rénale ou de mala-
Procalcitonine sanguine et synoviale dies auto-immunes qui peuvent augmenter la PCT (vasculites
à ANCA (VAA) et maladie de Still de l’adulte).7,8
La procalcitonine (PCT) est supposée être plus spécifique
d’une atteinte bactérienne. Une méta-analyse,7 publiée en Plusieurs études s’intéressant également à la mesure de la PCT
2017 et regroupant 10 études portant sur un total de 838 synoviale (PCTsyn) ont démontré une sensibilité nettement
­patients investigués pour une arthrite aiguë, a conclu, lors de supérieure à la PCT sanguine avec une excellente VPN permet-

TABLEAU 1 Comparatif des différents tests utiles au diagnostic des arthrites septiques (AS)
Les éléments anamestico-cliniques et les tests biologiques pour lesquels il était conclu que leur résultat ne permettrait pas d’orienter significativement le diagnostic
n’y figurent pas (notamment CRP, GB sanguins, VS, fièvre, PR, diabète ou âge entre autres).
Sen : sensibilité en % ; Spe : spécificité en % ; PPrT : probabilité prétest d’AS; PPT : probabilité post-test d’AS ; VPP : valeur prédictive positive en % ; VPN : valeur prédictive
négative en % ; FP : faux positifs ; FN : faux négatifs ; PJI : prosthetic joint infection ; RVP : rapport de vraisemblance positif ; RVN : rapport de vraisemblance négatif ; OR :
odds ratio ; ID : identification ; AB : antibiotiques ; PCT : procalcitonine ; LDH : lactate déshydrogénase ; GB : globules blancs ; CRP : protéine C-réactive ; VS : vitesse de
sédimentation ; PR : polyarthrite rhumatoïde ; AO : acridine orange ; MALDI-TOF : Matrix-assisted laser desorption/ionization Time of flight (cf texte) ; VAA : vasculites à
ANCA.
Performance Inconvénients Avantages Utilisation
Eléments anamnestico-cliniques7
Chirurgie articulaire Spe 96,5 • Seuls éléments anamnestico-cliniques

< 3 mois Sen 24 modifiant significativement la probabilité


RVP 6,9 post-test
RVN 0,78 • Présence de ces éléments = fort argument

en faveur d’une AS
Cellulite en regard Spe 98,4
d’une prothèse Sen 24,3
RVP 15
RVN 0,76
Tests biologiques,12
PCT > 0,5 ng/ml Spe 95 En cas de VAA ou de maladie de Rapidité PCT positive = fort argument en faveur d’une
Sen 54 Still, le cut-off est augmenté AS
RVP 10,97
RVN 0,49
Tests synoviaux
Lactates > 10 mmol/l7 Spe 98‑100 3 études Permettrait de poser le diagnostic d’AS, mais non standardisé
Sen 55‑100
LDH < 250 U/l7 1 étude Permettrait d’exclure AS, mais non standardisé
GBsyn7 (Gram)
0‑25 x 109/l Pour une PPrT à 27%, Diminue la PPT
la PPT devient 11 %
25‑50 x 109/l Zone grise Pas d’influence sur la PPT
> 50 x 109/l Pour une PPrT à 27 %, Augmente la PPT
la PPT devient 64 % Obtenus quasiment au « lit
RVP 4,7 Non applicable aux PJI
du patient »
RVN 0,52
>100 x 109/l Pour une PPrT à 27 %, Augmente nettement la PPT
la PPT devient 83 %
RVP 13,2
RVN 0,83
PCT syn14
< 0,5 µg/l Spe 57 Pourrait permettre d’exclure une AS
Sen 88
VPN 90
VPP 52
Non standardisé Rapidité
> 4,5 µg/l Spe 94 Pourrait supporter le diagnostic d’AS
Sens 54
VPP 82
VPN 79

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TABLEAU 1 Comparatif des différents tests utiles au diagnostic des arthrites septiques (AS) (suite)
Performance Inconvénients Avantages Utilisation
Tests microbiologies, moléculaires et spectrométrie de masse
Microbiologie standard
Hémocultures6 FN 63‑77 % Délai de culture
Sen 23‑36 Permet d’obtenir l’antibio-
Si stériles, n’excluent pas une AS
Hétérogénéité selon le germe et gramme
l’antibiothérapie antérieure
Germes au Gram Spe 100 Hétérogénéité selon le germe, •Si négatif, n’exclut pas une AS
Obtenus quasiment au « lit
du liquide Sen 30‑75 l’antibiothérapie antérieure et •Si positif, une AS est quasi certaine (CAVE :
du patient »
­synovial6,16,22 l’inoculum ce n’est pas le cas avec AO)
Culture liquide Spe 75‑100 Délai de culture • Si négatif, n’exclut pas AS en cas de forte

