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CMS5 Philosophie Morale-Liberte Kant

Philosophie Morale (Université Lumière-Lyon-II)

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PHILOSOPHIE MORALE
LA LIBERTÉ SELON KANT
Nous aborderons la liberté chez cet auteur par 8 strates parce qu’il n’est ni
univoque, ni homogène et peut faire l’objet de plusieurs lectures. Delbos, Philonenko
ont très tôt souligné l’ambiguïté du concept kantien de liberté et l’incohérence
apparente de ce concept. On montrera d’abord qu’il y a bien une tension entre
différents sens de la liberté chez Kant, et derrière ces 8 sens il y a sinon une
cohérence, sinon une univocité, ou du moins une construction logique qui préside à
l’examen de ces 8 statuts de la liberté. Nous montrerons aussi qu’il y existe malgré
tout une logique. Nous aborderons ces 8 strates dans un ordre croissant d’intensité du
concept. Le 8ème sens, fondamental pour les 7 autres, qui fait office de racine
originaire commune, la liberté fondamentale, première ou originelle, dont Kant traitera
assez tardivement dans La religion dans les limites de la simple raison. Ces 8 sens
peuvent s’enchainer selon une vue transversale au système.
Le concept de liberté est un des plus difficile à cerner, pas simplement au sein de
la philosophie morale de Kant, mais aussi précisément quand on prend en vue
l’ensemble du système kantien, c’est sans doute ce concept de liberté qui apparait le
plus polyvalent et qui subit au sein de ce système le plus de métamorphoses. Si on
lisait Kant et son concept de liberté depuis le système hégélien, dialectiquement, on
pourrait dire qu’il n’y a pas tant des statuts de la liberté que des métamorphoses, c’est
à dire des passages dynamiques ; on pourrait montrer qu’il n’y a pas tant de
contradiction mais une évolution entre eux, entre ces 8 figures de la liberté, qu’il faut
entendre la façon dont ces 8 figures s’engendrent de manière dynamique. Le procédé
historique de l’écriture du système accompagne et sous-tend la doctrine kantienne de
ces 8 figures de la liberté. On verra d’ailleurs que Kant s’attache à enchaîner deux
voire trois figures de cette liberté. Incontestablement nous avons affaire à l’un des
concepts les plus complexes de son système : à cela s’ajoute que selon les oeuvres et
selon le moment de conception de ces oeuvres, la liberté prend un sens différent. De
plus, à l’intérieur d’une même oeuvre, la liberté peut revêtir différemment sens.

8 statuts de la liberté :
I. Le premier, le sens le plus large et le plus impropre, le plus général, c’est la
liberté comme passion naturelle ou comme tendance innée inscrite dans la nature de
l’homme et de ce fait ce manifesterai dès l’état de nature – l’état de nature chez Kant,
comme chez Rousseau, n’est qu’une fiction : l’hypothèse d’un état de nature a une
fonction heuristique qui doit révéler les propriété de la société civile. Aucun des deux
auteurs ne le considère comme un état primitif.

II. Le second sens est de faire de la liberté l’objet d’une expérience


empiricopsychologique, expérience concernant le temps c’est à dire la forme du sens
interne. L’expérience empirique chez Kant donne lieu à deux sciences, la physique qui
porte sur les corps et leurs mouvements dans l’espace, et l’expérience psychologie,
relative au sens interne, entendue comme une science empirique étudiant la
succession des états d’âme ou des représentations psychiques, des états mentaux
tels qu’ils se présentent à notre conscience, et ce dans le temps, cette forme a priori
qu’est le temps.

III. Le troisième sens est que la liberté ne serait qu’une hypothèse ou une
supposition pour la raison théorique pure, mais que cette dernière ne parvient jamais à
prouver dans sa réalité objective, dans son existence réelle ou effective – real ≠
wirklich. La liberté est une hypothèse produite par la raison pure théorique ou
spéculative mais qu’elle
ne parvient jamais à
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établir l’existence de manière objective. C’est ce statut qui nous intéressera le plus
longuement. Il est susceptible d’être décrit négativement, mais aussi positivement en
en faisant une idée transcendantale comme le fait Kant dans la première critique, dont
l’objet reste théoriquement problématique c’est à dire seulement possible pour la
raison connaissante.

IV. Le quatrième sens est que la liberté apparait comme principe régulateur que la
raison pure pratique postule, c’est à dire suppose nécessairement en vue de ses
propres fins pratico-morales. La liberté devient alors pour la raison pure pratique
nécessaire et seulement subjectivement. La loi morale, en tant que fait rationnel aura
pour fonction de remplir la mission que la raison théorique n’a pas pu remplir, celle de
prouver la liberté.

V. Le cinquième statut est que la liberté n’est pas seulement un postulat de la


raison pure pratique parce quelle est capable d’aller au delà, elle est capable d’en
prouver la réalité objective, ou l’existence de la liberté en l’homme et ce au moyen
d’un fait pur, qui est le fait de la loi morale.

VI. Le sixième sens est qu’on peut distinguer dans la liberté une liberté plus
fondamentale comme capacité de choisir entre la loi morale et son contraire, c’est à
dire la loi de la nature. Ce sens de la liberté, le plus faible, la capacité de choisir entre
le bien et le mal, entre la loi morale et la loi de la nature, ou la liberté comme capacité
de choisir entre le bon et le mauvais pratique est sans doute la liberté la plus obscure,
la plus insondable.

Cette variété de points de vue sur la liberté explique que la doctrine kantienne de
la liberté est put être jugée non seulement obscure, car il y manque l’unification d’un
seul sens fort de la liberté, mais même elle fut jugée contradictoire. Delbos et
Philonenko ont soulevé les tensions inhérentes au concept kantien, concept que Kant
n’a cessé de remanier et requalifier à la fois dans son sens et son statut – Victor
Delbos, La philosophie pratique de Kant, p.192 - 193

Alexis Philonenko, La philosophie critique de Kant, p.139 - 140 : « La notion de


liberté paraît … répondre chez Kant à une double exigence. D’une part, Kant assimile
la liberté à la loi [en son universalité, geselt] et la sépare par là de l’individualité, qu’il
semble réduire à l’existence empirique, d’autre part, il considère la liberté comme
constitutive de notre caractère, qui peut être mauvais ou bon. Mais ne réunit-il pas en
ceci, sous le nom de liberté, l’autonomie de la volonté raisonnable et un pur pouvoir de
choix consistant en une spontanéité absolue ? Sans doute le caractère commun de
ces deux liberté est-il l’indépendance [unabhängigkheit] par rapport à la suite des
événements empiriques mais elles n’en demeurent pas moins distinctes et parfois
opposées. Le problème de la liberté … est une des plus grande difficulté de la morale
rédigée par Kant » Distinguons cependant choix et spontanéité, qui est chez Kant est
un concept cosmologique et transcendantal, qui est le pouvoir qu’elle a d’initier des
choses. D’un côté on a un sens proprement kantien, la liberté comme autonomie, et de
l’autre un sens plus classique, comme chez Descartes où la liberté est une liberté de
choix. On pourrait donc dire qu’il y a au moins deux pôles dans la liberté, d’abord le
sens positif, autonomie, et une liberté qui est celle de notre pouvoir originaire de choix
et que Kant appeler l’énigme insondable de la liberté dans l’homme, le mal radical,
cette possibilité de choisir aussi bien le bon principe et le mauvais principe, radical en
tant qu’il est la possibilité – c’est un peu le mal métaphysique chez Leibniz, condition
de possibilité des deux autres maux, les maux physiques et moraux. Le mal radical
vient supplanter le mal métaphysique et il a une forme morale ou amorale puisqu’il est
défini comme capacité de choisir.

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On peut voir trois aspects de la liberté chez Kant. Le premier appartient aux
couches les plus anciennes de la Critique de la raison pure et évoqué dans le chapitre
du Canon de la Raison Pure quand il distingue un troisième sens de la liberté au sens
faible, la liberté pratique au sens où elle constitue l’objet d’une expérience empirico-
psychologique, une expérience interne. C’est ici le seul texte où il affirme que la liberté
est une affaire d’expérience. Le second sens c’est la liberté comme idée
transcendantale et/ou la liberté comme idée cosmologique, ce qui occupe Kant dans la
troisième des quartes antinomies de la Critique de la raison pure, et il désigne par là
une causalité non pas comme celle qu’on connaît ordinairement, la causalité naturelle
mais son opposé : la liberté est une causalité intelligible, nouménale. Enfin, le
troisième sens qui se dessine est celui au sens fort et positif d’autonomie morale,
entendu au sens de pratique au sens fort, la liberté comme obéissance du vouloir au
fait pur de la loi morale.

II. LIBERTÉ CIVILE ET AUTONOMIE CIVILE


ou la nécessaire liberté de pensée et la liberté d’expression, où
l’on distingue la liberté de pensée, ou d’opiner et la liberté du
penser, ou la faculté qu’a la raison de se donner à elle même
ses règles de connaissance.

La philosophie politique de Kant se décline en gros à partir de L’idée d’une


histoire universelle du point de vue cosmopolitique (1784) et Qu’est-ce que les
Lumières ? jusqu’à La Doctrine du Droit (1797) et Théorie et Pratique (1793). La liberté
est un pilier indispensable au maintien de la société civile et en particulier de l’état
dans sa forme la plus parfaite, pour Kant la forme républicaine, et en particulier, la
liberté de pensée. A cet égard, Kant distingue dans le texte Théorie et Pratique, en
particulier dans la section II, en Académie 8 p.290, dans une première cartographie
des sens de la liberté, où il distingue la liberté civile et l’autonomie civile. Dans l’état
juridique civil, dans l’état de société civile se caractérisant par une justice distributive,
le citoyen jouit de trois droits fondamentaux, qui sont d’ailleurs aussi bien des droits de
l’Homme que des droits du citoyen stricto sensu. Il attribue à tout citoyen donc le fait
de pouvoir jouir de trois droits fondamentaux qui sont dans l’ordre : la liberté de
l’Homme que Kant appellerai plus tard en 1795 la liberté du citoyen ; l’égalité des
sujets ; et enfin l’autonomie civile c’est à dire l’autonomie non pas de tous les citoyens
mais des seuls citoyens actifs. Ces droits ne sont pas à proprement parler des droits
de l’homme mais plutôt des fondamentaux à tous les droits de l’Homme possibles, ils
sont conditions de possibilité pour toute doctrine des droits de l’homme.

Kant a évolué, sa doctrine a été remanié au sujet des deux statuts de la liberté
civile. Il existe deux grands stades. Le premier en 1793, dans Théorie et Pratique,
2ème section (période contemporaine de la Terreur en France), où il distingue trois
droits fondamentaux — qui définissent le status civilis (condition civile) de l’homme —
ou plutôt des fondements ou principes à priori ou conditions de possibilité et légitimité
pour tout droit de l’homme possible ; à la racine, un triangle formé de la morale, l’idée
de droit et l’idée d’humanité, donc l’idée du droit de l’humanité, droit inné naturel, donc
a priori, originaire ou fondamental qui s’attache à la nature de l’homme, son essence,
que Kant appelle la liberté. Cette liberté se fragmente en trois droits de l’homme qui
concerne le droit civil à l’intérieur de l’état, sorte d’escalier qui va de la liberté au droit
positif : du plus proche
de la liberté, le
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plus fondamental, c’est la liberté des hommes ; ensuite vient l’égalité des sujets
(l’égalité est bien un attribut du sujet) ; et enfin vient l’autonomie des citoyens actifs.
On a trois binômes qui forment la structure ou le tronc de la doctrine kantienne du
droit. — Ne confondez surtout pas la Liberté qui est au niveau de la racine ; la
liberté des hommes qui consiste à choisir librement son propre bonheur, un
droit de choisir librement les modalités de son bonheur ; et la liberté des
citoyens actifs qui consiste à élaborer les lois civiles de l’état ou du moins à y
participer indirectement. Les branches qui partent de ce tronc sont les droits de
l’homme et du citoyen, c’est les branches du droit positif, qui sont d’un nombre indéfini.
Le second stade en 1795, dans le Projet de Paix perpétuelle, il maintient se
schéma en introduisant une différence, qui intervient au niveau 1, le niveau de
transition entre la liberté et le tronc, au niveau de la liberté des hommes. On retrouve
donc les trois droits fondamentaux, on garde les deux derniers — égalité des sujets et
autonomie des citoyens actifs — mais change la liberté des hommes en liberté civile.
Pour lui, « la liberté des hommes dans le choix de leur propre bonheur » est un terme
trop ambigu et trop proche du « droit au bonheur » et l’appelle donc droit de liberté
civile, c’est à dire le droit d’obéir aux lois civiles auxquelles on a donné son
consentement. Ce que veut dire Kant, c’est que l’expression de 1793 étant trop
ambigu, on la remplace par quelque chose de plus restreint, mais il y a quand même
une continuité : la liberté d’obéir aux lois est compatible avec le choix de votre
bonheur, car on peut choisir de réaliser son bonheur en obéissant aux lois (mdr). Kant
est l’un des derniers à confondre société civile et État, comme le faisaient les
Lumières ou Hobbes ou Locke. En revanche, Hegel distinguera pour la première fois
de façon nette et définitive, la société civile bourgeoise et l’État — staat.

