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d’information dans la
Résumé
prise de décision straté-
Quelle soit biologique, sociale ou économique, la com-
plexité est jugée inhérente (Bonami M. et al, 1997) à la gique adaptée à la
vie : elle a ainsi toujours existé. Toutefois, la mondiali-
sation de l’économie, les technologies de l’information, complexité
la difficulté de prévision ont contraint les mangers à
percevoir la réalité et à maitriser la complexité supposée Role of information sys-
être de plus en plus croissante.
En mettant l’accent sur l’effet de la complexité de tem in strategic deci-
l’environnement sur la prise de décision stratégique, on
a pu montrer la nécessité de disposer d’une démarche sion making appro-
pratique basée sur une utilisation judicieuse du système
d’information. Une telle démarche permettra de faciliter priate to the complexity
au manager sa prise de décision stratégique tout en favo-
risant la maîtrise de ce contexte.
Le présent article propose par conséquent, une réflexion
sur la prise de décision stratégique dans la complexité, il Kaouther KORBI
vise à montrer l’importance du système d’information Maitre assistante à l’Institut Supérieur
dans la résolution de ce type de problème et à offrir un
de Comptabilité et d’Admistration des
modèle de choix stratégique par dosage. Celui-ci per-
mettra aux entreprises, à travers le développement de
Entreprises de Tunis
leur intelligence stratégique, de rattraper leur retard en e.mail : korbiko@yahoo.fr
termes d’acquisition de connaissances et de maitriser la
complexité environnementale.
Abstract
Whether biological, social or economic complexity is
considered inherent (Mr. Bonami et al, 1997) to life: it
has always existed. However, the globalization of the
economy, information technology, the difficulty of pre-
dicting, the mangers are forced to perceive reality and to
master the complexity assumed increasingly growing.
By focusing on the effect of the environment complexi-
ty’s in strategic decision making, it was shown the need
for a practical approach based on a judicious use of the
information system. Such an approach will facilitate the
manager's strategic decision-making while encouraging
the mastery of this context.
This article therefore, proposes a reflection on strategic
decision making in the complex, it aims to show the
importance of information technology in solving this
problem and provide a model of strategic choice deter-
mination. This will enable businesses, through the de-
velopment of strategic intelligence, to make up their
backwardness in terms of learning and mastering the
environmental complexity.
Elle est aussi définie par Morin E (1986) comme Le développement de l’intelligence permet dans ce cas de
« l’aptitude à s’aventurer stratégiquement dans l’incertain, combler l’écart d’incompréhension entre le système et son
l’ambigu, l’aléatoire en recherchant et utilisant le maxi- environnement.
mum de certitudes, de prévisions, d’informations.» De ce fait, et en se trouvant soumise à la complexité envi-
Partant d’une telle définition, cet auteur considère ronnementale, l’organisation doit éviter de creuser cet écart
l’intelligence intimement liée à la pratique de la stratégie. par une ouverture sur le monde externe. Elle doit donc
Cette dernière « ne peut se concevoir sans intelligence, arriver à contourner les conséquences de la complexité, de
sans acquisition de connaissance, sans adaptation à l’incertitude et de l’imprévisibilité.
l’incertain et au complexe ». Supposée comme une adaptation à l’illusion, l’intelligence
En effet, la stratégie est envisagée comme « l’art d’utiliser doit se baser sur « une surveillance et une cogitation cons-
les informations qui surviennent dans l’action et être apte à tante sur les faits et événements qui surgissent dans
rassembler un maximum de certitude pour affronter l’environnement du décideur. » (Marmuse C, 1992)
Une telle constatation conduit essentiellement à l’idée de - En bonne partie extravertie et non pas uniquement intro-
veille stratégique. vertie dans le sens où elles permettent de se renseigner sur
2-2-1-2) De l’information stratégique à la veille les capacités, les forces et faiblesses de l’entreprise et
d’autre part, sur son environnement et son évolution.
stratégique
- Qualitatives plus souvent que quantitatives puisqu’elles
En permettant le développement de la capacité de
se rapportent à des faits qui ne sont pas nécessairement
l’entreprise à identifier les opportunités stratégiques et à en
réalisés ou bien ne sont pas encore connus de façon chif-
évaluer la qualité potentielle, l’intelligence stratégique est
frée. Elles se présentent de ce fait sous diverses formes:
supposée aboutir à une surveillance active de
textes (coupure de presse, lettre confidentielle), dessin,
l’environnement.
plan ou photographie, communication téléphonique ou
Or, on ne peut parler de système de scanning et orale...
d’intelligence sans évoquer le concept d’information.
