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Cancer/Radiothérapie 13 (2009) 384–390

Mise au point

Radiothérapie guidée par l’image avec le Cone Beam CT kV (ElektaTM ) :


expérience du centre Léon-Bérard
Image guided radiotherapy with the Cone Beam CT kV (ElektaTM ): Experience of
the Léon Bérard Centre
P. Pommier ∗ , F. Gassa , F. Lafay , L. Claude
Service d’oncologie–radiothérapie, centre Léon-Bérard, 28, rue Laennec, 69373 Lyon cedex 08, France
Reçu le 5 mars 2009 ; reçu sous la forme révisée le 2 mai 2009 ; accepté le 10 mai 2009

Résumé
La radiothérapie guidée par l’image (IGRT) utilisant la tomographie conique de base énergie (Cone Beam CT kV [CBCT-kV]) d’ElektaTM a
été mise en place au centre Léon-Bérard en novembre 2006. La procédure thérapeutique est décrite et détaillée pour la radiothérapie guidée par
l’image des cancers de la prostate et la radiothérapie en conditions stéréotaxiques des cancers pulmonaires non à petites cellules. La tomographie
conique de basse énergie est utilisée en routine pour la radiothérapie en conditions stéréotaxiques, certains cancers de l’enfant, les cancers de
la prostate, les tumeurs cérébrales primitives et les cancers ORL sans irradiation ganglionnaire. De 35 à 40 patients sont traités quotidiennement
sur une période de 11 heures. Les procédures d’acquisition et d’analyse des images sont détaillées. La tomographie conique de basse énergie a
permis d’identifier environ 10 % de patients traités pour un cancer de la prostate pour lesquels un positionnement bidimensionnel osseux seul aurait
conduit à une distribution de dose non acceptable pour au moins une séance. La radiothérapie en conditions stéréotaxiques est réalisée en routine
pour les tumeurs bronchiques non à petites cellules périphériques inopérables. La simplicité de mise en place de la tomographie conique de basse
énergie et les bénéfices cliniques attendus devraient conduire à une diffusion rapide de cette technologie. Des évaluations médicoéconomiques
multicentriques (comparatives avec le Cyberknife® pour la radiothérapie en conditions stéréotaxiques thoracique) sont en cours.
© 2009 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Radiothérapie guidée par l’image ; Cone Beam CT ; Radiothérapie stéréotaxique ; Cancer prostatique ; Cancer du poumon non à petites cellules

Abstract
Image guide radiotherapy with the Cone Beam CT kV (CBCT-kV) developed by ElektaTM has been implemented at the centre Léon Bérard in
November 2006. The treatment procedure is presented and detailed for prostate cancer IGRT and non small cell lung cancer (NSCLC) stereotactic
radiotherapy (SRT). CBCT-kV is routinely used for SRT, selected paediatric cancers, all prostate carcinomas, primitive brain tumours and head
and neck cancers that do not require nodes irradiation. Thirty-five to 40 patients are treated within a daily 11-hours period. The general procedure
for 3D images acquisition and their analysis is described. The CBCT-kV permitted to identify about 10% of prostate cancer patients for whom a
positioning with bone-based 2D images only would have led to an unacceptable dose distribution for at least one session. SRT is now used routinely
for inoperable NSCLC. The easiness of implementing CBCT-kV imaging and its expected medical benefit should lead to a rapid diffusion of this
technology that is also submitted to prospective and multicentric medico-economical evaluations.
