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L’EXPERTISE TECHNIQUE 10 000 ARTICLES

& SCIENTIFIQUE DE RÉFÉRENCE 1 000 FICHES PRATIQUES

EXTRAIT
ISSU DE L’OFFRE

Caractérisation et propriétés de la matière

Constantes des réactions de complexation -


Déterminations et applications

par André RAHIER

RÉSUMÉ

La chimie des complexes intervient dans un grand nombre d'applications pratiques. Après avoir rappelé la définition, la nature
des liaisons et la nomenclature des composés complexes, les constantes d'équilibre des réactions de complexation sont
examinées. La répartition des formes complexes est présentée et les méthodes classiques de détermination des constantes
d'équilibre sont évoquées. L'importance pratique des réactions de complexation est ensuite illustrée dans le cadre
d'applications industrielles telles que la production d'aluminium, le traitement des surfaces par voie humide et le traitement
des minerais en vue d'en extraire les métaux. Les réactions de complexation sont aussi très utiles en chimie analytique, soit
pour réaliser des séparations, soit encore pour masquer les espèces qui interfèrent au cours des déterminations quantitatives.
[…]

ABSTRACT

The chemistry of complex mixtures has many practical applications. After reviewing the definition, the nature of the bonds and
the nomenclature of complex compounds, the equilibrium constants of complexation reactions are examined. The distribution
of complex forms is presented and the conventional methods for determining equilibrium constants are considered. The
practical significance of complexation reactions is further illustrated in terms of industrial applications such as the production
of aluminium, wet-chemistry surface treatment and mineral processing in order to extract metals. Complexation reactions are
also very useful in analytical chemistry, either to carry out separations or to hide species that interfere in quantitative
determinations. A table shows a large number of equilibrium constants for common metal complexes.

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Document téléchargé le : 24/09/2023 | © Techniques de l'Ingénieur | Tous droits réservés


Constantes des réactions
de complexation
Déterminations et applications

par André RAHIER


Docteur ès sciences appliquées
Ingénieur chimiste, Echemconsult (Consultance en Électrochimie Appliquée, Belgique)

1. Complexation, définitions et nomenclature ..................................... K 110 - 2


2. Stabilité des complexes et cinétique de complexation................. — 2
3. Propriétés particulières des complexes............................................. — 5
4. Applications ............................................................................................... — 5
5. Tableau des constantes de stabilité ................................................... — 7
6. Conclusions................................................................................................ — 46
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. K 110

es réactions de complexation sont utiles dans un grand nombre d’applica-


L tions industrielles, telles que la production à grande échelle de métaux
réducteurs, le traitement des surfaces par voie humide ou encore le traitement
des minerais en vue d’en extraire les métaux. Ces mêmes réactions sont aussi
très utiles en chimie analytique, soit pour réaliser des séparations, soit encore
pour masquer les espèces qui interfèrent au cours des déterminations quanti-
tatives. La maîtrise des réactions de complexation s’appuie sur une bonne
compréhension de la nature des liaisons complexes et des équilibres associés
aux réactions correspondantes. Une méthode systématique de calcul permet
d’accéder à la répartition des espèces dans un milieu donné. En l’absence de
complications dues par exemple à des réactions parasites dont le déroulement
est mal connu, cette approche permet d’une part de mieux comprendre les
phénomènes et d’autre part de prévoir le comportement des systèmes. Plu-
sieurs applications d’intérêt pratique sont évoquées et de nombreuses valeurs
de constantes d’équilibres sont mises à la disposition du lecteur. À titre
complémentaire, la détermination des constantes d’équilibre est évoquée car
les valeurs des constantes d’équilibre nécessaires pour traiter de nouveaux cas
pratiques n’ont pas nécessairement été déterminées ou n’ont simplement pas
été publiées.
Dans le présent article, nous limitons nos raisonnements au cas des
complexes en phase aqueuse. De plus, l’hydratation n’est pas précisée dans
les structures. Il en résulte que la formation des complexes évoquée ici résulte
de réactions de substitution d’une ou plusieurs molécules d’eau par un ou plu-
sieurs ligands chaque fois que l’espèce complexée est hydratée. Enfin, nous ne
traitons ni les lanthanides, ni les actinides dont la spécificité est telle qu’ils
méritent à eux seuls qu’on y consacre une étude séparée.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. K 110 – 1
CONSTANTES DES RÉACTIONS DE COMPLEXATION _______________________________________________________________________________________

