Vous êtes sur la page 1sur 46

ncomip

Réseau de cancérologie de Midi-Pyrénées

Référentiel Régional de prise en charge

Hématologie

LEUCEMIES AÏGUES,
NÉOPLASIES MYÉLOPROLIFÉRATIVES
ET MYÉLODYSPLASIES

Actualisation Mars 2009


RCP néoplasies myéloïdes malignes
Réunions hebdomadaires :
Lundi matin : 8h30-10h30

Référents partie clinique


Leucémies aiguës et néoplasies myéloprolifératives
Contact : Dr Huguet et Pr Récher
Tel : 05 61 77 20 78
Dr Françoise Huguet Fax : 05 61 77 75 41
Pr Christian Récher huguet.f@chu-toulouse.fr
recher.c@chu-toulouse.fr

Myélodysplasies
Pr Beyne-Rauzy
Pr Odile Beyne-Rauzy
Tel: 05 61 77 96 79
Dr Françoise Huguet
Fax: 05 61 77 92 35
Pr Christian Récher
beynerauzy.o@chu-toulouse.fr

Référents partie biologique


Cytologie :
Laboratoire d’hématologie, CHU de
Dr Eliane Duchayne
Toulouse, hôpital Purpan
duchayne.e@chu-toulouse.fr
Tel : 05 61 77 90 66
Dr Cécile Demur
Fax : 05 61 77 76 95
demur.c@chu-toulouse.fr

Cytogénétique :
Dr Nicole Dastugue dastugue.n@chu-toulouse.fr
Biologie moléculaire :
Pr Eric Delabesse delabesse.e@chu-toulouse.fr

Dr Véronique De Mas demas.v@chu-toulouse.fr


Médecin coordonnateur réseau :

Dr Xavier Carles
carles.x@chu-toulouse.fr

2
Sommaire

I- Les Pathologies myéloïdes malignes...................................................................4

Classification OMS 2008.................................................................................4

II- Polyglobulie primitive ...........................................................................................5

III- Thrombocytémie essentielle ............................................................................. 13

IV- Polyglobulie I, TE et procréation ...................................................................... 19

V- Myélofibrose primitive ........................................................................................ 21

VI- Autres néoplasies myéloprolifératives ............................................................ 27

VII- Leucémie Myéloïde Chronique ........................................................................ 30

VIII- Leucémies aigues ............................................................................................ 40

IX- Myélodysplasies ..............................................................................................................46

Légende : Retour au Sommaire

3
I- LES PATHOLOGIES MYELOÏDES MALIGNES

Table 1: The World Health Organization classification


scheme for myeloid neoplasms

1. Acute myeloid leukemia


2. Myelodysplastic syndromes (MDS)
3. Myeloproliférative neoplasms (MPN)
3.1 Chronic myelogenous leukemia
3.2 Polycythemia vera
3.3 Essential thrombocythemia
3.4 Primary myelofibrosis
3.5 Chronic neutrophilic leukemia
3.6 Chronic eosinophilic leukemia, not otherwise categorized
3.7 Hypereosinophilic syndrome
3.8 Mast cell disease
3.9 MPNs, unclassifiable
4. MDS/ MPN
4.1 Chronic myelomonocytic leukemia
4.2 Juvenile myelomonocytic leukemia
4.3 Atypical chronic myeloid leukemia
4.4 MDS/MPN, unclassifiable

5. Myeloid neoplasms associated with eosinophilia and abnormalities of


PDGFRA, PDGFRB or FGFR1
5.1 Myeloid neoplasms associated with PDGFRA rearrangement
5.2 Myeloid neoplasms associated with PDGFRB rearrangement
5.3 Myeloid neoplasms associated with FGFR1 rearrangement
(8p11 myeloproliferative syndrome)

4
II- LA POLYGLOBULIE PRIMITIVE OU MALADIE DE VAQUEZ

I. Définition et généralités

La maladie de Vaquez (MV) ou polyglobulie primitive est un syndrome


myéloprolifératif résultant de l’expansion clonale d’une cellule souche hématopoïétique
pluripotente, à l’origine d’une prolifération non régulée du tissu myéloïde prédominant sur la
lignée érythrocytaire.
Son incidence est faible, de l’ordre de 3 cas/100.000 habitants par an. Il s’agit
d’une pathologie du sujet âgé avec un âge médian au diagnostic proche de 60 ans. Très rare
avant 40 ans, elle est tout à fait exceptionnelle chez l’enfant. Le sex ratio est voisin de 1.
La pathogénie de la MV est longtemps restée inexpliquée, jusqu’au printemps
2005, où plusieurs groupes de chercheurs ont décrit la présence dans les cellules myéloïdes
des patients atteints, d’une mutation unique récurrente et activatrice dans le gène de la
Janus Kinase JAK2. Cette mutation JAK2V617F confère aux lignées cellulaires une
hypersensibilité et une indépendance vis-à-vis de diverses cytokines dont l’érythropoïétine.
Retrouvée dans 90-95% des MV (et avec une fréquence moindre dans la thrombocytémie
essentielle et la myélofibrose primitive), elle a ouvert la voie à un diagnostic moléculaire
précis de la MV. Il est également une autre mutation de JAK2 au niveau de l’exon 12 dans 1
à 2% des cas de MV.

II. Circonstances de découverte

La découverte de la maladie est le plus souvent fortuite, devant la constatation à


l’hémogramme d’une augmentation de l’hémoglobine, de l’hématocrite et des globules
rouges.
Des signes fonctionnels traduisant l’hyperviscosité sanguine peuvent attirer
l’attention. Le prurit aquagénique et les crises érythromélalgiques sont inconstants mais très
évocateurs.
Une complication thrombotique, veineuse ou plus rarement artérielle, peut
également être évocatrice. Les thromboses des veines portes ou des veines sus-hépatiques
(syndrome de Budd-Chiari) sont fréquentes. Une splénomégalie modérée est présente chez
70 % des patients, constituant un argument en faveur de l’origine primitive de la polyglobulie.

III. Diagnostic

Les paramètres déterminants à l’hémogramme qui permettent d’évoquer, voire


d’affirmer, l’existence d’une polyglobulie sont les augmentations conjointes de l’hématocrite,
du nombre de globules rouges et du taux d’hémoglobine.
Au-delà de 56 % d’hématocrite chez la femme et de 60 % chez l’homme, la
polyglobulie est certaine. Entre 48 % et 56 % chez la femme et entre 52 % et 60 % chez
l’homme, une étude isotopique de la masse sanguine est nécessaire afin d’affirmer une
polyglobulie vraie et d’éliminer une hémoconcentration. L’on parlera de polyglobulie vraie si
le volume globulaire total dépasse de plus de 25 % la valeur théorique normale. Le volume
plasmatique total est quant à lui souvent un peu augmenté dans la MV.
La découverte récente de la mutation JAK2V617F (90-95%) et de celle de JAK2
exon 12 (1- 3%) apportent une contribution décisive au diagnostic de la MV. La recherche de
ces mutations par les techniques de biologie moléculaire doit donc être réalisée pour
confirmer une MV et éliminer une polyglobulie secondaire (Dr Véronique De Mas, Pr Eric
Delabesse, Laboratoire d’Hématologie, CHU de Toulouse, Hôpital Purpan). Dans un premier
temps, la recherche de la mutation JAK2V617F est réalisée. Si elle est négative, celle de
l’exon 12 est réalisée.

5
Si la recherche des mutations de JAK2 V617F se révèle négative, le diagnostic de
MV doit alors s’appuyer sur les critères habituels :

Taux d’érythropoïétine sérique abaissé voire normal.


Formation spontanée de colonies érythrocytaires endogènes traduisant
l’hypersensibilité à l'érythropoïétine. Cette technique est de réalisation délicate et de
standardisation difficile. Elle est réalisée sur prélèvement de moelle par le Dr Cécile Demur
(Laboratoire d’Hématologie, CHU de Toulouse, Hôpital Purpan).
L’aspect histologique médullaire (BOM) peut être évocateur en montrant une
hyperplasie des trois lignées myéloïdes avec amas de mégacaryocytes pléïomorphes et
densification de la réticuline mais la reproductibilité entre observateurs est souvent
imparfaite.
Recherche d’une splénomégalie, palpable dans environ un tiers des cas, retrouvée
plus souvent après recours à l’échographie abdominale.
Existence d’une polynucléose neutrophile et/ou d’une hyperplaquettose.
Le caryotype des cellules hématopoïétiques de la moelle osseuse à la recherche
d’une anomalie cytogénétique clonale acquise, ne présente guère d’intérêt, les anomalies
éventuellement identifiées n’étant pas spécifiques. Il n’est donc pas utile de demander cet
examen.
En l’absence de tout élément en faveur d’une myéloprolifération, les diverses
étiologies de polyglobulie secondaire devront alors être passées en revue. La négativité de
cette enquête, aussi exhaustive que possible, aboutira au diagnostic d’attente
d’érythrocytose pure.

