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ANALYSE STRUCTURALE DES POLYMÈRES PAR COUPLAGE CG/SM ______________________________________________________________________________
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______________________________________________________________________________ ANALYSE STRUCTURALE DES POLYMÈRES PAR COUPLAGE CG/SM
Celle-ci dépend de l’équilibre qui s’établit entre la phase gazeuse et Avec ces types de détection, les informations obtenues pour iden-
la surface du solide où ils s’adsorbent. Cet équilibre est modifié tifier les produits après leur séparation sont faibles puisqu’elles se
lorsque l’on augmente la température de la colonne contenue dans limitent à un temps de rétention dans des conditions données, sans
le four du chromatographe. Le choix des types de colonne se fait identification plus précise des produits séparés.
en fonction de la polarité des produits susceptibles de se former et L’intérêt d’utiliser comme détecteur un spectromètre de masse
qui dépendent de la structure initiale du polymère [1] [3]. Le temps (SM), bien qu’il soit beaucoup plus onéreux que les autres types de
de sortie de chaque pic du mélange est appelé « temps de rétention » détecteur, est de pouvoir associer à chaque pic du chromatogramme
qui est caractéristique de la substance analysée. un ou plusieurs spectres de masse, ce qui permet une identification
La CG permet de séparer des quantités de produit comprises entre immédiate de la structure chimique du produit à analyser.
un milligramme (10 –3 g) et un nanogramme (10 –9 g). Plus le détec-
teur sera sensible, plus la quantité de produit à séparer pourra être ■ À ces trois éléments du chromatographe, il faut ajouter le circuit
réduite et plus la séparation sera facile. Dans le cas de la CG/SM, du gaz vecteur (phase mobile), gaz qui est choisi principalement en
les colonnes utilisées sont des colonnes capillaires et la phase sta- fonction du type de détecteur. Ce gaz doit être pur et inerte, avec
tionnaire est un solide poreux. des teneurs en eau et en oxygène minimales de manière à ne pas
modifier la polarité de la phase stationnaire par adsorption (eau)
ou en la décomposant lors de la montée en température (O2) dans
1.1.2 Appareillage le four du chromatographe. Dans le cas d’un détecteur de type SM,
on utilisera de l’hélium comme gaz vecteur.
Un chromatographe est composé de trois éléments principaux : Le gaz vecteur est introduit au niveau de l’injecteur et ressort au
un injecteur, une colonne dans une enceinte régulée en tempéra- niveau du détecteur. Il ne devra pas y avoir de fuite tout au long
ture, un détecteur. du circuit et le débit gazeux doit être régulé précisément
(régulateur de débit massique) de manière à avoir des temps de
■ L’injecteur permettra de déposer les produits à analyser en tête rétention reproductibles et des résultats quantitatifs constants.
de colonne chromatographique dans le circuit gazeux sans introduire Une fuite sur le circuit du chromatographe, très souvent située
de fuite, et de contrôler la quantité de produit injecté. Il en existe au niveau des raccords injecteur/colonne ou au niveau du septum
différents types, avec ou sans division de flux. Cet injecteur pourra d’injection, se traduit par des pics qui traînent, une ligne de base
être chauffé de manière à volatiliser tous les produits au moment instable, des temps de rétention non reproductibles.
de leur injection et à les recondenser en tête de la colonne de sépa-
ration avant le début de l’analyse. Dans le cas où les produits à ana- Sur la figure 1 est représenté le schéma de principe d’un chro-
lyser sont thermolabiles, on utilise des techniques d’injection comme matographe.
le procédé « on-column » qui permet de déposer les composés à
séparer directement sur la phase stationnaire de la colonne, à l’aide
d’une aiguille et d’une seringue, sans avoir à les chauffer.