1. Complexation, définitions 1.2.3 Chélate

et nomenclature Les ligands peuvent être polyatomiques et posséder ainsi


plusieurs atomes (chargés ou non) qui sont des bases de Lewis. De
tels ligands, polydentés ou polydentiques, peuvent former plusieurs
liaisons avec une seule espèce complexée. On appelle chélate (du
1.1 Liaisons chimiques grec Khêlê signifiant « pince ») un complexe résultant de l’associa-
tion d’une espèce complexée avec au moins un ligand polydenté.
Tous les types communs de liaisons chimiques peuvent intervenir Dans les chélates, les ligands polydentés entourent très fréquem-
dans les complexes. Ainsi on peut rencontrer des liaisons purement ment l’espèce complexée de telle manière qu’ils forment une cage
ioniques qui impliquent que l’un des deux partenaires de la liaison au cœur de laquelle se trouve l’espèce complexée. Cette particularité
cède entièrement un électron à l’autre partenaire. Lorsque l’électron diminue souvent le caractère réactionnel du complexe, particulière-
n’est pas entièrement cédé par l’un des partenaires à l’autre parte- ment en termes de cinétique de réaction. Un exemple très important
naire, on parlera de liaison polaire. Cependant, ces liaisons ne per- de chélate est la vitamine B12, qui est un complexe de Co3+.
mettent pas d’expliquer l’existence de molécules formées entre
atomes identiques telles que Cl2 ou H2. En 1916, Lewis a découvert
un troisième type de liaison permettant d’expliquer l’existence de 1.3 Nomenclature
telles molécules. Il s’agit de la liaison covalente qui met en jeu le
partage de deux électrons. Cependant, ces types de liaison ne per- Les règles consacrées permettant de nommer les complexes
mettent pas d’expliquer l’existence de nombreuses molécules peuvent être résumées comme suit [2] :
complexes. Une première difficulté résulte de la formation connue
de complexes polychargés impliquant un ion métallique chargé 1. La plupart des complexes étant chargés, on nomme les
positivement, mais associé à un nombre de charges négatives plus composés neutres correspondants en commençant par l’anion
nombreuses que les charges positives portées par le métal. Un suivi de la préposition « de », puis par la dénomination du cation.
exemple de ce type est l’ion complexe CoF63− . Une seconde difficulté L’ion complexe peut être indifféremment le cation [exemple :
découle de l’existence de molécules complexes impliquant un par- nitrate d’uranyle de formule UO2(NO3)2] ou l’anion (exemple :
tenaire neutre bien que polaire comme NH3. C’est le cas par exem- hexafluorozirconate(IV) de potassium, de formule K2ZrF6) ;
ple de Cu(NH3 ) 2+ 2. Pour nommer les espèces complexes (neutres ou chargées),
4 . Ce sont les travaux de Werner, le premier chimiste
inorganicien lauréat du prix Nobel de chimie (1913), qui ont permis on nomme d’abord les ligands, puis l’espèce complexée. Le
à Lewis et plus tard à Pauling et ses contemporains de jeter les nombre de ligands de même nature est mentionné par les préfixes
bases de l’extension de la théorie des liaisons covalentes en intro- di, tri, tetra, penta, hexa, hepta... respectivement pour 2, 3, 4, 5, 6,
duisant la liaison de coordination [1]. Ce type de liaison implique le 7... ligands. Le préfixe mono est toujours omis. Exemple : tetra-
transfert d’un doublet électronique du ligand vers une orbitale vide aminecobalt(II) pour Co(NH3 )++ 4 . Si des ligands de différentes
de l’espèce complexée. La disposition des ligands autour de natures sont impliqués, on les cite dans l’ordre alphabétique ;
l’espèce complexée aboutit à une géométrie particulière qui gou- 3. Si l’ion complexe est un cation ou s’il s’agit d’un atome
verne un grand nombre de propriétés des complexes (polarité, pro- neutre, on emploie le nom ordinaire du métal. Si l’ion complexe
priétés magnétiques, propriétés optiques). est un anion, on ajoute le suffixe « ate » au nom du métal (voir
l’exemple donné au point 1) ;
4. On précise l’état d’oxydation du métal par un chiffre romain
1.2 Définitions entre parenthèses (exemple : tretrachlorocuprate(II) de sodium
pour Na2(CuCl4) ;
5. Les noms de ligands négatifs sont terminés par la lettre « o ».
1.2.1 Agent complexant (ou ligand), espèces Un ligand neutre est cité sans modifier son nom générique ;
complexées et complexes 6. Certains ligands courants possèdent leurs appellations
propres : fluoro pour F–, chloro pour Cl–, bromo pour Br–, iodo
Nous désignerons par agent complexant ou ligand, une espèce pour I–, cyano pour CN–, hydroxo pour OH–, nitro pour NO2− , nitrito
capable de délocaliser une partie de sa densité électronique vers pour ONO, carbonyl pour CO, aqua pour H2O et ammine pour NH3.
une autre espèce que nous appellerons espèce complexée. Le plus
souvent, les espèces complexées sont des cations disposant d’orbi- La plupart des ligands sont de nature organique. Toutefois, de
tales vides. Les plus répandues sont les cations métalliques. Lors- nombreux ligands ont reçu des dénominations consacrées, déri-
que les liaisons sont formées, on obtient une espèce polyatomique vées de leur dénomination anglo-saxonne, permettant de raccour-
(chargée ou non) que nous appellerons complexe. Selon la théorie cir leurs appellations. C’est le cas de l’acide (1,2-éthanediyldinitrilo)
de Lewis, un acide est une espèce capable d’accepter un doublet tétraacétique, appelé plus simplement acide éthylène dinitrilo
électronique. Une espèce capable de céder un doublet électronique tétra-acétique que l’on nomme EDTA. Dans la suite de ce docu-
est appelée base de Lewis. Les ligands sont donc des bases de ment, nous utiliserons les dénominations raccourcies qui seront
Lewis alors que les espèces complexées sont des acides de Lewis. précisées en préambule du tableau 1.