Les critères diagnostic de l’OMS (classification de 2008) sont les suivants :

Critères majeurs :

1. Hb > 18.5 g/dl (homme) ou > 16.5 g/dl (femme) ou Hb > 17 g/dL (homme) ou > 15
g/dl (femme) si associée avec une augmentation soutenue ≥ 2 g/dl p/r aux valeurs
de base qui ne peut pas être expliquée par la correction d’une carence martiale ou
élévation de la masse de globules rouges > 25% de la valeur théorique.
2. Présence de la mutation de JAK2V617F ou autre mutation (JAK2 exon 12).

Critères mineurs :

1. Myéloprolifération impliquant les 3 lignées hématopoïétiques (BOM).


2. Taux d’Epo sérique subnormal.
3. Colonies érythroïdes endogènes.

Le diagnostic de MV nécessite les 2 critères majeurs et 1 critère mineur ou le premier


critère majeur et 2 critères mineurs.

6
Un algorythme décisionnel est proposé par Tefferi et al (Leukemia, 2008). Cet algorythme
est initialement basé sur la recherche de la mutation JAK2V617F. Toutefois, il est
recommandé de doser également l’Epo sérique pour minimiser le risque de faux négatif ou
faux positif du test moléculaire. Il est hautement improbable qu’une authentique MV soit à la
fois JAK2V617 négatif et présente un taux normal ou élevé d’Epo. La recherche de la
mutation JAK2 exon 12 et la réalisation de la BOM sont à considérer chez les patients
JAK2V617F négatifs.

A Tefferi et JW Vardiman, Leukemia, 2008.

VHL : service de génétique IGR Villejuif (Pr Gilbert Lenoir) tel 01-42-11-40-23 / 40-70
EPO-R : Laboratoire de génétique moléculaire, Henri Mondor, Créteil (Dr Claude Préhu)
Tél 01-49-81-28-73

Le bilan d’une MV devant apparaitre sur la fiche RCP doit comporter :

Examen clinique : signes fonctionnels, prurit, érythromélalgies et


splénomégalie
Facteurs de risque cardio-vasculaires. Antécédents thrombotiques
artériels ou veineux. Tout autre ATCD pouvant influencer la prise en
charge thérapeutique; ATCD familiaux d’hémopathies
Hémogramme complet, uricémie, bilan martial
Mutation JAK2 V617F
Epo sérique
Mesure du volume érythrocytaire total sauf si Ht>56% (F) ou >60% (H).
Echographie abdominale.

Examens recommandés mais non obligatoires et à demander en fonction


des premiers résultats :

BOM 7
IV. Evolution et complications

Le risque immédiat entraîné par la MV est d’ordre thrombotique, veineux ou


artériel. Ce risque est majoré par un âge supérieur à 60 ans, des antécédents de thrombose
ou l’association aux autres facteurs de risque cardiovasculaire habituels. Il est surtout
imputable à l’hyperviscosité sanguine, elle-même corrélée à l’hématocrite, mais d’autres
facteurs peuvent être incriminés comme un syndrome d’activation plaquettaire, souvent
associé à un syndrome d’activation leucocytaire et à des altérations des cellules
endothéliales vasculaires.

Les fiches RCP doivent faire ressortir tous les ATCD et facteurs de risque
cardio-vasculaires et éventuellement, s’ils sont corrigés ou non par un traitement
médicamenteux.

L’évolution de la MV peut par ailleurs se faire vers deux types de transformations


hématologiques : la myélofibrose secondaire et la transformation en leucémie aiguë.

La myélofibrose secondaire donne lieu de façon lentement progressive et après de


longs délais d’observation à un tableau superposable à celui de la myélofibrose primitive.
Pouvant sans doute être considérée comme l’évolution de la MV, elle est facilitée pour
certains auteurs par une carence martiale prolongée, induite par les saignées au long cours,
tandis que la stricte normalisation de la numération plaquettaire, en permanence, en
retarderait l’apparition.

En cas de suspicion de myélofibrose, une BOM est nécessaire. Le dosage du


taux de CD34+ circulantes peut également être utile (Dr Cécile Demur).

La transformation en leucémie aiguë est souvent précédée par une phase de


myélodysplasie. Son incidence est de l’ordre de 10 % à 15 % à partir de la dixième année
chez les patients soumis aux agents cytoréducteurs habituels et cette incidence continue à
croître avec le temps. Sa survenue est clairement facilitée par des agents mutagènes
comme le radiophosphore (qui n’est plus disponible en Midi-Pyrénées) ou la plupart des
alkylants qui ne doivent plus être qu’exceptionnellement utilisés. Le risque d’induction
leucémogène de l’hydroxyurée ou du pipobroman est par contre moins avéré et ces produits
interviendraient surtout en sélectionnant les formes de MV les plus évolutives et donc les
plus susceptibles de subir une évolution leucémique spontanée.

Toutefois, l’actualisation récente d’une étude française (Najean, Blood, 1997)


avec un recul médian de 16 ans montre que le pipobroman est associé à un risque de
MDS/LAM secondaire beaucoup plus important que l’hydroxyurée. Le pipobroman
n’est donc pas conseillé en première intention.

8
V. Objectifs du traitement

Le contrôle du risque thrombotique est l’objectif principal. Il passe impérativement


par la stricte normalisation de l’hématocrite qui doit être maintenu en permanence inférieur à
45 %. De même, il est nécessaire d’abaisser en permanence la numération plaquettaire au-
dessous de 450.000/mm3.
Ce résultat doit être obtenu en évitant les procédés thérapeutiques reconnus
comme facilitant les transformations hématologiques.
Prise en charge des complications thrombotiques, hémorragiques et du prurit.
Prise en charge de la grossesse.
La définition du traitement optimum de la MV se heurte à des difficultés résultant du
manque d’essais thérapeutiques randomisés récents portant sur des effectifs suffisants
pendant des délais d’observation suffisamment longs.

VI. Stratégie Thérapeutique

Si le principe des saignées en urgence n’est pas discutable pour des hématocrites
très élevés, leur poursuite en tant que traitement de fond de la MV est beaucoup plus
contestable. En effet, elles ne contrôlent qu’imparfaitement le risque thrombotique en raison
du caractère de plus en plus aléatoire de leur réalisation, au fil du temps, de l’aggravation de
l’hyperplaquettose imputable au développement d’une carence martiale profonde qu’il
convient pourtant de respecter et, de façon plus générale, de l’absence d’impact sur les
facteurs cellulaires thrombogènes. Certes, leur risque d’induction leucémogène est très
faible. Par contre, il est possible qu’elles accélèrent l’évolution vers la myélofibrose.

Le traitement myélofreinateur repose sur l’hydroxyurée. Ce produit nécessite un


traitement d’entretien continu, à la dose la plus faible possible, après la normalisation de
l’hématocrite et de la numération plaquettaire obtenue dans la quasi-totalité des cas. Les
interférons recombinants alpha pégylés, mieux tolérés que les formes non pégylées,
représente une alternative intéressante à envisager chez le sujet jeune afin d’éviter une
exposition prolongée à l’hydroxyurée. Le pipobroman a pu se rendre exceptionnellement
responsable d’aplasies médullaires graves et est incriminé dans les transformations aiguës.
Son emploi pourrait être réservé aux sujets âgés (> 70ans) réfractaires ou intolérants à
l’hydroxyurée. En cas de poussée thrombocytaire, l’anagrélide peut être utilisé.

Il a été récemment démontré (étude ECLAP) que l’aspirine à faible dose (100 mg/j)
et en continu représentait un traitement adjuvant utile du risque thrombotique dans la MV.

Il apparaît très important par ailleurs de contrôler minutieusement tous les facteurs
de risques cardiovasculaires habituels associés et de les traiter. L’arrêt du tabac doit être
fortement conseillé avec au besoin consultation auprès d’une équipe de tabacologie.

L’ensemble de ces mesures doit ménager dans les tranches d’âge habituelles de la
MV une espérance de vie sensiblement identique à celle d’une population témoin en
minimisant considérablement l’incidence des complications thrombotiques. La surveillance
attentive dont ces malades font généralement l’objet joue aussi un rôle prépondérant.

9
VII. Recommandations thérapeutiques

A - Traitement d’urgence

But : réduction rapide de l’hyperviscosité sanguine corrélée à l’élévation de


l’hématocrite.
Repose sur les saignées : 300 à 400 ml, 1 jour sur 2 ou sur 3, jusqu’à correction de
l’hématocrite.

