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INTRODUCTION

Dans la cadre de la rédaction du présent travail qui, porte sur l’arbitrage et la promotion des
investissements dans l’espace Ohada, nous avons collectés les documents ci-dessous :

I. Revue de la littérature

1. Jean Sossou BIADJA CASSIUS, (Le droit de l’arbitrage dans l’espace OHADA :
Rapport aux règles et principes de l’arbitrage d’investissement édition. Universitaires
européennes, France, 2020) affirme que l’arbitrage d’investissement répond à un
certain nombre de spécificité et d’exigences. Les lois et règlement d’arbitrage
modernes les intègrent de façon à permettre aux arbitrages entre Etat et investisseur.
Sur le fondement d’un accord d’investissement ou d’une législation proposant une
telle procédure, à pouvoir s’appliquer.

2. Revue Juridique de l’océan Indien 2007, pp 109-208, (Le règlement par voie
d’arbitrage des litiges relatifs aux investissements dans l’espace OHADA) affirme que
les textes Ohada relatifs à l’arbitrage sont à priori consacrés à l’arbitrage commercial
d’où on s’interroge sur l’aptitude des desdits textes à servir de fondement pour le
règlement des litiges relatifs aux investissements. L’on précise ensuite que les
arbitrages localisés régis par les textes Ohada relatif à l’arbitrage.

3. United Nations Commission on International Trad Law, (Le règlement des


différends relatifs aux investissements par l’arbitrage et la médiation dans l’espace
OHADA) Explique les liens étroits entre le développement économique et les
investissements étrangers directs. Ils affirment que les investissements étrangers
directs dépendent, dans une large mesure, des conditions économiques, politiques et
juridiques qui existent dans l’Etat hôte. L’accès à une méthode impartiale et efficace
de règlement des différends est un élément important des conditions juridiques.

4. Olivier CUPERLIER, (La protection des investissements dans les pays de l’espace
OHADA : un modèle transposable pour un lex mediterranea édition. OHADATA D-
20-08) affirment que la question de l’investissement et de sa protection sont
primordiale en Afrique compte tenu à la fois des importants besoins en capitaux
extérieurs mais également des risques particulières liés au climat des affaires et une
certaine instabilité géopolitique sur le continent car les investisseurs ont besoin de
garanties pour limiter leur risque faute de quoi, ils ne viennent pas ou ne restent pas.

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5. Ali BOUGRINE, Rim TAZI et Omnia BENKIRANE, (L’arbitrage dans l’espace
OHADA : principaux apports de la réforme de l’AUDA édition UGGC Africa Paw
firm, Maroc, 2021) affirment que l’AUDA a significativement modernisé le droit de
l’arbitrage au sein des Etats membres de l’Ohada, en introduisant des mesures visant,
d’une part à renforcer la célérité et l’efficacité des procédures d’arbitrage et d’autre
part, à encourager les investisseurs à avoir recours à ces procédures. L’AUDA vise
notamment à rendre l’espace Ohada plus efficace en termes de résolution amiable des
conflits.

6. Moktar AMADOU, (Droit et investissement en Afrique , colloque scientifique en


prélude des mélanges à l’honneur du professeur C. Dorothé SOSSA, CREDIJ,
Novembre 2021) Soutient que l’offre d’arbitrage Ohada des investissements ainsi
portée par l’Acte uniforme sur l’Acte uniforme sur l’arbitrage propose un gros
avantage comparatif en ce qu’il est proche des Etats hôtes des investissements autant
du point de vue géographique que du point de vue système juridique Ohada auquel ils
sont familiers mais aussi parce qu’il a mis fin à l’insécurité judiciaire, à la lenteur de la
justice et aux difficultés d’exécution des décisions de justice.

7. Jean MOMNOUGUI, (Arbitrage des investissements OHADA : évolution ou


révolution ? Actualité du Droit, wolkers kluger, 2018) Certifie que les dispositions
traditionnelles sont maintenues et tout porte à croire que ce sont ces dispositions qui
vont régir les arbitrages d’investissements qui seront porté devant la CCJA. Ce qui
peut être vu comme une faiblesse du dispositif, car l’arbitrage d’investissement à des
contraintes de fond qui ne sont pas prise en compte dans le droit Ohada actuel de
l’arbitrage.

8. Walid Ben HAMIDA, (La participation des personnes publiques subsahariennes à


l’arbitrage relatif aux investissements, Les cahiers de l’Arbitrage, 2012) Certifie que
ces pays ont compris que pour attirer les investissements étrangers, le recours à
l’arbitrage est primordial.

9. Hélène SABALBAL, (Le droit applicable dans l’arbitrage d’investissement,


Expérience euro-arabe, Edition l’harmattan, Paris 2022 ) Révèle que la détermination
du droit applicable au fond dans le litige d’un arbitrage est une question juridique
complexe qui peut être déterminante pour l’issue d’un litige, mais souvent oubliée ou
évitée par les parties.

2|Page
De ce qui précède, la présente étude diffère des études précédentes du fait que la nôtre
aborde la question de savoir si le droit de l’arbitrage Ohada est de nature, non
seulement à faciliter la promotion de l’arbitrage mais aussi à rassurer les investisseurs
étrangers et nationaux. En d’autres termes, le droit de l’arbitrage Ohada dans son
ensemble, répond-il aux attentes des opérateurs économiques en termes de sécurité
juridique et de garantie des investissements.

II. Etat de la question

Il y’a six ans, L’OHADA a procédé à la révision de l’acte uniforme relatif au droit de
l’arbitrage. Cette réforme s’inscrit dans une perspective de promotion et de consolidation des
modes alternatifs de règlements de différends illustrée par ailleurs d’une révision du
règlement d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’arbitrage (CCJA).

Cette réforme du droit de l’arbitrage a pour objectif de rendre d’avantage attractif la « Place
OHADA » en tant que mode de règlement de différends. Elle est donc une présentation qui
met en relief le droit Ohada de l’arbitrage consolidé, tel qu’il résulte de la réforme, complété
le cas échéant par le nouveau règlement de la CCJA.

Outre l’ouverture classique du droit Ohada à tout arbitrage ayant son siège dans l’un de ses
Etats parties et aux personnes morales de droit public, l’offre d’arbitrage étend son champ
d’application matériel à l’arbitrage d’investissement. Celui –ci est généralement défini comme
le forum arbitral qui accueille des différends opposant un Etat ou une de ses entités, et une
entité privée étrangère réalisant une opération d’investissement dans cet Etat.

Eu égard à cette évolution dans son volet normatif, tout porte à croire que l’idéal de la
promotion des investissements a pris son envol car la CCJA a accueilli plusieurs contentieux
Etats-investisseurs sur la base d’une convention d’arbitrage et ce, notamment, en l’absence de
dispositions communautaires spécifiques y relatives. L’offre d’arbitrage Ohada des
investissements ainsi portée par l’Acte uniforme sur l’Acte uniforme sur l’arbitrage propose
un gros avantage comparatif en ce qu’il est proche des Etats hôtes des investissements autant
du point de vue géographique que du point de vue système juridique Ohada auquel ils sont
familiers mais aussi parce qu’il a mis fin à l’insécurité judiciaire, à la lenteur de la justice et
aux difficultés d’exécution des décisions de justice.1

1
Moktar AMADOU, Droit et investissement en Afrique, colloque scientifique en prélude des mélanges en
l’honneur du professeur C. Dorothée SOSSA, CREDIJ, 2021 p.3

3|Page
Néanmoins, il importe de consolider cette tendance autant par des arguments substantiels
(définitions des notions d’investissement, d’investisseurs, etc.) que procéduraux (transparence
de la procédure, etc.).

III. Problématique

La question des investissements, l’une des sources incontournable du développement


économique par ses acteurs (investisseurs) n’a pas été occultée par le législateur de
l’OHADA.

A l’issue de sa révision du 23 novembre 2017, l’Acte uniforme sur l’arbitrage nous dévoile la
grande innovation assurément constituée par l’arbitrage des investissements visant à
impliquer les Etats dans les procédures arbitrales issues des contrats d’investissements tels les
contrats de partenariats publics – privé. Un succès sans précédent dans l’espace OHADA qui
à vue d’œil, favorise la promotion des investissements car ces pays ont compris que pour
attirer les investissements étrangers, le recours à l’arbitrage est primordial.2

Les garanties formelles tant recherchées par les investisseurs ont été rencontrées dans cet
instrument juridique notamment dans la pratique des arbitres dans l’intégration de principes
directeur du procès à l’occurrence : l’égalité de traitement (AUA, article 9), la célérité de la
procédure (AUA, articles 11, 12, 13), la standardisation du délai ( RACCJ, article 3), une
séparation claire entre la CCJA et le tribunal arbitral qu’il appartiendra désormais aux arbitres
de surveiller afin de préserver le tribunal arbitral des soupçons de dépendance à l’égard du
centre. L’objectif étant de développer d’avantage les modes alternatifs de règlement des
conflits mais aussi et surtout d’accompagner le développement économique et les
investissements dans la zone couverte par l’OHADA.

Mais hélas, il y’a lieu de relever que l’arbitrage des investissements a en outre subit une
révolution manquée au plan conceptuel et processuel. Handicapes qui peuvent soit ralentir ou
freiner le processus de la promotion de l’investissement dans l’espace Ohada.

