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Cas EGS

La société EGS (Effective Gear Systems) est née en 2018, en France, d’une idée : celui de la
commande de dérailleur Synchro Shift. Il s’agit d’une poignée tournante qui permet de
changer les vitesses d’un VTT (Vélo Tout Terrain). Sa spécificité est de pouvoir contrôler
avec une seule commande (une seule poignée) le dérailleur avant ET le dérailleur arrière. Une
seule commande pour deux dérailleurs !

Le système est particulièrement simple : le cycliste tourne la poignée dans un sens lorsqu’il
est en difficulté (côte par exemple), et dans l’autre sens lorsqu’il se sent mieux (descente,
plat). Le système Synchro Shift gère totalement les changements des deux dérailleurs,
choisissant le rapport idéal, évitant de croiser la chaîne (ce qui provoque une usure prématurée
de la chaîne). Le Synchro Shift est totalement mécanique : le contrôle des deux dérailleurs se
fait par un jeu de câbles.

Malgré le caractère innovateur du Synchro Shift, les ventes d’EGS n’ont jamais décollé, le
chiffre d’affaires atteignant péniblement 1,8 millions d’euros en 2021 (pour 6 millions d’euros
de pertes !).

L’entreprise a été liquidée au printemps 2022. Lors de cette liquidation, le leader mondial de
l’équipement vélo (dérailleurs, freins, roues…) a racheté les brevets d’EGS pour la somme de
251 000 euros. Jeune recruté dans l’entreprise, votre travail sera de présenter une analyse de la
situation, puis des préconisations pour l’entreprise dans l’optique d’une relance du concept
Synchro Shift. Les questions suivantes vous aideront à structurer votre étude.

Questions

1. Faites un bilan des opportunités et des menaces du marché du vélo. Quels sont les
facteurs clés de succès sur ces segments ?

2. Quelles sont les attentes de la clientèle sur les différents segments ?

3. Faites une synthèse des choix marketing effectués par la société EGS (mettez
clairement en évidence le positionnement de l’entreprise). Donnez votre avis sur ces
choix.

4. Que proposeriez-vous pour relancer le Synchro Shift ?

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1. Le marché

1.1. Les tendances de consommation dans le domaine du sport

Entre 2010 et 2021, la consommation de produits et services sportifs des ménages français est
passée de 206 euros à 518 euros par an. Cette forte croissance est liée à de nombreux facteurs
favorables :

 La valorisation de la pratique sportive dans les relations sociales

 Le développement d’un style de vie plus décontracté

 L’intégration par le grand public du lien entre santé et pratique sportive

 L’aspiration croissante d’un retour à la nature et la protection de l’environnement

 L’augmentation du temps libre

Mais tous les types de pratiques ne profitent pas de ces évolutions. Depuis dix ans on constate
des tendances que l’on peut synthétiser en 4 axes :

 Le développement des sports de plein air (dits ‘outdoor’)

 La préférence pour les sports individuels (par refus des contraintes), mais pouvant être
pratiqués en groupe

 Le ‘zapping sportif’, c’est à dire la pratique par un même individu de plusieurs sports
au cours de l’année

 La priorité donnée aux sports nécessitant peu d’apprentissage, liée au ‘zapping


sportif’, puisque le pratiquant n’a pas le temps d’investir beaucoup de temps dans un
seul sport

Ces aspirations devraient se maintenir voire s’accentuer au cours des années à venir.

1.2. Les ventes de cycles

Selon l'Union Sport & Cycle, en 2021, 2,7 millions de vélos neufs se sont vendus en France,
contre 1,8 million de trottinettes électriques et 1,65 million de voitures.
La France est-elle en train de redevenir un pays de vélo ? Si l'on pense en général rapidement
aux pays scandinaves, pour leurs équipements et la place faite aux bicyclettes dans les villes,
le marché français se porte très bien. Selon une étude de l'Union Sport & Cycle, en 2021, le
vélo s'avère être le moyen de transport le plus vendu en France, devant les trottinettes
électriques, les voitures, motos et scooters.
"Il y a un phénomène de société", rapportait jeudi matin sur France Inter Virgile Caillet,
délégué général de cette organisation professionnelle qui fédère des équipementiers et des

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distributeurs. "La France redécouvre le fait que le vélo est un moyen de locomotion du
quotidien et un véritable outil pour la société."