© 2009 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Image guided radiotherapy; Cone Beam CT; Stereotactic radiotherapy; Prostate cancer; Non small cell lung cancer

1. Introduction

Le département de radiothérapie du centre Léon-Bérard est


constitué d’une unité de radiothérapie externe, d’une unité de
∗ Auteur correspondant. curiethérapie et d’un service d’hospitalisation comportant des
Adresse e-mail : pommier@lyon.fnclcc.fr (P. Pommier). chambres à parois épaisses pour la curiethérapie. L’unité de

1278-3218/$ – see front matter © 2009 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.canrad.2009.05.004
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radiothérapie externe comprend notamment six blockhaus et La chaîne de la radiothérapie guidée par l’image est com-
cinq accélérateurs linéaires, tous de marque ElektaTM , un scano- plétée par une table de traitement à six degrés de liberté (table
graphie quadridimensionnel dédié Philips « Big Bore » à large « hexapod » d’ElektaTM ) qui permet de corriger des erreurs de
tunnel permettant l’acquisition des données anatomiques des positionnement en translations (3 cm) mais aussi de rotations
patients en position d’irradiation, un réseau informatique DIC (jusqu’à 3◦ ) avec une très grande précision (0,5 mm pour les
Sigma Micro prochainement remplacé par le logiciel Mosaiq de translations et 0,1◦ pour les rotations). L’exécution des cor-
la société Impac/ElektaTM , sept stations de travail Computerized rections et le contrôle de la position de la table sont réalisés
Medical System (CMS) ainsi que d’une plateforme d’échange de par l’intermédiaire de deux caméras infrarouges et le logiciel
données Aquilab (P2E). « Iguide » d’ElektaTM .
La radiothérapie guidée par l’image tridimensionnelle est réa- La tomographie conique de basse énergie d’ElektaTM a été
lisée avec l’accélérateur linéaire « Synergy » d’ElektaTM équipé installée au centre Léon-Bérard en mars 2006 et les premiers
du système d’acquisition volumique XVI « Xray Volumique traitements ont débuté en novembre 2006. La table hexapod a
Imaging System ». Il est équipé d’un collimateur multilame été installée en septembre 2007 dans le cadre de l’appel à pro-
(beam modulator) composé de 40 paires de lames de 4 mm jet 2006 de l’Institut national du cancer pour la radiothérapie
à l’isocentre, ce qui permet d’avoir un champ maximal de stéréotaxique des tumeurs extracrâniennes. Elle est utilisée en
16 × 21 cm2 . Cet accélérateur est muni de deux systèmes routine depuis octobre 2008.
d’imagerie embarquée utilisant des détecteurs de type silicium
amorphe, placés perpendiculairement l’un par rapport à l’autre 2. Indications
partageant ainsi le même centre de rotation [8]. L’imagerie
portale (iViewGT) réalise des images planaires à partir du rayon- La tomographie conique de basse énergie est actuellement
nement de haute énergie et le système de tomographie conique utilisée en routine pour tous les contrôles de qualité de posi-
de basse énergie (Cone Beam CT kV) (XVI) permet d’obtenir tionnement (mise en traitement et contrôles ultérieurs) pour les
des images planaires et surtout volumiques du patient grâce à patients traités avec le Synergy.
un tube à rayon X de faible énergie (100 à 120 kV) monté sur un Les indications prioritairement traitées à ce poste sont celles
bras rétractable solidaire du statif de l’accélérateur. Ce système pour lesquelles un haut niveau de conformation et de préci-
peut reconstruire une image volumique de haute résolution en sion est recherché. Les indications retenues de radiothérapie
une à deux minutes à partir des 650 projections acquises sur une conformationnelle avec ou sans modulation d’intensité (RCMI)
rotation de 360◦ (Fig. 1). de l’adulte avec fractionnement classique sont : les carcinomes
prostatiques, opérés ou non, les cancers ORL traités sans
irradiation ganglionnaire avec modulation d’intensité (essentiel-
lement : sinus de la face, base du crâne et ré-irradiation), les
tumeurs cérébrales primitives et certains sarcomes ou tumeurs
pulmonaires de taille compatible avec l’ouverture du collima-
teur [1,6]. Toute la radiothérapie en conditions stéréotaxiques
est réalisée sur cet appareil (notamment : tumeurs bronchiques
périphériques non opérées, tumeurs paraspinales, métastases
pulmonaires, hépatiques surrénaliennes). Les enfants traités
sous anesthésie générale, et/ou pour des tumeurs de volume
limité (neuroblastomes, néphroblastomes, tumeurs de la tête
et du cou. . .) sont également traités avec le Synergy. Au-
delà des bénéfices attendus par l’utilisation d’une imagerie et
d’un système de repositionnement optimisés, deux arguments
majeurs plaident pour l’utilisation du Synergy pour les indica-
tions pédiatriques : la réduction du temps nécessaire au contrôle
du positionnement et les faibles doses délivrées par la tomogra-
phie conique de basse énergie (de 9 à 25 mGy) par comparaison
avec l’imagerie de contrôle classique (environ 9 cGy pour deux
images de référence en haute énergie). Ces doses estimées dans
le logiciel de l’XVI ont été validées expérimentalement et sont
en accord avec les données de la littérature [5].