Sur le plan conceptuel, l’AUA a institué que « L’arbitrage peut être fondé sur une convention
d’arbitrage ou sur un instrument concernant un investissement, en particulier un code
d’investissement ou d’un traité d’investissement bilatéral ou multilatéral. »3

2
Walid Ben HAMIDA, La participation des personnes publiques subsahariennes à l’arbitrage relatif aux
investissements, les cahiers de l’arbitrage, 2012 p. 643
3
Article 3 de l’Acte uniforme Ohada sur l’arbitrage

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Cependant, l’AUA ne pose aucune définition des notions clés. Il y’a donc l’imprécision du
champ d’application matériel de l’arbitrage des investissements qui laisse libre cours à la
variété et la variabilité des notions d’investisseur et d’investissement dans les pays de l’espace
Ohada.

Nous savons que l’arbitrage des investissement confère au tribunal arbitral le pouvoir de juger
le comportement de l’Etat d’accueil envers un investisseur étranger dans l’exercice de ses
droits souverains prévus par la loi, un traité au contrat, à la lumière de la coutume et des
usages du droit commercial international or, en l’absence de définition claire des notions
« d’investisseur » et « d’investissement » par l’Ohada, il convient de se reporter aux
définitions hétérogènes données par les Etats. Par exemple contrairement au Sénégal, à la
Cote d’ivoire et au Niger qui ont opté pour une définition global de l’investisseur sans
discrimination à l’égard de l’étranger, la RDC a par contre opté pour une distinction nette
entre l’étranger (investisseur ou investissement) et le national en mettant l’accent sur le
caractère « direct » de l’investissement.

Sur le plan processuel, il se trouve qu’en dehors de ces dispositions énonçant le principe de la
connaissance de ce type d’arbitrage aucunes autres dispositions aussi bien dans l’AUA que
dans le RA ne prévoient de procédures particulières s’agissant de ce type d’arbitrage. Les
dispositions traditionnelles sont maintenues et tout porte à croire que ce sont ces dispositions
qui vont régir les arbitrages d’investissements qui seront porté devant la CCJA. Ce qui peut
être vu comme une faiblesse du dispositif, car l’arbitrage d’investissement a des contraintes
de fond qui ne sont pas prise en compte dans le droit Ohada actuel de l’arbitrage.4

On peut légitimement se poser la question de savoir :

En quoi cette référence expresse à l’arbitrage impacte la promotion des investissements dans
l’espace Ohada ? Est-ce une réelle opportunité ou non ? Quels sont les défis à relever sur le
plan théorique et dans la pratique de cet arbitrage ?

IV. Hypothèses

L’occasion faisant le larron, nous saisissons l’opportunité pour mettre à la disposition du


monde scientifique certain remèdes qui s’avère idoines bien que provisoires dans le but de
palier aux différents problèmes attachés à ce sujet tel que renchérit ci-haut dans notre
problématique.

4
Jean MOMNOUGUI, Arbitrage des investissements Ohada : évolution ou révolution ? actualité du droit,
wolters, kluwer, 2018 p, 25

5|Page
D’abord l’intérêt oublié de la définition d’une compétence matérielle exclusive de la CCJA
sur les codes des investissements aux termes de l’article 3 de l’AUA devra être prise en
considération car qui trop embrasse mal étreint.

En effet, face à la variété des traités bilatéraux et multilatéraux ainsi que la multiplicité des
parties et des intérêts en présence, le règlement d’arbitrage de la CCJA aurait été plus efficace
en circonscrivant sa compétence exclusive aux seuls codes des investissements conclus dans
l’espace Ohada. Et ceci pour un intérêt à deux points de vue :

Du point de vue pratique. La plupart des pays membres de l’Ohada ont déjà adopté des codes
des investissements qui accordent des allègements et garanties financières pendant de
nombreuses années aux investisseurs étrangers. Par exemple, le code des investissements aux
Comores offre à l’investisseur étranger la garantie de transfère des capitaux et la garantie de
transfère des rémunérations. Dans le même temps, les Comores sont parties à d’autres traités
bilatéraux ou multinationaux prévoyant d’autres garanties substantielles et devant être soumis
en cas de litige à d’autres centres d’arbitrage tels que le CIRDI.

D’où le droit substantiel quant à lui apparait comme un véritable vecteur de la promotion de
l’investissement. A cet titre, l’élimination des obstacles juridiques est nécessaire pour la
neutralisation des législations permettant aux investisseurs de se sentir en paix tant sur leurs
personnes que sur leurs biens.5

Du point de vue stratégique. Cela aurait circonscrit la saisine de la CCJA permettant le


développement d’un contentieux spécialisé tout en évitant une concurrence peu opportune
avec le CIRDI qui a développé en la matière une compétence reconnue et une jurisprudence
foisonnante et source de droit international.

V. Intérêt de l’étude

L’intérêt étant la mesure de l’action, notre adhésion à la problématique de l’arbitrage et la


promotion des investissements dans l’espace Ohada a été jugé préoccupante pour un intérêt à
double facettes.

Sur le plan pratique

Notre appel à l’ajustement du droit positif qui régit l’arbitrage des investissements dans
l’espace Ohada, servira non seulement d’attrait aux investisseurs venant de tout bord

5
Moktar AMADOU, op cit, p.2

6|Page
puisqu’étant réellement sécurisés juridiquement et judiciairement, mais aussi il représentera
pour eux une opportunité de palper un nouveau système d’arbitrage lié aux investissements.

Sur le plan théorique

L’évidence de cet intérêt sur le plan théorique se justifie dans la mesure où l’équilibrage par
des solutions idoines aux différents problèmes lié à ce sujet, tel que présenté dans la
problématique délivrera le monde scientifique et praticiens du droit de leur questionnement
jusque-là non satisfait. En outre pour ce qui nous concerne, ce travail constitue notre pierre
d’édifice que nous apportons dans le domaine de recherche scientifique.

VI. Méthodes

Pour mieux cerner notre travail, un duo méthodologique a été adopté, à savoir la méthode
exégétique et la méthode comparative.

La méthode exégétique

Elle nous a permis d’analyser les différents textes inhérents à notre sujet tout en donnant leur
sens à travers l’étude grammatical. En réalité il s’agit de l’approche juridique qui est
essentiellement exégétique et contentieuse6.

La méthode comparative

La plus usitée par les juristes, cette méthode nous a donné la faculté de comparer les
dispositions de l’AUA principalement entre celles qui concernent notre problématique et
celles qui ne les concernent pas directement mais aussi avec celles d’autres systèmes
juridiques parallèle avec le nôtre. Il est en effet, essentiellement question d’un comparatisme
d’évaluation qui consiste à apprécier et, le cas échéant, à améliorer son propre système
normatif à l’une de repères tirés d’une analyse d’un ou de plusieurs autres systèmes normatifs
jugés comparables7.

VII. Délimitation du sujet

Dans l’intérêt majeur de ne pas être vacillant sur le plan chronique et géographique, il est
impérieux de pouvoir délimiter notre travail dans le temps et dans l’espace.

6
Jean-Marie MBOKO DJ’ANDIMA, Droit congolais des services publics, éd. l’harmattan, Académie,
Bruxelles, 2015 p.21
7
Idem p, 23

7|Page
Délimitation dans le temps

Dans le temps, nous partons de la période du 23 novembre 2017 date déterminant la réforme
de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage qui institua l’arbitrage des investissements.

Délimitation dans l’espace

Dans l’espace, le champ de notre travail couvre toute l’étendue de l’espace Ohada. En
d’autres termes les territoires de tous les pays signateurs du traité de Port-Louis de 1993 sur
l’Ohada.

VIII. Annonce du Plan

Excepté la partie introductive et la conclusion, l’ossature de notre travail se présente en deux


grands chapitres. Le premier s’occupe de l’Analyse conceptuelle et Institutionnalisation de
l’arbitrage des investissements dans l’espace OHADA (Chap. I), et le second s’appesantira
sur la pratique de l’arbitrage à l’épreuve de la promotion des investissements (Chap. II).