synovial6,16,22 Sen 50‑95 Hétérogénéité : selon germe, Permet d’obtenir l’antibio- suspicion ou AB préalables
(50 pour N. gonor- antibiothérapie antérieure, gramme • Si positif avec germe compatible => AS

rhoeae) inoculum, milieu de culture quasi certaine


Nouvelles méthodes : spectrométrie de masse et méthodes moléculaires
MALDI-TOF sur Spe 100 Pas d’antibiogramme
liquide synovial16 Sen 6,3
Rapidité du résultat Inutile
VPP 100 Inoculum trop faible à Sen basse
VPN 55,9
PCR et PCR multiplex Pas standardisé, au cas Cross-amplification, contaminants Rapidité
par cas à FP ID des germes fastidieux
Sensitivité diminuée dans les ou décapités par les AB A utiliser au cas par cas
multiplex à FN
Coût et pas d’antibiogramme
16S rDNA PCR sur Spe 10016 Hétérogénéité des performances en ID germes fastidieux ou
liquide synovial 16,22 Sen 28,6 fonction des méthodes et du gold décapités par AB
VPP 100 standard
VPN 65,5
Uniquement chez un patient avec forte
probabilité prétest et culture négative
Spe 95,722
Sen 92,5
VPP 95,7
VPN 97,7
Métagénomique (cf. texte) : réservé aux activités de recherche

tant d’exclure l’AS.8,9 Cependant, ceci doit encore être confirmé timicrobien. Le tableau 2 montre les germes rencontrés dans
par d’autres études montrant des résultats similaires. l’AS, avec en gras les plus fréquents.

Le passé (toujours présent) : examen direct


INFECTIONS DE PROTHÈSES ARTICULAIRES (coloration de Gram) et culture
L’inflammation d’une articulation prothétique n’ouvrira pas La coloration de Gram reste d’actualité, utile lorsqu’elle est
le même diagnostic différentiel, ne présentera pas la même positive, mais avec une sensibilité limitée. La mise en culture
microbiologie (plus de S. epidermidis, Streptococcus spp.,
­Enterococcus spp. et problématique du biofilm). C’est pour-
Principaux germes
quoi, une littérature spécifique y est dédiée et les précé- TABLEAU 2 des arthrites septiques
dentes observations ne sont pas applicables. Typiquement,
le nombre de GBsyn en cas d’infection est généralement En gras les germes les plus fréquents.
moindre et certains biomarqueurs synoviaux ont été spéci­ Cocci Gram Cocci Gram Bâtonnets Gram Autres
fiquement étudiés pour les infections de prothèses (alpha- positif négatif négatif
défensine ou leucocyte estérase par exemple).10 Pour les • Staphylococcus • Neisseria • Haemophilus • Mycobacterium
­détails, les guidelines de l’IDSA (Infectious Diseases Society aureus gonorrhoeae influenzae tuberculosis
• Streptococcus • Neisseria • Kingella kingae • Champignons
of America),11 la Musculoskeletal Infection Society12 ou la
pyogenes meningitidis (enfants) • Infections poly-
­récente revue sur le sujet dans The Lancet13 figurent dans la • Streptococccus • Escherichia microbiennes
liste des références. pneumoniae coli
• Proteus

mirabilis
• Pseudomonas

IDENTIFICATION DU GERME LORS D’UNE ARTHRITE aeruginosa


• Klebsiella
SEPTIQUE : PASSÉ, PRÉSENT, FUTUR pneumoniae
• Salmonella spp.
L’identification du (des) pathogène(s) est essentielle pour le
diagnostic d’arthrite septique et pour guider le traitement an- (Adapté de réf.14)