Actuellement, sur la période d’ouverture (7 h 30–18 h 30), 35
à 40 patients sont traités par jour avec le Synergy, dont un à
trois en conditions stéréotaxiques, quatre à cinq enfants (dont
un à deux sous anesthésie générale), 15 à 20 cancers de prostate
(25 à 30 % avec contrôle quotidien du positionnement), cinq à
Fig. 1. Accélérateur linéaire « Synergy » d’ElektaTM équipé du système de dix tumeurs cérébrales primitives (50 % en RCMI) et cinq à dix
tomographie conique de basse énergie. cancers des sinus de la face ou de la base du crâne en RCMI.
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Pour la planification des séances, les plages appliquées conique de basse énergie va bien sûr perturber le recalage
selon les protocoles sont les suivantes : respectivement 20 automatique, par exemple, pour les cancers de la prostate.
et dix minutes en technique conformationnelle avec et sans Le logiciel associé à la tomographie conique de basse éner-
modulation d’intensité pour les tumeurs cérébrales et ORL gie offre trois possibilités de recalage : recalage automatique
(incluant un contrôle par tomographie conique de basse éner- « osseux » ou basé sur les « niveaux de gris » et un recalage
gie hebdomadaire) et les cancers prostatiques (avec dix minutes « manuel ».
additionnelles en cas de recalage manuel) et 40 minutes pour Le recalage automatique « osseux » est le plus performant
les radiothérapies stéréotaxiques et les irradiations pédiatriques en termes de précision et de rapidité (d’une à deux secondes)
sous anesthésie générale (incluant un contrôle par tomographie pour des tumeurs peu mobiles ou peu influencées par le mou-
conique de basse énergie à chaque séance). vement ou le remplissage des organes avoisinants (c’est-à-dire
Deux principales applications sont détaillées ci-dessous : les cancers de la tête et du cou). Par rapport à l’imagerie bidi-
l’irradiation des cancers de la prostate (opérés ou non) et la radio- mensionnelle (films ou i-view), il permet en outre de mesurer
thérapie en condition stéréotaxique des cancers bronchiques non les décalages autours des trois axes de rotation. Le recalage
à petites cellules de petite taille. sur « niveaux de gris » est potentiellement intéressant pour des
volumes cibles mobiles, non liés à des structures osseuses (i.e.
3. Méthodologie et protocoles cancers pulmonaires). L’analyse des images est réalisée en un
temps court de l’ordre de cinq à 20 secondes, essentiellement en
3.1. Export des données de la planimétrie fonction de l’importance du volume d’intérêt.
Les outils de recalage manuel permettent à l’utilisateur
Une fois la dosimétrie validée, les images scanographiques de d’optimiser le recalage de volumes cibles mobiles. La qualité
référence, les structures anatomiques (volumes cibles, organes des images issues du scanner et de la tomographie conique de
à risque) et l’isocentre des faisceaux sont transférés au format basse énergie va ici être prépondérante pour permettre si possible
DICOM RT sur la console du XVI et intégrés dans le fichier du l’individualisation des volumes cibles, des différentes structures
patient. entourant le volume cible ainsi que les organes à risques, éven-
tuellement situés à distance du volume cible (c’est-à-dire la
3.2. Acquisition des tomographies coniques de basse moelle épinière). Un fenêtrage identique pour les deux modalités
énergie doit être appliqué pour ne pas induire d’erreur d’interprétation
des limites anatomiques de certaines structures (c’est-à-dire les
Le choix de la collimation (hauteur et largeur du champ limites du diaphragme ; les contours d’une tumeur pulmonaire
d’acquisition) ainsi que de l’amplitude de l’acquisition (180◦ périphérique). Dans de nombreuses situations, le volume cible
versus 360◦ ) dépendent du volume à explorer, de la résolution n’est pas parfaitement identifiable et le recalage manuel est réa-
et de la qualité d’image recherchées (supérieures pour une col- lisé à partir de l’analyse de ses interfaces avec les tissus sains
limation de petite taille et une acquisition sur 360◦ ), ce qui environnants.