Projet de Paix Perpétuelle


• « Les membres d’une [société civile] (societas civitas) c’est à dire de l’État s’appellent les
citoyens (cives) et les attributs juridiques indissociables de leur essence sont, premièrement, la
liberté légale de n’obéir à aucune autre loi qu’à celle à laquelle ils ont donné leur consentement,
deuxièmement, l’égalité civile … et enfin l’attribut de l’autonomie civile qui consiste à ne
devoir son existence et sa conservation qu’à ses propres droits et à ses propres forces comme
membre de la république » Membre de la république, dans le vocabulaire kantien, ça
veut dire que seuls les citoyens actifs, c’est à dire les citoyens qui jouissent de cette
autonomie civile, peuvent élaborer les lois civiles. Ce statut d’acteur ou d’agent de la
loi, de législateur (Rousseau) fait des citoyens actifs des membres de l’état, c’est à
dire des organes, des membres organiques du corps politique total (Rousseau) en
vertu de leur fonction de législateur. Le terme de membre se distingue chez Kant du
simple terme de « partie ». Les parties sont simplement les sous ensembles d’un tout
qui sont séparables, les parties constituent un tout mécanique, elles s’additionnent en
étant extérieures les unes aux autres et ne constituent au mieux qu’un tout mécanique,
une somme analytique d’atomes, mais jamais ne sont membres d’un tout. Pour être
citoyen actif, législateur, pour bénéficier de cet attribut qu’est l’autonomie civile, il faut
être membre organique de l’état. Les « parties » seront citoyens passifs et n’ont pas le
droit de légiférer.

Théorie et Pratique, section II, AK 8, p.290


• Kant présente trois binômes qui constituent les trois piliers de l’État ou société
civile ou république, il énumère les trois attributs essentiels de la condition civile. « La
condition civile considérée simplement comme condition juridique, est fondée sur les principes
à priori que voici : premièrement, la liberté de chaque membre de la société comme homme
[individu considéré dans sa dimension sensible, l’homme phénoménal], deuxièmement
l’égalité de chaque membre de la société avec tout autre comme sujet , troisièmement
l’autonomie de tout membre comme citoyen. Ces principes sont moins des lois que donne l’État
déjà institué que des lois selon lesquelles seule l’institution d’un État est possible … » Ces
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trois principes ne sont pas tant déjà des lois qu’on pourrait trouver dans un état déjà
construit mais sont des principes d’après lesquels toute loi de l’état peuvent voir le
jour. Il n’y a pas d’État républicain possible si le législateur n’inscrit pas dans la
Constitution, la loi fondamentale de l’état, ces trois droits là. En effet Kant considère à
partir de 1793 et même encore en 1795 et jusque dans la Doctrine du Droit que ces
trois droits là fonde la possibilité même de tout État. Dans la Doctrine du Droit, il
considérera la liberté, l’égalité et l’autonomie comme les trois principes fondamentaux
à priori de la citoyenneté.

Le premier droit, la liberté des hommes, c’est la capacité qu’on les individus non
pas d’être heureux mais de choisir librement le bonheur qui leur convient, ce n’est pas
un droit au bonheur mais un droit de choisir librement l’idéal de l’imagination que
chacun en tant qu’homme peut se donner à lui-même comme bonheur. Attention ce
n’est pas un idéal régulateur de la raison mais c’est un idéal de l’imagination. Ce
premier droit c’est simplement d’imaginer librement l’idéal d’imagination qu’est le
bonheur, mais rien ne garantit ni dans les lois civiles ni dans la Constitution le bonheur
des hommes. En effet, pour Kant, la pire des choses serait, quand on est chef de
l’État, de vouloir garantir aux hommes un droit au bonheur car cela supposerait que le
Souverain lui-même devrait être en mesure de le garantir selon une formule unique ou
uniforme qui serait sa propre définition du bonheur. Il entrevoit ici le danger suivant : si
on admettait dans l’état un droit au bonheur, cela signifierai que le Souverain pourrait
dicter aux hommes leur bonheur, ou la façon dont ils devraient être heureux. En
d’autres termes, le Souverain pourrait s’immiscer dans la vie privée des sujets et leur
dicter la façon d’être heureux. Il serait immanquablement un despote paternaliste. Pour
Kant il n’y a pas de droit au bonheur parce que la porte serait grande ouverte au
paternalisme despotique.

• Théorie et Pratique, section II, AK 8, p.290 : « Personne ne peut me contraindre à


être heureux d’une certaine manière … Il est permit à chacun de chercher le bonheur dans la
voie qui lui semble, à lui, être la bonne, pourvu qu’il ne nuise pas à la liberté qui peut coexister
avec la liberté de chacun selon une loi générale possible. Un gouvernement qui serait fondé sur
le principe de la bienveillance envers le peuple, tel celui du père envers ses enfants, c’est à dire
un gouvernement paternel où les sujets, tels des enfants mineurs incapables dé décider de ce
qui leur est véritablement utile ou nuisible sont obligés de se comporter de manière uniquement
passive, afin d’attendre uniquement du jugement du chef de l’état la façon dont ils doivent être
heureux … un tel gouvernement est le plus grand despotisme que l’on puit concevoir
(constitution qui supprime toute liberté des sujets qui dès lors ne possèdent plus aucun droit) »
On voit ici que pour Kant, admettre un droit au bonheur que le souverain puisse
garantir, qui soit un droit opposable, c’est admettre une ingérence législative et
exécutive dans la vie privée des sujets, c’est ouvrir la porte au pire gouvernement qui
soit, puisqu’il serait une forme de despotisme paternaliste. Cette critique du
paternalisme despotique, de ce régime politique où les sujets sont considérés comme
des enfants, est le corrélativement d’une défense des libertés fondamentales de
l’homme, de sorte que Kant refuse un droit au bonheur pour mieux protéger préserver
ou privilégier ce droit au libre choix du bonheur.

Le second droit, l’égalité des sujets, désigne leur commune égalité de


soumission puisque tous les sujets dans l’état sont par définition soumis à la loi du
Souverain (souverain législateur). Le terme de sujet correspond à une catégorie du
droit latin, la catégorie des « subditi ». Kant considère donc que tous les sujets sont
également soumis à la loi et que tous doivent obéissance à la loi quelque soit leur rang
ou leur conditions personnelles. Ce n’est pas une invention de Kant mais une reprise
des révolutionnaires français et il s’inspire notamment du décret de l’abolition des
privilèges de 1789 où
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il est dit que tous les sujets sont égaux en droits. Cette égalité devant la loi n’est pas
incompatible avec une grande inégalité de conditions. Kant n’est pas favorable à un
système égalitariste, qui nivellerai, uniformiserai les conditions de vie des sujets. Il n’y
a cependant pas de privilège qui puisse se transmettre héréditairement, il est contre la
transmission héréditaire des privilèges. Dans l’état républicain tel que le conçoit Kant,
on a l’idée d’une promotion au mérite. Il n’est pas opposé aux privilèges, ni à
l’acquisition de nouveaux privilèges (tant qu’on le mérite), mais à la transmission
héréditaire de ces derniers. Il dessine donc une république méritocratique où tous les
sujets sont invités par leurs efforts propres à acquérir des privilèges. La formule de
l’égalité de tous face à la loi, égale soumission des sujets à l’autorité des souverains.

Le troisième droit, l’autonomie des citoyens actifs qui appartient seulement à


ces derniers et non pas aux citoyens passifs, constitués de trois catégories qui sont les
femmes (naturellement, genre vraiment par nature), les mineurs et la catégorie un peu
floue de ceux qui sont dépendants professionnellement, ou tous ceux qui n’ont pas
d’indépendance professionnelle, c’est à dire qui ne sont pas leurs propres maîtres (en
aucun cas c’est un critère de richesse mais d’autonomie professionnelle). Cela
concerne principalement les serviteurs, les domestiques qui sont simplement nourris et
logés, sans salaire. Les junker dans la Prusse occidentale du 18ème sont des
propriétaires terriens qui emploient parfois des centaines de domestiques qui n’ont pas
d’indépendance ni économique, ni financière, ni professionnelle. Ces trois types de
citoyens passifs sont caractérisés par le fait qu’ils sont simplement protégés par la loi,
mais n’ont pas en retour le pouvoir d’élaborer la loi ni directement ni indirectement. En
revanche et par opposition les citoyens actifs sont reconnaissables d’après le critère
de leur autonomie professionnelle : peu importe l’importance du salaire ou de la
fortune, pour être citoyen actif il ne suffit pas simplement d’être riche, mais, si il faut
posséder suffisamment pour vivre, le critère qui définit la dimension active de la
citoyenneté, la dimension législatrice des citoyens, c’est l’autonomie professionnelle.
De sorte que pour Kant, même de très petits salariés peuvent être citoyens actifs, si ils
ne dépendent pas dans la maîtrise de leur ouvrage d’un maître qui pourrait décider à
leur place. En effet, en tant que domestique on a pas d’esprit critique puisqu’on est
trop dépendant du maître et par peur d’être rejeter par le maître duquel on dépend, on
ne saurait édicter des lois pour nous même et on défendrait les intérêts du maître
(mdr). Pour prémunir donc de l’obligation de faire les lois que Kant invente cette
catégorie des citoyens passifs.
Parmi les citoyens actifs, il y a ceux qui le sont directement et ceux qui le sont
seulement indirectement. Les premiers sont eux-mêmes législateurs ou parlementaire
(députés, sénateurs, siègent en assemblées), les seconds sont plutôt les grands
électeurs, qui ne participent pas aux votes des lois mais participent à l’élection des
représentants du peuple au parlement. Ces grands électeurs les définit selon un critère
qualitatif très difficile à reconnaitre qui est celui de l’autonomie professionnelle, plutôt
que de fixer un critère quantitatif qui serait celui de la fortune. Il vise en effet le droit de
suffrage en effectif en France sous l’Ancien Régime, droit de suffrage censitaire. Kant
reconnait lui-même que ce critère qualitatif est très délicat et subtile à mettre en oeuvre
: il donne du moins un exemple pour nous apprendre à distinguer les passifs des
actifs. Par exemple, le manœuvrier qui va de ferme en ferme pour couper du bois, qui
met à disposition sa force physique, n’a pas d’autonomie professionnelle, il ne décide
pas où, quand, comment couper le bois. En revanche, le coiffeur a un savoir faire qui
fait que en tant qu’artisan indépendant il peut décider d’ouvrir et fermer sa boutique
comme bon lui semble, selon des modalités qui sont les siennes.

Ces trois droits de l’homme fondamentaux ont un socle commun, un principe


commun, notamment la liberté civile de choisir son bonheur et la liberté civile des
citoyens actifs reposent sur une seule et même liberté plus fondamentale. qui est la
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liberté de pensée en général, la liberté d’avoir des opinions. Elle est selon Kant
l’unique palladium des peuples, de porte bonheur ou de vêtement protecteur pour le
peuple et qu’il n’y a pas d’état possible sans celui-ci. Toutefois, cette liberté de pensée,
si elle est en elle même illimitée, la liberté de s’exprimer peu être bornée ou
relativement bornée, on ne peut pas tout dire. On ne peut pas, par exemple, faire
appel à l’insurrection ou à la désobéissance au souverain législatif en place, ce qui
serait contraire à l’idée même du droit. L’expression ne peut pas être licencieuse, mais
la pensée doit être absolument libre. La liberté de pensée n’est pas l’ennemi du
souverain au contraire, le souverain doit s’en nourrir. Le souverain législatif a tout
intérêt à écouter les critiques et les doléances que cette liberté de pensée permet, car
elle est aussi une liberté d’exercer son esprit critique, pourvu que cette liberté de
pensée s’exprime dans l’enceinte du « public » das publikum ou le public instruit— à
ne pas confondre avec das volk, le peuple. Par ailleurs maintient fermement que, en
vis à vis de cette liberté de pensée, est contrebalancé un autre principe fondamental à
la philosophie politique de Kant qui est le principe absolu d’obéissance au souverain,
loyalisme envers l’autorité souveraine en place, en particulier le souverain législateur.
Kant pose comme piliers de l’état républicain le refus du droit de résister juridiquement,
de résister au nom d’un droit, et la défense d’une liberté de pensée absolue. Ces deux
piliers vont de pairs, aucun ne peut être supprimé au profit de l’autre. Le refus du droit
de résistance, et non pas de la résistance attention, il était élogieux envers la
Révolution Française de fait en tant qu’événement, mais au niveau du droit ce n’est
pas légitime, ce n’est pas la même chose que d’accorder un fait de résistance et
d’accorder un droit de résistance. Si il le fait, c’est au nom simplement d’une
cohérence logique, et métaphysique, qui est que si l’on accordait à un peuple un droit
de résister, si l’on inscrivait dans la constitution, loi fondamentale de état, un droit de
résistance, cela signifierai que le droit lui-même reconnaitrai la possibilité dans
certaines circonstances, que le droit lui-même soit suspendu et cela est selon Kant
contradictoire : le droit ne peut pas inscrire dans un de ses textes à suspendre sa
propre validité, ne peut pas inclure sa propre suppression. >>> article sur le droit et le
fait de résistance. A propos de l’exécution de Louis XVI, Kant dira que ce qui est
contradictoire, c’est un procès en bonne et due forme qui prétende d’exécuter le
souverain qui est la source du droit au nom du droit — qui plus est, n’est plus le droit
en place et n’atteint pas le roi puisqu’il ne l’est plus de facto — cela revient à retourner
le droit contre sa propre source. En d’autres termes, Kant considère que si le
souverain, à un moment donné de son règne, procède contre les lois, alors le peuple
peut faire entendre ses plaintes et a même intérêt à le faire, mais en aucun cas le droit
juridique de résister au souverain en rigueur ne peut être donné au peuple. Et même
dans le cas où le souverain procèderait contrairement aux lois, où il agirait contre la loi
dont il est lui même auteur, qu’il deviendrait illégal, alors

• Théorie et Pratique : « le sujet peut bien opposer des plaintes, mais à cette injustice il ne
serait opposer quelque résistance en acte. Il ne peut même pas y avoir dans la constitution un
article qui permettrait à un pouvoir de l’état, au cas où le chef suprême transgresserait la loi
constitutionnelle, de lui résister et par conséquent de lui imposer des bornes … . Contre le
législateur suprême de l’état, il n’y a point d’opposition légale du peuple … ; il n’y a donc
pas non plus de droit de sédition, encore moins un droit de rébellion … . La résistance contre
la législation souveraine ne peut jamais être considérée que comme illégale et même comme
anéantissant toute la constitution légale. Car, pour qu’on soit autorisé à la résistance, il
faudrait qu’il existe une loi publique permettant cette résistance du peuple, c’est à dire il
faudrait que la législation suprême comprenne en soi une détermination d’après laquelle ne
serait pas suprême … . Un changement de constitution vicieuse de l’Etat peut bien être
parfois nécessaire, mais ce changement ne peut être accompli que par le souverain lui-même

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par une réforme et non par le peuple, c’est à dire par révolution, et si cette révolution a lieu,
elle ne peut atteindre que le pouvoir exécutif mais non le pouvoir législatif »
• La liberté de pensée, c’est à dire la liberté d’exprimer des opinions politiques
éventuellement critiques et de tous les droits de l’homme le plus sacré et le plus
inviolable, p. 288 : « Il faut accorder aux citoyens, et cela avec l’autorisation du souverain
lui-même la faculté de faire connaitre publiquement son opinion sur ce qui, dans les décrets
de ce souverain, lui parait être une injustice à l’égard de la chose publique, car admettre que
le souverain ne puisse pas même se tromper ou ignorer quelque chose, ce serait le
représenter comme un être gratifié d’inspirations divines et supérieur à l’humanité
[Rousseau, Le Contrat Social, un législateur ne serait être parfait]. La liberté d’écrire,
dans les limites du respect et de l’amour de la constitution sous laquelle on vit, … telle est
l’unique palladium des droits du peuple » palladium : du grec « palladion » désignait un
objet sacré à la garde duquel est liée la survie et le salut de la cité.