B - Traitement de fond

Buts : maintenir de façon permanente l’hématocrite < 45% et la numération


plaquettaire <400-450 G/L.
Si malade de plus de 50 ans : hydroxyurée : 15 à 20 mg/kg/j jusqu’à ce que la
réponse soit obtenue, puis dose de maintenance de 10 à 15 mg/kg/j. Le traitement est
interrompu transitoirement si l’Hb est < 10g/dl, plaquettes<100 G/L ou globules blancs < 2.5
G/L. Des saignées additionnelles peuvent être associées. La surveillance de l’hémogramme
doit être bimensuelle pendant les deux premiers mois puis mensuelles chez les patients
répondeurs et stables.

Critères de non réponse ou d’intolérance à l’hydroxyurée (définis pour la TE,


adaptés ici à la polyglobulie) :
- persistance d’un rythme important de saignées, apparition ou majoration de
la SMG
- > 600.000 PQ après 3 mois d'HU >= 2g/j (2,5 g/j si poids > 80 kgs)
- > 400.000 PQ et GB < 2500 ou Hb < 10 g/dl quelle que soit la dose
d’hydroxyurée
- toute dermatose, ulcères de jambe ou fièvre à l'HU

Si malade de moins de 50 ans et dépourvu d’antécédent thrombotique :


l’hydroxyurée reste le traitement de référence mais il pourra être discuté au cas par cas, un
traitement par un interféron alpha pégylé si possible après inclusion dans un essai clinique. Il
a été récemment montré que le taux de GB (>15G/L) représente un facteur de risque de
thrombose (notamment d’infarctus du myocarde) particulièrement chez les patients plus
jeunes et asymptomatiques. Cette notion devrait être prise en considération pour la prise en
charge thérapeutique.
Aspirine : 100mg/j.
Contrôle strict des facteurs de risque cardiovasculaire associés : tabac, diabète,
hypertension artérielle, hypercholestérolémie, obésité.

10
Indication du traitement en fonction de l’âge et des facteurs de risque CV.

**

**Essai Cosmyd (Collaborative Study of Myeloproliferative Disorders)

Essai thérapeutique de phase II-III randomisé adaptatif multicentrique comparant l’interféron


alpha-2a pégylé (Pegasys®) à l’hydroxyurée (Hydrea®) chez les patients atteints de
Polyglobulie de Vaquez et de Thrombocytémie Essentielle de haut risque avec mutation
JAK2 V617F. Groupes coopérateurs GOELAMS et PV-Nord. Cet essai n’est pas encore
activé.

C - Suivi

L’essentiel de la surveillance sera assuré à domicile par le médecin traitant après


que lui ait été remis, ainsi qu’au malade, un protocole écrit précisant les modalités
d’administration du traitement myélofreinateur. Une fois la posologie d’entretien de
l’hydroxyurée, une surveillance mensuelle de l’hémogramme est suffisante.
Ces patients doivent être revus périodiquement en consultation spécialisée, tous
les 6 mois ou tous les ans, afin de s’assurer de la bonne observance du traitement et de
l’absence de survenue de signes évocateurs d’une transformation hématologique
(développement d’une splénomégalie, apparition de cytopénies ne s’expliquant pas par un
surdosage thérapeutique). Hémogrammes, analyses du frottis sanguin, seront ainsi
pratiqués régulièrement et pourront guider le choix vers d’autres examens plus spécialisés
(BOM, CD34+ en cas de suspicion de myélofibrose ; myélogramme, coloration de Perls et
caryotype en cas de suspicion de MDS/LAM).

11
D - Traitement des complications

D’exceptionnelles aplasies médullaires durables ont été décrites avec le


pipobroman et répondent au traitement immunosuppresseur (sérum antilymphocytaire ±
ciclosporine).
Les complications thrombotiques seront prises en charge par les spécialistes
d’organes concernés, les modalités du traitement anticoagulant étant définies avec les
hématologistes et le traitement de fond adapté par ceux-ci si nécessaire. Il n’y a pas de
consensus sur la durée du traitement anticoagulant dans le cadre de la prévention
secondaire d’un épisode thrombotique. Toutefois, considérant que le second épisode
thrombotique est de même nature que le premier (A ou V) et que le risque de récidive
semble supérieur à celui des patients non-MV ayant eu un épisode thrombotique, une
anticoagulation au long cours pour les thromboses veineuses ou un traitement antiagrégant
plaquettaire pour les thromboses artérielles peut être proposé en l’absence de contre
indications. Le traitement cytoréducteur est également conseillé pour contrôler les chiffres
sanguins.
Les mesures thérapeutiques en cas de développement d’une myélofibrose
secondaire ne diffèrent pas de celles préconisées en cas de myélofibrose primitive.
Les transformations leucémiques aiguës sont de très mauvais pronostic.
L’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques représente le seul procédé thérapeutique
potentiellement curateur mais ne peut être que rarement proposée dans les tranches d’âge
habituelles de la MV vieillie. Un traitement par agents déméthylants peut être proposé après
avis en RCP.
Le prurit, s’il est féroce, peut nécessiter un traitement anti-histaminique voire de la
paroxetine (DEROXAT) (20 mg/j). En cas d’échec, l’interféron peut être discuté.

12
III- THROMBOCYTÉMIE ESSENTIELLE

A l’image de la MV, la physiopathologie et le diagnostic de la TE sont appréhendés


différemment depuis la découverte de la mutation JAK2V617F dans environ 50% des cas. Si
son évolution et son traitement présentent certaines similitudes avec la MV, la démarche
diagnostique est différente et son incidence chez sujets jeunes, notamment chez la femme,
implique une prise en charge thérapeutique devant prendre en compte fertilité, grossesse et
risque de transformation à long terme.

I. Critères diagnostiques et bilan initial

A. Diagnostic

En l’absence de critères « pathognomoniques » de cette affection, le diagnostic de


TE s’appuie sur un ensemble de tests dont l’ordre et le choix dépendent du contexte clinique
et de la complexité du diagnostic. Il faut aussi noter que le diagnostic peut se poser en
urgence en cas de manifestations cliniques hémorragiques ou thrombotiques majeures.

Le bilan initial suit 4 objectifs principaux :

1. Éliminer une hyperplaquettose secondaire


Le diagnostic de TE ne se pose qu’après avoir éliminé les thrombocytoses secondaires,
observées en particulier en cas de syndrome inflammatoire ou de carence en fer, d’asplénie
ou d’association à une tumeur maligne. Le bilan initial comporte donc la répétition des
hémogrammes afin d’objectiver la persistance de l’hyperplaquettose et d’autre part les
examens visant à éliminer ces étiologies responsables d’hyperplaquettose secondaire; ces
situations peuvent toutefois être associées à d’authentiques TE compliquant d’autant le
diagnostic.

2. Éliminer une dysmyélopoïèse


Selon les premières données de l’examen cytologique du sang périphérique ou en cas
d’anémie, un myélogramme avec coloration de Perls et caryotype ainsi qu’un test
moléculaire sanguin (recherche de la mutation de JAK2V617F) peuvent être demandés. Les
MDS associés à une thrombocytose regroupent les syndromes 5q-, les MDS avec anomalies
du chromosome 3, les ARSIA (ou ARSIA-T dont 50% présentent la mutation JAK2V617F et
qui représentent une entité provisoirement classée dans les SMP/MDS inclassables par
l’OMS).

3. Apporter des arguments en faveur du diagnostic de syndrome


myéloprolifératif: présence d’une splénomégalie attestée parfois seulement par
l’échographie abdominale ; anomalies caractéristiques de la biopsie médullaire; recherche
de la mutation JAK2V617F et du récepteur de la thrombopoïétine (MPL); culture de
progéniteurs érythrocytaires ou mégacaryocytaires (très rarement fait en routine).

4. Éliminer un autre syndrome myéloprolifératif.


Leucémie myéloïde chronique : par l’étude du caryotype et/ou la recherche du
transcrit Bcr-Abl.
Myélofibrose primitive : biopsie ostéo-médullaire, mesure des CD 34 circulantes,
LDH.
Maladie de Vaquez (cf chapitre spécifique).

13
Les critères diagnostic de l’OMS (classification de 2008) sont les suivants :

Critères majeurs :

1. Plaquettes ≥ 450 G/L


2. Prolifération de mégacaryocytes ayant une grande taille et une morphologie
mature, absence ou discrète prolifération érythroïde et granuleuse*
3. Absence de critères OMS pour une LMC, MV, MFP, MDS ou autre pathologie
myéloïde
4. Présence de la mutation de JAK2V617F ou autre marqueur de clonalité** ou pas
d’évidence pour une thrombocytose réactionnelle.