- Des signaux faibles, incomplets et incertains dans le sens
Tel qu’évoqué par March J.G (1991) : « on mesure où elles doivent permettre une anticipation suffisamment
l’intelligence d’une organisation à sa capacité de se procu- précoce pour que l’entreprise puisse agir en temps voulu et
rer, d’analyser et de retrouver les bonnes informations en tirer profit du changement plutôt que le subir.
temps voulu ».
Considérée comme l’essentiel des procédures de fonction-
En se basant sur un article intitulé « Informé la décision ou
nement d’une organisation, la mise en place d’un système
décider de l’information », de Le Moigne JL, Lesca H
d’information doit permettre au manager de décider intelli-
(1986) présente la limite à la quelle il faut aller dans la
gemment, d’exercer son rôle d’observateur et de décou-
collecte des informations sur l’environnement de
vreur au sein de cette unité.
l’entreprise.
Assemblé au système de décision, ce système doit conduire
Il s’agit ainsi de « bien décider de l’information puis
à l’idée d’information stratégique.
d’informer la décision. Ce n’est pas l’information qui con-
L’information stratégique : duit généralement à la décision mais c’est la décision qui
En cherchant la survie dans un environnement où la com- conduit à une observation, une recherche et une collecte
plexité et la turbulence ne cessent de croître, l’entreprise d’informations ».
doit être capable de saisir les inflexions de son milieu ex- Toutefois, et en se trouvant largement ouverte sur
terne et à y adapter sa stratégie aussi rapidement que pos- l’extérieur, l’entreprise peut avoir le risque d’être surchar-
sible. gée d’informations.
La détection de telles inflexions nécessite la mise en place Afin d’éviter ce risque, Schneider S.C (Lesca H, 1986)
d’un système d’information stratégique permettant suppose la nécessité d’une sélection des informations pour
l’analyse, l’élaboration et le suivi de la stratégie de ne retenir que celles qui sont jugées pertinentes.
l’organisation.
En se basant sur la remarque de Gilad T et Gilad B (1986),
Tels que suggérés par Courdon J.C (1993), les S.I.S: Sys- selon laquelle l’évaluation et la sélection des informations
tèmes d’Information Stratégique, présentent une double ne peuvent être que le fait des experts situés au niveau des
vocation « d’une part, il s’agit de générer, de maintenir et états majors de l’entreprise, Lesca H (1986) analyse la
d’exploiter l’information qui sert à élaborer une stratégie et collecte des informations sur l’environnement et la sélec-
d’autre part, ils doivent permettre de suivre sa réalisation et tion des informations pertinentes:
de susciter des adaptations si nécessaires ».
- La collecte doit être faite par tout membre de l’entreprise
Ayant pour objet principal de nourrir le processus de déci- en contact avec l’extérieur quel que soit son niveau hiérar-
sion stratégique, ce système doit se baser sur des informa- chique et ses responsabilités.
tions de nature aussi stratégique.
- La sélection ne peut être faite que par des membres de
Telle que définie par Mayere A (1993), cette notion l’entreprise qui sont parfaitement au courant de la stratégie
d’information stratégique repose sur la distinction clas- de l’entreprise et qui disposent de critères pour séparer les
sique entre l’information de fonctionnement, mobilisée informations pertinentes des autres.
pour l’activité courante de l’entreprise et l’information
Quant à la qualité de cette information, Lesca H (1986)
stratégique mobilisée pour les décisions d’orientation.
définit un certain nombre d’indicateurs repartis en quatre
Considérées le plus souvent comme étant subjectives, ces grands volets: la pertinence ou encore l’utilité actuelle ou
informations doivent présenter certaines caractéristiques potentielle, l’actualité (la fraîcheur), la fiabilité et la ri-
opposées à celles du système de gestion opérationnelle. chesse ou variété des informations recueillies.