influe sur de la dose délivrée par l’examen. La qualité des
images est également liée au patient et peut être dégradée en cas 3.4. Application des décalages
d’implants métalliques et lorsque le diamètre exploré est impor-
tant (cas des patients obèses pour l’exploration pelvienne et Les décalages proposés prennent en compte les trois axes de
abdominale). translation et les trois axes de rotation, ces derniers pouvant être
réalisés si l’on dispose d’une table avec six degrés de liberté.
3.3. Analyse des images Lorsque l’on ne souhaite pas (ou ne peut pas) appliquer les
modifications en rotation, l’outil d’analyse des images permet
La première étape pour l’analyse des images consiste à de visualiser et, le cas échéant, de modifier le recalage proposé
définir un volume d’intérêt (clip box) qui fera l’objet du recalage sans appliquer les rotations. Les marges de tolérance acceptées
automatique des tomographies coniques de basse énergie avec en translation et en rotation sont déterminées à l’avance pour
celles issues du scanner de dosimétrie. Ce volume doit être chaque protocole thérapeutique, prenant en compte notamment
centré sur le(s) volume(s) cibles en excluant si possible les les marges appliquées au volume cible anatomoclinique (CTV)
régions mobiles non directement liées à ces volumes (c’est- ou au volume cible interne (ITV) pour obtenir le volume cible
à-dire les hanches pour les cancers pelviens), mais doit être prévisionnel (PTV), qui doivent elles-mêmes prendre en consi-
suffisamment grand pour apporter suffisamment de structures dération la fréquence des contrôles (i.e. marges réduites en cas
de densités différentes pour permettre le recalage automatique de contrôle avant chaque séance) et les incertitudes cliniques
et aussi limiter le risque d’erreur (ex : irradiation vertébrale). Le (fiabilité des contours et de l’interprétation des images) et dosi-
volume d’intérêt doit également exclure certaines structures en métriques.
dehors du volume cible, différentes entre l’image de référence Les décalages validés par l’équipe médicale sont transmis
et la tomographie conique de basse énergie. C’est par exemple automatiquement à la table de l’accélérateur (avec la possibilité
le cas pour la vessie si la scanographie dosimétrique servant de de les réaliser depuis le pupitre), permettant d’éviter le risque
référence a comporté une injection entraînant son opacification. d’erreur sur le sens des translations à effectuer. À l’exception
Cette forte densité de la vessie non retrouvé sur la tomographie de déplacements importants ou de l’application de rotations
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(utilisation de la table hexapod), il n’est alors pas utile de véri- 3.7. Spécificités de la tomographie conique de basse
fier le déplacement effectué, d’où un gain significatif en termes énergie pour les cancers de la prostate
de temps et de dose d’irradiation délivrée par l’imagerie de
contrôle. L’irradiation des cancers de la prostate est une des indi-
cations principales de la radiothérapie guidée par l’image du
3.5. Contrôle des champs d’irradiation fait de la mobilité interfractions connue. La mobilité, notam-
ment liée au degré de réplétion rectale, pourrait être une cause
Contrairement à l’imagerie bidimensionnelle, la tomographie majeure d’échec thérapeutique évitable par l’utilisation de la
conique de basse énergie ne permet pas de contrôler la forme tomographie conique de basse énergie [2,4,9].