1.3. L’offre de cycles

Après une année 2020 marquée par une des plus longues grèves de ces dernières années (et
une pratique accentuée du vélo pour se substituer aux transports en commun bloqués) et la
pandémie de maladie à coronavirus (et donc la recherche de modes de transport plus sûrs sur
le plan sanitaire), le marché du vélo a connu une exceptionnelle croissance.

L'Union Sport & Cycles a mesuré une hausse de 4% en volume de vente en 2021 par rapport à
2020 et de 15% en valeur. Sur les deux dernières années, le marché du cycle connaît une
progression de 43 % en valeur. Des chiffres qui traduisent "une tendance de fond", selon
l'association.

Au total, plus de 2,7 millions de vélos se sont vendus en France en 2021, faisant de ce moyen
de locomotion le plus plébiscité par les Français. Suivent près d'1,8 million de trottinettes
électriques neuves et 1,65 million de voitures neuves achetées. Un biais toutefois : rien ne dit
que ces vélos neufs servent tous de moyen de locomotion quotidien, certains peuvent avoir un
usage sportif.

Dans un contexte pourtant difficile, avec de gros soucis d'approvisionnement et une flambée
des coûts en raison de la pandémie de Covid-19 et de ses conséquences économiques, le
marché du vélo s'en sort donc plutôt bien. Face à cela, "les industriels français tentent de
renforcer leurs capacités de production interne", estime l'organisation. 800 000 vélos ont été
produits en France en 2021 contre 660 000 en 2020. La plupart des vélos neufs vendus dans
l'hexagone, en volume, le sont par des magasins multisports (65 %) et les détaillants et petites
enseignes représentent 58 % des ventes en valeur. "Les perspectives pour 2022, c’est plus
d’un million de vélos fabriqués en France", prévoit Virgile Caillet.

Surtout, de plus en plus de vélos à assistance électrique (VAE) sont vendus et symbolisent "le
renouveau du cycle en France", estime l'Union Sport & Cycle. 660 000 VAE se sont vendus
en France en 2021 contre 515 000 en 2020, soit une hausse de 28% par rapport à l’année
précédente. Des ventes portées par l'essor des "vélotafeurs", et qui représentent un vélo vendu
sur quatre en France, souligne Virgile Caillet, avec toutefois un coût plus important : une
moyenne de 2000 euros, quand le vélo "normal" coûte en moyenne 700 euros.

Parallèlement à cette évolution, on constate l’arrivée de nouveaux concurrents, en particulier


de fabricants automobiles (Renault, BMW, Porsche). Leurs parts de marché restent pour
l’instant confidentielles, leur objectif semblant être de se cantonner à l’utilisation de l’image
écologiste et sportive du VTT et du VAE.

La plupart des fabricants et des distributeurs essayent de sortir de la guerre des prix. Cette
évolution est favorisée par le fait que les cyclistes (et vététistes) sont beaucoup plus exigeants
lors de leur deuxième achat, qui est plus réfléchi que le premier. La tendance actuelle est donc
de plus en plus à vendre des vélos sur des arguments techniques ou de qualité que sur des
arguments prix.

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1.4. Première monte et deuxième monte

Les accessoires type dérailleurs, commandes de dérailleurs, freins, roues peuvent être montés
d’origine sur le vélo (première monte) ou changés par le propriétaire du vélo ultérieurement,
pour changer une pièce cassée ou rendre son vélo plus performant (deuxième monte). Ainsi,
les propriétaires de vélos haut de gamme consacrent de gros budgets à faire évoluer leur cycle
(et sont donc clients de produits en deuxième monte). Il n’y a en revanche quasiment pas de
marché de deuxième monte pour les vélos de bas ou milieu de gamme. Il faut donc pouvoir
vendre les pièces d’équipement bas ou milieu de gamme directement au producteur de vélo
pour qu’il le monte en standard dès la fabrication du vélo.