1.2.2 Sphère et nombre de coordination


Dans un complexe, le nombre de liaisons entre l’espèce 2. Stabilité des complexes
complexée et les ligands auxquels elle s’unit est appelé nombre de
coordination. L’espace occupé par les ligands autour de l’espèce et cinétique
complexée est appelé sphère de coordination. Au début du XXe siè-
cle, les travaux de Werner permettaient déjà de soupçonner que la
de complexation
disposition de ces liaisons autour de l’espèce complexée est très fré-
quemment symétrique. Ce point a été confirmé plus tard grâce à la Dans la suite de cet article, nous désignerons par M l’espèce
mise en œuvre de puissants outils d’analyse des structures comme complexée et par L le ligand. L’activité de M sera notée [M] et celle
la diffraction des rayons X et la résonance magnétique nucléaire, de L sera notée [L]. Comme à l’habitude, ces activités sont assi-
ainsi qu’au développement de la théorie du champ cristallin et à son milables aux concentrations, pour autant que les solutions soient
application aux complexes. Le lecteur est invité à consulter [1] pour suffisamment diluées. Dans la suite de cet article, pour des raisons
une discussion plus détaillée sur les structures des complexes. de simplicité, nous considérerons que c’est toujours le cas.

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K 110 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.
________________________________________________________________________________________ CONSTANTES DES RÉACTIONS DE COMPLEXATION

2.1 Équilibres de complexation


Répartition des complexes amminés de Cd++
et constantes d’équilibre

Fonctions de répartition (%)


Comme beaucoup d’autres réactions, la formation et la dissocia-
tion des complexes obéissent aux lois de l’équilibre que l’on peut
trouver dans [1] [2] [3]. Considérons les réactions (1), (2), (3) et (4),
illustrant la formation de complexes successifs faisant intervenir un 100
nombre croissant de ligands associés à une espèce complexée M :
80
M + L ↔ ML (1)
60
ML + L ↔ ML2 (2)
40

