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Université d'Alger - Faculté de Médecine Ziania

Département de Médecine Dentaire


CHU MUSTAPHA
Service d'Odontologie Conservatrice-Endodontie
Pr C Baba Mehdid

Cours d’IMAGERIE 3ème année médecine dentaire

Tomographie volumique par


faisceau conique : Cône Beam

DR Y. GUERRACHE-KOUYANE

2023/2024
Introduction
L’établissement d’un diagnostic précis en odontostomatologie passe par un examen clinique
minutieux, souvent complété par des examens complémentaires radiologiques.
En imagerie dento-maxillaire, on différencie deux types de techniques :
Les techniques 2D : rétro alvéolaire, rétro coronaire……..panoramique ou
orthopantomographie (OPT).
Les techniques 3D plus sophistiquées comme le scanner et plus récemment le Cône beam
L’avènement du Cône beam vers la fin des années 90 représente une innovation majeure par
rapport au scanner.
Le Cône beam ou CBCT (Cône Beam Computed Tomography) appelé encore tomographie
volumique numérisée à faisceau conique, est une technique d’imagerie sectionnelle 3D en
plein essor.

1. Principe physique du CBCT


Le faisceau de rayons X, de forme conique, est atténué en traversant l’objet à explorer avant
d’être analysé par un système de détection.

Le tube et le système de détection tournant autour du sujet (180 à 360° selon les
constructeurs), plusieurs centaines d’analyses (prises de vues, clichés ou projections) sont
réalisés dans les différents plans de l’espace, permettant, après transmission des données à
un ordinateur, la reconstruction volumique d’un cylindre contenant l’objet (ici, les maxillaires).

L’émetteur de rayons X et le détecteur sont solidaires et alignés.


Le volume étudié est composé de voxels dont le côté est de la taille d’un pixel, mesuré en
micromètres (μm), chaque voxel obtenu mesurant entre 70 et 500 μm de côté (taille du pixel).

2. LES ETAPE D’ACQUISITION DU CBCT


2.1. Acquisition des données :
-Le patient est positionné debout ou assis (la plupart des appareils sont verticaux) ou couché
sur un lit (le lit s’engageant au centre d’un anneau porteur du couple tube-capteur plan), - la
tête maintenue dans une têtière.

- Les constantes d’acquisition sont définies : champ de vue, de 4x4cm à 30x30cm selon les
machines, de même que l’exposition : tension (de 50 à 110 kV), intensité (mA) et temps de
pose, en fonction de la corpulence du sujet et de la résolution souhaitée.

2.2. La réalisation initiale d’un topogramme (scout view) :


Consistant en la prise de deux clichés digitaux (profil et face) pour le centrage, l’orientation et
la délimitation du volume d’acquisition.
2.3. L’acquisition du volume :
S’effectue ensuite en un temps variable selon les machines et les programmes de 9 à 30
secondes, pendant lesquelles le patient est prié de ne pas bouger ou déglutir, Ce temps
correspond à l’acquisition des données brutes.
2.4. Travail informatique de l’image :
L’acquisition des données brutes n’est qu’un premier temps dans la chaîne de génération de
l’image. Les données brutes sont stockées et transformées en volume exploitable par
reconstruction d’image.

2.4.1. Reconstructions primaires : du volume exportable. On distingue :

2.4.1.1. Reconstructions bidimensionnelles «directes» (2D, axiales, frontales


et sagittales « directes », obtenues à partir des données brutes) ;
2.4.1.2. Reconstructions DICOM (Digital Imaging and Communication in
Medicine), images reconstruites selon le plan axial, autorisant
l’exploitation de logiciels spécialisés permettant d’obtenir des
reconstructions secondaires de deux types : multiplanaires et
dentascanner.
2.4.1.3. Le transfert des données DICOM sur CD ou par Internet : Les images
bidimensionnelles et tridimensionnelles obtenues peuvent être
imprimées sur film radiologique ou papier, idéalement en taille réelle.

2.4.2. Reconstructions secondaires ou « Rétroreconstructions ».

Obtenues à partir des reconstructions primaires axiales, elles permettent l’obtention d’images
en Ultra-Haute Résolution (UHR) à voxels de 70 à 80μm d’arête.
Ces images plus définies sont potentiellement plus bruitées et exigent des outils de « filtrage
» du bruit pour leur exploitation. Elles sont utiles surtout en pathologie endodontique
(diagnostic canalaire et des fêlures, d’un 4ème canal MV2 des molaires maxillaires, trajet
fistuleux d’un foyer d’ostéite …), et pour le diagnostic d’ankylose limitée ou «débutante».

2.4.3. Reconstructions tridimensionnelles (3D).

Elles sont de plus en plus exploitées, à visée chirurgicale pré et peropératoire en


implantologie, parfois orthodontique pour l’étude céphalométrique, pour visualiser les
rapports de dents ou structures incluses ou afin de plus facilement appréhender une
dysmorphie ou encore pour la modélisation prothétique.