1.2 Spectrométrie de masse (SM)
■ La colonne positionnée dans un four sera régulée très préci-
sément en température (± 0,2 oC), le temps de rétention d’un produit
dépendant considérablement de la température à laquelle il se La chromatographie permet de séparer les constituants d’un
trouve. La colonne est l’élément le plus important du chromato- mélange, mais si l’on souhaite obtenir une identification structurale,
graphe. Il en existe différents types qui diffèrent par leur longueur et il est nécessaire d’avoir recours à des techniques de caractérisation
par la nature de la phase stationnaire qu’ils contiennent. Les phases comme la spectrométrie de masse.
non polaires sont classiquement des diméthylsiloxanes. Les polari- Le problème majeur rencontré dans le cas d’un couplage CG/SM
tés de la phase stationnaire sont augmentées par greffage, sur ces résulte des différences de pression qui existent entre la colonne
colonnes, de phénylsiloxanes, avec des vinylsiloxanes ou des cyano- chromatographique et la source d’ionisation du spectromètre de
propylsiloxanes en faible concentration ; les phases polaires sont masse.
constituées par des phases à base de polyglycols modifiés. Plus la
phase stationnaire contenue dans la colonne sera polaire, moins
celle-ci sera thermostable et moins il sera possible de la chauffer pour
éluer les produits à séparer. Une colonne polaire a une température
d’utilisation maximale de 250 oC alors que les colonnes apolaires
actuelles peuvent être chauffées jusqu’à 350 oC. Il faut noter que,
depuis quelques années, des industriels spécialistes de la chromato-
graphie développent des colonnes capillaires pouvant supporter des
températures plus élevées (450 oC), ce qui nécessite que les colonnes
et les phases stationnaires pour ces colonnes soient thermostables.
L’épaisseur du film de phase stationnaire est de l’ordre du micro-
mètre, ce qui permet des échanges instantanés entre phase station-
naire et phase mobile et l’obtention de pics chromatographiques très
fins. Pour les séparations de produits de structures chimiques diffé-
rentes, on emploie des colonnes capillaires de 25 m de longueur,
alors que, si l’on doit séparer des produits de structure chimique très
voisine, on a recours à des colonnes de 50 m de longueur.
■ Le système de détection. Les produits séparés dans la colonne
chromatographique doivent être détectés, donc le rôle du détecteur
en sortie de colonne sera d’émettre un signal enregistrable et quan-
tifiable. Le détecteur est choisi spécifiquement en fonction des pro-
duits à analyser. Les plus classiques sont :
— les détecteurs à ionisation de flamme (FID) ;
— les catharomètres (détecteurs de conductivité thermique) ; Figure 1 – Schéma de principe d’un chromatographe
— les détecteurs à capture d’électrons... en phase gazeuse
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Dans le cas d’une colonne capillaire, le flux peut être envoyé ■ La source d’ions du spectromètre est le site d’ionisation des molé-
directement dans la source du spectromètre, alors que, dans le cas cules. La substance organique à analyser est introduite à l’état
d’une colonne remplie, le flux est trop important pour permettre de gazeux au voisinage d’un faisceau d’électrons accélérés et émis par
maintenir un vide de 10 –2 Pa dans la source. un filament porté à haute température. Ces électrons accélérés et
Le spectromètre peut être considéré, dans le cas d’un couplage focalisés constituent un courant d’ionisation. La collision entre ces
avec un CG, comme un détecteur dont le but est d’analyser en électrons et les molécules, qui ont un parcours moyen important du
continu la composition de l’éluat de la colonne. Cet éluat est constitué fait de la faible pression qui règne dans la source (vide primaire), va
par une succession de solutés dans le gaz vecteur (phase mobile) et permettre d’ioniser ces dernières pour former des ions moléculaires.
le signal obtenu est fonction du débit massique de substance. Le Ceux-ci, en fonction de leur stabilité pourront subir des fragmenta-
spectromètre en donne, à partir du rapport masse/charge d’ions tions. Tous les ions (moléculaires et fragments) seront repoussés à
(m /e), une identification et un dosage. l’extérieur de la source dès leur formation, pour être accélérés vers
la partie analytique de l’appareil.
Sur la figure 3 est représentée une source d’ionisation d’un
1.2.1 Principe spectromètre de masse.
M + e – → M •+ e –
M• symbolisant une molécule avec un électron non apparié
M + e – → M • + 2e–
M+ • est un ion radicalaire
M + e– → M ++ + 3e–
En fonction de leur énergie et de leur stabilité, ces ions pourront
se décomposer en fragments :
M + e– → M + •+ 2e– → A+ + B + 2e–
A et B sont des fragments issus de M.