ML2 + L ↔ ML3 (3) 20

ML3 + L ↔ ML4 (4) 0


0 1 2 3 4 5 pL
Chacune de ces réactions est caractérisée par une constante
d’équilibre de dissociation kci dont l’expression est la suivante : M = Cd++, L = NH3, T = 25 oC,
La force ionique est égale à 1 mole par litre.
[MLi −1] [L]
kci = (5) M ML3
[MLi ]
ML ML4
ML2
Il est évident que le complexe est d’autant moins stable que la
valeur de kci qui lui correspond est plus élevée. Les constantes
βci = 1/kci sont appelées constantes de stabilité ou de formation Figure 1 – Exemple de répartition d’espèces complexes dans l’eau
des complexes successifs.
Définissons les constantes de stabilité des complexes successifs
pci dans une échelle logarithmique selon l’équation suivante : Il est possible d’exprimer le rapport de la concentration de
chacune des espèces sur la concentration analytique [M]′ en fonc-
pci = log10 (βci ) = − log10 (kci ) (6) tion des constantes d’équilibre et de la concentration en ligand
libre. La figure 1 présente ces rapports (exprimés en %) en fonc-
Une valeur élevée de pci indique une grande stabilité du complexe tion de pL = – log10([L]) dans le cas de la complexation du cad-
correspondant. Nous définissons encore les notations Kci et Pci mium par l’ammoniac. Les constantes de complexation sont tirées
selon les équations (7) et (8) relatives à la dissociation totale du du tableau 1.
complexe, libérant ainsi l’espèce complexée ainsi que le ligand : Ce type de graphique permet d’apprécier en un coup d’œil
quelles sont les espèces présentes dans le milieu pour une
[M] [L]i concentration donnée en ligand libre. Dans le cas ici illustré, on
K ci = (7)
[MLi ] voit qu’il n’existe aucune concentration en ligand libre qui
conduirait à l’existence d’une seule espèce complexe en solution, à
l’exception des très faibles concentrations en ligand pour les-
Pci = − log10 (Kci ) (8) quelles le métal reste essentiellement libre. Pour qu’il en soit
autrement, il faudrait que les Pci successifs diffèrent d’au moins
L’inverse de Kci s’appelle la constante de stabilité ou de forma-
quatre unités.
tion globale du complexe correspondant. Des définitions (5), (6),
(7) et (8), on déduit facilement les deux relations suivantes :
2.1.2 Détermination expérimentale
i
des constantes de stabilité
K ci = ∏ kcj (9)
j =1 La plupart des déterminations expérimentales des constantes de
stabilité des complexes s’appuient, d’une part, sur des bilans de
i matière et, d’autre part, sur une, voire plusieurs mesures analy-
Pci = ∑ pcj (10) tiques, permettant de quantifier, dans une situation d’équilibre, la
∂=1 concentration de l’une des espèces intervenant dans l’équilibre.
Considérons l’équation (7). Dans un premier temps, nous faisons
Le tableau 1 fournit des valeurs connues des pci ou des Pci pour
l’hypothèse que l’espèce MLi est la seule espèce complexe pré-
diverses espèces complexées et ligands. Comme c’est le cas de
sente à l’équilibre. Dans ces conditions, en mettant en présence
toutes les constantes d’équilibre, les valeurs dépendent non seule-
des quantités connues [M]′ et [L]′ respectivement de M et de L, il
ment de la température, mais encore de la force ionique du milieu.
est clair que si i est connu et que l’on dispose d’une méthode ana-
lytique permettant de déterminer l’une des trois concentrations
2.1.1 Répartition des espèces [M] ou [L] ou [MLi ] dans les conditions de l’équilibre, les deux
autres concentrations peuvent être déduites des bilans de matière
Considérons les équilibres (1), (2), (3) et (4) et désignons par [M]′ [équations (12) et (13)], si bien que la constante d’équilibre peut
la concentration analytique de l’espèce complexée. Cette être calculée simplement en appliquant l’équation (7) :
concentration analytique représente la concentration totale en M
qui serait présente dans le milieu si tous les complexes étaient dis-
[M]′ = [MLi ] + [M] (12)
sociés. On a :