Telles que développées par Lesca H (1986), ces informa- Détecter mieux et plus vite que les autres les voies de réus-
tions doivent être: site dépend selon Marmuse C (1992) de la possession d’un
- Prospectives et non rétrospectives puisqu’elles visent à spectre d’observation de l’entreprise qui doit être de plus
éclairer les options futures de l’entreprise. en plus large.
Il s’agit ainsi de s’ouvrir de plus en plus sur le monde ex- En se référant au modèle du processus de prise de décision
terne tout en augmentant la capacité d’écoute prospective de H. Simon, Lesca H et Caron M.L (1995) situent la veille
de l’environnement, d’où l’importance de la veille straté- stratégique dans la phase intelligence de l’environnement
gique. de l’entreprise. Il s’agit ainsi d’une phase de recherche
d’informations, d’interprétation et de « construction d’une
vision » de l’environnement.
La veille stratégique :
Comparée aux autres veilles : technologique, commerciale
En cherchant à éviter le risque de surinformation, ou sociale et culturelle, cette veille présente un caractère
l’entreprise doit employer des informations à caractère synthétique.
anticipatif.
En permettant d’intégrer l’ensemble des paramètres qui
En permettant d’anticiper les ruptures pouvant se produire favorisent à l’entreprise de garantir sa compétitivité, la
dans l’évolution de l’environnement socio-économique et veille stratégique aboutit « à mieux situer les enjeux et
technologique de l’organisation, la veille stratégique se alimenter le processus de décision stratégique de
présente comme « un outil d’aide à la décision straté- l’entreprise » Delbès R (1995).
gique » (Marmuse C, 1994).
En cherchant à mettre en oeuvre un système d’information
Elle est définie ainsi comme « le processus informationnel pour cette veille, l’entreprise doit déterminer ce qui doit
par lequel l’entreprise détecte et traite les signaux annon- être surveillé dans son environnement, les processus lui
ciateurs d’événements susceptibles d’influer sur sa péren- permettant d’effectuer cette tâche et la façon dont cette
nité » (Lesca H et Caron M.L, 1995). information sera structurée et stockée dans la mémoire de
En effet, de point de vue des gestionnaires, pour informer l’organisation.
sur ses décisions l’entreprise a besoin de veille stratégique. Pour contribuer efficacement à la prise de décision, Delbès
Toutefois, l’organisation de l’opération de veille nécessite R (1995) présente une méthodologie de veille reposant sur
plusieurs opérations de traitement de l’information, telles quatre phases:
que la recherche, la collecte, la diffusion, l’analyse statis-
tique, l’analyse de la valeur et la synthèse ce qui représente - Une définition des besoins.
en général la base de tableaux de bord permettant à - une collecte d’information.
l’entreprise de rester à l’état de veille (Guedj N, 1992) - un traitement de l’information.
Le meilleur moyen est d’œuvrer selon El Quasmi M.J et - et une diffusion des résultats.
Kriouile A (2003) pour une planification réfléchie du sys-
tème d’information qui doit précéder le processus Le veilleur doit de ce fait commencer par une évaluation
d’élaboration de la stratégie. des besoins des décideurs en information, il dresse pour
chaque utilisateur important ou chaque département sa
Cependant, en évoquant l’approche de la planification vue fiche de besoins en information stratégique.
par les informaticiens, ces auteurs montrent que la défini-
tion des orientations stratégiques de la firme doit se faire Cette fiche permettra de lui transmettre les informations
avant de lancer l’opération de la planification du système dont il a réellement besoin. Ce veilleur va s’attacher à éta-
d’information dans la mesure où le futur système doit sup- blir une liste des priorités regroupant les questions les plus
porter la stratégie. cruciales que l’on se pose sur les différents intervenants
dans le secteur. Dans la phase de collecte d’information, il
Telle que perçue, la planification du système d’information cherchera à combiner l’information formelle accessible à
vue par les informaticiens doit partir de trois volets essen- travers les banques de données et des informations infor-
tiels (El Qasimi M.J et Kriouile, 2003): melles provenant des sources diverses telles que l’expertise
-la stratégie de l’entreprise déjà tracée par les gestion- des acteurs du secteur: clients, fournisseurs, publications
naires, locales...