Un exemple de spectre de masse est représenté sur la figure 2.
1.2.2 Appareillage
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À la sortie de la source d’ionisation, les ions formés sont accélérés 1.3 Couplage chromatographie /
uniformément vers l’analyseur. Ils ont donc tous une même énergie
cinétique, ce qui veut dire que leur vitesse est différente et dépend spectrométrie de masse
de leur masse. Ces différences de vitesse vont permettre à l’analy-
seur de les séparer.
Le problème du couplage dépend du type de colonne employée
■ L’analyseur a pour but de trier les ions en fonction de leur rapport et de la capacité de pompage du spectromètre. Pour réaliser un inter-
masse/charge. Il est maintenu sous un vide secondaire de manière façage correct, il faut pouvoir transmettre intégralement les consti-
à éviter les collisions entre les ions et les molécules atmosphé- tuants à analyser, sans les dégrader et sans modifier la séparation
riques, et pour détecter précisément la masse des ions à partir de chromatographique.
leur énergie cinétique. La volatilisation des produits en sortie du chromatographe dans
Il existe trois types d’analyseur : le spectromètre de masse étant assurée par le vide qui règne dans
— ceux combinant un champ magnétique et un champ électro- la source de l’appareil, le problème majeur rencontré dans l’analyse
statique ; des polymères par CG/SM est celui de leur introduction dans le
— les quadripôles ; spectromètre (cf. § 2).
— et, depuis une dizaine d’années, les pièges à ions (ion trap). La CG/SM permet d’obtenir pour les polymères, dans le cadre de
L’analyseur triera les ions par exemple en utilisant un champ leur analyse et de leur caractérisation, et en se basant sur l’ensemble
magnétique perpendiculaire au déplacement des ions (spectro- des produits détectés et identifiés par SM :
mètres magnétiques), ou un champ sinusoïdal (spectromètres qua- — un chromatogramme, empreinte pour l’identification du
dripolaires), ou un champ haute fréquence (spectromètres à trappe polymère analysé (à partir de la CG) ;
d’ions). et à partir de l’exploitation des spectres de masse :
Si les SM magnétiques utilisent un aimant et un champ électrique — les séquences d’enchaînement des motifs monomères ;
pour dévier la trajectoire des ions accélérés et pour les trier, avec — les branchements, les nœuds de réticulation et les substituants
une haute résolution, le filtre de masse quadripolaire est constitué latéraux des chaînes polymères ;
de quatre barres parallèles entre lesquelles on applique un potentiel — les séquences des copolymères et les modifications induites
continu et un potentiel de radiofréquence. Le piège à ions combine, par les systèmes de polymérisation ;
quant à lui, un champ électrique radiofréquence et un champ de — les adjuvants et les impuretés présents dans les matériaux.
potentiel continu qui permet de confiner les ions à l’intérieur d’une
cellule cylindrique. Un spectre de masse est obtenu en éjectant pro- L’identification des polymères nécessite de faire appel aux diffé-
gressivement les ions piégés par balayage du champ de radio- rentes techniques d’ionisation [4] d’une part l’impact électronique
fréquence. On trouvera de plus amples renseignements sur ces (IE), d’autre part les techniques d’ionisation chimique (IC). L’IC, qui
types d’analyseurs dans les articles de la littérature [1] [5] [6]. est un processus d’ionisation plus doux que l’IE, permettra de réduire
les fragmentations et, de ce fait, conduira à une détermination plus
■ Les détecteurs seront des amplificateurs (dynodes, ...) qui trans- aisée des enchaînements structuraux des motifs monomères.