[M]′ = [M] + [ML] + [ML2 ] + [ML3 ] + [ML4 ] (11) [L]′ = i [MLi ] + [L] (13)

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CONSTANTES DES RÉACTIONS DE COMPLEXATION _______________________________________________________________________________________

Le processus peut être répété pour diverses concentrations ini- 1. lorsque dans un couple Ox + ne– ↔ Red, l’espèce oxydante
tiales en M et en L de sorte qu’il est aisé de vérifier la constance du seule (Ox) subit une complexation par suite de la présence d’un
résultat aux erreurs de mesure près. ligand L, le pouvoir d’oxydation apparent du couple diminue
Cependant, en pratique, l’existence d’une seule espèce est un (c’est-à-dire que son potentiel standard apparent est inférieur au
cas d’exception comme illustré par la figure 1. Néanmoins, et en potentiel standard du couple) ;
l’absence de réaction parasite, il est encore possible de déterminer 2. lorsque dans un couple Ox + ne– ↔ Red, l’espèce réductrice
les constantes d’équilibre en faisant appel à l’équation (11) et en seule (Red) subit une complexation par suite de la présence d’un
remplaçant l’équation (12) par l’équation (14) : ligand L, le pouvoir d’oxydation apparent du couple augmente
(c’est-à-dire que son potentiel standard apparent est supérieur au
i potentiel standard du couple) ;
[M]′ = ∑ [ML j ] (14)
3. lorsque dans un couple Ox + ne– ↔ Red, l’espèce oxydante
j =0
(Ox) et l’espèce réductrice (Red) subissent toutes deux une
Dans un tel cas, plusieurs constantes d’équilibre entrent en jeu complexation par suite de la présence de ligands appropriés, le
et il est nécessaire de combiner plusieurs mesures analytiques pouvoir d’oxydation apparent du couple augmente ou diminue
pour permettre la résolution du système d’équations. Idéalement, selon que la stabilité du complexe affectant Red est plus ou moins
la détermination du ligand libre simplifie souvent les calculs en élevée que la stabilité du complexe affectant Ox.
vertu de la forme de l’équation (11). Ici aussi, il est conseillé
d’effectuer davantage de mesures que strictement nécessaire, pré- Cet effet est très utile en électrochimie analytique, particulière-
cisément pour s’assurer de la constance des résultats, qui ment lorsque l’oxydation de Red ou la réduction de Ox gêne la
constitue une confirmation de la validité des hypothèses et en mesure d’une autre espèce en provoquant un courant d’oxydation
particulier de l’absence de complications. Ces dernières se mani- ou de réduction nettement plus important que celui qui corres-
festent très fréquemment lorsque L est une forme basique d’un pond à la réponse de l’espèce à quantifier. L’utilisation d’un ou de
couple acide-base. Dans ce cas, il est nécessaire non seulement de plusieurs ligands adéquats permet de déplacer le couple gênant de
mesurer le pH, mais encore de connaître les constantes d’acidité sorte que la mesure devient possible. Plus loin, nous verrons
relatives aux formes protonées des ligands. Un autre cas pouvant encore un cas apparenté qui permet de mesurer des traces de
engendrer des complications se présente aussi très souvent par cobalt par polarographie en présence de grandes quantités de
suite de l’hydrolyse du métal libre ou simplement parce que ce nickel. De même, l’influence des ligands sur les potentiels
métal peut exister sous une forme complexe impliquant le solvant. oxydo-réducteurs apparents des couples électrochimiques est
exploitée dans l’industrie, notamment dans le cadre de l’extraction
A priori, n’importe quelle méthode analytique peut convenir pour de métaux nobles comme l’or [4] [10].
déterminer la concentration à l’équilibre de l’une des espèces en
jeu. À cette fin, les méthodes spectrophotométriques et les métho- Un troisième cas pratique important est l’influence mutuelle qui
des électrochimiques sont particulièrement utiles. Losqu’on pro- résulte de la compétition entre un métal et le proton pour se lier à
cède à la mesure de la concentration de l’une des espèces à un ligand L. Selon la force relative des constantes d’équilibre