Il n’y a pas de critères mineurs et le diagnostic nécessite de regrouper les 4 critères.

* La BOM fait partie du diagnostic initial. Toutefois, si les trois autres critères sont réunis et
en l’absence de signes évocateurs de MDS ou MFP, le diagnostic de TE est fortement
probable et la BOM peut être différée, surtout si l’abstention thérapeutique ou un traitement
antiagrégant plaquettaire seul, sont prévus.

** La mutation de MPL (W515L/K), 5% des TE, ne fait pas partie des critères de l’OMS mais
peut être demandée si celle de JAK2V617F n’est pas détectée (Dr Véronique De Mas, Pr
Eric Delabesse, Laboratoire d’Hématologie, CHU de Toulouse, Hôpital Purpan).

B. Estimation du risque vasculaire

Les complications thrombotiques de la TE sont plus fréquentes en cas de facteurs de risque


vasculaire artériel associés et à un degré moindre, de façon plus controversée, en cas de
facteurs de thrombophilie veineuse associés. Un risque vasculaire artériel accru sera
recherché par l’étude du métabolisme glucidique, lipidique, par la recherche d’une HTA,
d’un surpoids, d’une consommation de tabac.
La recherche d’un risque de thrombose veineuse augmenté s’appuiera sur la pratique d’un
bilan de thrombophilie. Recommandé s’il existe des antécédents personnels de thrombose
veineuse, ce bilan est aussi souhaitable s’il existe des antécédents familiaux. On rappelle
qu’hormis le taux de GB, il n’existe pas de facteurs de risque de thrombose clairement
identifiés. Le chiffre de plaquettes ou la présence de la mutation JAK2V617F ne sont pas
prédictifs d’un risque accru de thrombose.
En cas de grande thrombocytose (>1.5 G/L), un syndrome de Willebrand acquis peut-être
recherché.

14
Le bilan d’une TE devant apparaitre sur la fiche RCP doit comporter :

Examen clinique : signes fonctionnels, érythromélalgies et splénomégalie.


Facteurs de risque cardio-vasculaires. Antécédents thrombotiques artériels ou
veineux. Tout autre ATCD pouvant influencer la prise en charge thérapeutique ;
ATCD familial d’hémopathies
Hémogramme complet, myélémie, érythromyélémie, dacryocytes, blastes,
anomalies morphologiques sur le frottis sanguin
Mutation JAK2 V617F, Bcr-abl (recherchés sur le sang)
VS-CRP
Bilan martial

Examens recommandés mais non obligatoires et à demander en fonction des


premiers résultats :
BOM
Mutation MPLW515L/K (effectuée sur l’échantillon prélevé pour recherche JAK2V617F)
Myélogramme, coloration de Perls et caryotype si suspicion de MDS
Culture des colonies érythroïdes endogènes
Mesure du volume érythrocytaire total
Echographie abdominale
Bilan de thrombophilie : TP, TCA, fib, dosage des inhibiteurs de la coagulation
(prot C/S, ATIII), mutations G 1691 A sur le gène du facteur V, G 20210 A sur le
gène du facteur II (dites mutations V Leiden ou II Leiden), homocystéinémie,
anticorps anticardiolipine.
Si plaquettes > 1500 G/L : VWF : Ag, VWF : RCo ; FVIII.

II. Stratégie thérapeutique

1. La mise en route d’un traitement cytoréducteur visant à normaliser le chiffre


plaquettaire s’appuie sur les notions suivantes :

Le risque de thrombose est augmenté chez les patients de plus de 60 ans ou ayant
des antécédents de thrombose. Le taux de GB (>10 G/L) pourrait également être prédictif
d’un risque accru de thromboses A/V, alors que l’implication de la présence de JAK2V617F
n’est pas tout à fait claire même si elle semble représenter un facteur de risque pour les
accidents artériels. Les critères de risque thrombotique sont les suivants :

15
De plus un chiffre plaquettaire supérieur à 1500G/L augmente le risque
d’hémorragies et constitue une contre-indication relative aux antiagrégants plaquettaires. Ce
chiffre classe également en haut risque.
Les patients bénéficient d’un traitement cytoréducteur par hydroxyurée qui diminue
de façon significative la fréquence des thromboses.
l’hydroxyurée est supérieure à l’anagrélide pour diminuer la fréquence des
thromboses artérielles, des hémorragies et de l’évolution vers la MF dans le groupe des
patients à haut risque vasculaire. Cette différence concerne en premier lieu les TE
JAK2V617+. L’anagrelide est par contre plus efficace dans la prévention du risque de
thrombose veineuse. L’hydroxyurée reste le traitement cytoréducteur recommandé en 1ère
ligne. L’anagrélide chez les patients sans mutation de JAK2 et non leucocytaires ou
l’interféron alpha sont plus généralement proposés en 2ème ligne. Toutefois, les interférons
recombinants alpha pégylés et l’anagrélide peuvent représenter une alternative intéressante
chez le sujet jeune. Pour les mêmes raisons que dans la MV, le pipobroman n’est pas
recommandé en première intention et sera réservé aux patients très âgés ou en échec des 3
autres traitements disponibles.
L’utilisation d’un traitement cytoréducteur chez les patients ne présentant aucun
des critères de fort risque vasculaire clinique, mais des facteurs de risque vasculaires
biologiques, est encore discutée.
Chez les patients ne présentant aucun des critères de fort risque vasculaire ni
aucun critère biologique pouvant suggérer une majoration du risque vasculaire, l’abstention
de traitement cytoréducteur est une attitude souvent adoptée.
Prise en charge de la grossesse (voir chapitre procréation).

2. La correction des facteurs de risque biologiques associés, l’éradication des


facteurs favorisant les thromboses :

Les traitements spécifiques sont utilisés en cas de diabète, de dyslipidémie, d’HTA


; l’arrêt du tabac est vivement conseillé, les oestroprogestatifs et certains traitements
hormonaux substitutifs de la ménopause sont contre-indiqués. Chez la femme jeune, la
contraception peut être assurée par un progestatif microdosé ou un stérilet.
Un traitement anticoagulant préventif doit être envisagé en cas de situation à risque
de thrombose (alitement prolongé, voyage de longue durée, chirurgie, grossesse…), d’autant
plus que des anomalies de thrombophilie sont associées. Par analogie avec l’effet préventif
sur les thromboses artérielles démontré dans la polyglobulie de Vaquez, la prescription
d’un traitement antiagrégant plaquettaire (aspirine faibles doses) est souvent
envisagée.

16
Prise en charge thérapeutique en fonction du risque CV

*Essai PT1 : essai international randomisé (inclusions à Toulouse)

Questions posées par le protocole :

1. Chez les patients de « faible risque » (âge < 40 ans), quelles sont les incidences des
thromboses et des hémorragies majeures sous traitement par acétylsalicylate seul ?
2. Chez les patients de « risque intermédiaire » (âge entre 40 et 59 ans), le traitement par
hydroxyurée permet-il de diminuer les thromboses et les hémorragies majeures lorsqu’il est
associé à l’acétylsalicylate ?
3. Quel est l’impact des modalités thérapeutiques sur la qualité de vie ?

Définition des groupes de risque dans cet essai :

Faible risque : Age ≥18 et <40 ans et aucun critère de haut risque (≥ 60 ans, plq>1500 G/L, ATCD
d’ischémie ou de TVP/EP, érythromélalgies, hémorragie attribuée à la TE, HTA, diabète)

17
Risque intermédiaire: Age 40-59 ans et aucun critère de haut risque

Schéma de l’étude

Faible risque : Aspirine (75mg/j) – étude observationnelle

Risque intermédiaire: Aspirine (75mg/j) vs Aspirine (75mg/j) + Hydroxyurée

**Essai Cosmyd (Collaborative Study of Myeloproliferative Disorders)

Essai thérapeutique de phase II-III randomisé adaptatif multicentrique comparant l’interféron


alpha-2a pégylé (Pegasys®) à l’hydroxyurée (Hydrea®) chez les patients atteints de
Polyglobulie de Vaquez et de Thrombocytémie Essentielle de haut risque avec mutation
JAK2 V617F. Groupes coopérateurs GOELAMS et PV-Nord. Cet essai n’est pas encore
activé.

III. La surveillance thérapeutique

Elle repose sur la pratique régulière de l’examen clinique (tous les 6 mois) et de bilans
biologiques. Elle a plusieurs buts :

1. S’assurer de l’observance et de l’efficacité des traitements éventuellement institués :


traitement cytoréducteur par la pratique régulière des hémogrammes (cf chapitre
MV). L’objectif est de maintenir un taux de plaquettes < 400 G/L sans toxicité sur les autres
lignées.