8|Page
CHAPITRE 1 : ANALYSE CONCEPTUELLE ET
INSTITUTIONNALISATION DE L’ARBITRAGE
D’INVESTISSEMENT DANS L’ESPACE OHADA

SECTION 1 : ANALYSE CONCEPTUELLE

Paragraphe1 : L’arbitrage

1.1 Notion de l’arbitrage

Polysémique, la notion de l’arbitrage mérite une confrontation doctrinale pour en dégager


l’essence.
Il est entendu comme une convention par laquelle deux ou plusieurs personnes décident de
confier à un arbitre le soin de régler leurs différends présents ou futurs. Cette convention peut
intervenir à deux moments distincts.8
L’organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) renchérit que l’arbitrage est une
procédure dans le cadre de laquelle le litige est soumis, par convention entre les parties, à un
ou plusieurs arbitres qui rendent une décision contraignante. 9
Enfin un auteur se risque même à affirmer que l’arbitrage est de tout temps pour le commun
de mortels le mode de règlement des conflits par le recours à un tiers qui n’est pas un juge
étatique.10
L’on déduit de toutes ces définitions que lorsque les juristes utilisent l’expression
« arbitrage », ils lui confèrent généralement une signification juridictionnelle. Plus
précisément contractuel par l’origine des pouvoirs de l’arbitre. La doctrine juridique en arrive
à une qualification mixte à la fois contractuelle et juridictionnelle. 11

1.2 Nature de l’arbitrage


1.2.1 Nature contractuelle de l’arbitrage
La nature contractuelle de l’arbitrage est soutenue par trois arguments solides

Premièrement, il signifie que la justice des arbitres repose sur la volonté des parties. Le
fondement conventionnel du pouvoir de juger des arbitres est affirmé principalement par les

8
El hadji MAME GNING, L’arbitrage commercial dans l’espace Ohada, éd, Lefebvre dalloz, Paris 2009 p.1
9
https//www.wipo.int/amc/fr/arbitration/what-is-arb.html. Page consultée le 21 mai 2023
10
Antoine Kassis, Problème de base de l’arbitrage en droit comparé et en droit international, t. I Arbitrage
juridictionnel et arbitrage contractuel, Paris, LGDJ, 1987 cité par Pierre Meyer « Ohada, Droit de l’arbitrage.
Collection Droit uniforme africain, Bruylant, Bruxelles, juriscope p.26
11
Matthieu DE BOISSESON, Le droit français de l’arbitrage interne et international, Paris, G.LN Joly 1990,
cité par Pierre Meyer op cit p. 26

9|Page
dispositions relatives à la convention d’arbitrage bien que l’acte uniforme ne le mentionne pas
expressément, l’arbitrage suppose au départ une convention qui exprime la volonté des
parties de recourir à cette forme de justice privée. Et la sentence arbitrale n’oblige que ceux
qui ont été partie à la convention arbitrale. Il est inopposable aux tiers qui ne peuvent pas être
contraint de renoncer à la compétence des tribunaux des Etats. 12
Le traité et le règlement d’arbitrage de la CCJA, sont, eux, tout à fait explicites sur le
fondement conventionnel de la justice arbitral, puisqu’ « en application d’une clause
compromissoires ou d’un compromis d’arbitrage, toute partie à un contrat … peut soumettre
un différend d’ordre contractuel à la procédure d’arbitrage prévue par le présent titre.

Deuxièmement, Le caractère contractuel de l’arbitrage est également affirmé à travers


certaines dispositions relatives à la procédure arbitrale. Sur ce point, l’article 14 de l’AUA
confère aux parties une très grande liberté puisqu’ « elles peuvent, directement ou par
référence à un règlement d’arbitrage, régler la procédure arbitrale. Elles peuvent aussi
soumette celle-ci à la loi de procédure de leur choix on retrouve ici l’autonomie des volontés
qui caractérise la matière des contrats. Elles peuvent aussi soumettre celle –ci à la loi de
procédure de leur choix. On retrouve ici l’autonomie des volontés qui caractérise la matière
des contrats. Dans l’acte uniforme, l’institutionnalisation de l’arbitrage au sein de centres
permanents d’arbitrages, qui disposent d’un règlement d’arbitrage, n’altère faiblement cette
liberté des parties dans la mesure où celles-ci peuvent écarter expressément certaines
dispositions dudit règlement. L’article 10 de l’acte uniforme ne prévoit en effet que « le fait
pour les parties à en écarter expressément certaines dispositions.13

Troisièmement, Le caractère contractualiste de l’arbitrage est peut être également attesté par
les dispositions relatives au droit applicable au fond du litige. En effet, aussi bien l’acte
uniforme que le RA de la CCJA font des règles de droit choisies par les parties le principe de
solution à appliquer par les arbitres lorsqu’il s’agit de déterminer le droit applicable au fond
du litige.
Il ne pas cependant pas sûr que l’autonomie de la volonté, ainsi affirmée, traduise
fondamentalement sur une conception conventionnelle de l’arbitrage. Elle n’est peut-être que
l’expression d’une règle de droit international privé particulièrement bien adaptée à la matière
des contrats.

12
Yassine ASSILA, Le caractère contractuel et juridictionnel de l’arbitrage commercial, Casablanca, Avril
2016, p1
13
Pierre Meyer « Ohada, op cit p,23

10 | P a g e
1.2.2 La Nature Juridictionnelle de l’arbitrage

La nature juridictionnelle de l’arbitrage est logiquement liée aux critères de l’acte


juridictionnel. Or, ceux-ci sont divers, s’attachant tantôt aux effets de l’acte, tantôt à son objet,
tantôt à son processus particulier d’élaboration.
L’acte juridictionnel peut être défini par rapport à la qualité qui s’y attache. En ce sens, est
juridictionnel un acte revêtu de l’autorité de chose jugée. C’est la volonté du législateur qui en
accordant l’autorité de la chose jugée. Si l’on retient ce critère, l’arbitrage de l’Ohada a
effectivement une nature juridictionnelle puis que « la sentence a, dès qu’elle est rendue,
l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’elle tranche (Art 23 AUA).
Le règlement d’arbitrage de la CCJA est tout aussi explicite puisque les sentences, rendues
dans le cadre de l’arbitrage institutionnel mise en place par l’Ohada, « ont l’autorité définitive
de la chose jugée … au même titre que les décisions rendues par les juridictions de l’Etat »
(art 27). Le critère de l’autorité de la chose jugée, c.-à-d. de l’effet qui s’attache à l’acte, n’est
pas intégralement satisfaisant. Il n’est pas logique de qualifier un acte.
Un deuxième critère qui définit donc l’acte juridictionnel par le fait qu’il a pour objet de
trancher un litige, donc de départager les parties. A cet égard, le droit de l’Ohada est sans
équivoque. La mission des arbitres consiste bien à trancher des litiges. Ceci est clairement
affirmé par l’article 15 de l’acte uniforme qui évoque le fait qui « les arbitres tranchent le
fond du litige … »

1.2.3 Quid de l’arbitrage d’investissement en droit de l’Ohada ?

Quant à l’arbitrage d’investissement, il n’a pas été non plus défini par la doctrine ohadienne et
même par la doctrine récente. La raison en est toute simple. L’hoada n’avait jusque là pas fait
de distinction entre l’arbitrage interne et l’arbitrage international ou de commerce
international. Un auteur a bien vu que c’est bien parce que le droit de l’arbitrage de l’ohada
est pétri du droit matériel de l’arbitrage interne et de règles matérielles de l’arbitrage
international.

Pour trouver une définition de l’arbitrage d’investissement, faisons d’abord notre celle donnée
par Walid Ben Hamida pour qui « l’arbitrage relatif à l’investissement peut être définit
comme tout arbitrage opposant des entités publiques à des personnes privées étrangères et
portant sur une opération d’investissement (construction et exploitation d’autoroute,
concession, exploitation d’une licence de téléphone, usine, BOT) »14

14
Walid Ben HAMIDA, op cit p. 617

11 | P a g e
Deux critères se dégagent ainsi de cette définition. Le critère des personnes et le critère de
l’objet. Les personnes doivent être des personnes publiques et des personnes privées et quant
à l’objet, ce doit être une opération d’investissement.
Toujours selon cet auteur, « il s’agit d’une variante de l’arbitrage mixte ou transnational qui
oppose les personnes publiques et les personnes privées étrangères. La personne publique est
souvent l’Etat, mais peut être une entité infra-étatique (collectivité territoriale ou entreprise
d’Etat). La personne privée est souvent une société étrangère, mais parfois une simple
personne physique ».15
Un autre auteur le définit en arguant que l’arbitrage d’investissement, introduit en droit de
l’Ohada par l’acte uniforme de 2017, est une procédure de règlement des différends entre les
investisseurs étrangers et les Etats d’accueil, il a toujours été considéré comme la possibilité
pour un investisseur étranger de poursuivre un Etat hôte. C’est une garantie pour cet
investisseur étranger car, dans le cas d’un litige, il aura accès aux arbitres qualifiés et
indépendants qui résoudront le litige et rendront une sentence exécutoire.16

1.3 Le fondement de l’arbitrage

L’arbitrage en tout temps peut avoir plusieurs sources ou fondement. L’AUA dans son article
3, en arrive à établir de manière indirecte une hiérarchie de fondement dont il met en avant
plan la convention d’arbitrage suivi des codes des investissements et les traités relatifs aux
investissements.

1.3.1 La convention d’arbitrage

Dans un arbitrage, la convention d’arbitrage apparait comme l’acte pouvant permettre de


prouver que les parties ont consenti à se soumettre à l’arbitrage. Ce consentement est
indispensable à un tel mode de règlement des litiges dont l’existence même dépend de
l’accord des parties.17

 Importance de la convention d’arbitrage


En l’absence de convention d’arbitrage, l’arbitrage CCJA ne peut être mis en œuvre ; il en
est de même s’il existe une convention visant un organisme d’arbitrage autre que la CCJA.