des champs d’irradiation (position des lames). Ce contrôle est L’acquisition des tomographies coniques de basse énergie
alors réalisé par les manipulateurs avant la mise en traitement par est réalisée avec une collimation moyenne et une acquisition
une vérification systématique de la superposition à l’isocentre sur 360◦ . Un recalage automatique osseux est appliqué sur un
de la simulation lumineuse de chaque champ d’irradiation avec volume d’intérêt qui exclut les têtes fémorales et la vessie, si
la forme prévisionnelle imprimé sur papier lors de la validation celle-ci a été opacifiée lors de la scanographie à visée dosi-
de la dosimétrie. métrique. Le recalage manuel prend en compte les interfaces
vessie/prostate (ou loge prostatique) et rectum/prostate (ou loge
3.6. Responsabilités prostatique) (Fig. 2). Il est actuellement réalisé par l’oncologue
radiothérapeute. Une formation individuelle de chaque méde-
Les responsabilités (ou délégations de responsabilités) pour cin a été réalisée lors de la mise en route de la radiothérapie
chaque localisation ont été définies. Les mises en traitement guidée par l’image. De même, une formation des manipula-
sont obligatoirement contrôlées et validées par un oncologue teurs du poste de traitement a été mise en place et est en cours
radiothérapeute. Pour les contrôles ultérieurs (hebdomadaire) d’évaluation.
basés sur le seul recalage automatique « osseux », l’analyse
et la réalisation du recalage (selon les marges de tolérance 3.8. Spécificités de la tomographie conique de basse
protocolaires) sont déléguées au manipulateur, avec valida- énergie pour la radiothérapie stéréotaxique des cancers
tion médicale différée. Une validation par un radiothérapeute pulmonaires non à petites cellules
est actuellement la règle lorsque les contrôles nécessitent une
analyse des structures anatomiques pour un éventuel recalage Outre l’application des règles et recommandations de la
manuel. radiothérapie des cancers pulmonaires [7], le concept de

Fig. 2. Utilisation des outils de recalage automatique et manuel entre l’image obtenue par la tomographie conique de basse énergie et la scanographie dosimétrique
pour la radiothérapie du cancer de la prostate.
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stéréotaxie pulmonaire impose des règles et des équipements


indispensables pour assurer le positionnement des faisceaux
par rapport au volume cible au degré et au millimètre près
(selon la définition de la Haute Autorité de santé). Cela inclut
une contention performante, une limitation des mouvements
internes par un contrôle de la respiration (gating, tracking ou
compression diaphragmatique. . .), une délinéation très précise
des volumes cibles grâce à l’imagerie adéquate, une distribu-
tion de dose optimale grâce à une irradiation par multiples
mini-faisceaux (collimateurs avec lames d’épaisseur inférieure
à 5 mm) et l’utilisation d’équipements permettant de contrôler
la précision du positionnement. La radiothérapie stéréotaxique
pulmonaire est réalisée au centre Léon-Bérard avec le cadre de
stéréotaxie Stereotactic Body Frame (ElektaTM ) associé géné-
ralement à une compression diaphragmatique [3]. Du fait de
sa simplicité d’utilisation et de la durée de l’irradiation pour
la radiothérapie stéréotaxique, ce système a été préféré au
système d’asservissement respiratoire par blocage actif de la
respiration (active breathing control), utilisé en routine pour
les irradiations avec un fractionnement classique. Le réglage
de la compression diaphragmatique se fait en l’absence de
simulateur classique grâce à la fonction radioscopie de la
tomographie conique de basse énergie (motion-view). La pres-
sion abdominale exercée est ajustée pour limiter l’amplitude
des mouvements des coupoles diaphragmatiques à moins de
1 cm.
La tomographie conique de basse énergie intègre les mou-
vements respiratoires sur une à deux minutes créant un « flou »
autour de la tumeur, apportant ainsi une information du dépla-
cement de la tumeur au cours de la respiration (volume cible
interne). L’imagerie de référence pour le contrôle de positionne-
ment doit donc être aussi proche que possible de la tomographie
conique de basse énergie. Une image de référence du volume
cible interne peut être obtenue par une fusion–recalage de plu-
sieurs scanographies successives ou, actuellement au centre
Léon-Bérard, par l’utilisation du scanographe quadridimension-
nel.