2. S’assurer de l’absence de résistance à ces traitements et de l’absence d’effets


secondaires qui obligeraient à un relais vers les thérapeutiques de 2ème ligne.

Critères de non réponse ou d’intolérance à l’hydroxyurée :


- > 600.000 PQ après 3 mois d'HU >= 2g/j (2,5 g/j si poids > 80 kgs)
- > 400.000 PQ et GB < 2500 ou Hb < 10 g/dl quelle que soit la dose
d’hydroxyurée
- toute dermatose, ulcères de jambe ou fièvre à l'HU

3. Dépister et tenter de prédire la survenue d’évènements cliniques ou d’anomalies


biologiques qui pourraient majorer le risque vasculaire.

4. Préciser et tenter de prédire l’évolution de l’affection qui peut au cours du temps évoluer
vers un autre syndrome myéloprolifératif, en particulier une myélofibrose ou se transformer
en leucémie aiguë. Hémogrammes, analyses du frottis sanguin, seront ainsi pratiqués
régulièrement et pourront guider le choix vers d’autres examens plus spécialisés (BOM,
CD34+ en cas de suspicion de myélofibrose ; myélogramme, coloration de Perls et
caryotype en cas de suspicion de MDS/LAM).

18
IV- POLYGLOBULIE PRIMITIVE, THROMBOCYTEMIE ESSENTIELLE
et PROCRÉATION

A. Chez la femme

Les recommandations pour la prise en charge de la grossesse au cours des SMP ont pour
but d’aider les thérapeutes mais ne peuvent avoir « force de loi », car établies sur la base
d’études rétrospectives, portant sur de courtes séries non exhaustives. Les
recommandations pour la PV et la MF sont extrapolées des données acquises dans la TE,
dont l’âge de survenue explique un plus grand nombre de grossesses rapportées
(respectivement autour de 20, 5 et 300), et aussi de pathologies voisines comme le
syndrome des anti-phospholipides.

1- nature du risque

a. complications obstétricales : fausse-couche précoce (30 % des cas soit 2 fois


plus que dans la population générale), perte fœtale aux 2ème et 3ème trimestres
(moins de 5% à 20% des cas), prématurité (10% des cas), hypotrophie
fœtale, éclampsie, hématome rétro-placentaire
b. complications maternelles : accidents thrombotiques et hémorragiques

2- objectifs thérapeutiques

a. la normalisation des taux d’Hb ou PQ semble un objectif raisonnable, même


s’il n’y a pas de preuves de l’intérêt de ramener la numération PQ à moins de
1.000.000 /mm3. Un argument pour la normalisation est représenté par la
réduction du risque hémorragique par Willebrand acquis.
b. la numération PQ et le taux d’Hb diminuent spontanément durant la grossesse
dans plus de la moitié des cas.
c. le post-partum est une période de haut risque pour la mère, du fait en
particulier d’un rebond PQ.

3- suivi de la grossesse

a. avant la conception si possible : recherche de thrombophilie


b. pendant la grossesse :
i. numération PQ mensuelle jusqu’à la 24ème semaine puis bi-
hebdomadaire
ii. suivi obstétrical en milieu spécialisé dans la prise en charge des
grossesses à risque, avec échographies et doppler des artères
utérines répétés
c. à l’accouchement :
i. éviter la déshydratation
ii. anesthésie péridurale déconseillée
d. en post-partum
i. allaitement maternel déconseillé en fonction du traitement nécessaire
ii. numération PQ bi-hebdomadaire jusqu’à 6 semaines

19
4- conduite du traitement

a. cytoréduction : l’HU est déconseillé bien que certaines grossesses aient pu


être menées avec succès avec ce traitement. Les autres agents
chimiothérapiques sont interdits, ainsi que l’Anagrelide. Ces médicaments
doivent être si possible arrêtés 6 mois avant la conception. Lorsqu’une
cytoréduction est nécessaire autour de la conception et/ou pendant la
grossesse, l’Interferon Alpha (IFN) est l’agent de choix, de par une absence
avérée de tératogénicité. Il est administré à la dose de 3.000.000 UI/j deux à
trois jours /semaine.

b. traitement anti-thrombotique. Il dépend des antécédents et facteurs de risque


de thrombophilie. Dans la majorité des cas, il repose sur l’Aspirine à faible
dose, dont il a été montré que sa prescription systématique améliorait le
pronostic obstétrical. L’Aspirine est arrêtée au moins une semaine avant le
terme et remplacée par une HBPM à dose prophylactique ou curative selon le
contexte, poursuivie jusqu’à 6 semaine du post-partum. Le port de bas de
contention est également recommandé. L’adjonction de vitamine C et E à
visée anti-oxydante a pu être proposée.

B. Chez l’homme

L’information du patient sur l’absence d’infertilité mais le risque tératogène des cytostatiques
est indispensable. Malgré la toxicité faible de l’HU, il est recommandé de l’interrompre au
moins 6 mois avant la conception, ou même de proposer au nom du « principe de
précaution » une auto-conservation de sperme avant ce traitement. L’Anagrelide et
l’Interféron ne sont pas déconseillés.

20
V- LA MYELOFIBROSE PRIMITIVE

Autrefois appelée splénomégalie myéloïde chronique, myélofibrose idiopathique ou


myélofibrose avec métaplasie myéloïde, ce syndrome myéloprolifératif est actuellement
appelé myélofibrose primitive (MFP) (nouvelle nomenclature). Les MF survenant pendant
l’évolution d’une MV ou TE, sont appelées MF post-MV ou MF post-TE, et les
transformations aigues, phase blastique de MFP. Son incidence est de 3 à 7 nouveaux
cas/million d’habitants/an touchant essentiellement des sujets âgés (âge moyen au
diagnostic entre 60 et 65 ans). Toutefois, 10% des patients ont moins de 45 ans.

I. Bilan initial
La maladie est parfois asymptomatique mais peut s’accompagner d'une asthénie, d’un
syndrome anémique et de signes généraux fréquents (sueurs nocturnes, perte de poids,
cachexie, fébricule). Le diagnostic est suspecté devant la découverte d’une splénomégalie
et/ou d’anomalies de l’hémogramme. Plus rarement, on peut retrouver des douleurs
osseuses, thromboses et des manifestations de foyers d’hématopoïèse extra-médullaire
(poumon : HTAP, espace épidural: compression médullaire ; péricarde : tamponnade ;
péritoine: ascite).
La splénomégalie est la caractéristique prédominante, quasiment constante au diagnostic
et de taille croissante avec l’évolution, son absence persistante doit faire remettre en cause
le diagnostic. Une échographie ou un scanner abdominal peuvent être utiles pour les formes
infracliniques ou pour confirmer la splénomégalie, sa taille et son caractère homogène.
L’hépatomégalie est présente dans la moitié des cas, des adénopathies périphériques sont
très rares et de volume modéré. L’hémogramme est très évocateur avec des déformations
caractéristiques des hématies (en larmes ou dacryocytes) et une érythromyélémie
quasiment constante. L’hyperleucocytose est habituellement modérée, le taux de plaquettes
est variable. Il existe une anémie dans ¾ des cas.

21
Un taux d’hémoglobine normal, voire élevé justifie la réalisation d’une mesure isotopique du
volume globulaire. Les LDH sont souvent très élevées. La numération des progéniteurs
CD34+ circulants peut être utile dans les cas difficiles, une augmentation étant
caractéristique de la maladie (mais non spécifique), un taux normal (inférieur à 10/µl)
permettant quasiment d’éliminer le diagnostic. La ponction médullaire est habituellement
vouée à l’échec en raison de la fibrose. La biopsie ostéo-médullaire est indispensable au
diagnostic, montrant l’association d’une fibrose constante, d’une prolifération
mégacaryocytaire dystrophique et d’une néoangiogénèse. La recherche de la mutation JAK2
V617 peut confirmer le diagnostic de syndrome myéloprolifératif. Elle est trouvée dans 50%
des cas. La mutation de MPL515L/K est également présente dans 5% des cas. L’analyse
cytogénétique et moléculaire, rarement réalisable sur la moelle faute de possibilité
d’aspiration, est souvent fructueuse sur prélèvement sanguin. Elle répond à l’exigence
d’éliminer le diagnostic de leucémie myéloïde chronique (absence de chromosome
Philadelphie et de remaniement bcr-abl) et peut avoir un intérêt pronostique.