15
Walid Ben HAMIDA, op cit p. 617
16
Abdoulaye SAKHO, Deux cles de compréhension des atouts de l’arbitrage dans l’espace Ohada, Res
Consortium pour la recherche économique et social, p.13
17
Acka ASSIEHUE, Système d’arbitrage de la cour commune de justice et d’arbitrage de l’Ohada, Guide
pratique de procédure, p. 13

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Aux termes de l’article 9 Règlement d’arbitrage de la CCJA, « lorsque prima facie il n’existe
pas entre les parties de convention d’arbitrage visant l’application du présent règlement, si la
défenderesse décline l’arbitrage de la cour, ou ne répond pas dans le délai de 45 jours… la
partie demanderesse est informée par le Secrétaire General qu’il se propose de saisir la Cour
en vue de la voir décider que l’arbitrage ne peut avoir lieu »
Il en résulte que la première condition doit toujours être cumulée avec l’une des deux autres
conditions. Le fait de décliner l’arbitrage de la Cour ou de refuser de répondre à la requête en
arbitrage, n’aura d’effet qu’en l’absence d’une convention d’arbitrage visant la CCJA. 18
L’interprétation a contrario de l’article 9 du Règlement d’arbitrage permet d’affirmer que
même s’il n’existe pas de convention visant la CCJA ou si la convention ne vise aucun
organisme d’arbitrage, et que la partie défenderesse accepte l’arbitrage de la Cour, les parties
sont réputées avoir ainsi conclu en compromis d’arbitrage ; il s’ensuit que l’arbitrage CCJA
pourra être enclenché.

 Formes de la convention d’arbitrage

Cette convention d’arbitrage peut revêtir deux formes : celle de clause compromissoire ou de
compromis d’arbitrage.

 La clause compromissoire

Cette première forme est celle que l’on rencontre le plus fréquemment, consiste à soumettre
les futurs litiges à l’arbitrage. Il prend donc la forme d’une clause compromissoire dans le
contrat entre les parties.
Lorsque la convention d’arbitrage prend la forme d’une clause compromissoire, la loi
choisie par les parties au contrat principal doit également s’appliquer à la convention
d’arbitrage. Cela nous parait d’ailleurs être conforme à la volonté des parties, lesquelles
pourraient n’avoir pas prévu l’application d’une loi différente pour les clauses de leur
contrat.19
C’est pour cette raison que Hélène SABALBAL intervient et donne une sorte de mise en
garde lorsqu’elle avance que la détermination du droit applicable au fond dans le cadre d’un

18
Acka ASSIEHUE p.14
19
Chrysoula PANOU, Le consentement à l’arbitrage, Etude méthodologique du droit international privé de
l’arbitrage Ed. IRJS, 2008 p,294

13 | P a g e
arbitrage est une question juridique complexe qui peut être déterminante pour l’issue d’un
litige, mais souvent oubliée par les parties. 20

 Le compromis d’arbitrage
Les parties peuvent aussi conclure un compromis d’arbitrage lors de la naissance d’un
différend entre elles ou alors même qu’une instance a déjà été engagée devant une juridiction
étatique (art. 4, AUA). donc elles soumettent à l’arbitre les litiges déjà nés. Et ce genre de
convention est communément appelé compromis d’arbitrage ou simplement « compromis ».21

 Effets de la convention d’arbitrage

Contrairement à l’article 10 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage qui donne la


possibilité aux parties d’écarter les dispositions d’un règlement d’arbitrage qui ne leur
conviennent pas, l’article 10.1 du Règlement de la CCJA dispose que « lorsque les parties
sont convenues d’avoir recours à l’arbitrage de la Cour, elles se soumettent au règlement par
là-même aux dispositions du Titre IV du traité de l’OHADA, au présent règlement, au
règlement intérieur de la Cour, à leurs annexes et au barème des frais d’arbitrage… ».
En conséquence, même « si l’une des parties refuse ou s’abstient de participer à l’arbitrage,
celui-ci a lieu nonobstant ce refus ou cette abstention » (cfr. art. 10.2 du R.A).

 Le caractère autonome de la convention d’arbitrage et ses corolaires


A l'instar de toutes les législations contemporaines modernes du droit de l'arbitrage, le droit
OHADA pose lui aussi le principe général du droit de l'arbitrage qui consiste à immuniser la
convention d'arbitrage par rapport aux causes d'invalidité susceptibles d'affecter le contrat qui
contient ladite convention. Ainsi dans l'Acte Uniforme, le principe est formulé de façon très
explicite dans les dispositions de l'article 4 qui pose aussi bien le principe de l'autonomie
matérielle de la convention d'arbitrage (séparabilité) que celui de son régime juridique
permettant d'apprécier sa validité.22
La formulation du principe est moins évidente dans les dispositions du Règlement d'arbitrage
de la CCJA qui en son article 10.4 stipule que «sauf stipulation contraire, si l'arbitre considère
que la convention d'arbitrage est valable et que le contrat liant les parties est nul ou inexistant,
l'arbitre est compétent pour déterminer les droits respectifs des parties et statuer sur leur

20
Hélène SABALBAL, Le droit applicable dans l’arbitrage d’investissement, expérience euro-arabe Ed.
l’harmattan, 2022, p, 1
21
Acka ASSIEHUE, op cit p, 13
22
Cassius Jean SOSSOU, L’arbitrage Ohada à l’épreuve de l’arbitrage investisseur-etat Université de Genève,
Faculté de Droit et Hautes Etudes Internationales du Développement, 2008 p, 103

14 | P a g e
demandes et conclusions ».Le Règlement de la CCJA pose le principe de l'autonomie de la
clause d'arbitrage par raisonnement inductif en assujettissant la compétence de l'arbitre à
l'existence de la convention d'arbitrage en dépit de l'évocation de sa nullité. En clair, la
convention d'arbitrage est totalement autonome du contrat principal aussi bien matériellement
que juridiquement.23
Pour tout dire, cette autonomie se cristallise sous deux formes : d’une part, la convention
d’arbitrage survit en cas de nullité du contrat principal, et d’autres part, elle peut être régit par
une loi différente de la loi qui régit le contrat sur lequel elle se greffe. 24

Ce principe ainsi posé touche à l'existence même de l'arbitrage ; en effet, pas d'arbitrage sans
l'accord de volonté des parties. Mais, l'objet du principe ne saurait être saisi dans son entièreté
que si l'on l'illustre par deux de ses corollaires à savoir, la compétence-compétence et
l'arbitrabilité subjective que l'on retrouve aussi bien dans tout arbitrage qui plus est
d'investissement.

 La compétence-compétence

Il est connu comme le dérivatif du principe de l'effet négatif de la convention d'arbitrage


selon lequel le juge étatique doit, en tout état de cause, se dessaisir au profit de l'arbitre
lorsqu'existe une convention d'arbitrage manifestement valide. L'arbitre est donc dit
compétent pour statuer sur sa propre compétence en cas de contestation sur l'existence et la
validité du consentement à l'arbitrage. C'est un des principes vitaux de l'arbitrage en général
dans la mesure où il confère aux arbitres le pouvoir de statuer sur leur propre compétence. S'il
lui est reconnu la vertu de briser le cercle vicieux selon lequel, si la clause d'arbitrage n'est pas
valide, les arbitres sont dépourvus de pouvoir, on lui reconnaît cependant la conséquence de
reporter dans le temps, au stade du contrôle de la sentence, l'appréciation, par les tribunaux
étatiques, de la compétence des arbitres. Il va s'en dire que même dans un arbitrage
d'investissement, les arbitres ne sont pas exemptés du contrôle a postériori de leur
compétence par les juges étatiques. En conséquence, la compétence-compétence de l'arbitre
est un principe fort du droit de l'arbitrage international qui renforce l'autonomie des parties à
voir leur différend être soustraite à la compétence des juridictions étatiques. Presque toutes les
législations modernes sur l'arbitrage international le consacrent y compris le droit OHADA de
l'arbitrage, tout comme la Convention de Washington dans les dispositions de son article 41.

23
Idem
24
Chrysoula PANOU, op ci, p, 294

15 | P a g e
En droit OHADA la reconnaissance de la portée utilitaire de ce principe se retrouve dans les
codifications des articles 11 de l'Acte Uniforme et 10.3 du Règlement d'arbitrage de la CCJA.
Toutefois, le droit de priorité reconnu aux arbitres dans l'examen de leur compétence n'est pas
absolu dans les dispositions du Règlement, dans la mesure où il est atténué par la revue prima
facie de l'existence de la convention, dont le CCJA dispose des pouvoirs. Il s'agit ici d'un
emprunt au système de la CCI de Paris dans les dispositions de son article 6.

 L'arbitrabilité subjective

Il s'agit ici du défaut de capacité ou de pouvoir invoqué par l'une des parties, et déduit de sa
loi personnelle (au sens large) pour rendre inefficace la clause d'arbitrage. L'on s'imagine
combien de fois, une telle décision étatique peut être fort préjudiciable à un arbitrage
d'investissement. D'ailleurs, par analogie à l'arbitrage du CIRDI, aucun arbitrage
d'investissement ne peut avoir lieu si l'une des parties ne remplit les conditions exigeantes de
compétence du Centre, à savoir, un Etat contractant (ou une collectivité publique ou un
organisme dépendant d'un Etat contractant). Il en va de même des autres droits de l'arbitrage
où le rejet du défaut de capacité ou de pouvoir par une puissance étatique constitue une règle
d'or. Certains droits ont lutté contre ce moyen en posant une règle matérielle de validité de la
clause d'arbitrage dans les relations internationales. Mais ce procédé ne fait pas l'unanimité. Il
passe par les droits nationaux et est tributaire, aux yeux de certains, de la détermination de la
loi applicable à la clause ou au moyen invoqué. Pour échapper à ces contraintes, la
jurisprudence arbitrale, largement approuvée, a eu recours au principe de bonne foi qui pose
notamment qu'un Etat ne peut, de bonne foi, signer une convention d'arbitrage, puis se
retrancher derrière sa propre législation pour en soutenir l'inefficacité. Cette première
conséquence de la bonne foi repose sur la reconnaissance de celle-ci comme principe général
dans les relations internationales.25

Paragraphe2 : Investisseur et Investissement


2.1 Vue du monde Scientifique

Le monde scientifique nous révèle que L’investisseur est une personne morale ou un
particulier qui désire placer des capitaux dans un projet ou une entreprise. Il voit ce placement
financier sur du long terme et a pour but de réaliser une plus-value intéressante.