-l’évolution des technologies de l’information, Concernant la participation à la veille, le veilleur fait par-
- l’état actuel de l’organisation et du système ticiper en interne tous les collaborateurs qui détiennent ou
d’information. peuvent recueillir l’information en particulier en interface
avec l’extérieur (vendeur, acheteur, membre de la direc-
En présentant ces deux points de vue, ces auteurs montrent tion...) et en externe, les fournisseurs, les clients, les inter-
que la relation stratégie/ système d’information n’est pas médiaires. Ces acteurs constituent le réseau de veille dont
linéaire les deux dimensions doivent être pensées simulta- le veilleur sera l’animateur.
nément de manière interactive. Ayant regroupé l’information, ce dernier doit l’évaluer, la
Les innovations techniques peuvent être à l’origine commenter et en tirer une synthèse qui réponde aux at-
d’évolutions stratégiques et la stratégie doit être le vecteur tentes des décideurs pour la diffuser à ces différents inter-
de l’évolution du système d’information. venants au moment voulu et dans la forme voulue.
Concernant la délégation de cette veille stratégique, cer- L’entreprise, face à une masse importante d’information, se
tains auteurs dont notamment Cantegreil F (1991), affir- trouve confrontée à un problème de traitement de cette
ment l’impossibilité d’une telle action. dernière.
Toutefois, cet auteur suggère la possibilité de construction En se référant au modèle de Galbraith J.R (Le Moigne J.L,
d’une cellule de vigilance recherchant hors de l’entreprise 1974), l’entreprise pourra choisir entre deux alternatives:
et sous le contrôle direct du dirigeant des informations dans - l’augmentation de sa capacité cognitive à travers une
des domaines qui lui auraient été définis préalablement. utilisation judicieuse de ses matériels informatiques,
L’exploitation de ces informations reste ainsi la tâche de la - et la réduction du degré de complexité et d’incertitude à
direction de l’entreprise. travers un renforcement des procédures de surveillance
Convaincue de la nécessite du développement de sa capaci- dans l’organisation. Ce qui permettra de réduire la quantité
té d’écoute dans le cadre de cette complexité de d’information qu’elle a à traiter.
l’environnement, l’entreprise se trouve en face d’une
masse importante d’information provenant de la perception Toutefois, d’autres auteurs ont aussi proposé une troisième
complexe et incertaine de l’environnement. Un problème alternative consistant essentiellement dans l’insertion d’un
de traitement de cette information se pose. processus participatif au sein de l’entreprise. Ce dernier
2-2-1-3) De la veille stratégique au manage- permettra d’accroître la quantité d’information pertinente
ment par processus et la capacité à la traiter.
La sélection des informations de veille stratégique est per- 2-2-2-1) Automatiser la gestion de l’information
çue comme une étape importante mais difficile (Thietart
A travers le choix de la première alternative, l’entreprise
R.A, 1981), (Aker D.A, 1983), (Lesca H, 1994), (Gibbons
P.T, 1996). mettra en évidence l’importance des enjeux technologiques
de l’information: il s’agit de l’automatisation de la gestion
Ces difficultés résident selon El Qasmi M.J, dans :
de l’information suite à l’arrivée des ordinateurs.