• Doctrine du Droit, VRIN p. 201 - 205 : « il ne peut y avoir de résistance active permise,
mais au contraire une résistance négative, c’est à dire un refus du peuple au parlement
consistant à ne pas consentir aux exigences que le gouvernement avance … »

• Projet de Paix perpétuelle :


Kant refuse la voie de la révolution et préfère, pour sa part, la voie douce des
réformes, processus progressifs parfaitement réversibles et qui peuvent porter
ponctuellement sur une loi. « toute opposition au pouvoir législatif suprême, toute révolte
destinée à traduire en actes le mécontentement des sujets, tout soulèvement qui éclate en
rébellion est dans une république le crime le plus grave et le plus condamnable car il en ruine
le fondement même. Et cette interdiction [du droit de résistance] est inconditionnelle … Il est
en effet interdit de résister en opposant la violence à la violence …. Par conséquent le peuple
ne dispose jamais d’un droit de contrainte à l’égard du chef de l’état » — Voir Le conflit des
facultés

questions :
- la résistance/rébellion peut elle se réclamer d’un droit qui n’est pas un droit de
rébellion ? la résistance peut être elle inscrite dans le droit comme résistance à …
quelque chose de précis ? au niveau de la loi morale, de la moralité kantienne, que dit-
il de la résistance ? « le crime le plus grave et le plus condamnable » n’est-il pas celui
de la part du souverain de nier le peuple en tant que la république est une res public
(corruption, fraude électorale ou trafic des scrutins) ?

Les différentes libertés civiles reconnues par Kant, quelque soit la manière dont il
les formule, convergent vers une seule et même aspiration qui est la liberté de pensée.
En effet, que ce soit la liberté des hommes de choisir leur bonheur ; qu’il s’agissent de
la liberté civile au sens le plus faible c’est à dire obéir tout simplement aux lois
auxquelles on a donné son assentiment ; ou qu’il s’agisse de la liberté comme
autonomie des citoyens actifs s’exprimant à travers l’art d’élaboration de la loi, font
signe vers la liberté de pensée, qui fait signe elle même vers une liberté plus radicale,
la liberté du penser, au sens philosophique du terme par soi même c’est à dire au
moyen de sa propre raison ou son prendre entendement. Cette liberté du pensée ce
mue en liberté du penser et constitue un des deux piliers de la république kantienne
(l’autre étant l’obéissance à la constitution politique).

• Théorie et Pratique, AK VIII p. 305 : « Dans toute république doit régner une obéissance à
la constitution politique selon des lois de contrainte, mais en même temps un esprit de liberté
[dans la pensée et dans l’expression] … L’obéissance sans l’esprit de liberté donne
prétexte à toutes les sociétés secrètes »

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En effet ce droit fondamental à la liberté n’est pas simplement une liberté


d’expression et de pensée (avoir des opinions) c’est aussi plus radicalement une
liberté du penser, et plus largement, cette liberté du penser est la pierre de touche, le
critère de toute la philosophie de Kant, qui est un éloge de cette liberté du penser qui
vient donner son ampleur et sa force dramatique à la liberté de pensée.

III. VERS UNE ÉTHIQUE DU PENSER AUTONOME


ou de la simple liberté de pensée à la liberté du penser en
philosophie
ou sapere aude, « ose penser par toi même » librement, devise
de l’Aufklärung, première maxime du sens commun
a. Qu’est-ce que les Lumières ?, 1784

Cette liberté du penser, Kant la conçoit a la fois comme un droit et comme un


devoir fondamental inscrit dans la raison humaine de sorte que la liberté qui consiste à
penser par soi même de façon autonome correspond à la vocation essentiel de l’être
humain et de l’être raisonnable en général. Les lumières se définissent aux yeux de
Kant non pas tan comme une époque que comme mouvement tendant vers un idéal
non pas que de liberté mais de libération, c’est à dire que l’émancipation de l’homme
qui doit se faire au moyen prioritairement de ses forces intellectuelles (entendement ou
raison qui ici s’équivalent). L’opuscule de 1784 s’ouvre sur une définition de
l’Aufklärung — processus d’éclaircissement — : « Les lumières c’est la sortie de
l’Homme hors de l’état de tutelle dont il est lui même responsable. L’état de tutelle est
l’incapacité de se servir de son entendement sans la conduite d’un autre » la mise en tutelle
n’étant possible que par l’assentiment de celui qui s’y soumet, état de servitude
volontaire ; il s’agit de s’arracher à un état auquel on a donné son accord,
obscurantisme des âges passés. Par conséquent, l’Aufklärung marque un double
avénement de la liberté, douce processus dynamique de libération ou d’émancipation.
Il est un mouvement de libération de la pensée humaine, choisi et librement voulu par
l’Homme lui même, lassé de son état de tutelle. L’autonomie implique une forme
d’indépendance, c’est à dire le fait de penser indépendamment de la pensée d’autrui.
Cette liberté de pensée revendiquée par ce mouvement, c’est la liberté d’exercer son
esprit critique et c’est en faisant ainsi preuve d’un exercice en acte de sa pensée, on
doit aussi faire preuve d’autonomie, la pensée doit en effet se donner à elle même ses
propres lois. L’arbitre de la raison pure doit distinguer les quatre facultés de connaître
(Raison —> Entendement —> Imagination —> Sensibilité) et doit être en mesure de
dicter à chacune d’elle ses lois de fonctionnement propre — cf. Critique de la Raisin
Pure, Analytique transcendantale — c’est à dire doit être capable de se donner à elle
même ses propres canons. La liberté doit donc s’émanciper de la tutelle des autres,
version faible ou négative de l’indépendance, mais elle doit être aussi autonomie, pour
tirer d’elle même ses propres lois ou son propre canon. La liberté n’a pas encore ici le
sens transcendantal ni le sens pratique, c’est à dire n’est ni la spontanéité
transcendantale, ni le sens pratique d’autonomie morale mais a un sens plus général,
transverse et oblique au système, sorte d’idéal régulateur. En effet qu’elle concerne
l’usage de notre entendement, de notre raison théorique ou pratique, ce décline
toujours chez Kant comme autonomie c’est à dire propriété ou capacité à se donner
son propre canon en indépendance de la tutelle, de la pensée d’un autre. La liberté
devient dans cet opuscule devient une liberté autonomie et ‘enjeu de celle-ic dépasse
de très loin le simple
champ moral
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investi par Kant à partir de 1785. La philosophie de Kant est une philosophie
d’autonomie. On remarque que sapere aude est à l’impératif, on pourrait même dire
que c’est un impératif catégorique moral, même si Kant, curieusement, dans la
Doctrine de la Vertu et dans le tableau des devoirs, il ne mentionne pas la liberté de
penser comme un impératif catégorique.
Cet impératif catégorique du sapere aude, si on l’interprète comme un impératif
catégorique moral nous enjoint à mobiliser tous les efforts possibles pour nous
arracher nous même à tout état de servitude volontaire qui nous maintient non pas
simplement dans l’obscurité mais aussi dans l’obscurantisme, un âge où l’humanité ne
peut pas accéder au savoir. Cette servitude rejetée par Kant consonne avec ce qu’il
appelait « despotisme paternaliste ». Cette effort d’Aufklärung entendu dans son sens
dynamique, est nécessaire pour sortir de cette espèce de léthargie de l’homme qui se
contente de penser sous tutelle de façon paresseuse, car tout être humain est destiné
à l’autonomie.

« ’’sapere aude’’ est le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise
des lumières. [devise qui nous demande de mobiliser une vertu courageuse, capable de
nous arracher à la lâcheté confortable et paresseuse de l’état de tutelle, synonyme,
d’état d’obscurantisme] Si la plus grande partie et de loin des hommes tiens ce qui
affranchis de la tutelle très pénible … » Les tuteurs s’emploient à surveiller et à
s’assurer que les hommes restent dans l’obscurité. « Il est difficile à chaque homme pris
individuellement s’arracher à l’état de tutelle devenue pour ainsi dire une nature [seconde] «
aussi peu nombreux sont ceux qui ont réussi à se dépêtrer par le propre travail de leur esprit de
l’état de tutelle et à marcher malgré tout d’un pas assuré.»
Par conséquent Kant considère qu’il y a toujours des l’histoire des individus
moralement plus élevés que d’autres, qui font oeuvre de façon géniale et nouvelle
d’une raison ou d’un entendement autonome. Eloge de la vocation universelle du
genre humain à ce qu’on peut appeler éthique du penser autonome. « Pour ces
lumières, il n’est rien requis d’autre que la liberté, et la plus inoffensive parmi tout ce qu’on
nomme liberté à savoir celle de faire un usage public de sa raison … . L’usage public de sa
raison doit toujours être libre, il faut que cet esprit de libre critique soit préservé [libre et sans
limite] » pourvu qu’on appelle pas en acte à une rébellion, et cet usage est infini pourvu
qu’il s’effectue par le public instruit.

Kant utilise dans ce texte la distinction public/privé dans un sens totalement


différent de celui qu’on leur donne aujourd’hui. Le public est ce qui se manifeste et
s’exprime dans les écrits du public instruit — * publicum = ensemble des hommes qui
lisent et qui écrivent en faisant un usage public de leur raison. Il faut que le peuple,
progressivement se rapproche du public jusqu’à venir idéalement le public lui-même,
et dans une république parfaite, le Volk serait intégralement rendu « aufgeklärt »,
éclairé. En d’autre termes, l’usage privé de notre rationalité est constitué par tous les
autres domaines qui ne sont pas l’usage public, c’est à dire que privé est le contraire
de l’usage savant, restreint au public qui lit et qui écrit. C’est notamment l’usage par
exemple, que nous faisons de notre raison dans l’exercice de notre métier, c’est un
usage qui n’engage pas une personne comme un intellectuel qui publie, c’est à dire qui
met à disposition universellement en droit sa pensée. Et cet usage privé doit être
restreint. Il donne trois exemples d’usage privé et limité que nous pouvons faire de
notre propre raison par trois métiers ou profession. « J’appelle usage privé l’usage qui
nous est permit de faire de notre raison dans une charge civile qui nous a été confié. »
• exemple de l’officier : il ne peut pas, en tant que militaire, remettre en cause le
bien fondé des ordres qu’il a reçues. Sa liberté de penser et sa liberté de critiquer se
trouvent donc limitées. Mais en tant qu’homme, c’est à dire comme citoyen
potentiellement membre du public instruit, public qui travaille à s’instruire lui-même et
autrui, il est tout à fait libre en tant qu’homme de publier dans des écrits publics les
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critiques, les doléances ou les propositions de réformes qu’il propose de faire de


l’institution militaire par exemple.
• exemple du fonctionnaire de l’administration fiscale : il n’est pas habilité à
critiquer la loi en vigueur, en tout cas dans l’exercice de son métier, en revanche, il
peut tout à fait, à titre public en tant qu’homme, publier un livre où il explique comment
réformer les impôts en vigueur, et peut même dénoncer comme illégitimes et
incongrues certaines impositions.
• exemple du prêtre : en exercice, ne peut pas critiquer la hiérarchie ecclésiale,
car il est engagé par l’Eglise, ne peut pas critiquer ni les textes, ni les écritures saintes.
Mais en tant que membre du public instruit, peut faire un usage illimité de son esprit
critique et peut communiquer de façon universelle au public sa pensée à l’endroit des
imperfections du clergé ou des symboles de l’église.

questions :
Syndicats ??