25
Talfi Idrissa Bachir, Arbitrage investissement, la lettre juridique, éd n°759 du 25/10/2018

16 | P a g e
L’investisseur peut décider d’investir dans un produit, une action ou un projet immobilier. Il
existe plusieurs types d’investisseurs. Individuels : Ils se dirigent principalement vers de
jeunes projets, le financement d’œuvres d’art pour collection ou les actions boursières. On
parle également de Business Angels. Ils choisissent des projets parfois risqués pour aider des
jeunes entrepreneurs à lancer leur société Institutionnels : ce sont les entreprises privées ou
publiques, mais aussi les banques, les assurances et les fonds souverains.
L’investisseur doit être doté de certaines compétences telles que : La capacité à détecter de
bonnes opportunités ; La bonne connaissance des marchés et une forte aptitude à analyser les
variations ; Un esprit capable de mesurer les risques encourus et le rendement financier qu’il
peut espérer.26
Tandis que la notion d’investissement définit l’acte d’investir dans l’optique d’en retirer un
profit. Il s’agit de placer des capitaux dans le but de réaliser un objectif que l’entreprise s’était
fixé. Une entreprise peut décider d’un investissement pour acquérir de nouvelles machines ou
devenir propriétaire d’une autre société. L’engagement des dépenses est pris dans le but de
réaliser des bénéfices à plus ou moins long terme. L’entreprise décide d’investir pour
remplacer du matériel obsolète et obtenir un meilleur rendement, réduire les coûts de
production ou encore éviter de perdre du temps.27

De ce fait, l’investissement offre la possibilité d’accroître les capacités de production ou


encore de faire la différence sur une nouvelle niche de produits pour lesquels il est
indispensable d’acheter de nouvelles machines ou des bâtiments récents. L’entreprise peut
également investir dans l’achat d’une licence, d’un logiciel ou d’une action financière. Ou
même pour répondre aux normes écologiques et de développement durable en vigueur.

Dans notre démarche scientifique, il semble exister un cycle de vie de l’investisseur. Celui-ci
suit en fait le cycle de croissance de l’entreprise.28 Typiquement :
Niveau 1 : l’investisseur risque : il finance la preuve de concept, le premier développement
commercial et l’expansion des premières ventes ;
Niveau 2 : l’investisseur croissance : il soutient l’expansion de la compagnie à plus grande
échelle, et finance selon le cas, les recrutements, dépenses et campagnes marketing, besoin en
fonds de roulement ou investissements capex ;
Niveau 3 : l’investisseur en développement international : ces investisseurs sont souvent alors
régionalisés et peuvent par exemple financer des premières acquisitions ou l’extension de
l’activité sur d’autres continents.

26
https://www.bnppre.fr/glossaire/investisseur.html page consulté le 14/07/2023
27
https://www.bnppre.fr/glossaire/investissement.html idem
28

17 | P a g e
En effet, un des rôles majeurs de l’investisseur est alors d’aider à trouver les bons employés et
partenaires futurs pour faciliter la croissance de l’entreprise. Il est ainsi parfois plus approprié
de faire appel à un investisseur par région ou continent, qui possède les bons contacts et
canaux sur son territoire ;
Niveau 4 : l’investisseur stratégique : des investisseurs en private equity facilitent alors le
développement de la compagnie sur des tailles plus importantes de valorisation, ou afin de
créer de la valeur selon différentes stratégies.29
Enfin la vue du monde scientifique a fait suscite l’intérêt de la différence qui existe entre
l’entrepreneur et l’investisseur. E effet, l’entrepreneur est parfois vu comme un « super
homme ». Il peut et doit faire plus vite et mieux que les autres. L’investisseur est parfois vu
comme un « amiable opportuniste ». Il facilite en profite de la croissance de la valeur de la
compagnie. Des différences de focales existent donc, comme dans toute relation. La relation
entrepreneur-investisseur ressemble à beaucoup d’égards à un mariage : c’est une union pour
le meilleur et pour le pire ou le timing, la communication et l’adaptation sont clés ; une
relation long terme avec des hauts et des bas, et un contrat avec des droits et obligations. 30

2.2 Dans le code congolais des investissements


Le code des investissements de la République Démocratique du Congo ne définit pas de
manière directe les concepts « Investisseur » et « Investissement » il parle plutôt d’une part
de l’investisseur direct et de l’investisseur étranger direct et d’autres part, de l’investissement
direct et de l’investissement direct étranger

Est Investisseur direct : toute personne physique ou morale, publique ou privée effectuant un
investissement direct en République Démocratique du Congo. 31 Et L’Investisseur étranger
direct : toute personne physique n’ayant pas la nationalité congolaise ou ayant la nationalité
congolaise et résidant à l’étranger et toute personne morale publique ou privée ayant son siège
social en dehors du territoire congolais, et effectuant un investissement direct en République
Démocratique du Congo.32

Est Investissement direct : tout investissement relevant du champ d’application de la présente


loi envisagé par une entreprise nouvelle ou existante visant à mettre en place une capacité
nouvelle ou à accroître la capacité de production de biens ou de prestation de services,

29
Gilles Mougenot, Tout savoir sur l’investissement, Gualino, l’extenso éditions p, 92
30
Idem p, 103
31
Article 2 alinéa 4 de la loi n°004 du 21 février 2002 portant code des investissements
32
Article 2 alinéa 5 op cit

18 | P a g e
à élargir la gamme des produits fabriqués ou des services rendus, à accroître la productivité de
l’entreprise ou à améliorer la qualité des biens ou des services.33 Et l’Investissement étranger
direct (I.E.D) est tout investissement dont la participation étrangère dans le capital social
d’une entreprise dans laquelle l’investissement réalisé est au moins égale à 10 %.34

2.3 Dans L’AUA et dans le RACCJA

Nous l’avons souligné en d’autres mots que l’acte uniforme sur l’arbitrage et le règlement
d’arbitrage de la CCJA nous font remarquer un silence quant aux définitions claires des
notions d’investisseurs et investissement. Par exemple l’article 3 de RACCJA dispose que :
« la cour peut également administrer des procédures arbitrales fondées sur un instrument
relatif aux investissements, notamment un code des investissements ou un traité bilatéral ou
multilatéral relatif aux investissements(…)
Cela est dû au fait que le traité Ohada, ne considère pas le droit des investissements comme
une matière relevant de son champ d’application matériel même si l’article 2 du traité énonce
clairement le champ matériel de l’Ohada dans un premier temps, en citant les matières qui
entrent dans le « domaine du droit des affaires », dans un second temps, le même article
précise qu’entre dans ce domaine, « toute autre matière que le conseil des Ministres
déciderait d’y inclure conformément à l’objet du traité ».

SECTION 2 : INSTITUTIONNALISATION DE L’ARBITRAGE


D’INVESTISSEMENT DANS L’ESPACE OHADA

Paragraphe1 : Le cadre normatif

1.1 La consécration textuelle de l’arbitrage d’investissement dans l’espace Ohada

L’arbitrage d’investissement a été principalement consacré dans l’Acte Uniforme sur le Droit
de l’Arbitrage de 2017 ainsi que dans le Règlement de la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage. Ces nouvelles règlementations se justifient dans la mesure où l’arbitrage
d’investissement répond à un certain nombre de spécificité et d’exigences. Les lois et
règlement d’arbitrage modernes les intègrent de façon à permettre aux arbitrages entre Etat
investisseur sur le fondement d’un accord d’investissement ou d’une législation proposant
une telle procédure, à pouvoir s’appliquer.35

33
Article 2 alinéa 2
34
Idem, alinéa 3
35
Jean Sossou BIADJA CASSIUS, « Le droit de l’arbitrage dans l’espace OHADA : Rapport aux règles
et principes de l’arbitrage d’investissement éd. Universitaires européennes, France, 2020
19 | P a g e
En effet, l’article 3 l’AUA pose le jalon de l’arbitrage d’investissement en disposant ce qui
expressément ce qui suit « L’arbitrage peut être fondé sur une convention d’arbitrage ou sur
un instrument concernant un investissement, en particulier un code d’investissement ou d’un
traité d’investissement bilatéral ou multilatéral ».

1.2 La portée de l’AUA de 2017 instaurant l’arbitrage d’investissement

Le texte de l'Acte Uniforme sur le Droit de l'Arbitrage OHADA est hétéroclite. En effet, il est
largement inspiré du droit français de l'arbitrage d'une part et, certaines dispositions du droit
Suisse de l'arbitrage international, d'autre part, lui sont adjoints. Cette hybridation de la nature
de cet Acte a permis à un auteur d'affirmer que le Droit OHADA de l'arbitrage, en
l'occurrence, l'Acte Uniforme n'a pas échappé au principe qui veut que le choix du style
législatif se fasse parmi les grands systèmes ou modèles dominants. Ainsi, la réforme
juridique entreprise par l'OHADA selon lui n'a pu échapper à la «règle du politiquement ou de
l'idéologiquement neutre. Il en a déduit qu'en l'espèce le législateur OHADA semble avoir
construit un système d'arbitrage qui, bien que sui generis et composite pourrait être classé
dans la famille du droit français. Du fait de son caractère hybride nous pousserons même un
peu plus loin le catalogage en disant que le droit OHADA de l'arbitrage est catégorisable dans
la famille des droits de tradition civiliste c'est-à-dire les droits romano-germanique.36
Du droit français, il en a adopté la philosophie libérale. Tout en reconnaissant la primauté de
la volonté des parties dans la constitution du tribunal arbitral il a réglementé l'organisation de
la procédure arbitrale. La plupart de ses dispositions ont un caractère supplétif et le rôle du
juge étatique est limité à la coopération à l'arbitrage avec un contrôle sur la sentence arbitrale
conforme aux critères généralement admis en droit comparé.