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du liquide synovial reste la base pour l’identification du pa- plus la sensibilité et la spécificité baissent et 3) on risque de
thogène et son profil de résistance. Cependant, de nombreux détecter de l’ADN contaminant cutané (surtout Staphylococ-
facteurs rendent les performances de la culture très variables cus spp.).19‑21
dans les différentes publications l’évaluant : germes en présence
(germes à croissance fastidieuse tels que N. gonorrhoeae ou K. En l’absence de suspicion d’un pathogène précis, des PCR à
kingae par exemple), volume de l’inoculum, milieu de croissance large spectre (ou PCR eubactérienne ou broad range (Br)
utilisé, prise en compte de pathogènes considérés comme PCR) avec une (ou plusieurs) amorce(s) générique(s), ciblant
contaminants, gold standard utilisé comme comparatif. un gène conservé chez quasiment toutes les bactéries (16S
rDNA) sont utilisées.19 Le produit d’amplification est séquen-
Historiquement, après mise en culture du liquide synovial, il cé puis comparé aux millions de séquences contenues dans
fallait attendre une croissance (24‑48 heures), puis effectuer une base de données online afin d’identifier le pathogène
une batterie de tests biochimiques supplémentaires (24‑48 ­détecté. Le séquençage nécessaire ici prolonge le délai de
heures) pour aboutir à l’identification du germe. L’inconvé- ­rendu des résultats de 24‑48 heures et on perd donc l’avan-
nient principal était le délai de rendu des résultats, qui deve- tage de temps de la PCR envers la culture. Une étude22 de 525
naient disponibles lorsque le traitement était déjà en cours prélèvements ostéoarticulaires analysés prospectivement à la
depuis 4‑5 jours. demande du clinicien en charge (PCR et cultures) a comparé
la 16S rDNA PCR suivie de séquençage à la culture standard.
La spécificité de la culture était de 89 % pour une sensibilité
ENTRE PRÉSENT ET FUTUR : SPECTROMÉTRIE de 86,7 % (VPP 89 % ; VPN 96 %). En comparaison, la 16S
rDNA PCR couplée au séquençage de tout l’ADN amplifié
DE MASSE ET MÉTHODES MOLÉCULAIRES avait une spécificité de 95,7 % et une sensibilité de 92,5 %
Spectrométrie de masse (VPP 95,7 % ; VPN 97,7 %), Ces différences n’étaient pas statis-
La spectrométrie de masse consiste à séparer et identifier les tiquement significatives.
peptides bactériens selon leur masse et leur charge, puis à
comparer ce spectre à une base de données pour obtenir le Cependant, dans d’autres études, la PCR de large spectre se
nom du germe.14,15 Cet examen remplace donc les tests biochi- révèle peu sensible (30 % dans l’étude de Lallemand et coll.)16
miques historiques et permet une identification plus rapide et sujette aux contaminations lors des différentes étapes de
(1‑2 minutes) des colonies formées sur les plaques inoculées traitement de l’échantillon jusqu’au séquençage.
par le liquide synovial. On gagne déjà 24‑48 heures !
En conclusion, l’utilisation de Br-PCR devrait être réservée
L’analyse directe du liquide synovial (sans culture) par spec- aux situations dans lesquelles les cultures sont négatives mais
trométrie de masse permettrait de gagner encore 24‑48 heures qu’il existe une forte suspicion d’AS, surtout en cas d’antibio-
de plus et d’influencer la décision de traitement en temps thérapie antérieure. De façon générale, l’utilisation de tests
réel. Malheureusement, probablement en raison d’une charge moléculaires ne devrait se faire qu’en complément à la culture
bactérienne trop faible, ceci n’est pas faisable. Une récente pour obtenir un résultat plus rapide ou plus sensible (antibio-
étude prospective16 a étudié le MALDI-TOF (Matrix Assisted thérapie en cours lors du prélèvement, germe fastidieux
Laser Desorption Ionisation – Time of Flight) appliqué à des comme K. kingae). Afin de permettre une utilisation judicieuse
prélèvements synoviaux et osseux de patients avec suspicion de ces outils moléculaires et une interprétation correcte des
d’infection, en comparaison du Gram, de la culture et de la résultats, une consultation par le spécialiste en maladies in-
PCR à large spectre, et révélé une très faible sensibilité du fectieuses est souhaitable.
MALDI-TOF directement sur le liquide synovial (7,4 %),
­malgré des cultures positives dans plus de 80 % des cas. Une
étape de culture reste donc nécessaire et pourrait être accé­ QUEL FUTUR ?
lérée en combinant culture en milieu liquide avec détection
Metagenomic shotgun analysis
automatique de la positivité (inoculation de flacons d’hémo-
cultures), suivi immédiatement de MALDI-TOF sur les bou- La métagénomique clinique fait référence au concept de sé-
teilles positives.17 quençage de tout l’ADN présent dans un échantillon clinique
dans le but d’identifier les germes en présence et leur suscep-
Méthodes moléculaires : PCR spécifique, multiplex tibilité aux antibiotiques.
et à large spectre
Une étude récente23 s’est intéressée à évaluer les performances
La PCR est une technique d’amplification d’ADN à partir de de métagénomique clinique dans les infections ostéoarticu-
quelques copies. L’utilisation de primers (amorces) spécifiques laires comparativement à la microbiologie conventionnelle.
permet de cibler un ou plusieurs pathogènes (multiplex).18 La Sur 179 prélèvements opératoires (pour 47 patients), seuls
PCR « en temps réel » est la plus couramment utilisée et permet 13 % (24/179) ont pu être séquencés en raison du manque
la détection spécifique simultanée (sonde fluorescente) de d’ADN bactérien dans les autres échantillons. Parmi ces 24
l’amplification de l’ADN. Cette technique donne un résultat échantillons, 8 représentaient une infection monobactérienne
en 1‑2 heures, ce qui permet d’influencer l’initiation ou pas en culture et le germe était systématiquement retrouvé lors
d’un traitement. Cependant, elle comporte trois grandes fai- du séquençage. La prédiction « génétique » de l’antibiogramme
blesses : 1) on doit savoir ce que l’on cherche comme germe était par ailleurs adéquate dans 94 % des cas (111/128). 273 bac-
(par exemple K. kingae chez les enfants < 5 ans) ; 2) plus on téries ont été identifiées par séquençage sans être retrouvées
augmente le nombre de germes recherchés simultanément, par la culture : un tiers considéré comme des contaminants et