« En tant que savants en revanche qui, par des écrits, s’adressent au public proprement dit,
c’est à dire au monde, le prêtre [soldat fonctionnaire] jouit dans l’usage public de sa raison
d’une liberté illimitée de se servir de sa propre raison. » Penser comme les autres, penser
sous tutelle ou penser comme la majorité, c’est toujours un signe de paresse, de
lâcheté, et au fond de faiblesse, tandis que penser par soi-même, objet d’un impératif
catégorique moral, suppose d’endosser courageusement une responsabilité
individuelle, suppose d’accepter et d’embrasser volontairement un processus
d’émancipation qui nécessite vertu et force. Penser par soi même nécessite de
s’arracher à la tutelle confortable et d’entrer de soi-même dans le public éclairé faisant
un usage public de la raison. Il faut aujourd’hui se libérer, et se libérer complètement,
de toutes les tutelles qui pouvaient venir subjuguer les hommes. Cet esprit de liberté
critique et ce goût pour une autonomie de la raison (auto-canonique) se propage
d’abord à l’intérieur du cercle restreint des savants ; mais ensuite, ce mouvement
d’Aufklärung doit s’étendre au peuple, pour qu’à terme, il devienne aussi éclairé. Grâce
à ce médium, cet intermédiaire qu’est le public instruit, les lumières doivent se diffuser
dans le peuple, qui doit faire sien également ce travail d’émancipation. Pour Kant,
l’aufklärung favorise le libre usage illimité de l’esprit critique et plus généralement de la
liberté de pensée, du moins en ce qui concerne l’usage public de notre raison, jouit
d’une liberté illimitée. Au contraire de cette devise des Lumières, la devise de
l’obscurantisme est de penser comme la majorité, voire de penser sous la tutelle
d’autorités, et cela témoigne donc d’une paresse, lâcheté, de servilité, et au fond d’une
faiblesse. Penser par soi même n’est pas simplement la vocation naturelle de la
raison, mais c’est aussi celle de l’Homme en tant qu’être raisonnable, c’est un devoir
de l’homme envers lui-même qui implique, comme tous les devoirs moraux, du
courage et qui fait de la vertu une force courageuse. Face à la paresse, il existe un
rempart qui résistera toujours à cette inclination naturelle, c’est le rempart du public
instruit, qui finira toujours par se libérer du joug sous lequel une autorité peut être tenté
de le maintenir. La voie du despotisme éclairé c’est préserver cet unique palladium de
la liberté de penser par soi-même.

Ainsi pour Kant l’esprit de liberté intellectuelle, liberté du penser, liberté critique,
est le goût d’user de façon autonome de sa propre raison et de l’instituer en instance
auto législatrice ; c’est à dire au fond ce gout pour la philosophie au sens large, au
sens où le philosophe est un législateur de la raison, puisqu’il énonce les lois que la
raison elle même se donne — gesetgaber — cette liberté du savant, s’adressant au
public éclairé est l’indice d’une liberté sans limite, c’est même un droit et un devoir
pour le savant que de dénoncer publiquement, par ses écrits, les dysfonctionnements
dont il peut être témoin
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au sens de la société civile voire au sein de l’autorité souveraine (État composé du


souverain législatif, exécutif et judiciaire). Pour Kant, une bonne Constitution —
comme loi fondamentale de l’État = Verfassung —doit toujours veiller à préserver
cette liberté infinie de penser et de critiquer mais doit aussi en favoriser la diffusion et
le progrès. En d’autres termes, pour Kant, une bonne Constitution civile et un bon
gouvernement doivent nécessairement favoriser le progrès des Lumières, i.e pas
simplement la diffusion des savoirs mais au delà de ces savoirs il y a le devoir de
cultiver l’esprit critique chez les citoyens. Kant met en avant le devoir politique en
matière d’éducation qui n’est pas tant le devoir d’instruire mais plutôt, à travers
l’acquisition des savoirs, de cultiver la libre pensée critique, i.e le fait de penser par soi
même ou atteindre le régime d’autonomie de notre raison. Par conséquent tout
gouvernement et toute constitution qui se veulent républicains se doivent d’encourager
la diffusion des Lumières et leur processus, tout gouvernement se doit de « laisser toute
liberté à chaque citoyen de faire, en sa qualité de savant, publiquement, c’est à dire par ses
écrits, des observations sur les défauts de l’institution du moment ». En effet, seule une
politique des Lumières doit pouvoir non seulement éclairer le peuple en lui
transmettant les savoirs fondamentaux mais aussi cultiver l’esprit critique des citoyens
à titre individuel, et doit permettre d’éclairer le Souverain lui-même. Il y a une
dynamique qui va au delà du peuple seulement. Kant insiste sur le fait qu’un bon
Souverain ne peut prendre aucune mesure politique qui ne peut être rendue publique,
aucune des mesures que prend le Souverain ne doit rester secrète ou clandestine, et
c’est corrélatif à ce que l’on vient de dire. Le contenu des lois doit être nécessairement
soumis à l’avis critique du public éclairé, tout doit pouvoir être discuté avec un esprit
critique infiniment libre — cf. articles du Projet de Paix perpétuelle sur le militaire : pas
de secret défense au sein du public instruit, cela doit toujours être mis à sa disposition,
d’ailleurs pas de secret quel qu’il soit vis à vis du public éclairé. Double projet donc,
double finalité d’éclairer le peuple et le Souverain, qui repose toute entière sur ce
corps vital du public instruit. Cela permettra, dans une république idéale, de réformer
l’état de l’intérieur en fonction des doléances du public instruit, il doit intégrer le fruit
des expertises de ce public dans sa politique, et c’est les membres du parlement qui
s’en porte garant au sein de l’organe de l’état. Il serait logiquement contradictoire de
jure de fonder un État en brimant, oppressant, a fortiori en interdisant la liberté de
s’exprimer et surtout la liberté de penser, qui elle est infinie. Aucun État, aucun pouvoir
politique ne peut interdire ou limiter l’usage public de la raison des citoyens, et nul état
n’a intérêt pragmatique ment à brimer la liberté de penser, mais plutôt a intérêt à s’en
nourrir, à favoriser donc la liberté de penser et la diffusion des Lumières dans le
peuple à travers et grâce à la médiation du publicum.

Le seul cas d’exception ou un état peut légitimement limiter la liberté du peuple


est en ce qui concerne son droit de libre expression, mais jamais son droit de libre
penser. En effet, dans les cas limites, où le gouvernement contreviendrait à se droit
fondamental de l’homme à la liberté du penser — cas du despot opposé au progrès
des Lumières — et bien dans ce cas là le peuple peut désobéir au Souverain. Un
Souverain qui priverait ses sujet de liberté de penser, totalement ou partiellement,
cesserait par là même d’être légitime, du moins moralement, et donc cesserait d’être
Souverain et contreviendrait en outre à la nature de l’homme, alors seulement une
révolution est possible. Si le Souverain proclamait officiellement gouverner contre la
diffusion des Lumières contreviendrait à la vocation de l’homme :

• « Un tel contrat qui serait conclu pour tenir à jamais le genre humain à l’écart de toute
nouvelle lumière est purement et simplement nul et non avenu (…) ce serait un crime contre la
nature humaine [priver la raison humaine de toute possibilité d’autonomisation], dont la
destination originelle consiste précisément en cette progression [des Lumières, des savoirs et de
la liberté de penser par soi même] (…). Empêcher qu’une époque ne voie l’humanité
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s’améliorer progressivement … est absolument interdit. Un homme peut certes pour sa


personne ajourner les Lumières quant à ce qui lui incombe de savoir, mais y renoncer, que ce
soit pour sa personne mais plus encore pour ses descendants, c’est attenter au droits sacrés de
l’humanité et les fouler aux pieds. » Ici, la destitution de facto du Souverain est légitime,
mais pas légalement, crime de mysologie en quelque sorte. Kant s’adresse
directement ici au roi de Prusse. cf. Doctrine de la Vertu — devoir de perfection :
parfaire toutes nos aptitudes naturelles — §1. Kant vise ici aussi la liberté académique
de son université, car la censure universitaire est une censure d’État et donc illégitime,
contre productive. Il dénonce donc non pas toute censure, mais une certaine forme de
censure d’État (pas la censure privée) censure dont il fera lui-même les frais, et qui
contrevient à l’essence même de l’homme et constitue, si organisée par le Souverain,
un crime contre l’humanité.

Kant dénonce en effet toute répression organisée par l’état à l’encontre de la


liberté de penser, et dans une moindre mesure de la liberté d’expression. Penser
librement donc, penser par soi-même dans le régime d’autonomie de la raison n’est
pas simplement un droit, inscrit dans la Constitution fondamentale de l’État et dont le
Souverain est garant, c’est aussi un devoir, indissociablement. Cette devise des
Lumières est un précepte fondamental de la raison envers elle-même. Le premier
devoir de l’homme envers lui même est le devoir de cultiver toutes les aptitudes
naturelles en lui même en vue de toutes les fins possibles de la raison. Il reprends
dans la troisième Critique cette devise, en l’éclairant un peu différemment.

• §40 - Critique de la Faculté de juger


Kant fait de la pensée autonome la première des trois maximes du sens
commun, et elle désigne l’auto institution du penser en son autonomie, éthique du
penser libre qui se fonde sur trois principes. Le premier (1) est une reprise mot pour
mot de la devise « sapere aude », penser par soi même ; (2) penser en se mettant à la
place de tout autre être humain i.e tout homme pensant, universalité de la pensée
humaine commune à tout homme, pensée qui doit être universellement
communicable ; et (3) penser toujours en accord avec soi-même — p.280-281 La
Philosophie morale de Kant, Lequan

Comment s’orienter dans la pensée, 1784

Liberté civile de penser : Grace à la liberté du penser infinie, on a la possibilité


de communiquer ouvertement nos pensées à autrui, et réciproquement autrui peut
sans limite nous communiquer et communiquer au publicum instruit toutes ses
pensées. Par conséquent, la liberté de penser au sens civique ou civile du terme
désigne d’abord et avant tout une liberté de communiquer « en public » ses pensées.
Le premier droit fondamental de l’homme c’est donc d’abord et aussi une liberté
civique entendue au sens du pouvoir de communiquer sans limites toutes nos pensées
au public instruit. Opposition entre contrainte civile, subordination à des lois, et ce seul
espace de liberté absolue qu’est le public instruit. « La liberté de penser … s’oppose à la
contrainte faite à la conscience morale » : la liberté de penser n’a plus simplement le sens
de communiquer ses pensées à autrui mais aussi le sens de chercher en soi même
librement la loi morale et l’appliquer par un choix régit par une conscience morale
strictement individuelle. Notre conscience morale intérieure se veut totalement
indépendante des consciences morales d’autrui. Kant anticipe ici ce qu’on trouvera
dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, qui défendra la
liberté de conscience morale, expression que Kant emprunte à l’air du temps et qui
sera aussi reprise par les rédacteurs de la Déclaration, et l’emprunte précisément à la
philosophie des
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Lumières et notamment à Rousseau. Loi de l’autonomie entendue comme loi d’une


faculté autonome, la raison est la faculté qui par essence, par vocation, peut et doit
fonctionner en régime d’autonomie, en étant elle même son propre tribunal et se
jugeant elle même. La conscience morale comme tribunal à l’égard de soi même, que
Hegel apparentera à la certitude absolue de soi, Kant la reprend dans la Doctrine de la
Vertu, quand il dira que se connaitre soi même, c’est opérer une descente aux enfers.
L’expression de liberté de conscience morale a donc plusieurs influence, d’abord
Rousseau, puis elle prépare et accompagne la rédaction des textes révolutionnaires
du droit français. La liberté subjective absolue de penser sans aucune contrainte en
toute indépendance vis à vis des tutelles extérieures sera reprise par Hegel dans
Principes de la philosophie du droit, sous l’angle de la certitude absolue, critiquée et
dépassée.

Liberté de conscience morale : Kant vise par là de façon politique toutes les
tutelles qui prétendent nous donner des normes en matière morale, religieuses,
politiques ou idéologiques. Se soumettre à leur joug, c’est toujours faire preuve de
paresse, mais aussi de lâcheté. Dans ces cas de figures, chaque fois que l’on renonce
à notre liberté de penser en tant que liberté de conscience morale, entendue sous la
figure particulière de la conscience morale, en réalité, on subit ce que Kant appelle « la
crainte angoissée du danger d’un examen propre ». Le mot d’examen renvoie à une
pratique connue dans la culture piétiste, l’examen de conscience où le croyant doit
comparaitre lui même devant sa propre conscience morale comme devant un tribunal
intérieur — examen : examen = la balance, la pesée. Chaque fois qu’on est dans la
crainte d’ériger son propre tribunal intérieur, chaque fois qu’on redoute d’obéir au seul
juge de notre conscience morale, notre loi morale en nous, alors on fait preuve de
lâcheté et de paresse. Tout examen de soi en conscience, doit être une confrontation
à cette autonomie de sa raison pure pratique. Penser par soi-même c’est trouver en
soi la loi morale pour chercher à s’y conformer dans un scrupuleux examen de soi-
même. Ce réseau sémantique de l’examen de soi, du « scrupuleux » examen de soi,
de la descente aux enfers dans l’intériorité de la conscience morale, du tribunal
intérieur … perdurent chez Kant de ces années 1784, puis 1785 dans les Fondements
de la Métaphysique des Moeurs et trouveront leur aboutissement dans la Doctrine de
la Vertu du 1797. Ce que Hegel critiquera à travers l’idéal de l’examen de conscience
n’est pas tant la morale telle que stipulée par Kant que la lecture qu’en font les
romantiques (notamment Fries).

Liberté de penser comme autonomie de la raison en général : « La raison ne


se soumet à aucune autre loi qu’à celle qu’elle se donne elle-même » : ce passage signifie
deux choses, d’abord une reprise de Rousseau mais d’autant plus élargie par rapport
à celles de Rousseau, car cette dernière demandait une application dans la sphère
civile, sous sphère de la pratique. Au delà de la liberté civile, au delà de la liberté
pratique d’autonomie morale, c’est une liberté de la raison tout court, c’est à dire aussi
une liberté théorique. La liberté de la raison de se donner ses propres lois n’est pas
que pratique, mais Kant l’étends aussi à la raison spéculative, c’est une référence a
posteriori à la Critique de la raison pure, qui se voulait un tribunal de la raison pure à
l’égard d’elle même — 2nde préface de 1787 : la raison critique doit être son propre
juge. La raison est la seule faculté à même de réguler toutes les autres.