1.5. La distribution de cycles

Les ventes de vélos échappent de plus en plus aux spécialistes. On estime que les 4 300
détaillants indépendants existant aujourd’hui ne seront plus que 600 dans 5 ans.
Parallèlement, la grande distribution a vu ses ventes régresser très légèrement (exigences
accrues des clients), et cherche à se donner une légitimité en proposant des vélos mieux
équipés et de meilleure qualité. Les grands distributeurs restent les plus gros vendeurs de
vélos, mais à des prix qui ne leur procurent parfois que de faibles marges.

1.6. Les profils de clientèle

La population cycliste est fortement hétérogène, on peut distinguer 5 profils d’utilisateurs :

 Les routiers sportifs pratiquent le vélo de route

 Les vététistes sportifs sont des passionnés, ils consacrent un gros budget à leur
matériel et sont très exigeants. La technicité de leur matériel est un fort vecteur de
valorisation personnelle. L’argument central pour cette population est la performance.

 Les vététistes promeneurs partent en famille le dimanche se promener en VTT ou en


VTC ou encore en VAE. Ils cherchent avant tout de la facilité d’emploi et de la
fiabilité.

 Les urbains utilitaires utilisent le vélo (souvent un VTC ou un VAE) comme moyen de
déplacement, ils recherchent de la facilité et le confort.

 Les urbains branchés utilisent leur vélo en ville et sont prêts à consacrer un gros
budget à leur matériel, l’aspect de leur équipement est très important. Cette population
reste très marginale.

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2. La société EGS

2.1. Les produits EGS

EGS propose une gamme complète de commandes de dérailleurs, couvrant les besoins des
utilisateurs loisirs et des compétiteurs. Ce sont les modèles compétition qui ont été lancés en
premier sur le marché en 2018. Le but était alors de rentrer sur le marché par le haut de
gamme afin d’établir une image forte pour les produits EGS, avec une politique de prix
relativement élevés. Dans cette optique, l’équipe de compétiteurs sponsorisés par EGS (le
‘Team EGS’) était le point central de la politique marketing de la société.

La gamme EGS comportait 6 produits au début de l’année 2018 :

 Top Compétition : Synchro Shift X-Pro

 Compétition : Synchro Shift Ultimate

 Free Ride : Synchro Shift Sport

 Loisir : Synchro Shift Adventure

 Ville : Synchro Shift Easy

 Jeunes : Synchro Shift Zawax

Les produits Adventure, Easy et Zawax constituent 90 % des ventes d’EGS.

2.2. La promotion EGS

Dès sa création la société a fait le choix de communiquer sur la compétition pour se forger
une image. La société Sunn avait donné l’exemple au début des années 90 en étant la première
à constituer une équipe professionnelle de VTT. Mais à la fin des années 2010, le milieu de la
compétition a évolué : les compétiteurs sont devenus plus exigeants, aussi bien en termes de
salaires que de performance du matériel.

Jusqu’à sa liquidation, EGS consacre donc plusieurs centaines de milliers d’euros par an à son
équipe de compétiteurs (le ’Team EGS’). Ce sponsoring est alors utilisé comme vitrine sur les
grands événements cyclistes et dans les magazines spécialisés.

2.3. La distribution

Pour être cohérent avec le positionnement relativement haut de gamme des produits EGS, le
choix a été fait de privilégier la distribution des commandes de dérailleurs comme produits de
deuxième monte, donc comme pièces détachées auprès des clients finaux.

Le seul accord avec un fabricant a été signé avec Décathlon au courant de l’année 2020, à
priori trop tard pour sauver l’entreprise.