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deux tiers comme de possibles pathogènes. La métagéno- CONCLUSION


mique est clairement révolutionnaire, puisqu’elle permet, en
plus de l’identification du germe, de prédire génétiquement Le diagnostic d’AS repose sur une combinaison d’éléments
son antibiogramme ! Cependant, elle reste pour l’instant limitée anamnestiques, cliniques et microbiologiques. Le manque
aux activités de recherche en raison de ses trop nombreuses d’études randomisées contrôlées sur le sujet rend difficile
limitations (quantité d’ADN bactérien nécessaire, interpréta- une vision claire des performances des différents tests et le
tion des échantillons polymicrobiens : contaminant ou patho- clinicien devra toujours intégrer les résultats à la probabilité
gène, temps nécessaire aux résultats et rapport coût/bénéfice prétest d’AS, qui reste un jugement clinique. Cependant, le
encore défavorable). développement rapide des outils moléculaires permettra d’ici
peu un diagnostic microbiologique de l’AS, dans les heures
suivant la ponction articulaire.
STÉROÏDES ET ARTHRITE SEPTIQUE : INDIQUÉS,
RISQUÉS OU CONTRE-INDIQUÉS ? Conflit d’intérêts : Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation
avec cet article.
Nombre d’arthrites inflammatoires aiguës se présentent de la
même façon que l’AS. La ponction articulaire nécessaire au
diagnostic peut également être utilisée à visée thérapeutique
(injection de stéroïdes intra-articulaire). Le risque de déve- IMPLICATIONS PRATIQUES
lopper une AS iatrogène secondaire à l’injection est faible et
varie selon les études de 1/3000 à 1/100 000.2,24‑28 Ces quelques Hormis la procalcitonine avec ses propres limitations, les
autres valeurs sanguines de laboratoire ne sont pas utiles pour
cas pourraient être dus à des pathogènes présents initiale-
discriminer une arthrite septique (AS) d’une autre arthrite aiguë
ment dans les parties profondes de la peau et non accessibles
à la désinfection.24‑28 Les globules blancs synoviaux (GBsyn) permettent d’augmen-
ter (> 50 x 109/l) ou diminuer (< 25 x 109/l) la probabilité d’AS,
La plupart des sociétés savantes recommandent d’éviter mais ils n’ont pas de valeur diagnostique indépendante
­l’injection intra-articulaire de stéroïdes tant qu’une infection La procalcitonine synoviale et les lactates synoviaux sont des
n’a pas été exclue, mais ceci avec un degré d’évidence C.29 Des tests prometteurs qui nécessitent encore d’être standardisés
études randomisées contrôlées dans ce domaine sont néces-
saires. Ceci d’autant plus qu’une étude a montré plutôt un La coloration de Gram est peu sensible et les méthodes de
­effet bénéfique de la bithérapie stéroïdes intra-articulaires + culture habituelles, bien qu’elles restent le « gold-standard », sont
antibiotiques dans le traitement de l’AS chez le lapin30 et que trop lentes pour influencer le choix d’antibiothérapie au moment
des rapports de cas vont dans le même sens chez l’homme.31 du diagnostic clinique
Concernant l’utilisation de stéroïdes systémiques en associa- L’utilisation et l’interprétation adéquates des PCR sont capi-
tion à une antibiothérapie, il semblerait également qu’il n’y tales, raison pour laquelle ces tests devraient être accompagnés
ait pas de contre-indication majeure, voire même que ce soit de l’avis d’un infectiologue
bénéfique dans l’AS, par exemple chez l’enfant.32

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RHUMATOLOGIE

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