Le socle commun de ces trois sens, c’est que la liberté est toujours obéissance à
une loi, à sa loi évidemment, mais toujours l’obéissance à une loi. Définir la liberté
comme le pouvoir de faire tout et n’importe quoi indépendant de sa propre loi est un
contresens, même pour le sens commun. La liberté est toujours déjà l’obéissance à la
loi, et pas n’importe laquelle, la loi de sa raison propre. Il ne faut pas entendre raison
comme raison singulière, mais la raison universelle du moins sensée être universelle,
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pas la raisons engoncée dans la certitude absolue de soi. Le point commun, c’est
l’équation minimale de liberté = autonomie. Dans cette définition de liberté comme
autonomie, la raison est donc soumise à sa propre loi, de sorte qu’elle échappe à toute
hétéronomie. Kant fera un raisonnement à l’absurde, en supposant qu’une liberté
veuille se développer sans loi : la conséquence d’une telle liberté, serait ce que Kant
appelle tantôt la licence, tantôt l’anarchie. « La conséquence inévitable de l’absence
déclarée de lois dans la pensée (c’est à dire d’un affranchissement des restrictions provenant de
la raison) est que la liberté de penser en fait finalement les frais » Contrairement à ce que le
sens commun peut d’abord croire, une liberté illimitée finirait inévitablement par se
contredire elle-même et donc par s’auto abolir. Aucune liberté sans le support recteur
de la loi ne saurait se maintenir durablement. La liberté se gaspillerait elle même — cf.
Critique de la raison pratique, Conclusion : chaque fois qu’on manque d’appliquer une
méthode rigoureuse et qu’on se laisse séduire par des trésors imaginaires (panacée
médiévale), on gaspille les seuls vrais trésors qui sont ceux de la raison, notamment
les trésors de la science rationnelle. De même, dans le texte de Comment s’orienter
dans la pensée, l’état de sauvagerie sans loi, passion innée de la liberté, et bien on
gaspille les vrais trésors de la raison, on gaspille l’énergie précieuse de la raison, on
gaspille les forces d’autonomie de la raison. Chaque fois qu’on définit illusoirement la
liberté comme licence, on abolit l’essence de la raison qui est une essence autonome.
Quand la liberté « brise ses entrailles », qu’elle fait un usage d’elle même dérégulée
alors la liberté « dégénérera nécessairement en abus et en une confiance téméraire dans
l’indépendance de son pouvoir à l’égard de toute restriction, en une persuasion de la toute
puissance », abus ici désignant l’anarchie — Canon de la raison pure, distinction entre
conviction et persuasion : la persuasion est purement subjective, croyance subjective,
appelée par Hegel la certitude absolue de soi ; la conviction est quand la persuasion
subjective est également objective, quand le bien fondé de la certitude est dans la
chose, la conviction est universelle ou du moins universalisable. Ce que montre Kant,
c’est que cette liberté licencieuse d’anarchie n’est pas seulement ruineuse dans la
sphère politique, mais elle est plus ruineuse encore quand elle affecte la raison
spéculative ou théorique elle même. Ici il fait allusion à la Critique de la raison pure,
Dialectique transcendantale de 1781 où il montrait que la témérité de la raison
dérégulée, cette hubris de la raison métaphysique dogmatique, telle qu’on la trouve
chez Platon, Descartes ou Spinoza, ces figures s’abstraient du réseau sémantique
de la raison autonome comme tribunal qui doit se donner à elle-même ses lois. Il
donnait trois exemples de ces raisonnements dits sophistiques, fallacieux, qui
relevaient d’une logique dialectique de l’apparence : d’abord les antinomies, puis les
paralogismes et enfin les idéaux mal compris, qui illustrait cette dérégulation
licencieuse d’une raison qui n’est plus autonome. La raison ne doit jamais désobéir à
sa propre loi, en particulier ne doit jamais désobéir aux lois de la connaissance
légitime énoncées dans la Critique de la raison pure, mais non plus aux lois pratico-
morales qui sont les siennes. « Si l’on retirait en effet aux lois morales toute leur force
comme mobiles du coeur, et si l’on retirait même toute leur autorité … alors on ferait naître le
mode de pensée qu’on nomme licence de la pensée » On a licence ou anarchie dès que la
raison abandonne son essence de tribunal auto institué. Ainsi, « la liberté dans la pensée
finit par se détruire elle-même quand elle va même jusqu’à procéder indépendamment des lois
de la raison … ne déniez pas à la raison ce qui en fait le Souverain bien sur la Terre … »
L’anarchie tue la liberté, loin de la magnifier.

Dans la suite du texte, il faut percevoir que Kant vise ironiquement certains de
ses contemporains qu’il qualifie souvent de « prétendus géniaux », philosophes qui
prônent une philosophie du sentiment immédiat ou de l’intuition intellectuelle, que
Hegel critiquera aussi, en les appelant les philosophes romantiques du sentiment ou
de l’intuition,
qui sont notamment
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Jacobi, Schiller, Hölderlin, critiqués par Hegel comme philosophes romantiques de


l’absolu, de l’irrationnel. Ces philosophes méprisent les règles du savoir en matière
morale ou théorique tuent la philosophie d’une certaine façon. Cette critique est
légèrement différente de celle qu’il adresse aux philosophes de la confusion. Ces
philosophes romantique de l’intuition s’imaginent pouvoir faire l’économie d’une
méthode rigoureuse de la raison : Kant vise tous ceux qui critiquent toute entreprise
rationnelle et en particulier ceux qui ont critiqué avec virulence la Critique de la raison
pure. Tout ceux qui au nom d’un prétendu génie d’outrepasser les lois, qui s’abstraient
des lois de la critique de la raison, défendent une liberté de penser absolue sans
aucune borne ni limite — Schwärmerei = enthousiasme.
Tous ces faux philosophes, prétendus esprit géniaux, ont tué la liberté de peur de
la borner, de peur de la soumettre à ses propres lois. Ces philosophes sont de
ennemis de la raison, des haïsseurs de la raison et soutiennent sans le dire une sorte
de mysologie où la raison se trouve destituée de a propre nature, une inspiration à son
propre régime autonome. Or, il n’y a de liberté que dans la soumission à sa propre loi.
A défendre une loi anarchique dans l’ordre de la pensée, ou dans l’ordre moral, ou
métaphysique ou théorique, à prôner une liberté sauvage et sans borne, illégale, on
favorise un basculement de la situation dans son exact opposé, on favorise l’avenue
d’un despotisme. « Chercher la suprême pierre de touche de la vérité en soi même (c’est à
dire dans sa propre raison) et la maxime de toujours penser par soi même, c’est les Lumières »,
c’est à dire non pas dans son ego singulier, mais chercher le critère du vrai en soi ça
veut dire le chercher dans la raison. La liberté donc ne saurait se préserver elle-même
qu’en se conformant à ses propres lois, juridico-civiles d’abord (sens 1 du cours), ou
des lois édictées par le criticisme théorique (CRP 1781) ou le criticisme pratique ou
lois morales de la raison pure pratique.

Si on ôte à un intellectuel ou membre du public cette liberté du penser, on le


censure et on le condamne de facto à penser dans une solitude solipsiste, car
l’essence de la pensée rationnelle c’est la communicabilité. Chaque fois qu’un despot
prive la liberté de penser civile, cela désole l’homme en l’isolant. Il n’y a rien de plus
ruineux que de couper ses sujets de la libre circulation des pensées avec n’importe
quel autrui. C’est condamner les individus à ne plus pouvoir communiquer leur
pensées entre eux, et c’est sombrer dans l’obscurantisme, c’est supprimer la
possibilité des riches échanges et dialogues qu’il pourrait y avoir entre eux. Platon : la
pensée est un dialogue de l’âme avec elle-même, mais c’est aussi penser en dialogue
avec tout autrui possible. Le publicum est évidemment cosmopolitique, citoyens du
monde. Kant pense à des revues internationales comme Berlinische Monatschrift,
revue scientifique, qui rayonne bien au delà de l’Allemagne. On a la visée d’une
pensée fluide, transparente à un niveau international. Cette pensée de l’éthique
universelle est une pensée dialogique, ouverte et transparente qui se communique
vers tout autrui humain possible, c’est la deuxième maxime du sens commun. L’idéal
kantien des lumières est celui d’une universelle communicabilité en droit de la pensée
et des savoirs, idéal qui s’adosse à la constitution d’un public instruit, ou en anticipant
sur les termes de la Critique de la faculté de juger, qu’on peut appeler d’une
communauté intersubjective — Fichte.
Le souverain ne perdure d’autant plus que s’il défend un tel idéal, la liberté civile
prend un sens fort de liberté de penser que doit défendre le souverain. La liberté
morale fait signe pas seulement vers la doctrine de l’autonomie morale — les futurs
Fondements de la Métaphysique des Moeurs— mais fait signe au delà d’elle même,
déjà vers la liberté de conscience religieuse qui implique aussi une autonomie du
vouloir, un pouvoir de juger indépendamment de toute tutelle y comprise ecclésiale,
indépendance du jugement par rapport à toute doctrine positive des devoirs. Le vrai
noyau de la religion est en effet moral donc rationnel. Ce que Kant réclame au delà de
la liberté morale c’est une liberté de conscience religieuse. La liberté comme
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autonomie de la raison doit être entendue en son sens le plus large, théorique et
pratique, et désigne simplement l’institution de ce tribunal à l’égard d’elle même, la
prescription de la raison de sa propre loi, et rejoint l’entreprise du criticisme : faire de la
raison objective et universelle en soi l’aune de toute vérité.

Toutes ces formes de liberté, civile ou éthico-religieuse, ont en commun de


consister dans un ferme et constante résolution d’user toujours de sa propre raison
pour juger en matière de bonheur, de critique politique, morale ou religieuse, i.e toutes
ces formes de liberté ont en commun l’exigence de faire, d’édifier à l’égard de soi-
même, un tribunal, un juge qui produit des lois, des normes, pour le fonctionnement
légitime de nos facultés de l’esprit. Autonomie : obéissance à une loi universelle de la
raison, n’est pas synonyme du repli sur une législation du sujet dans sa singularité,
sujet ne doit pas être confondu avec individu. Kant est un penseur du sujet universel,
non pas de l’individu. L’idéal de liberté kantien n’est pas un idéal de liberté individuelle.

Questions :
G. Chamayou, libéralisme comme extrême liberté économique et autoritarisme social

Les termes hétéronomie et autonomie ont été opposés dans la philosophie


morale, et Kant importe ce concept d’autonomie morale, le défait de son sens
technique moral pour ne garder de l’autonomie que son noyau, logique, conceptuelle,
à savoir l’obéissance à une loi universelle de la raison. L’autonomie est conforme à
l’essence de l’être de raison. Tout ce qui relève de l’hétéronomie de la raison est le
signe d’une passivité lâche et paresseuse dans l’individu, chaque fois qu’on obéit à
une autre loi que celle de la raison universelle, on reste un simple individu et on est
pas capable de s’élever à la subjectivité. Le sujet nous rattache à une communauté
universelle d’êtres raisonnables. L’individualité qui nous enfonce dans la singularité
empirique est du côté de l’hétéronomie. Le seul usage de la raison reconnu par Kant
c’est l’usage autonome. A cet usage s’oppose l’usage où la raison se délie de toute loi
quelqu’elle soit, et ce type d’usage est le contraire absolu de l’autonomie, c’est
l’anarchie ou la licence. Par conséquent, la liberté illimitée que prônent pour eux même
les pseudos-génies de la philosophie contemporaine (romantiques allemands) qu’ils
s’imaginent penser sans loi ne peut que se pervertir en son contraire et aboutir à une
suppression totale de la liberté — cf. livre 8 de La République de Platon :
dégénérescence de la liberté en tyrannie. L’anarchie engendre le despotisme :
l’anarchie en tant que possibilité politique, qui vient du grec an-arche qui signifie
absence d’ordre, de principes, de commandements, et toujours incompatible avec
l’autonomie, différence de nature entre ces deux types de fonctionnement, l’anarchie
est même le contraire de l’hétéronomie.

Ainsi, la liberté du penser ne peut que faire les frais de toutes les formes
d’anarchie et de désordre, de toute forme de licence absolue, morale, religieuse,
théorique ou intellectuelle. Lorsque donc ces pseudos philosophes de génie prétend
s’abstraire de toute règle de penser, en réalité il corrompt la philosophie elle-même et
n’obéit plus qu’a son inspiration subjective, ou individuelle, et sombre alors dans
l’exaltation de la Schwärmerei — forme de folie, délire, revendication de penser
indépendamment des lois universelles (Swedenborg) qui nous enferme dans la
singularité de nos propres mondes individuelles. Loin d’être une pensée en dialogue,
ouverte, la Schwärmerei plus rien ne vient limiter la raison de l’extérieur, et comme
celle ci ne se donne à elle même aucune loi, elle ne peut que se replier sur un monde
singulier, proprement incommunicable à autrui. Et c’est cela le danger le plus grand
pour Kant, le fait qu’elle soit incommunicable — Rêves d’un visionnaire, 1766 :
idios cosmos, monde singulier contraire au monde commun, partagé, monde
singulier non

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communicable et par là non partageable à autrui. Le swcharmer s’enferme dans une


représentation du monde qui n’est pas communicable à autrui ; et les philosophes
romantiques auraient aussi ce défaut de se replier sur la conviction de leur propre
génialité.