-L’imagerie 3D en Rendu de Volume (Volume Rendering ou VR) tend à s’imposer, permettant


d’isoler des structures de densité donnée par seuillage, Par exemple, le seuillage osseux
permet d’analyser les structures osseuses avec une transparence variable et le seuillage
dentaire, permet d’isoler la denture, effaçant les structures osseuses et les parties molles.
-L’imagerie 3D de surface (Surface Rendering ou SR) ne montre que les surfaces cutanées ou
osseuses, ne permettant pas l’analyse des structures internes.

3. LES FLUX DE TRAVAIL NUMÉRIQUES (workflow) REPOSANT SUR LE CBCT


Les flux de travail numériques, que ce soit pour la pose d’implants ou pour le dessin d’un
sourire incluant le design gingival, comprennent généralement plusieurs étapes, avec un rôle
dominant pour l’imagerie.
La chaîne d’imagerie comprend :
o l’acquisition CBCT
o la segmentation de l’image pour la génération d’un modèle anatomique 3D
o la superposition des images CBCT 3D acquises avec les données :
 De la caméra (scanner) intra-buccale (IOS),
 L’enregistrement dynamique de l’occlusion et
 Éventuellement le balayage 3D du visage,
avec pour objectif final la fusion d’images multimodales (également appelée superposition ou
enregistrement) de toutes les images pour parvenir à la création d’un patient virtuel

4. Les paramètres influençant la qualité de l’image du CBCT


Aujourd’hui, plus de 280 modèles CBCT provenant de près de 50 fabricants sont disponibles
dans le monde entier.
Ceci explique que les caractéristiques des images puissent varier considérablement, tant au
sein d’une même machine qu’entre les machines.
De ce fait, il est nécessaire de connaitre les caractéristiques d’une machine et savoir l’utiliser,
 Les caractéristiques du tube à rayons X et du détecteur choisi.
 Les paramètres d’exposition typiques tels que le courant (mA) et la tension (kV) du
tube…
 Le champ de vision (FOV, Field Of View), avec des options au sein et entre les appareils
CBCT allant de 20 × 20 mm à 300 × 300 mm FOV.
Les appareils CBCT dentaires peuvent offrir une variété de champs de vision prédéfinis, allant
généralement du balayage :

A une partie de la mâchoire supérieure ou inférieure (champs sectorises : ≤ 6 × 6 cm) (a)


A la mâchoire supérieure uniquement ou inférieure (champs mono-arcade : ≥ 6 × 6 cm, ≤ 12 ×
5 cm) (b),
Des mâchoires supérieure et inférieure (champs moyens : ≥ 8 × 8 cm, ≤ 12 × 12 cm) (c)
Ou à la mâchoire inférieure entière (grand champ : ≥ 13 × 13 cm, réservé aux radiologues) (d).
5. Facteurs influençant la formation de l’image radiologique et le niveau de
dose absorbée par le patient

Le kilo-voltage (KV) : ce paramètre influe sur le pouvoir de pénétration des photons X dans la
matière. Plus l’objet sera épais et/ou dense, plus on aura besoin d’augmenter les KV.
Les milli-ampères (mA) : ce paramètre influe sur le nombre de photons X générés
Le temps d’exposition : quelques millisecondes pour un cliché intra-oral, quelques secondes
à une grosse dizaine de secondes en panoramique dentaire ou cône beam. Il est à noter que
plus on réduit le temps d’exposition plus l’image devient floue.
La surface irradiée : (le champ du cône beam). Son unité est le gray (Gy) ou milli-gray (mGy).
La dose efficace : (son unité est le microsievert : μSV) qui est une dose pondérée par la
radiosensibilité des organes et le type de rayonnement. La dose efficace est une somme
pondérée des doses absorbées par chaque organe. Plus la dose est importante mieux serait la
résolution de l’image radiologique.
L’étalon de dosimétrie en radiologie dentaire est le PDS (produit-dose-surface) ou DAP (Dose
Area Product). Son unité est donnée en mGy.cm2.
Exemples :
Un panoramique dentaire délivre entre 100 et 120 mGy.cm2 pour un adulte moyen ; un cône
beam des deux mâchoires (80 × 80 mm) en mode « classique » délivre un DAP moyen de 300
à 1 200 mGy.cm2 pour le même adulte moyen selon les paramètres choisis.

6. La dose d’irradiation pour un examen Cône beam


Elle est définie par les études dosimétriques comme la moins irradiante des techniques
sectionnelles. Les doses d’exposition du Cône Beam sont 1.5 à 12 fois plus faibles par rapport
au scanner médical conventionnel.