formeront le courant ionique en sortie de l’analyseur en un courant La structure des polymères sera établie en interprétant les spectres
électrique. On reliera le moment précis du signal de détection enre- de masse de la même manière et avec les mêmes règles de fragmen-
gistré à la masse de l’ion détecté. Il existe deux types principaux tation que celles employées pour interpréter les spectres de masse
de détecteurs utilisés dans les spectromètres de masse : les multi- de composés organiques. En plus, on se basera sur :
plicateurs d’électrons à dynodes et les multiplicateurs tubulaires
— les possibilités de coupures spécifiques et de recombinaison
(channeltron ). Ces derniers sont moins coûteux et plus stables dans
des fragments ;
le temps, mais ils sont moins sensibles et présentent un bruit de
— les séquences répétitives des motifs monomères ou copoly-
fond plus important.
mères ;
Sur la figure 4 sont représentées schématiquement les différentes — le fait que les coupures s’effectuent de manière préférentielle
parties constituant un spectromètre de masse. entre les monomères pour former des ions stables ;
— les enchaînements des ions dans les spectres de masse.
L’ionisation chimique directe (DCI), qui permet une introduction
directe des échantillons dans la source du spectromètre de masse,
pourra également être employée en complément des analyses
CG/SM. Elle permet de déterminer des masses molaires pour des
molécules ayant des masses plus élevées que celles analysées avec
l’IC classique, les molécules à analyser n’ayant pas à être éluées à
travers la colonne capillaire du chromatographe.
Pour l’analyse des polymères, on doit également citer, en plus de
la CG /SM, les développements particuliers liés aux techniques
d’ionisation, en particulier l’électrospray (chromatographie
liquide/SM) qui permet d’introduire des molécules multichargées
intactes [7] et l’ionisation à pression atmosphérique (API) qui permet
de détecter des molécules de très hautes masses moléculaires.
Un tableau non exhaustif des principaux fournisseurs de systèmes
d’analyse par CG/SM est donné en [Doc. A 3 273]. Des renseigne-
ments complémentaires sur les techniques d’ionisation peuvent être
trouvés dans la référence [7] et auprès des différents fournisseurs
Figure 4 – Schéma de fonctionnement de tout type de SM (résonance cyclotronique ionique FTICR ; temps
d’un couplage chromatographe gazeux/spectromètre de masse de vol TOF) sur leurs récents développements.
Le tableau 1 récapitule les moyens d’introduction des polymères
(thermoplastique ou thermodurcissable – avant ou après mise en
œuvre) dans un système CG/SM en vue de l’identification de leur
structure et de leurs constituants. Il présente également les avan-
tages et inconvénients liés à chaque moyen. (0)
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Cassures spécifiques des polymères permettant • Analyse très rapide des échantillons
• Très faible quantité d’échantillon
DCI/SM de remonter à leur structure par interprétation • Pas de séparation des produits de thermolyse
des spectres de masse • Interprétation délicate des spectres de masse
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3.2 Thermodurcissables
Dans la plupart des cas, avant leur réticulation, les constituants
des polymères thermodurcissables ont des masses molaires relati-
vement faibles (de l’ordre de 1 000). Une analyse directe par cou-
plage CG/SM est possible, en employant une colonne apolaire, après Figure 6 – Courbe d’analyse thermogravimétrique
solubilisation des prépolymères et des adjuvants dans des solvants d’un copolymère styrène/dicyclopentadiène
comme l’hexane, le diéthyléther, l’acétone ou le chloroforme. Dans
ces analyses, l’intérêt de la SM, technique qui possède une très
bonne sensibilité, de l’ordre de quelques nanogrammes pour chacun
des constituants à analyser, est qu’une dilution très importante des 4. Analyse des polymères
échantillons pourra être employée de manière à limiter les réactions
thermiques dans l’injecteur du chromatographe. L’identification des après mise en œuvre
produits s’effectue de manière similaire à celle employée pour iden-
tifier un composé organique. La technique de choix pour l’analyse des polymères est le couplage
Sur la figure 6 on a reporté le schéma de dégradation d’une PY/CG/SM. Pour les thermodurcissables qui, après mise en œuvre,
chaîne vinylester de type bisphénolique à terminaison métha- sont insolubles et infusibles, c’est même le seul moyen d’analyser
crylate de méthyle, en précisant les fragments les plus importants leur structure.