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Annexe 1 – Données sur le marché
(https://www.lexpress.fr/actualites/1/societe/le-marche-
francais-du-velo-survolte-en-2021_2171211.html)

En 2021, le marché a en outre été fortement porté par les vélos à assistance électrique (VAE),
qui ont établi un nouveau record à 660.000 exemplaires vendus (+28% sur un an).
Les VAE représentent désormais près d'un vélo sur quatre vendu en France et 59% du marché
en valeur, avec un prix de vente de 1.993 euros en moyenne. Le prix moyen des vélos
classiques est de 423 euros (+7% sur un an).
Cette hausse profite surtout aux enseignes multisport comme Decathlon ou Go Sport, qui
représentent les deux tiers des volumes de vente de vélos mais restent en retard sur les VAE
par rapport aux spécialistes du cycle.
Par ailleurs, les ventes de VTT baissent légèrement (-8%), tout comme les ventes de vélos
pliants (-21%), tandis que les ventes de vélos pour enfants sont restées stables. Quelque
17.000 vélos cargo, utilisés pour transporter des enfants ou des marchandises, ont également
été vendus, soit une augmentation de 50% sur un an.
La production de vélos en France a aussi fortement augmenté en 2021, à 804.744 unités
(+25%) dont près de la moitié sont des VAE.
L'Union prévoit de frôler le million en 2022, avec une majorité d'électriques. Les importations
ont également augmenté de 20%, principalement en provenance du Portugal, de l'Italie et de
la Roumanie.
"La France était un pays avec une vraie culture industrielle du vélo, on retrouve cette
dynamique", souligne Virgile Caillet. "C'est aussi une démarche vertueuse en termes
d'environnement et pour la santé publique."
Les aides à l'achat sont utiles pour multiplier le nombre de vélos "mais ce qui va être le plus
efficace, c'est le développement des infrastructures", comme les pistes cyclables ou les
garages à vélo, poursuit-il.
Face à l'exemple néerlandais ou allemand, il demande "plus d'ambition" dans les politiques
publiques.
Mardi, la Fédération des usagers de la bicylette (FUB) a également regretté que peu de
candidats à l'élection présidentielle "se montrent à la hauteur de l'enjeu", pointant "un
manque de réflexion sur la question des mobilités, voire un recul des engagements en faveur
d'une politique cyclable active".

Annexe 2 – Extraits d’entretiens de vététistes

Les extraits d’entretiens présentés ci-dessous ont été réalisés au cours d’une compétition de
masse (5 000 participants) en 2019. Les cyclistes interrogés sont donc des passionnés du
VTT. Ils étaient invités à donner leur opinion sur le système de dérailleur Synchro Shift.

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Hector : Il paraît qu’au début ce n’était pas fiable, surtout en conditions extrêmes. Mais après
c’était bien au point.

Bertrand : Moi ce système me semble très malin. Je n’en ai personnellement pas besoin car je
fais du vélo depuis longtemps, mais pour ma femme ce serait bien.

Gontrand : C’est très pratique, il n’y a plus aucune question à se poser sur le sens de passage
des vitesses ou le croisement de la chaîne.

Firmin : Dommage que ce soit si gros, car le même principe en plus petit serait idéal pour
mes enfants.

Germain : Après 10 ans de compétition je n’ai aucun besoin de ce truc !

Benjamin : J’en avais acheté un, mais mon marchand de vélo n’a jamais su comment le
régler, car c’est un système spécifique. Alors j’ai tout démonté.

Honoré : J’ai un copain, qui avait un ami, qui connaissait un membre de leur team. En fait ils
n’utilisaient pas le Synchro Shift en course parce que ce n’est pas adapté au haut niveau.

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Annexe 3 – Les produits EGS

Top Compétition : Synchro Shift X-Pro

Compétition : Synchro Shift Ultimate

Free Ride : Synchro Shift Sport

Loisir : Synchro Shift Adventure

Ville : Synchro Shift Easy

Jeunes : Synchro Shift Zawax

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Annexe 4 : Plus dynamique que jamais, le marché du cycle doit s’adapter à
l’engouement des usagers (https://www.velo-territoires.org/actualite/2021/04/18/plus-
dynamique-jamais-marche-cycle-sadapter-a-lengouement-usagers/#)
18 avril 2021