Les critères diagnostic de l’OMS (classification de 2008) sont les suivants :

Critères majeurs :

1. Prolifération de mégacaryocytes avec atypies et fibrose réticulinique et/ou


collagénique ou en l’absence de fibrose réticulinique, les modifications des mégacaryocytes
doivent être accompagnés d’une augmentation de la cellularité, d’une hyperplasie
granuleuse et souvent d’une diminution de l’érythropoïèse (MFP préfibrotique)

2. Absence de critères OMS pour une LMC, MV, MDS ou autre pathologie myéloïde

3. Présence de la mutation de JAK2V617F ou autre marqueur de clonalité* ou pas


d’évidence pour une fibrose médullaire réactionnelle.

Critères mineurs :

1. Erythromyélémie

2. Elévation des LDH

3. Anémie

4. Splénomégalie palpable

Le diagnostic de MFP nécessite les 3 critères majeurs et 2 critères mineurs.

* La mutation de MPL (W515L/K), 5% des MFP, ne fait pas partie des critères de l’OMS mais
peut être demandée si celle de JAK2V617F n’est pas détectée (Dr Véronique De Mas, Pr
Eric Delabesse, Laboratoire d’Hématologie, CHU de Toulouse, Hôpital Purpan).

22
II. Evolution, Pronostic et Surveillance

L’évolution, chronique et insidieuse, est émaillée de complications souvent multi-factorielles.


La médiane de survie est aux alentours de 4 à 5 ans, avec de grandes variations
individuelles. L’âge élevé et le caractère symptomatique de la maladie sont défavorables
(médiane de survie autour de 12 ans pour les moins de 55 ans). L’anémie est le paramètre
pronostique majeur avec une limite à 10 g/dl d’hémoglobine. Les valeurs extrêmes de la
numération leucocytaire (inférieure à 4 ou supérieure à 30 G/L) sont péjoratives ainsi que
les anomalies cytogénétiques. Le score pronostique le plus utilisé a été le score de Lille,
établi de façon simple en fonction du taux d’hémoglobine (< 10 contre > 10 g/dl), de la
leucocytose (< 4 ou > 30.109 / l contre 4 à 30.109 /l) et du caryotype (pour les faibles
risques). Toutefois, un nouveau score pronostique international (ASH 2008) devrait être de
plus en plus utilisé dans le futur. Ce score est basé sur l’âge, le taux d’Hb, le taux de GB
et le pourcentage de blastes sanguins (>65 ans; Hb<10g/dL; GB>25.109/L; blastes
sg>1%). Ils doivent donc figurer sur la fiche RCP :
– Faible risque: 0 facteur; 22% des patients; médiane de survie, 135 mois
– Int-1: 1 facteur; 29%; 95 mois
– Int-2: 2 facteurs; 28%; 48 mois
– Haut risque: 3 facteurs; 21%; 27 mois.
JAK2V617F n’a pas de valeur pronostique alors que les anomalies cytogénétiques ont un
impact uniquement dans les groupes intermédiaires. Ces éléments sont importants pour les
décisions thérapeutiques notamment l’allogreffe chez les patients jeunes. La surveillance de
la maladie est simple, essentiellement clinique (état général, splénomégalie) aidée de
l’hémogramme. Les critères de réponse au traitement ont été récemment définis (Barosi G,
Blood 2005).

Le bilan d’une MFP devant apparaitre sur la fiche RCP doit comporter :

Examen clinique : signes généraux, splénomégalie (taille et symptômes associés).


Facteurs de risque cardio-vasculaires. Antécédents thrombotiques artériels ou
veineux. Tout autre ATCD pouvant influencer la prise en charge thérapeutique ;
ATCD familial d’hémopathies
Hémogramme complet, myélémie, érythromyélémie, dacryocytes, %blastes (+++),
anomalies morphologiques sur le frottis sanguin
BOM
Mutation JAK2 V617F , Bcr-abl (recherchés sur le sang)
Caryotype
Myélogramme, coloration de Perls et caryotype si suspicion de MDS
LDH
VS-CRP
Bilan martial

Examens recommandés mais non obligatoires et à demander en fonction des


premiers résultats :
Mutation MPLW515L/K (effectuée sur l’échantillon prélevé pour recherche JAK2V617F)
Echographie abdominale + doppler

23
III. Prise en charge thérapeutique

Actuellement, seules les formes symptomatiques doivent être traitées afin d’améliorer la
qualité de vie. Les formes asymptomatiques sont à surveiller. Aucune étude n’a démontré à
ce jour d’amélioration de la survie par le traitement, en dehors de la greffe allogénique. Les
décisions sont individuelles et très dépendantes de l’expérience de chaque médecin en
l’absence de protocole établi.

A. Traitements conventionnels
Ils sont symptomatiques visant à contrôler la myéloprolifération et/ou à améliorer les
cytopénies. Des transfusions sont habituellement nécessaires en cours d’évolution, sans
oublier la correction d’éventuelles carences.

1. Traitement des cytopénies

L’androgénothérapie prolongée et notamment le danazol (à la dose de 600 à 800 mg/jour)


peut améliorer les cytopénies (anémie dans 30% des cas, thrombopénie dans 50% des cas)
avec une toxicité réduite et réversible et une efficacité lente (3 à 6 mois). Ce traitement est
introduit en l’absence d’antécédents prostatique et après vérification du taux de PSA et reste
contre indiqué en cas de tumeur androgéno-dépendante, de thrombose évolutive ou
d’antécédents de maladie thromboembolique, d’insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque
sévère.

Les érythropoïétines sont parfois efficaces sur l’anémie (30 à 50% de réponse). Les
facteurs prédictifs de réponse sont : EPO sérique < 125 mUI/mL, absence de nécessité
transfusionnelle, Hb > 8.5 g/dL.

Une étude rétrospective récente a montré que les patients ayant été traités par Epo
et Danatrol étaient plus à risque de transformation aiguë. Même si ces résultats restent à
confirmer et ne démontrent pas formellement que ces deux produits augmentent le risque
leucémogène (sélection des patients les plus à risque ?), ils incitent à la prudence dans leur
indication et durée d’utilisation.

La corticothérapie (à la dose initiale de 0.5 à 1mg/kilo/jour) est d’efficacité plus rapide sur
les cytopénies (30% des cas) mais s’accompagne souvent d’une cortico-dépendance
nécessitant le maintien de petites doses ultérieures. Les corticoïdes peuvent également être
utiles sur les signes généraux et en association avec du thalidomide.

Le thalidomide à faible dose (50 mg/jour) est efficace sur les cytopénies dans 30 à 50 %
des cas dans un délai rapide (moins de 3 mois) avec un effet limité voire délétère sur les
signes de prolifération (rebond leucocytaire possible). Sa toxicité est réduite par l’usage de
faibles doses et l’intérêt accru par l’association notamment avec une corticothérapie à faible
dose. Le Thalidomide peut être obtenu par la demande d’une ATU, après échec des
traitements de première intention (danatrol, corticoïdes, etc).

Le schéma actuellement recommandé est : Thalidomide 50 mg/j + prednisone


(0.5 mg/kg/j pdt un mois ; puis 0.25 un mois; puis 0.125 un mois) et thalidomide en
entretien à 3 mois en cas de réponse et en fonction de la tolérance.

24
2. Traitement du syndrome tumoral

L’Hydroxyurée dont les doses sont à adapter aux cytopénies est indiqué en cas de
splénomégalie volumineuse et/ou symptomatique, d’hyperleucocytose (supérieure à 30 G/L)
ou de thrombocytose. Le pipoproman, la mercaptopurine sont parfois utilisés en deuxième
intention. La 2 cd-A ou leustatine (4 à 6 cycles mensuels) a été récemment utilisée avec une
efficacité variable, mais parfois significative et durable (50% de réponse sur HSMG, anémie,
leucocytose et thrombocytose). L’interféron-alpha donne des résultats très variables sur le
syndrome tumoral et rarement, après utilisation prolongée, sur l’anémie, mais au prix d’une
tolérance très médiocre.

La splénectomie est à envisager en cas de splénomégalie massive, symptomatique,


accompagnée de cytopénies (hypersplénisme) nécessitant des transfusions massives,
d’hypertension portale symptomatique, après échec du traitement médical. La splénectomie
permet dans la grande majorité des cas une amélioration symptomatique qui peut être
durable (médiane, 12 mois). La morbidité post-opératoire (30%) reste importante, liée
essentiellement à des complications thrombo-emboliques (thromboses des veines splénique,
porte etc) justifiant l’utilisation systématique d’hydroxyurée et une anticoagulation préventive.
Les saignements post-opératoires et les infections ne sont pas rares ainsi qu’une
thrombocytose réactionnelle (20%), une hépatomégalie rapidement progressive (10%) et un
risque de transformation (10%). La mortalité péri-opératoire est d’environ 10%. L’indication
de la splénectomie doit donc être soigneusement portée et le patient clairement informé du
risque. Elle reste souvent indiquée avant allogreffe.

