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Le Secret derrière la porte, un thriller psychanalytique

(freudien) ?

« Faire passer l'inconscient à l'écran, c'est ce que veut tenter


Lang ». Bernard Eisenschitz
Genèse du genre du film freudien

La psychanalyse née en même temps que le cinéma dans les
années 1895.

Psycha. se répand ds années 40 aux USA, bien + tard qu'en Europe.
Lié aux trauma. de la 2nde guerre mondiale notamment.

Va fournir des éléments à la psychologie criminelle des films noirs se
développant ds années 40, et des cavenas de scénario.
→ Similitude entre enquête policière et enquête psycha. (indices...)

Propice à une époque où sévit le code Hayes car ce genre dissimule
sous des images des propos qui pourrait être choquants.


Développement de ce genre dans les années 40 donc : La Possédée de
C. Bernhardt, Le Médaillon de J.Brahm (1946), Le Mystérieux Dr Korvo
de Preminger (1946), La Double énigme de Siodmak (1946), La Maison
du Dr Edwards (1945)...
Les concepts freudien (Cf cours)

Inconscient

Système psychique : ça, moi, surmoi

Pulsions entre Eros et Thanatos

Frustrations, névroses, psychoses

Trauma, refoulé, déni, retour du refoulé, sublimation, transfert...

Complexe d'Oedipe

Symbolique des rêves, hypnose, lapsus...

→ Présence explicite ds le film : ds séquence d'ouverture,


Célia a lu « un livre qui disait le sens des rêves » ; Célia cite le
« Dr Freud » pour se moquer de son amie Edith pdt la
réception ; une jeune psychanalyste présente lors de la visite
des chambres annonce déjà : « le meurtre d'une épouse a ses
racines dans la haine inconsciente de la mère »....
Genèse de ce genre chez Fritz Lang et influences


Lang, originaire d'Autriche comme Freud, a connu la psychanalyse
bien avant les années 40. Expressionnisme all. Imprégné de figures et
topiques psycha.

Le Secret... est le 3ème film d'un cycle qu'on a pu nommer le cycle
« freudien » de Lang : La Femme au portrait (1944), La Rue rouge
(1945) et House by the river (1950) qui sont tous traversés à des
degrés divers de notions psycha : la relation entre Eros et Thanatos,
entre désir et frustration, entre réel et représentation, sublimation, etc...


Echos entre Le Secret... et certains films d'Hitchcock reposant sur
une investigation psycha., notamment La Maison du docteur Edwards
(1946) : sorti un peu avant Le Secret, Lang dit ne pas s'en être inspiré.

Compositeur Miklos Rosza, le même pour les 2 films.


Le Secret derrière la porte et La Maison du docteur
Edwards
L'enquête psychanalytique de Célia
Célia enquête pour percer le mystère du comportement de son mari. C une psy
elle écoute le patient, explore sa demeure pour accéder à l'inconscient. Voix off
nous sert de relais au cheminement de ses réflexions.
Etapes de son investigation :
● Séquence du puits à souhait Mark lui parle d'« un autre Mark » à
« connaître »

● Puis 1er symptôme ds l'hacienda : il la


quitte brusquement lors de nuit de noces
après qu'elle ait verrouillé la porte

● 2ème symptôme : rejet à la gare après


avoir vu le lilas

→ Chacun de ces symptômes, c ds La Maison du docteur Edwards, arrive après un


élan amoureux.
L'enquête psychanalytique de Célia
● Lors de la visite des chambres, Célia découvre l'objet de fixation de Mark, une
fixation criminelle : fasciné par chambres où des meurtres de femmes ont eu lieu.
Séquence point de bascule, au centre du film.