Le vélo ne connaît pas la crise, et le vélo à assistance électrique (VAE) n’en finit plus
d’exploser. Le bilan de l’Observatoire du cycle, présenté en ligne le 8 avril dernier par
l’Union Sport & Cycle, confirme les ressentis : malgré les temps troublés, les ventes de
vélos atteignent des sommets. La filière du cycle est assurément la grande bénéficiaire
d’une demande en forte augmentation. Pourtant, face à l’ampleur du phénomène
conjuguée aux fluctuations de la situation sanitaire, l’industrie peine à s’adapter, allant
jusqu’à réinterroger les systèmes de productions.
2020, une année hors norme pour le vélo
« J’avais prédit une baisse d’activité et j’étais dans le vrai. Ce que je n’avais pas anticipé,
c’était le délai pour la reprise du marché. » L’incroyable engouement en faveur du vélo
observé en 2020 sera même parvenu à dérouter Jérôme Valentin, président de l’Union Sport
& Cycle. « La dynamique était déjà bien engagée », indique Jérôme Valentin en rappelant une
date charnière : le 14 septembre 2018 et l’adoption du Plan vélo, « pierre angulaire du
développement de la culture vélo en France ». Soulignant l’impact de quatre acteurs majeurs
– la FUB (Fédération française des Usagers de la Bicyclette), le Club des villes et territoires
cyclables, Vélo & Territoires et l’Union Sport & Cycle, il mentionne une croissance « de 2 à
2,5 fois supérieure à l’activité habituelle » au sortir du premier confinement. « Les Français
ont adopté le vélo comme mode de déplacement », ajoute-t-il. Les chiffres de fréquentation
vélo publiés par Vélo & Territoires le confirment : +27 % en 2020, hors périodes de
confinement, par rapport aux mêmes périodes en 2019. Sur près de dix mois, le coup de pouce
vélo a engendré 1,9 million de réparations, un chiffre « totalement significatif, impressionnant
pour un dispositif qui a créé des emplois, accéléré des formations, et qui va dans le sens du
développement de notre industrie », commente Jérôme Valentin.

Plus de 3 milliards d’euros de chiffres d’affaires pour les ventes conjuguées de vélos,
périphériques et accessoires en 2020 : c’est 25 % de plus qu’en 2019. En volume, l’évolution
est moins nette : +1,7 % pour atteindre près de 2,7 millions de vélos vendus. Comment
s’explique un tel différentiel ? D’abord par le fait que l’engouement pour l’usage du vélo ne
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se traduit pas uniquement par l’achat. « Sur les deux millions de vélos remis en état dans le
cadre du coup de pouce vélo, si l’on considère qu’un sur deux était déjà utilisé, cela donne un
million de nouveaux vélos en circulation », estime André Ghestem, président de la
commission cycle à l’Union Sport & Cycle. « Les vélos en libre-service se sont développés
également. » Autre tendance que rapportent les chiffres : la diversification, la montée en
gamme et l’augmentation de la part de marché des VAE. Autrement dit, les Français achètent
proportionnellement plus de VAE, et de meilleure qualité.
Le VAE, catalyseur de la demande
« Nous assistons à un phénomène d’accélération de la croissance », observe Jérôme Valentin.
Avec 514 672 unités vendues en 2020, le VAE représente 19 % du marché. Son évolution est
impressionnante : +29 % en volume par rapport à 2019, alors que la croissance annuelle des
dix dernières années était, en moyenne, de l’ordre de 25 %. En valeur, l’évolution est encore
plus nette : +58 % d’augmentation du chiffre d’affaires. Avec 56 % du chiffre d’affaires total,
les ventes de VAE dépassent le milliard d’euros en 2020. « Pour la première fois, le marché
des VAE en valeur dépasse celui des vélos classiques », poursuit Jérôme Valentin. Facteur
influençant ? Le prix de vente moyen d’un VAE a augmenté de 21 % pour dépasser les 2 000
€. Cette augmentation se traduit par l’achat de VAE de meilleure qualité, mais aussi par
l’absence de promotions et gestes commerciaux face à une demande soutenue.
Autre fait marquant ? La diversification des pratiques. Si le vélo de ville reste le plus vendu
(40 % de part de marché), le VTT à assistance électrique se classe deuxième à la faveur d’une
forte hausse (+46 % en volume). Le marché voit émerger le vélo pliant (+95 %), le vélo de
route (+215 %). Encore plus spectaculaire et témoin de l’évolution des pratiques, le vélo
cargo à assistance électrique (+354 % pour 11 000 unités vendues), segment « à très fort
potentiel de croissance ». Pour la première fois l’Observatoire lui consacre une catégorie
spécifique.
En volume comme en valeur de ventes, le VAE compense la décroissance des vélos
traditionnels. A-t-on, dès lors, atteint le point de bascule et entamé le déclin irrémédiable du
vélo classique ? Pas pour Jérôme Valentin, qui considère ce phénomène comme n’étant pas
anormal : « lorsque l’on achète un VAE, on n’achète pas en même temps un vélo classique. Le
VAE ne le remplacera pas, par contre, il va poursuivre sa croissance. » Croissance dont les
prévisions sont montées d’un cran : « à l’horizon 2025, notre potentiel se situe entre 1 et 1,5
million de VAE vendus. »