identifiés par SM, fragments qui sont spécifiques de la chaîne Le choix de la température de pyrolyse se fait en fonction des
macromoléculaire vinylester étudiée. L’identification de l’ensemble analyses thermogravimétriques qui peuvent être effectuées de
des ions présentés sur la figure 6 permet, par recombinaison de manière conjointe. On choisit les températures les plus représen-
ceux-ci, de remonter à la structure du polymère de départ. Par tatives des pertes de masse successives qui ont été enregistrées.
exemple, la détection d’ions à des masses molaires de l’ordre de La figure 7 représente le thermogramme d’un copolymère
1 000 permet de conclure que le nombre de motifs répétitifs n de styrène/dicyclopentadiène (DCPD) sur lequel les températures choi-
la chaîne est égal à 3. sies pour la pyrolyse ont été mentionnées. Plus la température est
Pour une analyse complète des constituants des polymères, élevée, plus la quantité et le nombre de produits dégagés sont impor-
basée sur des techniques de préparation des échantillons par tants. Pour faciliter l’analyse du polymère, on a intérêt à effectuer
gonflement ou par extraction, il faut faire attention à obtenir un plusieurs analyses successives, à des températures de plus en plus
prélèvement représentatif, avec une bonne solubilisation de tous élevées. Au-delà d’une température seuil, dépendante du polymère
les constituants (absence de précipité). L’intérêt de l’analyse des à analyser, une élévation plus importante de la température n’aug-
produits extraits par gonflement est de permettre de séparer avant mente plus le nombre de produits de thermolyse permettant l’iden-
analyse les produits n’ayant pas réagi (adjuvants, monomères...) tification du polymère.
du polymère thermodurcissable lui-même. Cela évite, pour la Les dégradations thermiques typiques qui pourront être mises à
détermination de la structure du polymère à partir des produits profit pour remonter à la structure initiale des polymères résultent
identifiés par SM, de combiner des molécules provenant des adju- principalement des processus suivants :
vants avec les molécules provenant du polymère de base.
— cassures statistiques des chaînes ;
Pour l’analyse des produits insolubles comme les macro- — dégradation à partir des extrémités de chaîne ou des centres
molécules de forte masse molaire, des agents de blanchiment susceptibles de produire des monomères ou des produits de dépo-
(TiO2) et des charges (verre, agents thixotropes...), il sera lymérisation ;
nécessaire d’avoir recours à d’autres techniques d’analyse phy- — dégradation thermique ou réactions intramoléculaires avec des
sico-chimique organique ou minérale. chaînes latérales en tant que préréaction à la cassure de la chaîne
principale ;
— dégradation thermique via des polymères cycliques.
C’est sur ces processus que l’on se fonde pour analyser et carac-
tériser les polymères.
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Figure 7 – Ions détectés par PY/CG/SM lors de l’analyse de la structure d’une chaîne prépolymère de type vinylester bisphénolique
à terminaison méthylméthacrylate (D 411 /45 de Dow Chemical)
Les molécules formées dépendent fortement des énergies de — un temps d’injection des produits de pyrolyse dans le chroma-
dissociation des liaisons constitutives du polymère et des énergies tographe le plus court possible (< 30 s) et une température de
de recombinaison des molécules [13]. colonne capillaire très inférieure (de 50 à 70 oC) à la température de
vaporisation du produit de pyrolyse la plus basse.