-le manque de motivation pour coopérer, sélectionner et En facilitant le stockage, ces outils sont censés manipuler
pour transmettre l’information (Thietart R.A, 1981), (Typ-
des quantités d’information importantes.
son K.W.M, 1986, Gilad B et Gilad T, 1988, De Guerny J,
1994), En adoptant comme argument principal la rapidité de
-discerner les informations de veille stratégiques surtout en l’accès à l’information et donc la rapidité proportionnelle
situation de surcharge d’information et de pression de de la décision et de la réaction, Simon H (1989) précise
temps, que le couple ordinateur-système d’information représente
-la difficulté d’extraire ou de diffuser l’information de ma- une force de travail inépuisable en énergie et en régularité
nière continue, et une infatigable force de gestion qui n’a aucune préten-
-avoir du mal à distinguer l’utilité des différentes informa- tion à partager les fruits des activités de l’entreprise.
tions. En permettant d’accéder et d’interagir avec les données,
En dégageant ces difficultés, El Qasmi M.J montre que la « de les manipuler pour en faire une information avec
veille stratégique ne peut pas garantir la recherche des in- « une valeur ajoutée » vis à vis des problèmes rencontrés
formations pertinentes. Cette recherche a besoin d’outils et
par le gestionnaire » (Courdon J.C, 1993), le système
de dynamique et dont la mise en place se fait en plusieurs
étapes : d’information arrivera à assurer la fonction de traitement
de l’information.
-la gestion du cycle de vie de l’information qui passe par la
cartographie des processus de l’entreprise, Cette fonction se pose dès que l’entreprise se trouve con-
-l’analyse de l’organisation en identifiant les processus frontée à un problème de gestion des informations.
clés, Seules les informations présentées sous forme de banque
-la mise en œuvre du management par processus pour une de données font l’objet de ce traitement informatique, les
vision transversale de l’entreprise, informations présentées sous forme de rapports, de syn-
-et enfin la diffusion de l’information utile. thèse, de tableaux arrivent toutes traitées au gestionnaire et
D’où, la nécessité d’une mise en œuvre d’un management les informations présentant le caractère informel ne justi-
par processus pour trouver l’information pertinente. fient pas le recours à une quelconque technologie.
Selon Mougin Y, un système de management des proces- Telles que présentées par Courdon J.C 1993), ces données
sus est une des composantes du management général des collectées doivent être transformées à travers divers logi-
organisations. Il consiste à comprendre et à formaliser le ciels. Des calculs élaborés sur les données collectées per-
mécanisme interne d’une entreprise à travers
mettent de ce fait, de construire des modèles d’aide à la
l’identification des processus et de leurs interrelations. La
maitrise des processus est basée sur la mise en œuvre de décision. Il s’agit des Systèmes Experts (S.E) ou des Sys-
bonnes pratiques de travail, sur la connaissance des finali- tèmes Interactifs d’Aide à la Décision (S.I.A.D) ayant pour
tés de chaque processus et sur l’établissement de contrats ambition d’assister le décideur dans le processus de prise
d’interfaces. de décision.
Il faut noter que dans toutes ses recherches Simon H a ess- S’agissant des limites de la délégation, Koremblet P et
sayé d’analyser l’impact des ordinateurs sur l’art de la ges- Loyole G (1986) notent la nécessite de la distinction entre
tion (Thomson R.A et Clark K, 1992). l’ordinateur aug- distribution du travail et délégation, à leur égard, cette der-
mente les capacités de traitement de l’information pour nière doit commencer avec la marge de manœuvre de
l’organisation, il permet d’augmenter le degré de rationali- l’échelon inférieur sur la manière de réaliser le travail:
té collective et de développer des réponses appropriées à « Un glissement dangereux consisterait à faire la marge de
des situations d’incertitude (Reix R, 1995). manœuvre le travail lui-même et non le comment du tra-
A cet effet El Qasmi M.J et Kriouile A. montrent que vail ».
l’informaticien et le responsable du système d’information En précisant les deux limites d’une telle action, ces deux
ne doivent plus se contenter du rôle du technicien, les ta- auteurs notent le risque de la mise en cause de l’autonomie
bleaux de bord, la datawerhouse, le datamining et la veille du supérieur hiérarchique et d’une motivation du subor-
stratégique doivent faire acte de présence active durant tout donné liée à une réduction du pouvoir de décision portant
le processus stratégique, leur rôle principal étant sur le « comment ».