La radiothérapie splénique à petites doses peut être utilisée lorsque la chirurgie est contre-
indiquée. Le bénéfice en terme de réduction splénique est transitoire (6 mois) et les
cytopénies secondaires peuvent être profondes et prolongées, parfois fatales (10%).
L’irradiation de certains foyers d’hématopoïèse ectopique est en général efficace (irradiation
pulmonaire à faible dose en cas d’HTAP ; irradiation spinale et autres sites d’hématopoïèse
extra-médullaire para-vertébraux ou autres).

B. La greffe de moelle osseuse allogénique

Une greffe allogénique peut être indiquée chez les patients de moins de 65 ans
(conditionnements myélo-ablatifs ou d’intensité réduite), avec un score pronostique
intermédiaire ou élevé c'est-à-dire lorsque leur survie médiane estimée est inférieure à 4
ans. La décision est prise en RCP greffe (Dr Anne Huynh).

C. Nouvelles molécules

Les inhibiteurs de JAK2 sont en cours d’évaluation mais nous n’avons pas d’essai
thérapeutique prévu dans le service pour l’année 2009. Le lénalidomide n’est pas encore
recommandé dans cette indication mais plusieurs études sont en cours et il est possible que
ce médicament puisse être utilisé dans le futur à l’image du Thalidomide.

25
26
VI- AUTRES SYNDROMES MYÉLOPROLIFÉRATIFS

La nouvelle classification OMS a modifié la terminologie des syndromes myéloprolifératifs


chroniques en les regroupant sous le terme néoplasies myéloprolifératives (NMP). Leur
caractéristique commune réside en une prolifération myéloïde clonale sans signe de
dysérythropoïèse, de dysgranulopoïèse ou de monocytose. Cette catégorie inclue
désormais les mastocytoses et isole les NMP avec éosinophilie clonale caractérisées sur le
plan moléculaire et antérieurement classées avec les hyperéosinophilies
essentielles/leucémies éosinophiles chroniques (HES/CEL).

A. Bilan

Le bilan d’une NMP devant apparaitre sur la fiche RCP doit comporter :

Examen clinique : signes généraux, splénomégalie, autre sd tumoral. ATCD de


pathologies malignes
Fratrie
Hémogramme complet, myélémie, %blastes (+++)
LDH, uricémie, urée, créatinine, électrophorèse des protides
Myélogramme
Caryotype
BOM

En cas d’hyperéosinophilie* primitive (>1.5 G/L)

Durée d’hyperéosinophilie et atteinte d’organe**


BOM
Tryptase sérique
Clonalité T
Immunophénotypage lymphocytaire : population T : CD3- CD4+ CD8-
FIP1L1-PDFGRalpha

En cas de mastocytose systémique

Mutation de cKIT

* L’avis de la RCP est sollicité après élimination des autres causes d’hyperéosinophilie
(réactionnelle, cancer, hémopathies, allergie, auto immunité, vascularites, parasitoses,
médicaments)

** Selon les critères de Chusid, le SHE associe une HE massive (> 1,5 G/L), d’origine
inconnue évoluant depuis au moins 6 mois, à une infiltration tissulaire diffuse de PNE et des
atteintes multiviscérales.

27
Algorythme diagnostic proposé pour le bilan d’une hyperEo, A Tefferi (Leukemia,
2008)

Lorsque la présentation clinique et biologique est en faveur d’une NMP mais qu’aucun critère
ne permet de la classer, la terminologie diagnostique choisie sera néoplasie
myéloproliférative inclassable.

B. Traitement

1. NMP inclassable

En fonction de l’âge, de la présentation clinique, et des caractéristiques


cytogénétiques plusieurs options thérapeutiques sont possibles.

a. Traitement myélo-freinateur par hydroxyurée


b. chimiothérapie intensive si signes d’accélération et présence d’une donneur
de cellules souches hématopoïétiques.
c. Allogreffe de CSP

2. HES et HES variant lymphoïde

a. Corticothérapie, faible doses au long cours


b. Interféron alpha 1 à 3 MU X 3 par semaine
c. Hydroxyurée
d. Ciclosporine

28
3. HES variant myéloïde sans documentation moléculaire

a. Hydroxyurée
b. Imatinib. Un test thérapeutique ++ avec une dose de 200 mg/j est parfois
concluant même si aucune anomalie moléculaire connue est constatée. Les autres
ITK (dasatinib, nilotinib) peuvent être discutés.

4. NMP avec hyperéosinophilie et réarrangement moléculaire PDGFR ,


PDGFR , FGFR1

a. Imatinib 100 à 400 mg/j en première ligne. Les autres ITK (dasatinib,
nilotinib) peuvent être discutés.
! des cas d’insuffisance ventriculaire gauche peuvent être observé à l’initiation
du traitement en particulier chez les patients ayant une cardiopathie éosinophilique.
Une corticothérapie pendant les deux premières semaines d’imatinib peut être
nécessaire. Un bilan cardiaque rigoureux est donc nécessaire (ECG, proBNP,
troponine, echographie).

b. Hydroxyurée ou interféron alpha si échec des ITK


c. L’allogreffe peut être discutée au cas par cas si absence de réponse aux
ITK

29
VII- LEUCÉMIE MYÉLOÏDE CHRONIQUE

La Leucémie Myéloïde Chronique est caractérisée par la présence du chromosome de


Philadelphie, par translocation réciproque t (9 ; 22). Le gène hybride BCR-ABL ainsi généré
est à l’origine d’un ARN transcrit, puis d’une protéine d’activité tyrosine-kinase. Il existe
plusieurs types de transcrits en fonction des points de cassure chromosomiques. L’activation
constitutive de BCR-ABL dans la cellule leucémique déclenche une cascade d’évènements
intra-cellulaires influençant prolifération, apoptose, instabilité génétique. La progression de la
maladie d’une phase chronique indolente (en dehors des possibles complications
thrombotiques des grandes hyperleucocytoses) vers les phases avancées, accélérée et
blastique, est le fait de nouveaux évènements oncogéniques.

Ces considérations expliquent que le diagnostic de la maladie se fasse aujourd’hui


exclusivement sur ces marqueurs. Il repose donc sur le caryotype et la FISH médullaires,
l’identification et la quantification du transcrit par PCR dans le sang. Les examens tels
que BOM, phosphatases alcalines leucocytaires et dosage de vitamine B12 sont inutiles. La
phase de la maladie doit être précisée, et les scores pronostiques de Sokal et Hasford
doivent être calculés grâce à des programmes informatiques ad hoc.

Au-delà de la réponse clinique et hématologique jugée sur l’hémogramme, l’objectif du


traitement de fond de la LMC n’est donc pas seulement la réduction de la splénomégalie et
de l’hyperleucocytose, mais surtout la disparition du clone Philadelphie positif, jugée sur le
marqueur chromosomique par le caryotype médullaire, et sur le marqueur moléculaire, plus
sensible, par RQ-PCR sur le sang. La qualité de la réponse au traitement conditionne le
pronostic à long terme. Celle-ci doit donc être précisément appréciée à des étapes
déterminées du traitement, selon les critères de l’ELN (European Leukemia Net), en
réponse optimale, infra-optimale, ou échec. Le niveau de réponse conditionne le
traitement à proposer.

Ce traitement repose aujourd’hui en première intention sur les inhibiteurs de tyrosine-


kinases (chef de file Imatinib ou Glivec). Les multiples interrogations concernant la meilleure
molécule, la posologie, les associations thérapeutiques, la place résiduelle de la greffe de
cellules souches hématopoïétiques, etc...justifient que le traitement de cette maladie rare
continue à faire l’objet d’essais thérapeutiques. Les autres traitements sont à discuter en
cas d’intolérance au traitement jugée sur des critères précis de garde et durée, ou de
résistance.

Certains mécanismes de résistance au traitement peuvent être appréhendés en pratique


clinique. Le mécanisme pharmacologique d’insuffisance d’exposition à la drogue découle
notamment de l’inobservance, des interactions médicamenteuses, de l’insuffisance des taux
sériques. Le mécanisme moléculaire est lié à la survenue de mutations de BCR-ABL
diminuant la fixation du médicament à sa cible.