Dans le cas des élastomères, qui auront été vulcanisés pendant
leur mise en œuvre, l’analyse par PY/CG/SM permettra d’obtenir
4.1 Élastomères et thermoplastiques des pyrochromatogrammes très spécifiques, dépendant entière-
ment des monomères constitutifs. Ainsi, il est possible de différen-
Dans le cadre de l’analyse des élastomères et des thermo- cier sans ambiguïté des élastomères de type butadiène, isoprène,
plastiques, on rencontre les quatre processus de dégradation cités butadiène/styrène (chaînes macromoléculaires isomères, copoly-
ci-dessus. mères, terpolymères...). Les élastomères de type chloré ou nitrilé
produisent en se dégradant des petites molécules facilement iden-
Les mécanismes proposés pour la dégradation thermique des tifiables et spécifiques de l’élastomère considéré. Cette technique
polymères constitués par un enchaînement de motifs monomères, permet d’identifier les élastomères spéciaux, comme les silicones,
et leur identification par analyse des spectres de masse obtenus, sont les polysulfures... qui présentent des mécanismes de thermolyse
très nombreux dans la littérature. On peut citer, par exemple, le cas bien spécifiques, avec formation d’intermédiaires cycliques, les
du polystyrène [14] [15]. énergies de liaison des groupes Si—Si, C—S, C—Si, C—S étant
L’analyse des copolymères est également facilement réalisable à relativement faibles par rapport aux énergies de liaison C—C ou
partir du couplage PY/CG/SM, où des séquences différentes sont C—O.
obtenues en fonction des enchaînements spécifiques des motifs
monomères. Les conditions fondamentales pour obtenir des pyro-
chromatogrammes caractéristiques et reproductibles, comme dans 4.2 Thermodurcissables
le cas de copolymères styrène/isoprène [16], par exemple, sont
mentionnées dans la littérature.
La PY/CG/SM permet d’étudier les structures formées lors de la
Pour obtenir des pyrochromatogrammes de polymère reproduc- mise en œuvre, comme par exemple, dans le cas des polybisma-
tibles, les conditions principales minimales à respecter sont : léimides, qui sont des thermodurcissables thermostables, où deux
— une pyrolyse complète de l’échantillon dans la tête de pyro- types de structures sont susceptibles de se former en fonction des
lyse pendant l’analyse ; conditions de mise en œuvre (figure 8). L’étude par PY/CG/SM de
— un échantillon d’épaisseur la plus faible possible, afin de favo- la structure de ces matériaux conduit à l’étude de la formation des
riser les transferts thermiques au sein du polymère, de manière à produits présentés figure 9, dont les proportions dépendent des
le dégrader le plus rapidement possible et à éviter ensuite la dégra- fractions relatives de réaction d’homopolymérisation et de réaction
dation thermique des produits formés ; d’allongement de chaîne lors de la mise en œuvre [17].
— un bon contrôle de la qualité du gaz vecteur dans la tête de
pyrolyse (% oxygène) et un débit suffisant pour extraire les pro-
duits formés rapidement de la zone chaude ;
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Figure 8 – Mécanisme de polymérisation et de réticulation des résines de type bismaléimide suivant les conditions de mise en œuvre
Figure 9 – Fragments détectés par analyse PY/CG/SM en fonction des motifs formés lors de la réticulation des polymères de type bismaléimide
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Cette technique permettra également, dans le cas de thermo- 6.1 Analyse des produits d’hydrolyse
durcissables biphasiques, d’étudier la formation et l’agencement
des différentes phases. On retrouve, dans les produits de dégrada- Certains polymères, comme les polyesters, les polyuréthanes,
tion, les fragments spécifiques aux produits liés à chacune des sont susceptibles, en présence d’eau, de subir des dégradations.
phases présentes, et l’étude de l’ensemble des fragments formés L’étude de ces dégradations, de manière à déterminer les durées de
permet une caractérisation poussée de ces polymères. Par vie et à essayer d’améliorer les résistances à l’hydrolyse, nécessite
exemple, dans les matériaux de type polyester insaturé et vinyl- l’emploi de techniques d’analyse physico-chimique. La CG/SM est
ester réticulés par voie radicalaire en présence de styrène, l’état une technique de choix pour ce type d’étude, l’identification des pro-
biphasique de ces matériaux peut être mis en évidence par cette duits de dégradation permettant de remonter aux mécanismes de
technique. dégradation. Ces produits passés en solution pourront être extraits
de la phase aqueuse de vieillissement, analysés par CG/SM, puis
quantifiés pour une détermination des cinétiques d’hydrolyse.
5. Étude des mécanismes Dans le cas de l’analyse de traces, le seuil de détection peut
encore être abaissé en utilisant des techniques de détection par ions
de polymérisation multiples qui augmentent la sensibilité des spectromètres en étant
plus spécifiques [3].