l’équilibre, il convient de vérifier que la mesure ne perturbe pas les correspondantes (respectivement les constantes de stabilité des
équilibres dont on souhaite déterminer les constantes. Alternative- complexes du métal avec L et les constantes de dissociation des
ment, on peut faire appel à un titrage acide-base mais dans ce cas, il couples acide-base impliquant L), on peut assister soit à une dimi-
faut tenir compte du fait que le proton déplace le ligand du nution du pH lorsqu’on ajoute le métal à une forme acide du
complexe. Il en résulte que le traitement mathématique est plus ligand, soit encore à la dissociation du complexe métallique
compliqué et que des estimations précises des constantes d’acidité lorsqu’on diminue le pH.
du ligand doivent être disponibles. Dans tous les cas, on s’assurera
que les expériences sont menées à une température constante et
bien déterminée. De même, on évitera d’utiliser des concentrations 2.1.4 Cinétique de complexation
trop élevées pour pouvoir assimiler ces dernières aux activités.
Dans une grande majorité des applications pratiques, la ciné-
2.1.3 Influences mutuelles tique de formation et de dissociation des complexes joue un rôle
tout aussi essentiel que la stabilité de ces mêmes complexes. On
Dans tous les équilibres, ce sont les activités des espèces réelle- sait que les équilibres sont dynamiques, c’est-à-dire qu’à tout ins-
ment en équilibre qu’il faut prendre en compte dans les expres- tant, les réactifs se transforment en produits et réciproquement. À
sions thermodynamiques correspondantes. Lorsque l’une ou l’équilibre, les deux conversions évoluent à la même vitesse, si
plusieurs de ces espèces sont engagées dans une ou plusieurs bien que les concentrations des produits et des réactifs sont sta-
autres réactions équilibrées, la résolution exacte des équations tionnaires. Cependant, ces deux conversions peuvent évoluer rapi-
d’équilibre devient plus compliquée. En outre, le rapport de force dement ou, au contraire, lentement. Dans le cas des complexes,
entre les différentes réactions peut être nettement en faveur de lorsque ces conversions sont rapides, on dit que le complexe est
l’une d’entre elles. Dans un tel cas, l’avancement à l’équilibre des labile. C’est le cas de Ni(CN)2−
4 . Inversément, un complexe caracté-
autres réactions s’en trouve diminué, ce qui permet d’en négliger risé par des conversions dynamiques lentes à l’équilibre est appelé
virtuellement les effets. complexe inerte. C’est le cas de Co(NH3 )3+ 6 en milieu acide. Les
complexes labiles peuvent se former et se dissocier rapidement
Un premier cas très utile en pratique consiste à empêcher la préci- alors que les complexes inertes se forment et se dissocient lente-
pitation d’un hydroxyde en complexant les ions libres du métal. C’est ment. Pour toutes les applications en chimie analytique, des
le cas de Cu(OH)2 lorsqu’on augmente le pH en utilisant une solution vitesses suffisamment élevées de formation et de dissociation des
d’ammoniac, par suite de la grande stabilité des complexes amminés complexes sont clairement essentielles car elles gouvernent
du cuivre(II) (Pc1 = 4,12 ; Pc2 = 7,58 ; Pc3 = 10,4 ; Pc4 = 12,6). souvent la durée des mesures. Lorsque ces vitesses sont trop
Un second cas pratique de ce type sera exposé plus loin (réac- faibles, la méthode analytique peut éventuellement perdre tout
tion de Tollens). Un autre exemple très important est celui qui son intérêt. Dans le cas de nombreuses applications industrielles,
résulte de l’effet des ligands sur les potentiels oxydo-réducteurs les cinétiques de formation et de dissociation des complexes sont
apparents des couples électrochimiques. Sans entrer dans les aussi très importantes. On conçoit que si un complexe inerte se
détails, nous pouvons dégager trois règles générales qui tra- forme par exemple au cours d’une opération d’extraction d’un
duisent simplement les déplacements d’équilibre par suite du mas- métal au départ de son minerai, il sera difficile et coûteux de récu-
quage de l’une des espèces : pérer le métal à partir du complexe.

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