Elles restent cependant 4 à 42 fois plus fortes que les clichés panoramiques.
La technique CBCT répond au principe ALARA (As Low As Reasonably Achievable) de la
législation nationale de radioprotection qui demande d’appliquer la plus faible dose
nécessaire.
Le CBCT permet de localiser le champ d’examen sur la zone à étudier (un secteur dentaire,
une arcade complète), évitant ainsi d’irradier inutilement les autres parties du crâne.
Technique Cliché intra-buccal Cliché panoramique Cône beam

Dose d’irradiation 1 à 8 mGy 3 à 7 mGy 3 à 25 mGy


absorbée en Gray

7. Les indications du cône beam

Technique d’imagerie de référence en odontostomatologie, le cône beam est indiqué dans la


plupart des cas où une imagerie tridimensionnelle s’impose :
 Implantologie ;
 Dents de sagesse posant un problème anatomique avant extraction ;
 Pathologie orthodontique et malformative imposant une imagerie 3D (inclusions, agénésies,
dent surnuméraire, fentes, dysmorphies…) ;
 Traumatismes dentoalvéolaires ou maxillaires en dehors des traumatismes graves de la face,
indiquant plutôt un scanner ;
 Pathologie endodontique (anatomie canalaire, lésions d’origine endodontique : leurs causes,
leurs rapports et conséquences, fêlures…) ;
 Endodontie guidée dans le cas de canaux calcifiés
 Endodontie chirurgicale guidée
 Pathologie parodontale ;
 Images claires et denses des maxillaires (diagnostic et bilan) incluant la pathologie tumorale
et kystique intra-osseuse ;
 Sinusites d’origine dentaire ou implantaire et pathologie des sinus en général ;
 Pathologie osseuse des ATM.

8. Avantages du Cône beam

Confort pour le patient: L’acquisition est plus simple, plus rapide et plus confortable pour le
patient qui n’est pas obligé d’être en position allongée mais plutôt debout comme pour le
cliché panoramique. Une seule rotation de l’appareil est effectuée autour du patient.

Dosimétrie et irradiation : A l’inverse du scanner, le Cône beam est considéré comme une
technique « low dose », permettant de balayer en un seul passage l’ensemble du volume à
explorer, en étant moins irradiant que la tomodensitométrie classique. Le CBCT délivre une
dose de radiation ionisante jusqu’à 6 fois plus faible qu’un même examen réalisé par scanner.

Variétés d’images, résolution spatiale et netteté : Le CBCT permet d’obtenir différentes vues
sur une même image, à savoir des coupes frontales, sagittales, coronales et obliques.

Sensibilité aux artéfacts : Le Cône beam est moins sujet aux artéfacts métalliques surtout au
niveau radiculaire que le scanner.

Coût : Le CBCT est nettement moins coûteux que le scanner.

9. Limites du cône beam

Acquisition et travail en console


Lors de la phase d’acquisition par CBCT le patient est en position debout, il est donc difficile
de conserver une immobilité le temps de la rotation de l’appareil (20 à 30s). Le risque de
bouger est donc significatif, ce qui peut alors entrainer des artéfacts cinétiques
Tous les appareils Cône beam devraient comporter un système de contention efficace afin de
limiter ce risque de déplacement.
Par ailleurs, le Cône beam nécessite un temps de travail plus long pour la reconstruction 3D
des images.
Résolution en densité, en contraste
Le Cône beam présente donc une faible résolution en en contraste par rapport au scanner.
Si le Cône beam offre une résolution supérieure au panoramique dentaire et au scanner, son
échelle de densité est beaucoup moins large du fait de sa faible irradiation.
La qualité d’image qu’il fournit n’est pas suffisante pour la mesure de la densité des tissus
calcifiés et l’analyse des tissus mous ce qui limite ses indications.
Conclusion
L’utilisation justifiée du CBCT nécessite une sélection de protocoles spécifiques au patient et
orientés vers l’indication, afin de permettre une imagerie optimisée.
Au fil du temps, une législation a été développée pour encadrer l’utilisation du CBCT,
notamment l’obligation de formation régulière.

Bibliographie :
1. MARIELLE OLIJNYK. Apport du CBCT dans la prise en charge des résorptions radiculaires.
Rev Odont Stomat 2014 ; 43:149-161 MAY 2014.
2. Revue Clinic. CBCT 2.0. NOVEMBRE 2022. N°419.
3. Dr Norbert BELLAICHE, Paris. Cône beam pratique en odontostomatologie
GENERALITES : principe, technique, qualité d’image, artéfacts, types d’appareil,
indications.
4. Lionel CARDONA. Intérêts du cône beam lors du diagnostic et du traitement des lésions
inflammatoires périapicales d’origine endodontique. THESE N° 2017 LYO 1D 63.
5. Dr Norbert BELLAICHE. LE CONE BEAM EN ENDODONTIE. LS N°61 - mars 14.

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