Les produits d’hydrolyse étant fréquemment des acides ou des
Dans le cadre des études de caractérisation des polymères en vue
alcools, on peut avoir recours à des techniques de dérivatisation
de mieux contrôler leur structure et d’optimiser leurs propriétés, il
qui facilitent leur analyse CG, comme des silylations par exemple.
est souvent important de déterminer les mécanismes chimiques de
Ces méthodes, diminuant les interactions polaires à forte énergie
réaction qui interviennent lors de leur polymérisation. Cela est tou-
entre les molécules en les remplaçant par des interactions hydro-
jours particulièrement difficile pour les matériaux mis en œuvre à
phobes de plus faible énergie (exemple : triméthylsilyl), facilitent la
haute température, par exemple dans l’élaboration des céramiques,
volatilisation des molécules à analyser. Toutefois, avec ces tech-
qui est réalisée par décomposition thermique de précurseurs orga-
niques, il faut veiller à conserver l’intégrité chimique des molécules
nométalliques de type polyvinylsilane, polysiloxane, ou dans le cas
à analyser.
de synthèses permettant d’obtenir des polymères ayant de bonnes
propriétés de thermostabilité (réaction avec l’hexachlorophospha- Ces techniques de dérivatisation sont également d’un grand
zène pour former des polyphosphazènes) : intérêt pour l’analyse des biomolécules (peptides, oligosaccha-
rides...) [22].
De manière à éviter les manipulations d’extraction liquide-liquide
des produits organiques contenus dans des solutions aqueuses,
manipulations qui sont très souvent relativement complexes et
longues, difficilement reproductibles pour obtenir des données
quantitatives fiables, une nouvelle technique de préparation
d’échantillons en phase aqueuse par microextraction en phase
ou bien dans le cas de la synthèse de composés polycycliques
solide (SPME – Solid Phase Micro Extraction ) a été mise au point
résultant de réactions d’ouverture de cycles [18].
depuis 1992. Cette technique permet de concentrer les composés
Une meilleure compréhension des mécanismes réactionnels, par volatils et non volatils dans les échantillons liquides et gazeux.
mise en évidence notamment des produits de réaction permet de L’appareil se compose d’une fibre en silice fondue revêtue d’une
mettre au point une méthodologie d’étude des matériaux synthé- phase adsorbante pouvant coulisser dans une aiguille de seringue.
tisés par analyse des produits de décomposition thermique. La fibre va être immergée dans l’échantillon à analyser et les
La PY/CG/SM est la technique la plus facilement mise en œuvre molécules organiques vont s’adsorber sur la phase adsorbante apo-
pour identifier les mécanismes de formation de ces matériaux, car laire de la fibre jusqu’à atteindre un équilibre de partage des
elle permet l’analyse des produits volatils formés et l’étude de la molécules organiques entre la phase stationnaire de la fibre et la
structure des matériaux déposés dans le pyrolyseur. solution à analyser (5 min). Une fois l’équilibre atteint, la fibre est
Pour des études plus approfondies de ces mécanismes de retirée de la solution à analyser puis introduite dans l’injecteur du
chromatographe où, par chauffage, les produits adsorbés seront
synthèse, on pourra avoir recours si nécessaire à des techniques
désorbés en une vingtaine de secondes.
d’analyse par CG /SM/SM et une caractérisation plus approfondie
pourra être réalisée par l’étude des énergies cinétiques de réaction Cette nouvelle technique, très rapide d’utilisation et quantitative,
à partir de spectres MIKES (Mass Analyzed Ion Kinetic Energy est très intéressante pour l’analyse des produits de dégradation
Spectrometry). des polymères en contact avec de l’eau.
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Analyse structurale des polymères R
par couplage CG/SM
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par Bruno MORTAIGNE
Docteur en matériaux et structures de l’École nationale supérieure d’arts et métiers
(ENSAM)
S
Ingénieur responsable du service Structure et durabilité des polymères
Délégation générale pour l’armement
Centre de recherches et d’études d’Arcueil (DGA/CREA)
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4 - 1997
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