Du droit suisse, cet Acte a repris les dispositions sur l'arbitrabilité subjective de l'article 177
al. 2 de la Loi Fédérale sur le Droit International Privé portant sur l'arbitrage international.
Cette disposition, il faut le dire, est formel sur les restrictions des droits portant sur l'aptitude
des Etats, collectivités ou entreprises publiques à se soumettre à l'arbitrage qui deviennent
inopposables à leurs cocontractants lorsqu'une convention les lie.37

S'il est évident que l'Acte Uniforme sur le Droit de l’Arbitrage Ohada est la principale source
de l'arbitrage international dans cet espace, il constitue, à ne point en douter, le droit commun
de l'arbitrage dans la zone circonscrite par l'Ohada et en tant que tel peut régir toutes sortes

36
Cassius Jean SOSSOU, op cit, p, 104
37
Idem

20 | P a g e
d'arbitrage. Le texte en soi est formel sur son champ d'application puisque sa portée n'est
exclusive d'aucune forme d'arbitrage comme le dispose son article 1 er. En effet, l'article
1er dispose qu'il «a vocation à s'appliquer à toute d'arbitrage« sans exclusif de nature ou de
forme. Il peut s'en déduire qu'il peut donc régir, dans cet espace Ohada, un arbitrage ad hoc
d'investissement sur la base des conditions classiques contraignantes de compétence tenant
aux parties, à la nature de l'investissement au consentement etc. que l'on retrouve dans la
jurisprudence du CIRDI. Nous inférons cette compétence supposée de l'Acte Uniforme à
pouvoir s'appliquer à un arbitrage d'investissement du fait qu'il nous semble avoir tenu grand
compte des développements récents du droit et de la pratique de l'arbitrage international. En
effet, il en consacre les grands principes applicables à un arbitrage d'investissement tels qu'ils
ressortent des instruments du CIRDI que sont ceux de l'autonomie des parties, du
contradictoire, de l'indépendance et de la séparabilité de la convention d'arbitrage par rapport
au contrat principal avec son corollaire du principe de compétence-compétence du tribunal
arbitral pour ne citer que ceux-là.38

1.3 L’AUA, le RCCJA et le Traité : Compétence non contradictoires mais complémentaire

La problématique des domaines de compétence se complexifie davantage avec la prise en


compte dans cet espace de deux autres textes législatifs à savoir le traité Ohada et le
règlement de la CCJA. En effet, on se saurait parler de l’arbitrage d’investissement Ohada qui
plus est un arbitrage international sans envisager la possibilité qu’il se déroule sous les
hospices de la Cour Commune de Justice d’arbitrage selon les dispositions de son Règlement
d’arbitrage. Dans cette hypothèse, les dispositions relatives à la reconnaissance et à
l’exécution de la sentence s’opèreraient selon le traité Ohada auquel le Règlement de la Cour
viendrait en appoint. Il en appert que pour la reconnaissance et l’exécution des sentences
arbitrales dans la zone Ohada quatre textes peuvent se réclamer d’application.

Il est évident que dans l’hypothèse d’une sentence d’arbitrage d’investissement rendue sous
l’égide de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’Ohada selon le règlement de cette
institution, cette sentence sera exéquaturées par la Cour conformément aux dispositions de
l’article 25 du traité Ohada.

L’on pourrait aussi s’interroger sur le rapport étroit qui existe entre l’AUA et le RCCJA lors
d’un arbitrage d’investissement.

38
Cassius Jean SOSSOU, op cit, p, 108

21 | P a g e
La valeur législative de l’AUA : L’on relèvera, à ce sujet que l’AUA a une valeur législative,
son article 35 précisant qu’il tient lieu de loi relative à l’arbitrage dans les pays membres de
l’Ohada. C’est ce texte qui régit l’arbitrage de droit commun dans l’espace Ohada.
L’expression « arbitrage de droit commun » doit ici s’entendre à la fois de l’arbitrage ad hoc
et de l’arbitrage institutionnel administré par les Centres privés d’arbitrage opérant dans
l’espace Ohada.39

S’agissant de l’arbitrage institutionnel, on ne perdra pas de vue qu’en faisant référence au


règlement d’arbitrage institutionnel dans ses articles 10&14, l’AUA reconnait
indiscutablement que ce type d’arbitrage a également cours dans l’espace Ohada et, en même
temps, valide l’activité des Centres d’arbitrage existant ou à créer dans ledit espace.

Dès lors, les Règlements d’arbitrage des Centres ou d’institutions d’arbitrage opérant dans
l’espace Ohada doivent être en harmonie avec la loi relative à l’arbitrage dans ledit espace
qu’est l’AUA, lequel peut compléter ces Règlements, le cas échéant. 40

A titre d’illustration, on mentionnera que le Règlement d’un Centre d’arbitrage opérant dans
l’espace Ohada ne peut prévoir qu’un tribunal arbitral soit composé en nombre pair, alors que
l’AUA consacre l’impartialité en énonçant que le tribunal arbitral comprend un ou trois
arbitres (article 8 de l’AUA).

De même, le Règlement d’arbitrage d’un Centre fonctionnant dans l’espace Ohada ne peut
proscrire la motivation de la sentence arbitrale à peine de nullité (article 26 AUA),

Comme un autre exemple, on mentionnera qu’il ne serait pas convenable que le règlement
d’une Institution d’arbitrage qui opère dans l’espace Ohada énonce que les sentences
arbitrales rendues sous l’égide desdits Institutions sont insusceptibles de recours, alors que
l’AUA stipule que la sentence arbitrale est susceptible d’un recours en annulation et peut
aussi faire l’objet d’une tierce-opposition ou d’un recours en révision (article 25 AUA).41

Tous ces exemples illustrent la nécessité pour les Règlements d’arbitrage des Centres existant
dans l’espace Ohada de se conformer aux dispositions impératives de l’AUA, qui constitue la
loi relative à l’arbitrage dans l’espace Ohada.

La valeur contractuelle du Règlement du RACCJA : En ce qui concerne le Règlement


d’arbitrage de la CCJA, celui-ci a une valeur contractuelle, au même titre que tout autre
règlement de quelque Centre ou Institution d’arbitrage que ce soit.

39
Gaston KENFACK DOUAJNI, L’arbitrage Ohada, Droit Ohada & Droit communautaire Africains p, 13
40
Idem
41
Ibidem

22 | P a g e
On rappellera, à cet égard, que c’est au moyen d’une convention d’arbitrage que les parties
choisissent de soumettre à l’arbitrage le règlement de leurs différends. Si elles optent pour un
arbitrage institutionnel, elles se réfèrent nécessairement au règlement d’arbitrage de
l’Institution ou du Centre d’arbitrage de leur croix, adhérant ce faisant audit règlement ; d’où
le caractère contractuel des règlements d’arbitrage, car en y adhérant, les parties s’y
soumettent.42

En tout état de cause, l’arbitrage d’investissement Ohada ayant un support dualiste, puisqu’il
est régit à la fois par l’AUA et par le Règlement de la CCJA, il convient afin de bien
l’appréhender, d’en examiner les fondements tant politique, économique que juridiques car les
investissements étrangers directs dépendent, dans une large mesure, des conditions
économiques, politiques et juridiques qui existent dans l’Etat hôte.43

Les mobiles politiques

Avant la signature du Traité de Port Louis dit Traité Ohada, le 17 octobre 1993, les opérateurs
économiques étaient unanimes pour affirmer que l’insécurité judiciaire résultant de la faillite
des systèmes judiciaires des pays de l’espace Ohada constituait l’une des causes du sous-
développement desdits pays. Il était donc nécessaire de réformer ces systèmes judiciaires, afin
de les rendre aptes à contribuer au développement de l’Afrique par la production des
décisions rassurantes en raison de leur bonne qualité technique, pour les investisseurs tant
locaux qu’internationaux. Or comme la réforme efficace des systèmes judiciaires risquait de
durer pendant un certain temps, les Etats africains en général et les promoteurs du Traité
Ohada en particulier ont vu dans l’arbitrage des investissements une des garanties juridiques
susceptibles de sécuriser les investisseurs et d’inciter, ce faisant, les investisseurs à
s’intéresser à l’espace Ohada.