● Célia se rend compte que la chambre n°7 est fermée, frappée


d'interdit = pour elle, clé d'accès à l'inconscient de Mark.
● Elle cherche alors à faire parler Mark par 3
fois : - après apparition du 2ème symptôme du lilas (séq 15)
- après la découverte de sa collection macabre (Cf photogrammes) (séq 17)
- après avoir établi qu'il a une double personnalité après discussion avec la
sœur et gouvernante) (séq 22)
Mais refus systématique de Mark à
chaque fois.
L'enquête psychanalytique de Célia
● Célia enquête dc en s'appuyant sur le propos des autres (sœur, fils, miss Robey,
domestiques) pour résoudre l'énigme.
● Célia explore la demeure, métaphore du cerveau de Mark
et se rend dans la chambre n°7, révélatrice de l'inconscient
de son mari. (Cf étude en classe)

● Avt dernière séq.: Célia en danger de mort en allant ds chambre


associée au meurtre avec lilas pour faire ressurgir le souvenir refoulé.
Intervention de miss Robey qui enferme le couple,
répète le trauma vécu par Mark (a cru être enfermé
par sa mère).
→ Du coup, Célia peut établir un lien avec la réaction de Mark lors
de la nuit de noces (s'est cru rejeté).
Elle guide la remémoration du souvenir de
Mark et...
… contre son geste meurtrier en lui
révélant la vérité : enfermement de sa sœur.

Résultat : levée du traumatisme par la parole confirmée par le geste


de Mark qui veut sauver Célia de l'incendie.
La névrose de Mark
Incapacité à accéder à son désir sexuel car :
● Complexe d'Oedipe non résolu. Au moment de son
attachement oedipien à sa mère, elle fait une promesse
qu'elle ne tient pas (lire une histoire) ; plus que cela elle
l'aurait enfermé à clef ds sa chambre et serait parti avec
un autre homme.
→ Motif de la fermeture à clé c moment de blocage.

● A vécu ds un univers fém castrateur (mère, sœur, femme,


gouvernante, Célia).
N.B. C'est la sœur qui a l'initiative de la visite des chambres.

un moi clivé, tiraillé entre ses désirs + incapacité à les assouvir du fait de son
traumatisme : frustration sexuelle et pulsion meurtrière
+ sentiment de culpabilité.
Esthétiquement : éclairage low key, latéral
contrasté avec part ds ombre et lumière.
Célia : une enquête sur elle-même
Sujet principal du film : Célia, elle-même ? Lang ne s'intéresse pas seulement au
cas du mari ms aussi de cette femme amoureuse d'un h. peut-être dangereux.
Preuves :
● Séquence de la rencontre (Cf analyse) : Couteau symbolique de
la violence du désir de Célia à ce moment-là. Scène de fantasme où
Célia laisse rentrer en elle la possibilité du désir sexuel, de la
découverte de son propre corps et de son désir.
Projection envieuse envers la femme. Présence de la double
symbolisation genrée (couteau et étoffe).
C'est elle qui met fin à cette scène de fantasme en disant à sa copine
de partir.
→ Le vrai sujet du film n'est peut-être pas la résolution d'un complexe d'Oedipe non réglé
chez Mark, mais peut-être la découverte par une femme de son désir.
● Fascination et désir pour Mark malgré - et peut-être à cause de - la peur qu'elle ressent pour
lui, exprimée à plusieurs reprises, dès la rencontre. C'est le paradoxe du désir.
Célia : une enquête sur elle-même
● Architecture de la narration : montre un regard croisé sur 2 névroses par le biais du
changement de Point De Vue
Après séquence finale ds brume, cri, fondu en noir.
Changement de PDV celui de Mark : on croit qu'elle
est morte. Elle revient, ms son PDV pas tt à fait restauré.
Plutôt PDV objectif sans 1ère personne ? Finie la voix off
de Célia...

→ Fin du film en demi-teinte : trouble pas réglé complètement : « Il nous reste un


long chemin » rectifie Célia à la phrase de Mark !

Pulsion meurtrière de Mark certes, ms besoin de ressentir


du danger pour aimer chez Célia : réglés ?
N.B. Plan semblable à la fin, ds cette hacienda, qu'au début = peut-être l'échec, l'enfermement ds une
boucle...
Célia : une enquête sur elle-même
● Division psychique de Célia marquée par la voix off.
- Au départ, deux voix d'actrices prévues pour voix off : refus de Bennett.
Il n'empêche : pas même voix en off (plus chaude...) que qd Célia parle en son direct.
- Par cette voix off, Lang disait vouloir montrer son conflit int. Cette voix off aura elle-
même plusieurs timbres = voix contradictoires ds cet inconscient. Selon Lang, cette
voix correspond à « une autre personne – quelque chose en nous que nous ne
connaissons peut-être pas. »
- Cf analyse Séquence d'ouverture : plongée en eaux troubles accompagnée par
discours d'une voix sans corps, presque fantomatique → Voix de l'inconscient,
archaïque, pas plus située que datée, semble relever d'un autre espace-temps.
Après la séq d'ouverture, elle surplombe l'action sans correspondre tjrs avec PDV
Célia, voix flottante précédant le corps de Célia au début.