Une imagerie tomographie conique de basse énergie est réali-
sée avant chaque séance d’irradiation. Un recalage automatique
sur les niveaux de gris est ensuite réalisé sur un volume d’intérêt
relativement restreint. Le radiothérapeute et le physicien médi-
cal peuvent ensuite compléter ce recalage automatique de façon
à inscrire à l’aide du recalage manuel la tumeur visible sur la
tomographie conique de basse énergie dans le volume cible
interne dérivé de la scanographie dosimétrique (Fig. 3). Pour
cette modalité et cette indication thérapeutique, la pose de fidu-
ciaire est donc inutile. Les paramètres fournis par l’XVI sont
Fig. 3. Utilisation des outils de recalage automatique et manuel entre la tomo-
entrés dans le logiciel Iguide et transmis à la table hexapod. graphie conique de basse énergie et la scanographie dosimétrique pour la
Une seconde tomographie conique de basse énergie est réali- radiothérapie en conditions stéréotaxiques d’un cancer pulmonaire périphérique
sée pour contrôler les mouvements de la table. Celui-ci pourrait non à petites cellules : a : reconstruction frontale ; b : reconstruction sagittale ;
être remplacé par un système d’imagerie surfacique (en cours c : reconstruction transversale.
d’évaluation).
La tomographie conique de basse énergie permet par ailleurs
de rechercher une modification significative du volume cible lié
à la survenue d’une atélectasie ou à une progression non attendue
de la tumeur, pouvant notamment conduire à une adaptation de
la planimétrie (exceptionnel).
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4. Données cliniques sur la tomographie conique de L’irradiation a pu être réalisée selon le protocole validé lors
basse énergie au centre Léon-Bérard de la dosimétrie pour l’ensemble des patients. Il n’a pas été
observé de modification significative des volumes tumoraux en
4.1. Radiothérapie guidée par l’image des cancers de la cours de radiothérapie. Onze pneumopathies aiguës (de grade 1
prostate pour six et de grade 2 pour cinq patients) et deux fibroses tar-
dives de grade 2 ont été observées. Deux décès sont survenus,
Un protocole d’évaluation médicoéconomique de la radiothé- dont un de cause inconnue cinq mois après la radiothérapie et
rapie guidée par l’image pour les cancers prostatiques non opérés un d’insuffisance respiratoire aiguë dans un contexte de bron-
a été mis en place par l’Institut national du cancer en 2007 dans le chopneumopathie chronique obstructive sévère. Le suivi médian
cadre du programme de soutien aux innovations thérapeutiques (huit mois) était insuffisant pour évaluer le taux de contrôle local
et coûteuses (STIC), avec pour objectif principal d’évaluer un et de survie actuellement.
potentiel bénéfice en termes de survie sans récidive biochimique Les avantages et bénéfices respectifs des différentes moda-
d’un contrôle et recalage du volume cible prostatique quotidien lités de radiothérapie en conditions stéréotaxiques pour les
par comparaison à une fréquence de contrôle hebdomadaire. patients porteurs de tumeurs bronchiques primitives localisées
Dans ce protocole, la tolérance maximale a été définie à 3 mm. non opérées (Cyberknife® ou accélérateur linéaire équipé pour
Hors protocole, appliqué pour les patients opérés ou non, le stéréotaxie) font l’objet d’une évaluation médicoéconomique
repositionnement est réalisé automatiquement en osseux par les prospective dans le cadre d’un appel d’offre de l’Institut national
manipulateurs avec repositionnement du patient (translations) du cancer (INCa). L’objectif principal de l’étude est d’évaluer
en cas de décalage supérieur ou égal à 3 mm. Une formation le contrôle local à deux ans. Une étude physique associée va
des manipulateurs à l’analyse des tomographies coniques de permettre de comparer les distributions de dose des différents
basse énergie pour ces indications a permis de repérer et de systèmes, de comparer les différents modes de prescription,
prendre en compte les situations les plus critiques pour la qualité d’évaluer la performance des différents algorithmes de calcul
du traitement, notamment les variations importantes du volume utilisés, de valider le nombre d’unités monitrices calculé par
rectal. Dans tous les cas, tout recalage fait l’objet d’un contrôle le système de planification des doses et de comparer les doses
et d’une validation immédiate ou différée par le radiothérapeute. réellement réalisées par chacun des centres participant.