d’augmenter la rationalité limitée de l’entreprise et
d’améliorer son intelligence de traitement de l’information
(Garmilis A, 1992). Ayant ainsi défini ce concept de délégation de pouvoir, on
En effet, l’utilisation du datawerhouse comme outil néces- notera l’utilité d’une telle action dans le cadre d’une prise
saire au système d’information décisionnel permettra de de décision stratégique dans la complexité.
relier les différentes bases de données, extraire les infor- Partant de la nature décentralisée de ce type de décision, le
mations selon les différentes prises de décisions et alimen- dirigeant se limitera à une délégation des actions de col-
ter le tableau de bord général qui va jouer le rôle de copi- lecte et de traitement de l’information d’une part et de la
lote et supporter la stratégie de l’entreprise. réflexion stratégique d’autre part et ceci afin de se libérer
2-2-2-2) La délégation de pouvoir pour ses tâches spécifiques ; de politique générale, de
prospective et du choix stratégique.
En envisageant la décision de groupe, l’entreprise peut
penser aussi à déléguer certaines responsabilités.
2-2-2-3) Le renforcement des procédures de
surveillance
Telle qu’évoquée par Froissart D (1991), la délégation de
responsabilités signifie seulement une sorte de contrat par- En cherchant à réduire la quantité d’information à traiter et
ticulier entre un cadre et son patron, le patron fournissant collectée dans le cadre d’une complexité environnemen-
les moyens et laissant au cadre le soin de décider de tale, l’entreprise peut chercher à renforcer ses procédures
l’utilisation de ces moyens et de prendre les initiatives né- de surveillance ou de veille stratégique.
cessaires à la réalisation de l’objectif, la contre partie du En évoquant la question de traitement des informations
contrat est que l’objectif soit réellement atteint. pour le management stratégique, Lesca H (1986) note la
nécessité de l’extraction des connaissances des personnes
susceptibles d’être à l’écoute de l’environnement afin de - La course aux parts de marché et la mondialisation de la
construire la banque d’information de l’entreprise. concurrence.
Il s’agit ainsi du passage du savoir individuel des scruta- - La révolution télématique ayant ouvert à une diffusion
teurs de l’environnement au savoir collectif formalisé et rapide de l’information.
transmissible pour constituer l’intelligence de l’entreprise - Les mutations profondes des univers de consommation.
ou une mémoire collective de l’entreprise.
De point de vue interne, la complexité trouve son origine
Dans leur article « Veille stratégique: créer une intelligence dans le fait que l’entreprise est un ensemble humain et
collective au sein de l’entreprise », Lesca H et Caron ML qu’elle ne peut être traitée uniquement selon la dimension
(1995) ont proposé une méthode permettant d’élaborer une fonctionnelle du travail.
vision collective des évolutions cruciales de
l’environnement. En partant d’une telle constatation, Morin E (1990) consi-
dère l’entreprise comme un milieu humain complexe. Il
Ce travail trouve sa justification dans la rareté des outils justifie son point de vue par le besoin « d’inventivité », la
disponibles permettant le traitement des informations de nécessité de lutter contre la « sclérose bureaucratique » et
veille stratégique. par le besoin de plein emploi des aptitudes de chacun.
En partant de la conclusion de Mintzberg H selon la quelle Suite à une telle présentation, l’action simultanée sur la
les dirigeants synthétisent les informations plutôt qu’ils ne complexité des deux milieux s’avère nécessaire, on aboutit
les analysent, ces deux auteurs ont retenu deux hypothèses de ce fait à une troisième voie consistant dans le dosage:
pour la construction de leur méthode: augmentation de la complexité de l’entreprise /réduction de
- Quelques informations peuvent être suffisantes pour la complexité ambiante.
amorcer la construction d’une représentation visuelle. L’adoption d’un tel dosage trouve sa justification dans
- L’utilisation de relation entre les informations est essen- l’aspect complémentaire de ces deux options stratégiques.
tielle. En effet, et en cherchant à augmenter sa propre complexité,
Deux phases principales ressortent de ces postulats: le re- l’entreprise doit se doter des compétences lui permettant de
groupement d’une part et la création de liens entre les in- dominer et de maîtriser son environnement. Il s’agit en
formations d’autre part. conséquence, de capter et d’interpréter des signaux nou-
veaux, de créer de nouvelles configurations, de décider et
de choisir celle la plus créatrice.