1.4 Les mobiles économiques

Il a été opportunément affirmé que l’investissement constitue un critère décisif et une des
garanties du développement économique. Or les pays en développement, dont l’Afrique
Ohada fait partie, constituent un bloc fertile pour les investissements, en raison de ses
richesses naturelles dont le développement se heurte à des obstacles qu’il conviendra
d’examiner. Ainsi « l’ensemble de l’Afrique dispose d’une vingtaine de matières minérales
dont la production de cinq d’entre elles dépasse 40 % de la production mondiale (métaux
précieux, vanadium, chrome, rutile et palladium). Quant aux réserves, elles sont

42
Gaston KENFACK DOUAJNI, op cit, p.13
43
United Nations Commission on International Trad Law, Le règlement des différends relatifs aux
investissements par l’arbitrage et la médiation dans l’espace Ohada

23 | P a g e
exceptionnelles et estimées à 70 % des réserves mondiales de chrome, 78 % du platine, 64 %
du manganèse, 71 % des phosphates, 43 % des diamants, 42 % de l’or et 35 % du cobalt.

Les ressources agricoles, largement sous-exploitées, permettent néanmoins à l’Afrique de


fournir 56 % de la production mondiale de cacao et le quart de celle de café.

Si l’Afrique reste fournisseur de matières premières et de ressources naturelles, elle tend à se


marginaliser vis-à-vis de la mondialisation de l’économie par exemple en fournissant 17 % de
la bauxite mondiale et en ne produisant que 3 % de l’aluminium.44

Malgré ces richesses, le continent africain reste pauvre et sous-développé. Il y a là un


paradoxe difficile à expliquer car, « alors que l’Afrique a largement favorisé, pendant des
siècles, la prospérité de l’Europe occidentale et des Amériques par son capital humain et ses
ressources naturelles, elle semble incapable de mettre en place le cercle vertueux de son
propre développement » ; d’où l’une des raisons sinon la plus importante de l’entrave au pour
l’Afrique de « mettre en place … son propore développement » tient à l’absence ou à la rareté
des investissements dans ce continent.45

Outre la construction des routes, des barrages, des aéroports, ponts et autres ouvrages utiles
pour le développement de l’Afrique, toutes qui nécessitent des investissements importants, ce
continent regorge de richesses naturelles, dont l’extraction et l’exploitation en vue du
développement et du mieux-être des ses populations exigent également des investissements
considérables.

Paragraphe2 : Le cadre juridictionnel

2.1 La compétence reconnue à la CCJA dans l’arbitrage d’investissement

Instituée en application du Traité OHADA, la CCJA est une juridiction supranationale basée à
Abidjan, en Côte d'Ivoire. Son rôle est d'assurer, dans les Etats membres de l'OHADA,
l'interprétation et l'application commune du Traité, des règlements pris pour son application et
des actes uniformes. C'est non seulement la Cour suprême ou "Cour de cassation" des Etats-
membres au Traité OHADA en matière du droit des affaires, mais aussi un Centre
international d'arbitrage qui administre les arbitrages conformément au Règlement CCJA. 46

En effet, l’article 13 alinéa 2 de l’Acte Uniforme relatif à l’arbitrage pose le principe de


l’incompétence des juridictions des juridictions étatiques pour connaitre des litiges visés dans

44
Thierry LAURIOL, compte –rendu de la journée d’Etude sur « Les investissements en Afrique et l’arbitrage »,
MTM n° 2729 p.433
45
Gaston KENFACK DOUAJNI, op cit, p.24
46
Cassius Jean SOSSOU, op cit

24 | P a g e
une conventions d’arbitrage lorsque l’une des parties en ait la demande ; que le tribunal
arbitral ait été saisi ou non, le principe demeure celui de l’incompétence des juridictions
étatiques ;en présence d’une convention d’arbitrage alors que le tribunal n’a pas été saisi du
litige, le principe de l’incompétence reçoit une exception constituée de la « nullité manifeste »
de la convention d’arbitrage. Par conséquent, en retenant la compétence de la juridiction
étatique au seul motif que le tribunal arbitral ne serait pas encore saisi, sans rechercher au
préalable si la convention d’arbitrage est en tachée d’une « nullité manifeste », le juge
étatique a manifestement erré, ca(r il fait de l’exception un principe en retenant sa
compétence avant de rechercher les causes de nullité du protocole transactionnel.(Arrêt
N°043/2008 du 17 juillet 2008 Affaire DAM SAAR contre Mutuelle d’Assurances des Taxis
Compteurs d’Abidjan dite MATCA).47

2.3 Le souci du positionnement de la CCJA et ses avantages

L’AUDA a consacré l’arbitrage d’investissements, en donnant compétence à la CCJA en


matière de litiges relatifs aux investissements, lorsque le recours à la procédure d’arbitrage est
fondé sur un traité ou un contrat d’investissement. En effet, l’arbitrage d’investissements étant
une procédure de règlement des conflits entre investisseurs étrangers et Etats d’accueil, cette
nouvelle disposition permet à un investisseur étranger qui conclut un contrat avec un Etat
membre de l’Ohada de bénéficier d’une plus grande sécurité à travers le recours aux arbitres
qualifiés de la Cour. Cette initiative s’inscrit ainsi directement dans le cadre de la volonté de
l’Ohada de se positionner comme une place de référence en matière d’arbitrage
d’investissements.48 En d’autres termes l’observateur externe a les supputations sur ce qui a
pu motiver le « législateur Ohada » à adopter telle ou telle autre mesure dans les Actes
uniformes (et les Règlements). Ainsi, on peut dans ces conditions, penser que par le seul fait
de prévoir expressément dans une disposition l’arbitrage d’investissement, l’Ohada attend
par-là saisir une opportunité pour désormais capter les différends d’investissements réglés par
la voie de l’arbitrage. C’est que l’Ohada affiche ainsi une ambition de se positionner sur
l’échiquier de l’arbitrage international comme un référentiel en matière d’arbitrage
d’investissement et positionner la CCJA comme centre d’arbitrage d’investissements au
même titre que les centres internationaux reconnus en la matière.

Ce positionnement de la CCJA a accouché trois avantages à savoir : la proximité


géographique, la proximité intellectuelle ainsi que le rapatriement des différends
d’investissement.
47
Felix ONANA ETOUNDI, Ohada « Grandes tendances jurisprudentielles de la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage en matière d’interprétation et d’application du Droit Ohada , 2013 p, 434
48
Ali BOUGRINE, Rim TAZI et Omnia BENKIRANE, L’arbitrage dans l’espace OHADA : Principaux apports
de la réforme de l’AUDA, Nov 2021

25 | P a g e
 La proximité géographique

S’agissant de la proximité géographique l’opportunité pour les Etats membres de s’adresser


désormais à la CCJA pour les arbitrages d’investissements résiderait dans le fait que le centre
est géographiquement plus proche que les centres traditionnels connus. En effet, les différents
centres d’arbitrage des investissements connus et reconnus sont tous en dehors du continent
africain. C’est afin de réduire cette marginalisation de l’Afrique dans les arbitrages impliquant
des paries africains ou simplement dans la pratique de l’arbitrage et « combattre cette sorte de
monopole géographique » en vertu duquel les sièges des tribunaux arbitraux sont toujours
fixés en Europe ou en Amérique, des législateurs africains, au nombre desquels le législateur
Ohada, vont entreprendre de rénover le cadre juridique de l’arbitrage en Afrique et y créer ou
favoriser la création des centres d’arbitrage dont la CCJA.49

La proximité d’un centre sur le continent d’un centre sur le continent présente des avantages
certains pour les Etats. Le premier serait une réduction considérable du cout de l’arbitrage
dans les économies qui seraient réalisées sur pratiquement tous les points de dépenses d’un tel
arbitrage (frais liés au déplacement relatifs à la procédure devant le centre, frais d’arbitrage et
honoraires des arbitres).

 La proximité intellectuelle

En ce qui concerne la proximité intellectuelle l’opportunité résiderait aussi pour les Etats de
voir leurs différents tranchés selon des règles assez connus dans un système juridique connu
et donc pas étranger. Ceci pourrait être une source de confiance pour les parties à l’arbitrage.
Il est bien vrai que les parties à un arbitrage ont le choix du droit applicable. Cependant, le
seul fait d’être en face d’un centre en dehors du territoire géographique de la zone d’influence
d’un système de droit connu pourrait aussi présenter de risque de barrière intellectuelle sur le
droit applicable au fond du litige. La proximité ou la présence du centre sur le territoire
Ohada, rassurerait les parties, surtout internationaux soient, eux, rassurés par le droit Ohada,
habitués qu’ils sont par les procédures des grands centres reconnus, Sur ce point de vue,
l’Ohada devrait encore poursuivre son œuvre d’attractivité vis-à-vis de ces investisseurs.
Quant aux investisseurs du continent, ceux-ci peuvent facilement se rallier à la CCJA pour
l’arbitrage de leurs différends.

Non seulement la plupart des procédures d’arbitrage impliquant des parties africains se
déroulaient alors en Europe ou en Amérique mais aussi quasiment sans la participation des
juristes africains, qui ne sont que très rarement, voire pas du tout, conviés à ces arbitrages ni

49
Gaston KENFACK DOUAJNI, op cit p,19

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comme arbitres, ni comme Conseils, alors que « la réunion d’arbitres venant d’horizons
divers, de cultures et de systèmes juridiques différents est d’ailleurs l’un des trait les plus
marquants de l’arbitrage international et contribue d’évidente manière à l’élaboration d’un
droit véritablement international de l’arbitrage. 50 D’où un autre avantage de l’érection de la
CCJA en centre d’arbitrage des investissements réside dans le fait que le règlement de la
CCJA ainsi que l’arsenal juridique du droit des investissements de l’espace géographique
couvert par l’Ohada n’est pas inconnu des arbitres CCJA.