La liberté de penser ne peut jamais se délier de toute entrave, elle ne peut faire
l’économie de toute limite, elle ne peut jamais faire fi de la légalité, en particulier de la
sienne propre. Sinon, si elle s’émancipe de toute loi et devient raison licencieuse, alors
elle n’est plus qu’expression d’une passion naturelle innée, liberté sauvage, et nous
fait régresser à l’état de nature, état d’indépendance absolu vis à vis de toute loi.
Distinguer donc l’anarchie, état politiquement construit dans le refus de la loi, et l’état
de nature qui est ante juridique. Quand la liberté de penser se transmue en licence ou
en anarchie, en indépendance absolue, que ce soit pour la Schwärmerei, dans les
formes politiques d’anarchie, la réponse de l’Etat ne peut être que la répression. En
effet, à vouloir défendre une liberté illimitée, sans loi et dérégulée, on en réalité détruit
la seule vraie liberté sous la loi (en nous), détruit la possibilité même de l’autonomie.
Par conséquent Kant substitue ici à la maxime licencieuse des pseudos philosophes
romantiques du génie, et surtout au schwarmer, l’impératif catégorique moral des
Lumières, penser par soi-même en se soumettant aux lois universelles de la rationalité
que la philosophie critique, en tant que tribunal de la riions à l’égard d’elle même, a
pour but de démontrer.

Projet de paix perpétuelle, 1795 — AKVIII :

• « L’État invitera ses sujets tacitement … à le conseiller, ce qui signifie qu’il les
autorisera à parler librement et publiquement sur les maximes générales concernant la
conduite de la guerre et la conclusion de la paix … . On ne doit pas s’attendre à ce que les rois
se mettent à philosopher [on ne doit pas espérer que les souverains se fassent eux-même
des savants ou des philosophes membres du publicum ] ni que des philosophes deviennent
rois ; ce n’est pas non plus désirables … . Mais que des rois … ne permettent pas que la classe
des philosophes disparaisse ou devienne muette et [ que les rois] les laissent au contraire
s’exprimer librement, voilà qui est aux uns comme aux autres indispensable pour apporter de la
lumière à leurs affaires »

Le thème de la liberté de pensée dans la sphère de l’Etat, ce thème


politicojuridique est donc toujours fondé plus profondément sur le thème d’une éthique
du penser autonome. Kant montre que les souverains ont toujours intérêt à cultiver
cette liberté de pensée infinie, à préserver le public, lieu privilégié où la liberté de
pensé peut se déployer sans limites. Ils ne peuvent que tirer avantage des conseils et
critiques des savants et philosophes. Tout État républicain ne peut donc que favoriser
une politique des Lumières qui garantissent une liberté de pensée illimitée dans le
public. Tout ce qui concerne dans une nation la paix ou la guerre doit être discuté
librement et publiquement par le publicum instruit. Kant pense que le roi et le
philosophe doivent rester des personnes distinctes, mais le roi peut chercher conseil
auprès du philosophe, besoin d’un philosophe indépendamment du roi et qui n’est pas
roi. Le philosophe, l’intellectuel, a besoin de toute sa liberté pour penser correctement,
or quand on est souverain on a plus cette liberté.

Les souverains n’ont rien à craindre du public dans la mesure où il est le lieu de
l’universel, le public ne peut former de kabbales, ne peut pas conspirer, il ne peut y
avoir d’actes de propagande puisque chacun y pense dans le but de l’universel, pas
d’intérêt personnel en jeu. On peut trouver par anticipation ce que Hegel appellera le «
service de l’universel », la fonction publique, ce qui à certain moments de notre
histoire, nous hisse au niveau du public instruit. Le public instruit est totalement
incapable de s’organiser en kabbales ou en factions partisanes puisqu’il est au service
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de l’universel — idée reprise de Rousseau, Le Contrat Social, les factions rompent


avec la volonté générale ; un état ne peut se maintenir qu’en marge des factions
partisanes qui s’attribuent la volonté générale. Chaque fois que le particulier confisque
l’universel, s’en est fini du public instruit. Hegel, Principes de la philosophie du droit :
les factions partisanes, groupements d’intérêts, sont une menace constante de
confiscation de l’universel. Kant place une entière confiance dans le public instruit
comme étant réfractaire à toute faction.

Pour Kant donc, ce publicum est donc indispensable au peuple mais aussi au
souverain, aux gouvernants pour gouverner mieux et sans craintes des kabbales,
factions partisanes ou propagande. Les savants et les philosophes ne sauraient jamais
constituer des factions, et par conséquent il n’y a aucun risque de renversement
émanant du public. C’est pourquoi Kant substitue à l’idéal platonicien de la
République, administrée par un roi philosophe, l’idéal d’un prince éclairé non pas parce
qu’il serait lui même membre du public, mais l’idéal d’un prince éclairé par son public.
Idéal d’un Prince à l’écoute des savants et philosophes, soucieux de préserver leur
liberté d’expression et de penser et qui ne doit redouter d’eux aucune kabbale. Parfaite
connivence et intimité entre rois et philosophes, sans que l’un et l’autre se confondent.
Kant va donc conclure, tirer de cet idéal une conclusion plus large concernant en
général les rapports entre le droit politique d’une part et la morale de l’autre, doctrine
du lien entre la morale et la politique. Si la politique était incompatible avec la morale,
de fait et de droit, elle se réduirait à un art prudente, et ne pourrait jamais s’élever à
une forme de sagesse.

• « S’il n’existe pas de liberté, ni de loi morale fondée sur elle, et si tout ce qui arrive ou
peut arriver résulte d’un pur mécanisme de la nature, dans ce cas la politique (en tant qu’art
d’utiliser ce mécanisme pour le gouvernement des hommes) constitue la pure sagesse pratique
et la notion de droit n’est qu’une idée dépourvue de toute réalité »

Kant pense, à l’opposé de cette hypothèse qu’un accord comme science politique
comme sagesse et la liberté morale est possible, et le lieu de cet accord idéal entre la
morale et le droit politique, c’est la personne du souverain. Idéalement, un souverain
doit être autant un politique qu’un être moral. En effet, Kant se représente ce qu’il
appelle un « politique moral », c’est à dire un homme qui conçoit les principes de la
politique comme conciliables avec la morale. Ce politique moral, idéal régulateur,
souverain éclairé (se laissant éclairer par la liberté du penser de son public autonome)
serait aux antipodes d’un « moraliste politique », (real politiker) un politique qui plierait
la morale à ses propres fins. Selon Kant, c’est la morale qui doit être rectrice en
politique, et non pas assujetties par les buts de la politique. Il prône une articulation
des deux, mais cette adéquation, osmose entre morale et politique ne se fait qu’à la
condition que la morale reste rectrice et que la politique vienne en second. Ce
moraliste politique serait un homme qui « se fabrique une morale à la convenance des
intérêts de l’homme d’état », un homme qui plie l’éthique à la pragmatique et fait valoir
ses intérêts d’individu sur l’intérêt général. Une politique morale n’a comme but que
l’intérêt général.

La liberté morale, définie comme autonomie de la volonté, confine ici ou rejoint à


la liberté du penser, i.e de la raison, dans tous les domaines, théoriques ou pratiques.
Le politique moral n’est donc pas étranger à l’avènement de la République, idéal donc
d’autonomie morale, et doit avoir le soin de préserver cette éthique du penser
autonome, et doit par conséquent veiller à la constitution d’un public instruit. Idéal
d’une sagesse politique qui est en son fond morale, et ce sage politique n’est possible
que dans une République, nom pas entendue comme régime politique déterminé, mais
plutôt entendue

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comme idéal de gouvernance distinguant les trois pouvoirs en vue de garantir le


maximum de liberté et de sécurité à ses sujets. Dans une telle République idéale, les
conseillers du Prince sont savants, mais le Prince lui-même n’est pas savant. Ainsi,
dans ces trois écrits, on voit que Kant transpose le concept de l’autonomie du champ
moral, d’où elle provient, pour l’appliquer à toutes les autres sphères et faire de
l’autonomie le mot d’ordre voire le modèle de toute liberté authentique. Le projet moral
de Kant n’est donc pas totalement étranger à sa pensée de la liberté civile, car dans la
vraie liberté « chacun obéit … à la loi non statutaire qu’il se prescrit lui-même » PPP, 1795.
Ici Kant reprend explicitement la définition de la liberté comme « autonomie à la loi qu’on
s’est prescrite », Rousseau, Le Contrat Social I.8. Pour Kant, la souveraineté des Etats
fait d’eux des analogues d’individus, puisqu’ils refuseront toujours de se soumettre à
une loi au dessus d’eux. La souveraineté des états est du côté de l’indépendance,
projet de moralisation des souverains.

Le projet moral de Kant et sa définition d’autonomie va innerver son projet


politique, religieux, éducatif, les autres domaines de sa philosophie pratique. Le maître
mot de toutes ces dimensions de la philosophie pratique de Kant est le mot
d’autonomie entendue dans sa plus large consonance comme liberté du penser, idéal
d’autonomie, liberté qui reste un idéal régulateur. La liberté du penser comme
autonomie de la raison reste un horizon de visée pour le politique. L’esprit de liberté
doit engendrer aussi celui de tolérance, et par conséquent cet idéal doit favoriser la
coexistence pacifique des individus dans leurs différences. L’idéal cosmopolitique de la
paix kantienne doit, à une autre échelle, se bâtir dans le respect des différences
culturelles des peuples sous-jacents à ses Etats. Il définit la culture principalement par
la langue et la religion ; ce qui veut dire que la paix ne peut se bâtir que dans le
respect des langues des différents peuples et dans le respect de la diversité des
religions des peuples. Les différences de langues et religions, inhérentes à l’Esprit d’un
peuple, est indispensable au processus de construction de la paix perpétuelle.

Projet de Paix perpétuelle, 1795 — AKVIII


« Il peut y avoir diverses sortes de croyances, et de même plusieurs livres de religions … mais
il ne saurait y avoir qu’une seule religion valable pour tous les hommes et pour tous les temps »
i.e la religion morale de la raison pure pratique, noyau de toute religiosité.

Il serait absurde de séparer les hommes entre ceux « mûrs pour la liberté » et
ceux qui ne le seraient pas, à un moment donné. Pour Kant il n’existe pas de degré de
maturité de l’humain quant à la liberté. Quand un homme dit d’un autre qu’il n’est pas
mûr pour la liberté, ou ne mérite pas encore d’en jouir pleinement, c’est qu’en réalité il
nourrit un dessein secret de le maintenir en esclavage ou de l’assujettir, par intérêt
personnel. En d’autres termes, la maxime qui veut que certains hommes ou peuples
ne seraient point encore mûrs pour être mis en liberté, c’est une maxime qui n’a
aucune sens et est même la plus cynique qui soit, puisqu’elle recèle une volonté
purement pragmatique d’assujettir l’homme ou le peuple en question. En effet, pour
Kant il n’y a pas de divers degré pour la liberté, ni non plus de seuil, ni qualitatif ou
quantitatif, à partir duquel l’homme puisse entrer dans la liberté. Pour Kant, l’homme
est toujours déjà mur pour la liberté, il nait d’emblée par nature libre. Pour Kant, nul ne
peut s’octroyer le droit de juger ceux qui méritent d’être libres et ceux qui ne le
mériteraient pas encore. Nul ne peut assigner certains hommes à la servitude, à
l’obscurantisme et à l’esclavage et assigner au contraire d’autres à une maturité pour
la liberté. Par conséquent nul homme ne peut fixer la date à laquelle un individu ou
peuple deviendrait digne d’être mis en liberté. C’est toujours faire un faux procès à un
être humain de lui reprocher de ne pas être encore mûr pour la libération ou pour la
liberté comme processus d’émancipation. Cela serait dire que certains ne seraient pas
près aux Lumières. La liberté est pour Kant toujours déjà là — Introduction à la

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Doctrine du Droit idée d’un droit de l’humanité, droit qui s’attache à priori de façon
innée et naturelle à l’humain, droit au contenu unique qui est la liberté — Kant s’en
prend aux contre révolutionnaires, notamment deux théoriciens contrerévolutionnaires,
Gentz et Rheberg, deux ennemis de la Révolution française : ils considèrent que le
peuple français ne seraient pas encore mûrs pour la liberté. C’est une formule absurde
pour Kant puisque la liberté est un droit inné et inaliénable.

La religion dans les limites de la simple raison


La liberté est donc un droit originaire, mais Kant considère aussi qu’un telle
formule ne peut que nourrir l’esclavage. Loin de chercher l’émancipation dépeuple, ces
théoriciens de la contre-révolution barrent définitivement tout accès à la liberté. La
liberté n’a pas besoin d’être instaurée à un moment donné de l’histoire, la liberté n’a
pas à voir avec le temps. A cela s’ajoute le fait que la mise en liberté d’un peuple ou
d’un individu n’est possible que si on lui a toujours déjà le droit originaire d’être libre, il
faut lui donné la reconnaissance de l’idée d’un droit originaire. La liberté présuppose la
liberté, elle s’auto-présuppose de même que symétriquement l’esclavage,
l’assujettissement … toutes les figures de l’hétéronomie se nourrissent elles-mêmes,
s’auto-alimentent. Il est vrai que les progrès d’un peuple vers sa propre liberté, telle
qu’il peut en user dans un régime républicain, sont d’autant plus lent que le peuple lui-
même redoute d’avantage le moment de sa libération : plus un peuple s’est installé
dans un état de pensée sous tutelle confortable, plus il est difficile de s’émanciper
politiquement. Par conséquent, plus un peuple redoute sa liberté, plus il préfère la
sécurité de la pensée sous tutelle aux risques et dangers d’une pensée autonome,
plus il pérennise son propre état de tutelle et plus il conforte les positions radicales, et
anti révolutionnaire pour qui le peuple n’est pas encore digne de s’administrer
politiquement lui-même. Si il reconnait qu’il faut un grand courage et une grande
témérité pour s’émanciper, passer à l’autonomie, il n’est reste pas moins que la liberté
comme processus d’émancipation ou de libération est, ou fait l’objet, d’un impératif
catégorique moral. Cet état de libération doit être favorisé par le public instruit. Un
homme ne doit pas renoncer à sa liberté mais doit aider autrui à se libérer : ce qui
devient un impératif catégorique moral, c’est aussi le mot d’ordre dynamique de la
libération, plus que le mot d’ordre fixe de liberté. Ainsi la liberté de penser par soi
même devient un droit et un devoir, lié à la nature humaine, un devoir dynamique de
se libérer soi-même et de favoriser en tout autrui possible le processus de libération.
Kant pense aussi ici aux futures générations qui sont aussi concernées, il faut favoriser
au delà des représentants actuels du peuple les descendants de ces représentants.