Les tomographies coniques de basse énergie avec analyse des
structures anatomiques ont conduit à la nécessité d’évacuation 5. Conclusions et perspectives
des matières ou des gaz du rectum en cas de distension de celui-ci
(environ 10 % de la totalité des séances d’irradiation), la réali- L’accès à l’imagerie de contrôle tridimensionnelle obtenue
sation d’un recalage manuel en complément du recalage osseux par la tomographie conique de basse énergie a eu un impact
(environ 10 % des séances) avec pour 10 à 15 % des patients la important sur l’activité du département de radiothérapie, avec
décision de passer à un contrôle quotidien de positionnement notamment la mise en place de la radiothérapie stéréotaxique
« prostatique ». Exceptionnellement, les contrôles ont conduit extracrânienne et un repositionnement basé sur les structures
à une adaptation de la planimétrie (réalisation d’une seconde anatomiques pour tous les patients traités pour un cancer de pros-
scanographie dosimétrique et nouvelle dosimétrie) lorsque le tate. Pour cette indication, la radiothérapie guidée par l’image
recalage manuel était insuffisant pour assurer la qualité du a permis dans notre expérience d’identifier environ 10 % de
traitement (cas d’une distension rectale lors de la première patients pour lesquelles un repositionnement bidimensionnel
scanographie dosimétrique, non retrouvée lors des séances ulté- osseux seul aurait conduit à une distribution de dose non opti-
rieures). L’accès aux données anatomiques a également permis male pour au moins une séance. L’étude STIC en cours devrait
de mettre en évidence la variabilité de volume mais aussi de la de façon prospective et multicentrique notamment permettre
position des vésicules séminales par rapport à la prostate. d’identifier les patients les plus à même de bénéficier de cette
En cas de contrôle quotidien, la dose d’irradiation cumulée nouvelle technologie.
liée à l’imagerie utilisant la tomographie conique de basse éner- La limite pour la diffusion de cette technique est essentiel-
gie est d’environ 1 Gy, dose prise en compte dans la planimétrie lement d’ordre économique, essentiellement lié au surcoût de
pour le respect des contraintes de doses aux organes à risque. l’investissement. En effet, la mise en place de la radiothérapie
guidée par l’image et son utilisation en routine sont relativement
simples par comparaison notamment à celle de la radiothérapie
4.2. Radiothérapie guidée par l’image pour la conformationnelle avec modulation d’intensité. En dehors des
radiothérapie en conditions stéréotaxiques des cancers situations où un recalage manuel est réalisé, l’utilisation des
pulmonaires outils de recalage de la tomographie conique de basse énergie
permet un gain de temps significatif par comparaison aux outils
Trente-quatre patients ont été traités entre août 2006 et d’imagerie bidimensionnelle pour les contrôles de qualité de la
décembre 2008, dont 32 pour des cancers pulmonaires périphé- radiothérapie, avec une plus grande précision et sécurité ainsi
riques non opérés de stade T1T2 N0 M0 et deux pour métastases qu’une réduction des doses délivrée. Ces aspects économiques
solitaires pulmonaires périphériques. Quatre fractions ont été seront précisés par deux études en cours (radiothérapie guidée
réalisées avec une dose médiane de 48 Gy (40 à 68 Gy) prescrite par l’image prostate, radiothérapie stéréotaxique pulmonaire) et
sur l’isodose 70 ou 80 %. une programmée en 2009 (tomothérapie pour les cancers ORL).
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La radiothérapie guidée par l’image complète permet [4] Ghilezan M, Yan D, Liang J, Jaffray D, Wong J, Martinez A. Online image-
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