Cette voix relaiera à la fois les hésitations, questions, incertitudes, sentiments de Célia
et la trajectoire de sa réflexion, de son élucidation des signes à décrypter.
Célia : une enquête sur elle-même
● Le film lui-même, ce qu'on voit, pourrait relever de son seul fantasme, d'un rêve : en effet,
récit peu cohérent dans sa construction temporelle :
- Certes, on a quelques dates : Célia part 2 mois après décès du frère, rejoint Levender Falls, 5
jours après départ de Mark...
- Mais, voix off d'abord au présent (Séq1), puis au passé après décès du frère (Séq3. Combat
au couteau, mariage...), puis revient au présent quand elle s'installe à Levender Falls...
- Par ailleurs, linéarité du récit rompue au début par des flashback entre 2 séquences du
mariage.
- Ensemble du récit repose sur des ellipses indéfinies.
Ex : au 3ème soir de sa rencontre avec Mark, dvt puits à souhaits, annonce rentrer le lendemain à N.Y. avt
de renoncer pour l'épouser. Alors que sa voix int. informe qu'elle écrit « ce soir-là » à Bob, on la voit déjà
mariée... Combien de temps écoulé entre baiser et cérémonie ? Et entre mariage et nuit de noces ?

Film peut être donc vu comme un récit mental détaché de liens spatio-temporels solides,
comme un récit de rêve.
D'ailleurs nbreux fondus-enchaînés qui lient les différentes actions peuvent être rattachés à la
logique associative du rêve.
Les personnages secondaires : leurs fonctions dans le
schéma psychanalytique
● Rick le frère : figure paternelle pour Célia, modèle masculin : ambiguïté sur leur relation pour
le spectateur au début.

● Caroline, la sœur de Mark :


- témoin des épisodes douloureux du frère : rupture et mort de la
1ère épouse, problèmes avec son fils
- gestion du domaine en son absence
- castratrice pour Mark qui lui demande de quitter la maison à la fin.
- responsable involontaire du trauma de Mark : l'a enfermé enfant
- double de Miss Robey

● David, le fils : à l'image de Mark/variation autour du complexe d'Oedipe


● Surtout, Miss Robey : perso important ; perso. double
- présence fantomatique et hiératique. Apparaît et disparaît à souhait.
- expression d'un désir refoulé et frustré (amour pour Mark) : surmoi développé
- incarnation du lieu et de la névrose associée : symbolise l'emprise de ce lieu sur les perso
(comme Miss Danvers ds Rebecca)
- elle porte l'étoffe, objet symbolique
- à la fin, elle a fermé la chambre à clé et en déclenche
le feu destructeur/purificateur
Décors, objets et formes symboliques
(selon M. Tomada et D. Chambe)
● Symbolisations liées au genre, au sexe
- Les symboles phalliques : couteau du gitan, dague, clé, bougies, escalier...
→ Célia coupe à 2 reprises ces symboles (bougies)
- Les symboles féminins : symboles maternels (englobants, chaleureux, enveloppants), sexuels
(caverne, chemins, humidité, obscurité, angoisse). Motif du cercle (chapeau, voûtes, miroir, etc...)
● Les associations symboliques (par déplacement ou condensation)
- Motif des portes : grand nbre de portes, de fleurs → associées au moment du traumatisme,
renvoient à la frustration initiale, à la mère et à la sexualité : chaque image qui renvoie à ce
symptôme bloque Mark).
- Motif des tentures et rideaux : ce qui dissimule et
s'ouvre comme sexe fém : Mark svt figé à cet endroit.

- Motif de l'étoffe : associé au couteau, équivalent du


sexe fém. (gitan avec l'étoffe et l'arme blanche). Motif
fétiche pour Mark et symbole de frustration, arme de
destruction. Incarne la double orientation du désir entre
Eros et Thanatos
- Motif de la lumière (bougie : symbole du désir, de la pulsion, qui mène Célia ds action), du feu
(à la fin, destructeur et libérateur : il détruit la maison symbole de la névrose)

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