Tels qu’évoqués, les différents moyens proposés doivent
permettre un meilleur traitement de la masse importante En développant son intelligence stratégique, l’entreprise
d’informations collectées dans le cadre d’une complexité arrivera à améliorer sa capacité d’identification des oppor-
environnementale. tunités stratégiques.
Une telle action aboutit à une surveillance active de
3) La place du système l’environnement permettant de collecter, de se procurer et
d’information dans le modèle de de retrouver l’information stratégique en temps voulu.
choix stratégique par dosage Ce type d’information permet à l’entreprise de saisir les
En définissant la complexité par la multiplicité inflexions de l’environnement et à susciter des adaptations
d’interactions et d’incertitudes, Morin E (1990) considère si nécessaires.
l’entreprise comme une unité concernée par la complexité Développer son intelligence stratégique et se doter d’un
de façon à la fois externe et interne. système de veille stratégique sont de ce fait considérées
D’une façon externe parce qu’elle se situe dans un marché comme deux conditions nécessaires pour la flexibilité et la
qui se trouve de plus en plus mondialisé et où joue toute réactivité de l’entreprise. (Fig1)
une série d’incertitudes. La mondialisation s’accompagne Le degré de développement Capacité de l’entreprise à
d’une internationalisation du milieu social, économique et de l’intelligence stratégique {- réagir vite
culturel.
et de veille stratégique {- être flexible
Cette évolution marquante de l’environnement est expli-
quée par Bargaud D (Morin E, 1990) par: Fig 1
- La recherche par les entreprises de volumes supplémen- D’autre part, et en prenant en considération la caractéris-
taires (volume de production plus important pour mieux tique extravertie et non seulement introvertie de
saturer les outils industriels et bénéficier à plein des éco- l’information stratégique, on considère cette dernière
nomies d’échelle). comme une nécessité pour la réalisation de la segmentation
stratégique au sein de l’entreprise dans le sens où elle per-
- Le développement entre les pays des flux de personnes, mettra de se renseigner sur ses capacités, ses forces, ses
de capitaux, de produits et surtout d’informations. faiblesses et sur l’évolution de son environnement. (Fig 2)
Développement La segmentation stratégique
de l’information gique pour la promotion de la réactivité de l’entreprise et
stratégique de l’information stratégique pour la réduction de la com-
plexité spatiale à travers la mise en place de la segmenta-
Fig 2 tion stratégique.
En effet, pour formuler des orientations cohérentes par S’agissant de la deuxième voie à savoir la réduction de la
rapport à la capacité stratégique de l’organisation, il im- complexité spatiale, elle consiste dans la réduction de la
porte de faire le point sur les forces et les faiblesses, les variété future des conduites par l’action dans des segments
activités à valeur ajouté, le cœur de compétences et le por- d’environnement plus aisément maîtrisables et d’une ré-
tefeuille de relations de l’organisation (Coté M et al, 2008). duction de la complexité temporelle à travers une recherche
En partant de la constatation de Marmuse C (1992) selon la accrue de la réactivité et donc de la flexibilité.
quelle « détecter mieux et plus vite que les autres les voies Concernant la réactivité, Burgaud D (1995) l’exprime à
de réussite dépend de la possession d’un spectre travers l’assouplissement des structures et le renversement
d’observation de l’entreprise supposé être de plus en plus de la tendance d’une rigidité hiérarchique vers une plus
large », réagir vite et le mieux possible devient dépendant grande souplesse participative.
de l’ouverture de l’entreprise sur le monde extérieur et du
degré de développement de sa capacité d’écoute prospec- A travers cette dernière, l’entreprise arrivera à raccourcir
tive de l’environnement. son temps de réponse et donc à mieux réagir.