30
Les diapositives jointes (présentées en réunion régionale en novembre 2008) détaillent ces
différents thèmes.

Réponse moléculaire

31
Critères de réponse (European Leukemia Net, 2006)

Échec Réponse suboptimale “Vigilance”

• Risque élevé
• Del 9q+
Diagnostic
• ACA dans les cellules
Ph+

3 mois Pas de RH < RCH

< RCH
6 mois < RPCy
Pas de RCy

12 mois < RPCy < RCCy < RMolM

18 mois < RCCy < RMolM

- Perte de RCH - ACA dans les cellules Ph+


- Augmentation du taux
A tout - Perte de RCCy - Perte de RMolM
de transcrit
moment - Mutation - Mutation
- AAC dans les cellules Ph-
(résistance élevée à Glivec) (faible résistance à Glivec)

Suivi du traitement (recommandations ELN)

Mois 0 1 3 6 9 12 Puis

Suivi Clinique x x x x x x Tous les 6 mois

Suivi biologique

Tous les 15 jours jusqu’à obtention et confirmation


NFS
d’une réponse hématologique complète, puis tous les 3 mois

Suivi cytogénétique Tous les ans


x x x
Caryotype médullaire après réponse complète

Suivi moléculaire
x x x x x Tous les 3 mois
RQ-PCR
32
Suivi du traitement (recommandations Oncomip)

Arrêt des caryotypes à la RCyC :

• les anomalies surnuméraires du clone Ph- n’ont pas de signification pronostique


• la perte de réponse Cy est précédée d’une perte de réponse moléculaire

Espacement des RQ-PCR à 6 mois au-delà de la 2ème année :

• les évènements et progression sont rares au-delà de 2 ans

année évènement Ph Accélérée-Ph


Blastique

1 3,3% 1,5%

2 7,5% 2,8%

3 4,8% 1,6%

4 1,5% 0,9%

5 0,9% 0,6%

Dosage de l’imatinib

Défaut de compliance, interactions médicamenteuses

Echec ou réponse sub-optimale

Effets secondaires

Systématiquement ? Pourra faire l’objet d’étude prospective (Pr E Chatelut)

Les dosages de nilotinib et dasatinib ne se font pas encore en routine.

33
Mutations de bcr-abl

34
35
LES INHIBITEURS DE DEUXIEME GENERATION

36
37
38
PROTOCOLES LMC

1. Traitement de première ligne


SPIRIT (FI-LMC)
– Phase III
– IM 400 vs IM 600 vs IM Peg IFN vs IM AraC
– ouvert
SKI 300
– Phase III
– IM vs Bosutinib
– ouverture prochaine
2. LMC en RCyC
• MIM (FILMC)
– Phase III
– IM > 2ans, RCyC > 1 an
– Stratégie standard IM vs optimisation de dose d’IM
– ouverture prochaine
3. LMC en RMolC

• STIM (FILMC)
– Etude ouverte
– IM > 3 ans, transcrit indétectable > 2 ans
– Arrêt IM et PCR mensuelle
– Fermé mais continuer « selon » avec évaluation biologique centralisée à
Bordeaux

4. LMC en réponse suboptimale

• IPH-1101-204
– Phase I-II
– Réponse sub-optimale ou presque...
– Agoniste des T gd, 3 cures mensuelles
– Ouvert
5. LMC en échec

• CGX-635-CML-202
– Phase II
– PC, PA, PB avec mutation T315I
– Homoharringtonine (CGX-635 ou Omacetaxine) S/C
– ouvert
• CGX-635-CML-203
– Phase II
– Échec ou intolérance à Deux ITK
– HHT S/C
– ouvert
6. Etude d’observance et qualité de vie

• EOSTA
– Etude observationnelle
– visite médicale M0, 6,9 + auto-questionnaire M0, 3, 6, 9,12
– Nilotinib AMM
– ouverture prochaine

39
VIII- LEUCEMIES AIGUES

Diagnostic

Cytopénies ou leucocytose avec blastes circulants: cytologie sur frottis (myéloïde ?


lymphoïde ?)
Il n’est pas forcement utile de faire un myélogramme sauf cas particulier. Prendre contact
avec le service d’hématologie, hôpital Purpan, pour consultation en urgence et ponction
sternale avec prélèvements centralisés.

Ponction médullaire :
Cytologie
Cytogénétique
Mutations (FLT3-ITD, NPM1, CEBPα, autres)
Immunophénotype
Congélation moelle (et sang si leucocytose blastique) pour cytothèque (Dr Cécile Demur).

Bilan préthérapeutique

Biologie standard. Hémostase


KT central
FE ventriculaire
Typage HLA (<65)
Indice OMS
Comorbidités+++ (score de Sorror) pour les sujets de plus de 60 ans
ATCD onco-hématologique et traitements cytotoxiques éventuels à détailler

Score de Sorror

Comorbidité

Arythmie 1
Cardiaque 1
Maladie inflammatoire intestinale 1
Diabètes 1
Maladie vasculaire cérébrale 1
Trouble psychiatrique 1
Hépatique, légère 1
Obésité 1
Infection 1
Rhumatologique 2
Ulcère gastro-duodénal 2
Rénale, modérée ou sévère 2
Pulmonaire, modérée 2
Tumeur solide antérieure 3
Cardiopathie valvulaire 3
Pulmonaire, sévère 3
Hépatique, modérée ou sévère 3

40
Les urgences vitales

LAM hypercytaires
GB> 50 G/L
Leucostase clinique

Prise en charge des LAM hypercytaires > 50G/L


Hydratation adaptée
Fasturtec
HYDREA 4 à 6 g/m2
Plaquettes > 20 G/L

LAM 3
Leucopénie
CIVD+++

Prise en charge des LAM 3 avec CIVD


Transfusion de plaquettes (> 50 G/L)
ATRA PO: 45 mg/m2/j en deux prises (à demander en urgence)
PFC (TP> 50%)
Fibrinogène purifié (Fib>1g/L)

41
PROTOCOLES LAM

1. LAM < 60 ans

a. LAM avec t(8 ;21) ou inv16

Phase III, 1ere ligne : essai LAM CBF 2006 (intergroupe français des LAM ALFA-GOELAMS).
Phase II, résistants à la chimiothérapie conventionnelle ou en rechute moléculaire : DASA-
CBF (intergroupe français des LAM ALFA-GOELAMS).

b. LAM avec cytogénétique intermédiaire :

Phase III, 1ére ligne : essai LAM 2006 IR (GOELAMS). Chimiothérapie standard +/-
MYLOTARG.

c. LAM avec cytogénétique défavorable

Phase I/II, 1ére ligne : LAM-HR/IPC 2006-07 (GOELAMS). Chimiothérapie standard +/-
CLORETAZINE.

e. LAM3

Phase III, 1ère ligne: APL 2006.

f. Rechute

Phase I (< 65 ans, RC1 >12 mois) : RAD001 (GOELAMS) : Chimiothérapie standard +/-
RAD001 (everolimus).

Phase II, CP4055-106 (> 18 ans).

Phase III, > 55 ans: essai CLASSIC I CLO34100405: Aracytine-placebo vs Aracytine-


Clofarabine.

42
2. LAM > 60 ans

a. LAM avec cytogénétique non défavorable et éligible pour une chimiothérapie


intensive

Phase III, 1ére ligne : essai LAM-SA 2007. Chimiothérapie standard +/- CCNU.

b. LAM3

Phase III, 1ère ligne: APL 2006.

c. Rechutes/réfractaires

Phase III, > 55 ans: essai CLASSIC I CLO34100405: Aracytine-placebo vs Aracytine-


Clofarabine.

Algorythme décisionnel

Apte pour
chimiothérapie
intensive

Caryotype Caryotype
Pronostic cytogénétique Pronostic cytogénétique
intermédiaire ou favorable défavorable

Protocole LAM SA Essais thérapeutiques Non hypercytaire Hypercytaire


2007 < 10 G/L
Goelams (non activé) > 10 G/L
Hors protocole: Agents déméthylants
Ida-AraC-CCNU puis Ida-AraC-CCNU
Ida-AraC-CCNU Revlimid/Vidaza
Clofarabine?
Ida-AraC-Clofa Cloretazine?

43
Algorythme décisionnel

Inapte pour
chimiothérapie
intensive

Non hypercytaire Hypercytaire


<10 G/L >10 G/L

Traitement
Clofarabine? symptomatique
Agents déméthylants Essais Cloretazine? Hydroxyurée
thérapeutiques
3 à 8 g/jour
AraC faible dose
Transfusions

44
PROTOCOLES LAL

1. LAL < 60 ans

a. LAL B non ph et T :

Phase III, 1ère ligne : GRAALL 2005-GRAALL 2005-R (LAL CD20+).

b. LAL ph+ :

Phase III, 1ère ligne : GRAAPH-2005.

2. LAL > 60 ans

a. LAL B non ph et T :

Phase II, 1ère ligne: GRAALL SA2: EWALL + GRASPA.

b. LAL ph+:

Phase II, 1ère ligne: EWALL + DASATINIB.

45
IX- MYÉLODYSPLASIES

Ce chapitre est en cours de rédaction et de finalisation par le groupe de travail.

46

Vous aimerez peut-être aussi