 Le rapatriement des différends d’investissement

Le rapport du CIRDI sur les cas d’arbitrage à la date du 30 avril fait ressortir que sur les 563
affaires enregistrées, 2,3 % implique des Etats africains. Sur ces 23 %, 20 % ont été
introduites par les investisseurs africains et les 80 % par les investisseurs hors du continent
africain. Enfin, on relève que sur les 131 affaires (représentant les 23 % des affaires), 46
impliquent des Etats parties de l’Ohada. C’est donc une grande partie des affaires qui
impliquent des Etats parties de l’Ohada. Il serait donc opportun pour les Etats membres de
l’Ohada de rapatrier les affaires au centre de la CCJA.

Dans la perspective d’un accroissement des affaires d’investissement, c’est donc une
opportunité pour les Etats parties à l’Ohada que la CCJA capte ces affaires. Ainsi fait, la
CCJA se positionnerait véritablement comme un centre d’arbitrage des investissements. En
effet, tout plaide pour que les différends qui s’élèveraient à l’occasion des investissements
réalisés sur le continent soient arbitrés sur et éviter leur exportation.

Ce rapatriement des affaires ne concernera bien entendu pas les affaires courantes. Il
concernera les affaires futures. Et pour ce faire, il faudrait que les TBI ou les codes des
investissements des différents Etats qui contiennent des dispositions renvoyant expressément
à l’arbitrage CIRDI ou CCI ou autre soient révisés pour intégrer désormais l’arbitrage CCJA.
Ce ne serait pas chose facile. Mais ce serait aux Etats de savoir imposer cette clause ou
dispositions. C’est aussi à l’Ohada de convaincre de sa capacité à gérer ces types de
différends ce qui serait assurément le meilleur plaidoyer en faveur de l’érection de la CCJA en
centre d’arbitrage des investissements.

2.4 Tendances jurisprudentielles de la CCJA dans l’arbitrage

Mode alternatif de règlement des litiges contractuels des litiges encouragé par le traité Ohada,
l’arbitrage a généré un contentieux diversifié au niveau de la CCJA, s’agissant aussi bien des

50
Gaston KENFACK DOUAJNI, op cit p,19

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problèmes liés à l’arbitrabilité du litige, à la constitution du tribunal arbitral, à l’annulation de
la sentence arbitrale, qu’un rôle quelque peu résiduel au juge étatique.

Il ressort de l’analyse des dispositions de l’article 23 du Traité Ohada « tout tribunal d’un Etat
parties saisi d’un litige que les parties étaient convenues de soumette à l’arbitrage se
déclarera incompétent si l’une des parties le demande et renverra, le cas échéant, à la
procédure d’arbitrage prévue au présent traité », et l’article 4 de l’Acte uniforme sur
l’arbitrage « La convention d’arbitrage est indépendante du contrat principal. Sa validité
n’est pas affectée par la nullité de ce contrat et elle est appréhendée d’après la commune
volonté des parties, sans référence nécessaire à un droit étatique », que celles-ci posent deux
principes, à savoir le principe, à savoir le principe de l’incompétence de toute juridiction
étatique saisie d’un litige que les parties sont convenues de soumettre à une procédure
d’arbitrage et le principe de l’autonomie de la convention d’arbitrage par rapport au contrat
principal auquel elle se rapporte ; dans le premier cas, toute juridiction d’un Etat partie saisie
d’un tel litige doit se déclarer incompétent lorsque l’une des parties en fait la demande ; dans
le second cas et en vertu de ce principe de l’Independence de la convention d’arbitrage par
rapport au contrat principal, la validité de celle-là n’est pas affectée par la nullité de celui-ci
et ladite validité est appréhendée d’après la commune volonté des parties sans référence
nécessaire à un droit étatique ; par conséquent, doit être cassée la décision qui recherche si le
litige porte sur la validité donc l’existence même de la convention sur son application, le
principe d’autonomie de la convention d’arbitrage, par rapport au contrat principal auquel elle
se rapporte, imposant au juge arbitral, sous réserve d’un recours éventuel contre la sentence à
venir, d’exercer sa pleine compétence sur tous les éléments du litige à lui soumis, qu’il
s’agisse de l’existence, de la validité ou de l’exécution de la convention (Arrêt N°020/2008 du
24 avril, Affaire SOW Yérim Abib contre 1°/Ibrahim Souleymane, AKA, 2°/KOFFI Sahouot
Cédric) ;51

Il résulte des articles 26, alinéa 2, a)et 9 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage
susvisé disposent respectivement que « le recours en annulation n’est entre autres cas
recevable, que 2°) si le tribunal a été irrégulièrement composé ou l’arbitre unique nomme un
arbitre et les deux autres arbitres ainsi nommés choisissent un troisième réception d’une
demande à cette fin émanant de l’autre partie ou si les deux arbitres ne s’accordent sur le
choix du troisième arbitre dans un délai de trente jours à compter de leur désignation, la
nomination est effectuée sur la demande d’une partie par le juge compétent dans l’Etat partie ;
« et enfin les parties doivent être traitées sur un pied d’égalité et chaque partie doit avoir
toute possibilité de faire valoir ses droits . « ; par conséquent, lorsque la procédure de

51
Felix ONANA ETOUNDI, op.cit p, 439

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désignation d’un arbitre et partant de la constitution du tribunal arbitral ad hoc obéi aux
prescriptions de ces textes quant à un délai et quant au traitement égalitaire dont doit bénéficier
toute parie à un procès, il s’ensuit que ledit Tribunal ad hoc a été irrégulièrement constitué et la
sentence rendue encourt annulation (102. Arrêt N° 004/2008 du 17 juillet 2008 Affaire
SOCIETE AFRICAINE DE RELATIONS COMMERCIALES ET INDUSRIELLES dite SARCI
Sarl contre 1°/ATLANTIQUE TELECOM SA & 2°/ TELECEL BENIN S.A).52

2.5 Autres Compétences de la Cour

L’article 14 du Traité OHADA détermine les missions confiées à la Cour Commune Justice et
d’Arbitrage. Ce texte dispose en substance :

« La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage assure dans les Etats parties l’interprétation et
l’application commune du présent Traité, des Règlements pris pour son application et des
Actes uniformes (alinéa 1er) ;

La cour peut être consultée par tout Etat ou par le Conseil des Ministres sur toute question
entrant dans le champ de l’alinéa précédent. La même faculté de solliciter l’avis consultatif de
la Cour est reconnue aux juridictions nationales saisies en application de l’article 13 ci-dessus
(alinéa 2) ;

Saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par
les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions
relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlement prévus au présent Traité à
l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales (alinéa 3) ;

Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel
rendues par toute juridictions des Etats parties dans les mêmes contentieux (article 4) ;

Il s’induit de ces dispositions que la CCJA joue d’abord le rôle d’organe consultatif sur toute
question d’interprétation ou d’application des Actes uniformes par les juridictions nationales.
Par sa fonction consultative, la CCJA à travers ses avis exerce un contrôle à priori de
l’application des Actes uniformes et des Règlement pris en application du Traité OHADA à la
demander des juridictions nationales du fond elles-mêmes.

Somme toute, il faut souligner que la mise en œuvre de ces dispositions régissant les règles
d’organisation, de fonctionnement et de compétence de la CCJA révèles d’énormes problèmes
d’application qui sont ressentis comme un malaise tant dans la structure interne même de la
Cour que dans ses rapports avec les juridictions nationales de cassation des Etats parties. D’où

52
Idem, p, 440

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la réforme de certains aspects institutionnels de la CCJA dans le Traité portant révision du
Traité Ohada et la nécessité d’une réflexion sur les perspectives d’évolution d’autres aspects
de cette haute juridiction communautaire.53

CHAPITRE 2: LA PRATIQUE DE L’ARBITRAGE A


L’EPREUVE DE LA PROMOMTION DES
INVESTISSEMENTS DANS L’ESPACE
OHADA
SECTION 1 : LA PROMOTION DES INVESTISSEMENT PAR LES GARANTIES
PROCEDURALES
53
Felix ONANA ETOUNDI, op.cit p, 16

30 | P a g e
Olivier Cupilier parlant de la protection des investissements dans les pays de l’Ohada en
arrive à déduire que la question de l’investissement et de sa protection sont primordiale en
Afrique compte tenu à la fois des importants besoins en capitaux extérieurs des affaires et une
certaine instabilité géographique sur le continent car les investisseurs ont besoin de garanties
pour limiter leur risque faute de quoi, ils ne viennent pas et ne restent pas.54

1.1 Principes procédurales novateurs dans l’arbitrage d’investissement Ohada

Il s'agit pour nous dans ce paragraphe d'esquisser une vue d'ensemble des mécanismes des
instruments de l'arbitrage OHADA comme outils du règlement des conflits du contentieux
international de l'investissement dans cette zone. Comme fil directeur de cette revue, nous
explorerons aussi bien le Traité en soi, l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage mais
aussi le Règlement d'arbitrage de la CCJA comme normes applicables à un arbitrage
d'investissement dans l'OHADA.

Olivier CUPERLIER, La protection des investissements dans les pays de l’espace Ohada : un
54

modèle transposable pour un lex mediterranea éd.OHADATA 2008


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