Une telle action permettra à cette unité de détecter et de Telles que développées par Rivard S (2003), les structures
traiter les signaux annonciateurs d’événements susceptibles décentralisées se sont développées comme un moyen
d’influer sur sa pérennité. d’institutionnaliser la flexibilité nécessaire à la prise de
décision à travers les frontières des unités et de permettre
Définie comme un instrument permettant aux décideurs de le changement rapide selon les exigences de
définir et d'orienter les stratégies des organisations pour l’environnement, tout en assurant une vision commune et
réaliser des activités complexes dans un environnement une stabilité dans l’exploitation.
incertain (Merindol V, 2008), la prospective notamment
stratégique, permettra d’explorer de nouvelles opportuni- Suite à une augmentation de la complexité de l’entreprise,
tés (Godet M, 2001). cette souplesse ou flexibilité est censée permettre la délé-
gation des actions de collecte et de traitement de
En tant qu'activité tournée vers l'exploration de nouvelles l’information jugée pertinente pour la maîtrise de la com-
solutions, la prospective constitue un outil visant à favori- plexité environnementale. (Fig 4)
ser l'apprentissage organisationnel (Bootz J.P, 2003 ;
Blakman D.A et al, 2004). L'objectif est d'améliorer la Réagir vite Délégation des actions de collecte
capacité des individus à anticiper, à donner du sens aux (souplesse et de traitement de
évolutions (Lesourne J, 1995) et à accroître leurs aptitudes, structurelle) l’information
à remettre en cause leur perception de la réalité ou les Fig 4
orientations stratégiques de l'organisation. D’autre part, et en adoptant comme argument principal, la
rapidité de l’accès à l’information et donc la rapidité pro-
De même et en rappelant les caractéristiques des entre- portionnelle de la décision et de la réaction, Simon H
prises ouvertes sur l’extérieur, à savoir la volonté de (Lesca (Maktouf O, 1989) montre l’importance du couple ordina-
H, 1985): teur/système d’information dans l’accomplissement de
telles actions.
- mieux s’adapter et plus vite que les concurrents,
Par conséquent, l’automatisation de l’information ne peut
- pré agir plutôt que réagir, être considérée qu’une condition nécessaire pour la rapidité
- innover avec succès et être prête au bon moment, on de la réaction. (Fig 5)
confirme l’idée selon la quelle l’ouverture sur l’extérieur et Automatisation Rapidité de réaction
par conséquent, le développement de la veille stratégique,
sont des conditions nécessaires pour susciter la réactivité de l’information
de l’entreprise. (Fig 3) Fig 5
L’ouverture sur l’extérieur
Le développement de la capacité d’écoute Réactivité S’agissant de la réduction de la complexité spatiale qui
La prospective de l’environnement de l’entreprise consiste à agir dans des niches de segments bien réduits de
Fig 3 l’environnement, on note la nécessité de la connaissance:
CONCLUSION :
En analysant le processus de décision stratégique dans la
complexité, on a pu concevoir un modèle de choix straté-
gique par dosage (Fig 7) mettant en évidence le rôle impor-
tant du système d’information dans une telle action.
En effet, en développant son intelligence stratégique,
l’entreprise arrivera à reconnaître sa situation probléma-
tique. Une collecte judicieuse de l’information, son traite-
ment et sa communication devront lui permettre de conce-
voir des options stratégiques adaptées à un environnement
de plus en plus complexe.
A travers des actions simultanées sur la complexité tempo-
relle grâce au modèle de réactivité et sur sa complexité
spatiale en opérant dans des champs plus réduits,
l’entreprise pourra envisager des stratégies adéquates à son
domaine d’activité tout en développant sa capacité à réagir
vite et dans les meilleures conditions.
Quant au choix stratégique le plus adéquat il doit découlé
d’une évaluation des stratégies envisagées sur la base
d’une combinaison des outils d’aide à la décision d’essence
aussi bien heuristique que scientifique faisant appel à la
technologie de l’information.
--- : Aspect complémentaire des actions A/R
Maîtrise de la complexité
Développement de
l’intelligence stratégique Réduction de la Réduction de la
complexité spatiale complexité temporelle
Veille stratégique
Segmentation stratégique
Recherche de l’information
Traitement de Délégation de
l’information pouvoir
Renforcement des
procédures de surveillance
Technologie de
l’information
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