Un retour de la production française


Près de 660 700 vélos ont été assemblés en France en 2020, dont 261 000 VAE. Que nous
disent ces chiffres ? « En France, la production se focalise et on se focalisera de plus en plus

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sur les VAE. Pourquoi ? Parce que la valeur ajoutée est plus importante », explique Jérôme
Valentin. Un retour à la relocalisation de la production ? « Des spécialistes qui autrefois
importaient des vélos les fabriquent aujourd’hui en France. C’est très positif pour nos
emplois et pour notre économie locale. » L’implantation de Mercier, fabriquant historique,
dans les Ardennes est un exemple emblématique. Pour 2021, les assembleurs prévoient une
hausse de 40 % de la production du cycle en France.
Bien sûr, cette tendance est à nuancer par la provenance de la plupart des composants, cadres,
pneumatiques, moteurs et batteries en premier lieu. Pour le président de l’Union Sport &
Cycle, la clé se trouve dans la réindustrialisation du cadre. « Si on fait revenir la fabrication
des cadres, les équipementiers suivront. Des initiatives au Portugal et dans certains pays de
l’Europe de l’Est émergent. Dans trois ans, nous aurons des cadres fabriqués en Europe ! »
Et en France ? « Une quarantaine d’artisans fabriquent entre 50 et 150 cadres par an. On
parle très peu d’eux, mais leur action et leur persévérance sont à féliciter ».
Il est intéressant de confronter ces tendances à l’évolution des importations et des
exportations. Les premières augmentent de 4 %, un chiffre faible eu égard aux 25 % de
croissance du secteur. La mutation concerne surtout des canaux d’approvisionnement. « Plus
de 60 % de ces vélos proviennent d’Europe. C’est le résultat de notre lobbying, l’antidumping
chinois pour les vélos traditionnels et, depuis 2019, pour les VAE. » Les exportations, quant à
elles, reculent de 11 %. Une baisse jugée normale par Jérôme Valentin qui l’explique par
l’ampleur de la demande nationale.

La nécessaire adaptation de l’industrie


La relocalisation progressive du marché du cycle pourrait apporter des solutions à l’un des
principaux écueils : l’approvisionnement. « L’année 2020 était inédite, mais les industriels
ont et auront des difficultés liées à la chaîne logistique », tempère Jérôme Valentin. « Tous les
jours nous nous battons pour obtenir les composants que nous avons commandés. La
demande a été anticipée et les commandes passées, mais les fournisseurs glissent leurs
délais. » Du côté des enseignes multisports notamment, les ruptures de stock sont intervenues
rapidement, générant d’importants délais de livraison. La France risque-t-elle une pénurie de
vélos ? « Nous avons des difficultés d’approvisionnement et cela crée une légère tension.
Mais nous faisons face », assure Jérôme Valentin. « Pas d’inquiétude, allez dans les magasins
acheter vos vélos ! »

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