L’homme contient en lui de façon immanente ou inhérente à sa nature, il contient


en lui, comme un attribut essentiel, la liberté, qui est comprise analytiquement et qui
appartient essentiellement au concept d’humanité (concept rationnel pur = Idée). C’est
un droit inaliénable que l’homme ne saurait donc ni perte ni acquérir. Par conséquent,
nul n’a le droit de se priver lui-même ni de priver autrui, qu’il s’agisse de
contemporains ou de successeurs, de ce droit à la liberté qui est aussi un devoir de
libération. La liberté appartient par essence au concept rationnel, à l’Idée d’humanité.
La liberté est rattachée intrinsèquement à la définition de la personne humaine comme
fin en soi, directement liée à dignité qui s’attache à la personnalité. L’expression même
de « ne pas encore être mûrs pour la liberté » est donc non seulement antinomique ou
oxymorique, mais surtout elle cache en réalité le cynisme de ceux qui ont tout intérêt à
opprimer les autres et à les maintenir sous tutelle.

CONCLUSION
La conviction
qui traverse autant le
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domaine juridique que théorique de Kant, il s’agit de penser en liberté, parce que la
liberté appartient non pas simplement l’essence de la rationalité mais à l’essence de
l’humanité, en tant qu’idée d’une personne raisonnable ou morale. La liberté du penser
est constitutive et de la nature de l’homme, et de la nature de sa raison. Il ne dépend
pas des hommes, ni comme individus ni comme peuple d’abroger en eux la liberté ni
d’en priver autrui. Kant a donc produit dans ces quatre textes les linéament d’une
autonomie de la liberté de la pensée, auteur d’une éthique du penser autonome qui
nous fait un devoir de penser par nous même, par notre propre raison et ce par un
usage public de notre rationalité. Ainsi la liberté du penser comme Selbständigkeit de
la raison dans tout ses usages, comme droit et devoir d’émancipation, fonde toute la
philosophie kantienne et pas uniquement sa philosophie pratique, entendue au sens
juridicopolitique ou au sens moral. La liberté c’est la clé de voute de tout le système
philosophique kantien, capable de réunifier la partie théorique et la partie pratique,
parce qu’elle a à la fois un visage transcendantal (Idée de la raison pure théorique) et
pratique.

IV. LA LIBERTÉ AU SENS TRANSCENDANTAL


nécessité naturelle et liberté transcendantale,
ou Idée transcendantale de liberté telle que produite par la
raison pure théorique

a. La troisième antinomie de la Raison Pure

+ A LIRE ABSOLUMENT (synthèse & solution de l’antinomie)


§3, section 9, Antithétique de la Raison Pure
Canon de la Raison Pure

La loi de la liberté transcendante et la loi de nécessité naturelle n’opèrent pas au


même niveau, jouent à deux niveaux de réalité, réalité sensible ou phénoménale et la
réalité intelligible ou nouménale de l’autre. En effet, dans la CRP la liberté fait l’objet
d’une antinomie, conflit apparemment insoluble entre deux thèses opposées que la
raison produit également d’elle même. Kant a distingué dans la Dialectique
Transcendantale qu’il y avait quatre antinomies de la raison pure théorique : antinomie
du monde, antinomie de l’âme, antinomie de la liberté, antinomie de Dieu. On peut
résumer ces quatre antinomies par un tableau — cf. fiches. Comme dans toutes les
antinomies, on a affaire à une thèse métaphysique dogmatique, selon laquelle la
liberté existe dans le monde ; face à elle l’antithèse sceptique selon laquelle il n’existe
aucun être libre dans ce monde. Si on anticipe sur la démonstration de Kant, on verra
que la solution de l’antinomie, la solution critique consiste à distinguer en conciliant
deux niveaux de réalité. D’abord un niveau intelligible ou transcendantale ou niveau
nouménal, de l’autre un niveau empirique, phénoménal ou sensible. Kant montrera
qu’en l’Homme il existe à la fois une liberté comme loi de causalité intelligible (loi de
causalité = caractère ≠ tempérament) quoique on ne puisse que penser cette idée
transcendantale de liberté et non la connaître — denken ≠ erkenen.

Par conséquent, deux niveaux donc, au niveau nouménal l’homme est libre il a
en lui une causalité intelligible libre qu’il ne peut que penser sans contradiction logique,
mais qu’il ne peut jamais connaître ni donc prouver au moyen d’une rationalité
théorique. De l’autre, au niveau empirique, en ce qui concerne le caractère
phénoménal de l’Homme en tant qu’il obéit à une loi de causalité phénoménal,
l’homme est entièrement déterminé par des lois de causalité naturelle, déterminisme
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universel. Kant admet non pas que la liberté existe mais admet du moins que la raison
peut et doit penser sans se contredire une idée transcendantale de liberté, i.e une idée
transcendantale d’une causalité et d’une loi de causalité indépendante du
déterminisme naturel qui régit les phénomènes du monde sensible.

La solution kantienne va viser à admettre les deux : liberté nouménale, nécessité


empirique. La synthèse critique consiste à reprendre la thèse mais la dédogmatise, la
prive de sa prétention à valoir comme un savoir de la raison pure théorique. Kant va
refuser toute preuve théorique de la liberté (si ce n’est cette pseudo-preuve d’une
pseudo-liberté qu’est la preuve empirico-psychologique de notre capacité de choisir
mais pour Kant c’est pas une vraie liberté, une preuve qui n’atteint pas son objet, et il y
renonce vite). En revanche, il reconnait que s’il n’existe pas de preuves théoriques
pour la raison pure théorique ou spéculative de la liberté, il reste qu’on peut en
chercher une preuve dans la raison pure pratique, prévue qui déduira la liberté à partir
d’un fait apodictique ment en nous, le fait de la loi morale. Mais théoriquement elle ne
l’est pas.

Toutefois, la thèse des métaphysiciens dogmatiques, quoiqu’elle soit fausse,


consiste à en admettre sans la prouver son existence ; et la thèse des dogmatiques
est des deux la plus séduisante, celle qui convainc le plus grand public : elle séduit
puisqu’elle comporte en elle une dimension morale (et éventuellement religieuse) ce
qui veut dire que l’intérêt moral et religieux, besoin éthico-religieux de la raison se
trouve aisément satisfait par la thèse des dogmatiques. Elle est donc plus populaire :
le grand public s’en empare. En effet, l’intérêt moral de la raison nous fait pencher
plutôt en faveur de la thèse, c’est pourquoi Kant se la ré approprie. En effet, la thèse
dogmatique, et c’est la sa force, correspond à un besoin pratique de la raison : c’est
donc de ce côté que Kant va puiser l’Idée transcendantale de liberté qui lui servira de
fondement pour la future liberté pratique, pour l’autonomie.

• CRP, Antithétique, AKIII p.324 et suivantes


« Du côté du dogmatisme ou du côté de la thèse, on trouve en premier lieu un certain intérêt
pratique, auquel prend part de bon coeur tout homme sensé qui comprend son véritable
avantage … . L’antithèse nous enlève ou semble du moins nous enlever tout ces appuis … . Du
côté de l’empirisme … ou du côté de l’antithèse, on ne trouve d’abord aucun intérêt pratique …
comme celui que renferment la morale et la religion »

La thèse dogmatique correspond à un intérêt pratique et religieux de la part de la


raison, tandis que l’antithèse correspond à l’absence de tout intérêt éthicopratique.
Kant penche d’avantage du côté de la thèse, et il va la reprendre en la purifiant de
toute prétention spéculative ou théorique à connaitre l’idée de liberté ou a prétendre
prouver l’existence objective et réelle de cette liberté. L’enjeu ici n’est pas tant la liberté
transcendantale que ce à quoi elle sert de support, i.e à la liberté pratique. C’est deux
facettes de la même médaille, c’est une seule chose qu’on peut regarder de deux
points de vue : par dessous, raison théorique et idée théorique ; ou par dessus, par ce
qu’elle rend possible, liberté pratique. La liberté transcendantale sert de socle à
l’autonomie pratique. Ici, la liberté va se décliner comme liberté transcendantale ou
comme ce que Kant va appeler, en l’empruntant à Leibniz, une idée cosmologique :
la liberté c’est une propriété du monde. L’idée cosmologique devient chez Kant liberté
transcendantale. Double définition de la liberté transcendantale. Cette liberté biface,
héritage de la spontanéité leibnizienne et de l’autonomie rousseauiste, c’est elle que
Kant qualifiera de clé de voute de l’ensemble de son système philosophique,
rassemblant la partie théorique et la partie pratique.

1.Thèse :
Dans les
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interstices de la loi de causalité naturelle, il y a place pour la causalité libre qui


a le statut d’une idée transcendantale de liberté ; qui pourra expliquer tous les
phénomènes qui ne peuvent s’expliquer simplement par la causalité naturelle.
Différence d’avec les dogmatiques : statut épistémique, pour Kant la liberté
n’est pas connaissable ✸ « La causalité déterminée par les lois de la nature n’est pas
la seule d’où puissent être dérivés tous les phénomènes du monde. Il est nécessaire
d’admettre aussi, pour les [les actions humaines libres ou en 1785 FMM = actions
morales] expliquer, une causalité libre » [caractère libre].
• Preuve : consiste en une preuve proprement cosmologique, et la structure du
monde s’en trouve proprement engagée. Ce que montre les métaphysiciens, c’est qu’il
faut admettre un premier commencement, pour éviter une régression à l’infini. L’aporie
ouverte ici se pose à un double niveau chez les dogmatiques, double strate de
l’aporie du premier commencement. D’abord, premier commencement de nos actes
moraux, classe particulière de phénomène : qu’est-ce qui explique qu’une action libre
soit possible dans le monde phénoménal ? La cause de ce premier commencement
de la série que constitue un acte moral comme acte absolument nouveau ne peut être
que extérieure au monde naturel et sensible. Ensuite, radicalisation du premier
niveau : de la même façon qu’il faut bien trouver un premier commencement à la série
des modifications dans le monde qui constitue des actes libres ou moraux, de la
même façon que pour les expliquer on a recours à la causalité libre ; il nous faut
demander par rapport à la série complète, par apport au monde considéré comme
système, totalité inconditionnée, série totale de tous les phénomènes contingents
(Leibniz = monde), quel est la cause première du monde lui-même ? Une série d’actes
contingents qui forment un monde, notre monde en l’occurence, ne peut elle même
avoir comme cause qu’une cause autre que le monde lui-même et qui est elle-même
un commencement absolument nécessaire. La réponse des dogmatiques c’est que le
monde ne peut avoir sa cause qu’en dehors de lui dans un être supérieur et premier,
cause qui est aussi cause de soi. A ce double niveau actes moraux et monde lui-
même, les métaphysiciens dogmatique ont recours à une cause extérieure au monde
et qui est une cause libre, et il n’y a qu’une causalité libre qui puisse rendre compte de
ces deux genres de séries. Ici, une cause libre est libre eu égard à ce qu’elle produit,
au sens leibnizien. ✸ Spontanéité = pouvoir de commencer, initier une série nouvelle
de phénomènes soit dans le monde, soit elle est le pouvoir de commencer initier le
monde. Seule solution possible = admettre un premier commencement qui soit dans
les deux cas une cause libre.
En effet le problème du premier commencement c’est qu’une série n’est jamais
complète du côté des causes dérivant les unes les autres. L’explication ne peut se
suffire aux causes naturelles qui dérivent les unes des autres. La loi de causalité
naturelle qui veut que tout effet a sa cause antérieure. Cette loi de la nature vaut pour
tous les phénomènes du monde sauf pour les actes moraux et pour le monde lui
même. Par conséquent, cette loi de la nature elle-même, loi d’homogénéisation, loi
permettant de lisser les phénomène (loi immanente), est une loi qui loin de valoir
universellement, rencontre des exceptions qui sont d’aux moins deux types :
l’existence du monde et les actes moraux. Chaque fois qu’on soutient que la règle
déterministe doit valoir universellement, c’est donc faux, contradictoire quand on la
prend sans restriction. La causalité naturelle n’est pas la seule causalité. Définition
leibnizienne cosmologique ou spontanéité absolue = idée transcendantale de liberté et
liberté transcendantale qui n’est ni connue, ni prouvée.

« … il faut donc admettre une causalité d’après laquelle quelque chose arrive sans que la cause
en soit déterminée plus haut encore par une autre cause antérieure selon des lois nécessaires »
— « admettre une spontanéité absolue des causes ayant la vertu de commencer par elle-même
une série de phénomènes …, par conséquent, [il faut admettre] une liberté transcendantale sans

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laquelle, même dans le cours de la nature, la série des phénomènes ne serait jamais complète du
côté des causes »

1. Antithèse : empirico-sceptique, la liberté n’existe pas. Tous les


phénomènes dans le monde sont explicables par une loi de causalité naturelle.
Une telle antithèse n’est évidemment pas satisfaisante, parce qu’en niant la
liberté elle prive l’homme de toute responsabilité morale en nivelant les actes
moraux sur le même plan que les phénomènes de la nature physique. Ainsi, si
on étend le déterminisme aux actes moraux, on en fait un nécessitarisme, et
c’est cela que Kant dénonce dans l’antithèse des empirico-sceptiques. Ce qui
se joue ici n’est pas simplement la position d’un Hume ou d’un Locke mais la
position d’un nécessitarisme fataliste, pire ennemi de la philosophie — cf.
Discours préliminaire des Essais de Théodicée, Leibniz : cette doctrine de
fatalisme nécessitariste se manifeste pour Leibniz particulièrement dans l’Islam,
fatalisme mahométan, idée que les homme sont toujours prédéterminés à agir
tel qu’ils le font. Kant vise ici toutes les formes de fatalisme, de Spinoza à
Priestley. ✸ « Il n’y a pas de liberté mais, tout dans le monde arrive suivant des lois
naturelles. — « [la causalité libre] est contraire à la loi de causalité … elle ne se
rencontre dans aucune expérience [c’est] un vain être de raison »
• Preuve : la liberté transcendantale est contraire à la loi de causalité,
incompatibilité logique entre idée d’une causalité libre et l’idée d’une causalité
naturelle. Kant ici fait provisoirement des remarques, puisqu’il exposera sa propre
solution critique de synthèse cinquante pages plus loin. Il transforme ici le texte des
dogmatiques et le texte des sceptiques pour les rendre convergents, il prépare le
terrain à sa propre solution de synthèse. La thèse et l’antithèse valent toutes les deux
mais pas au même plan. La thèse des dogmatiques est vraie au plan des noumènes
(monde intelligible), l’antithèse empirico-sceptiques vaut aussi mais sur le plan des
phénomènes (monde sensible).

3. Remarques sur la thèse


« L’idée transcendantale de liberté est loin de former tout le contenu du concept psychologique
de liberté qui en grande partie empirique. Cette liberté transcendantale se borne à présenter la
spontanéité de l’action, comme le fondement propre de son imputabilité mais elle n’en est pas
moins la pierre d’achoppement de toute la philosophie, qui trouve des difficultés
insurmontables à admettre cette sorte de causalité inconditionnée » principe de
responsabilité. Cette liberté transcendantale admise par lui et les dogmatiques est une
difficulté insoluble car on ne peut la connaître ni la prouver. Cette difficulté
transcendantale embarrasse fort la raison spéculative, qui ne peut et ne doit pas s’en
débarrasser : elle doit être maintenue dans la philosophie. En montrant que la liberté
transcendantal a du moins le mérite de rendre possible l’imputabilité i.e la
responsabilité morale de l’homme à l’endroit de ses actes, Kant anticipe sur sa propre
position philosophique, à savoir que pour lui aussi la liberté » pratique se fonde sur la
liberté transcendantale. Enfin, Kant ajoute, et c’est là que se différencie son système
critique et le dogmatisme métaphysique, c’est que l’idée transcendantale de liberté en
tant que difficulté insurmontable, ne serait être que pensée et non pas connue.

« Il n’est pas nécessaire de pouvoir répondre à la question de savoir comment une telle faculté
[la liberté comme capacité à agir spontanément] est possible » — « … il faut que nous nous
contentions d’admettre a priori qu’une causalité de ce genre [libre] doit être admise … .
Puisque la faculté de commencer tout à fait spontanément une série dans le temps a été une fois
prouvée [par Leibniz à un double niveau], il nous est permit aussi maintenant de faire
commencer spontanément sous le rapport de la causalité [libre] diverses séries de phénomènes
dans le cours du monde et d’attribuer à leur substance la faculté d’agir par liberté. »

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4. Remarques sur l’antithèse


« Une puissance transcendantale de liberté [spontanéité] ne pourrait être qu’en dehors du
monde … . Mais il ne peut jamais être permis d’attribuer une pareille faculté [de liberté
transcendantale] aux substances qui existent dans le monde même, puisqu’alors disparaitrait en
grande partie l’enchaînement des phénomènes qui se détermine nécessairement les uns les
autres suivant des lois universelles et avec cet enchaînement, que l’on désigne sous le nom de
nature, disparaîtrait la marque de la vérité empirique, qui distingue l’expérience du rêve » Pour
Kant, si on admettait dans le monde phénoménal naturel une puissance
transcendantale de liberté ou causalité spontanée alors on suspendrait en partie la
validité du déterminisme naturel. Or c’est précisément l’intégralité de ce déterminisme
qui fait de ce monde une nature, un monde régi par des lois universelles et
nécessaires — Prolégomènes : ✸ nature = conformité à des lois universelles
nécessaires a priori. Si on excepte de la nature les actes moraux, on rompt la
cohérence homogène de la nature, on transforme le monde naturelle en un simple
rêve chaotique, enchaînement désordonné d’images mentales - puisque la nature a
des lois ; le monde cesserait d’être une nature légale pour être un chaos rêvé.

Ici Kant admet la validité de cette antithèse et en limite la validité. Il partage l’idée
avec des empiristes qu’il est risqué de suspendre la validité des lois naturelles, cela
serait le risque d’abolir la nature ; l’enjeu ici c’est que si on admet une liberté
transcendantale dans le monde, la nature cesserait d’être connaissable. En même
temps, Kant travaille le texte en le tirant vers sa propre philosophie critique puisqu’il
reconnait que la liberté transcendantale ne saurait exister dans le monde, mais elle
peut exister dans un monde intelligible. Si la liberté transcendantale existe, c’est dans
le monde nouménal. Mais Kant va ajouter et reconnait, à la différence des empirico-
sceptiques, que cette liberté transcendantale est capable néanmoins de produire des
effets dans le monde naturel phénoménal. Nous sommes capables de poser dans le
monde des actes phénoménaux en tant que causes intelligibles libres, ces actes sont
les actes moraux (dont on ne peut pas trouver la cause dans le sensible). Ces actes
sont à la fois phénoménaux et non explicables phénoménalement. C’est la fécondité
de cette puissance transcendantale de liberté que Kant va reconnaitre et qui le
distingue des partisans de l’antithèse.

Kant distingue ici plusieurs sens de la liberté (sans encore le sens pratique) :
d’abord la liberté empirico-psychologique qu’il appellera au chapitre du Canon de la
Raison Pure « la liberté pratique au sens faible d’indépendance du pouvoir de choisir »
qu’on peut expérimenter en soi au titre d’une introspection psychologique intérieure
(Descartes, libre arbitre d’indifférence). Ensuite, la liberté transcendantale ou
cosmologique, non conditionnée empiriquement, empiriquement inconditionnée,
causalité spontanée. Cette causalité spontanée n’est pensable qu’au niveau du monde
intelligible, et si elle a une réalité elle n’est que nouménale. Enfin, le troisième pôle qui
s’esquisse ici, c’est le sens de la liberté pratique. Kant n’en parle pas trop mais fait
jouer en tension les deux premières. Il rappelle que la dimension transcendantale de la
liberté est si difficile à appréhender qu’elle reste une énigme insoluble pour toute
philosophie théorique, puisque la liberté comme telle est inconnaissable et
improuvable par la Raison théorique.
Mais en même temps Kant ouvre vers le champ pratique en montrant que si elle
n’est pas prouvable théoriquement, elle est requise, exigée, elle est un besoin de la
même Raison. C’est là que se noue ce que Kant appeler plus tard dans la CRPrat en
1788 le postulat de la raison pure pratique. Les trois postulats (liberté, immortalité de
l’âme et existence de Dieu) ne sont pas tant des postulats pour la raison pratique
(dans leur contenu ils sont apportés par elles) que pour la raison pure théorique. Kant
fait tout ça parce que s’il n’admet pas une liberté dans le phénoménal, les actes
moraux se retrouveraient impossibles. Contre les sceptiques : cette liberté a une
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efficience sur les actes moraux, contre les empiriques : on ne peut cependant que la
postuler.

CONCLUSION
Kant fait jouer plusieurs sens ici de la liberté : d’abord le sens transcendantal,
puis empirico-psychologique, et enfin la liberté pratique au sens fort, liberté
d’autonomie morale. L’argument que produit Kant pour autoriser hors du monde
phénoménal une liberté transcendantale résulte de l’argument de Leibniz. La
cosmologie leibnizienne prétendait prouver l’origine première du monde. Kant dit que
si admet le raisonnement leibnizien pour le monde lui même rien ne nous empêche de
l’appliquer à certains phénomènes du monde lui-même qui sont les actes moraux.
L’argument est le suivant : si on peut admettre au commencement du monde une
liberté transcendantale (Leibniz = dieu) une liberté première qui soit un pouvoir d’initier
le monde qui ne soit pas déterminé par des causes sensible antérieures, on doit par
aussi admettre une telle puissance transcendantale de liberté dans le monde pour
expliquer les actions morales des hommes. Ce qui vaut pour le commencement du
monde doit valoir pour la suite du monde, et ce qui dans cette suite relève de la
moralité. Toute fois on ne peut admettre cette extrapolation à un double
dédogmatisation : pas empirique, seulement intelligible, elle puise sa cause dans
l’intelligible, cause transcendante au monde sensible ; puis on doit reconnaitre à cette
cause libre une efficacité dans le monde sensible des phénomènes et reconnaitre que
c’est une source possible d’actes vertueux.

La liberté transcendantale dont Kant admet la simple possibilité logique ouvre sur
le champ pratique doublement. D’abord, la première porte ouverte par Kant de la
liberté transcendantale vers la liberté pratique, c’est la petite porte du Canon de la
Raison pratique en admettant une liberté pratique de sens faible, empirico-pratique,
empirico-psychologique, qui s’avérera en 1788 une fausse liberté. Mais il ouvre une
seconde porte quand il dira que la liberté transcendantale est le socle de la liberté
pratique au sens fort, anticipant ici sur l’autonomie. Elle annonce d’une part le Canon
et la liberté empirico-psychologique, et d’autre part, la grande porte donc, la liberté
pratico-transcendantale, mixte autonomie et spontanéité liées par l’indépendance, qui
deviendra la clé de voute du système.

Par conséquent les deux questions que se pose la raison à savoir si une liberté
transcendantale existe et si elle existe comment est-elle possible, comme elle produit
ses effets. Ces deux questions restent sans réponse, en tout cas dans le cadre de la
critique de la raison théorique. En tout cas, pour la première critique, même dans la
seconde édition le statut de la liberté transcendantale reste problématique, la liberté
transcendantale comme spontanéité n’est que possible ou douteuse, on ne peut pas
en établir la preuve par l’expérience. Juste sans elle la morale est impossible du coup
il faut fortement la postuler. La première critique n’affirme encore ni la nécessité
pratique du postulat ou de la supposition de la liberté transcendantale, et elle n’affirme
pas d’avantage le possibilité réelle d’une telle liberté transcendantale. Si ni la nécessité
pratique, ni la possibilité réelle de la liberté transcendantale ne sont reconnus, c’est
tout simplement la possibilité de la liberté transcendantale qui est reconnu, elle est
logiquement pensable sans contradiction. Toutefois, cette moindre possibilité logique
permet à Kant néanmoins d’avoir une solution critique non seulement à l’antinomie de
la liberté et de la nécessité, au conflit thèse dogmatique et antithèse empirico-
sceptique ; mais plus généralement indique la voie de la solution critique de toutes les
antinomies de la raison pure, et cette solution réside dans deux niveaux de réalité, le
monde nouménale
et le monde
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phénoménal. Cette solution de synthèse est sensée pacifiée durablement les partisans
de la métaphysique dogmatique et de la métaphysique empiriste. Il veut réconcilier la
thèse et l’antithèse puisqu’il va puiser dans l’une comme dans l’autre des vérités. Kant
hérite de la thèse et de l’antithèse et les épure chacune de leur éléments de fausseté.
La liberté pour Kant n’est pas le contraire de toute loi de causalité : peut-être elle est
elle même une loi mais intelligible, nouménale. Kant appellera plus tard cette loi de
causalité intelligible la loi morale — FMM et CRPrat. La liberté peut coexister avec le
déterminisme naturel sans introduire la moindre perturbation dans le processus de ce
dernier. La liberté transcendantale et la nécessité naturelle sont compatible.
Superposition des deux mondes, naturel et moral, sans perturbation réciproque des
deux causalités qui leur sont propres.

Solution de l’antinomie : liberté transcendantale et nécessité naturelle sont


parfaitement compatibles ou pour le dire dans un vocable leibnizien, compossibles.
Chacun des deux causalités régit un niveau particulier de l’être. LA causalité libre régit
le monde intelligible des choses en soi, des noumènes (monde moral intelligible ou
règne des fins) tandis que la causalité naturelle régit le monde sensible des
phénomènes. Ce qui pose problème à Kant, c’est l’intersection commune à ceux des
causalités (horizontale de la nature, verticale de la liberté). Car le problème de la
liberté se pose à la jonction des deux : un même acte moral peut être considéré à la
fois comme libre en vertu de sa cause intelligible et en même temps comme déterminé
en tant qu’effet sensible dans le monde naturel. Un même acte, événement, peut être
considéré de deux points de vue différents : phénoménal et nouménale. Double de
point de vue re développé dans les FMM, 3ème section. Le §3 de la 9ème section
amplifie cette solution du double point de vue : c’est l’homme qui peut être considéré
d’un double point de vue ou selon un double caractère (loi de causalité) sensible
(nature) et intelligible (liberté) « Solutions des idées cosmologiques qui portent sur la totalité
des dérivations des événements du monde à partir de leurs causes [libres] » : « Il est tout à fait
remarquable que c’est sur cette idée transcendantale de la liberté que se fonde le concept
pratique que nous en avons… . La suppression de la liberté transcendantale anéantirai en même
temps toute liberté pratique. » — « … on peut alors envisager la causalité de l’être humain
sous deux points de vue : comme intelligible, quand à son action considérée comme l’action
d’une chose en soi [être nouménale] et comme sensible quand aux effets de cette action,
considérée comme phénomène dans le monde sensible … »

« Cette liberté ne doit pas être considérée de manière négative comme un indépendance
vis à vis des conditions empiriques … , mais on peut aussi la caractériser de manière positive
comme une faculté de commencer d’elle même une série d’événements [spontanéité] … . Par
conséquent, toutes deux peuvent avoir lieu indépendamment l’une de l’autre et sans être
troublées l’une par l’autre … Cette antinomie repose sur une simple apparence et la nature n’est
pas du moins en contradiction avec la causalité libre »

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