Vous êtes sur la page 1sur 12

Chapitre 2: Un cadre d’analyse pour la croissance

Introduction

Comment expliquions-nous les faits stylisés soulignés dans le chapitre précédent?


—>Quels sont les déterminants de la croissance ?

Cadre d’analyse proposé par Robert Solow dès la n des années 1950 (Prix Nobel 1987 pour ses
travaux sur la croissance)
“A contribution to the Theory of Economic Growth”, Quarterly Journal of Economics, 1956 (article
très célèbre) (page 65-94)

Cadre d’analyse toujours utilisé pour aborder les problématiques de croissance (même au travers
des développements ultérieurs)
—>Modèles de croissance néoclassiques

Famille de modèles dans lesquels :


• Production agrégée décrite par une fonction de production à rendements d’échelle constant
• Utilisation des facteurs de production (usités dans la fonction de production pour produire) dont
la variation des prix garantit leur plein emploi dans le processus de production

I- La fonction de production agrégée (ou macroéconomique)

A) Dé nition

Le point de départ de toute théorie de la croissance est la fonction de production.


Fonction de production : spéci cation de la relation entre le produit (output) et les intrants
(inputs) du processus de production.
Croissance = accroissement de la capacité de production au cours du temps sur longue
période.

La fonction de production considérée pour l’analyse de la croissance est de nature


macroéconomique (on parle aussi d’o re globale ou agrégée). Elle concerne l’économie dans
son ensemble.

Elle relie le revenu national ou PIB (Y) aux quantités de facteurs, ici le travail (N) et le capital
(K), utilisés dans l’économie sur une période donnée (en général l’année).
Cette fonction de production est gouvernée en arrière-plan par les choix individuels des
entreprises, compte tenu des ressources productives disponibles dans l’économie concernée.

L’analyse de la fonction de production macroéconomique s’appuie sur les propriétés des


fonctions de production utilisées en microéconomie. Le passage du niveau micro au niveau
macro pose la question de l’agrégation des comportements.

La démarche souvent adoptée est :

• Hypothèse : L’économie peut être décrite par une fonction de production particulière, qui
partage des propriétés importantes avec les fonctions micro (rendement d’échelle et
production marginale par exemple)
• On examine la robustesse empirique de la fonction concernée
Inputs :

Deux inputs sont principalement considérés :

• Le travail (ou les services du travail) mesuré soit:


fi
fi
ff
fi
-En nombre de travailleurs  productivité du travail mesurée par le PIB par actif (par
travailleur) (ie l’emploi)
-En heures de travail (par travailleur)  productivité du travail est mesurée en PIB par
heure (de travail)

• Le capital: les moyens physiques de production ( du capital humain). Toute forme d’intrants
physique utilisés, bâtiments, machines, outils, énergie, ressources naturelles...
Problème de mesure :
- Coût monétaire pour pallier l’hétérogénéité des unités physiques
- Au-delà, problème d’une mesure d’un ux qui doivent re éter les services rendus par el
Capital

Hypothèse : les services rendus par le capital sont proportionnels au stock de capital que l’on
intègre directement comme input.

Représentation adoptée de la fonction de production : Y = F (K, N) (estimation des ux de


services rendus par ce capital)

Limites de la représentation :
- Homogénéité (de la prise en compte) du capital
- Homogénéité (de la prise en compte) du travail : ex : rôle de l’éducation qui peut créer de
l’hétérogénéité dans le travail, travail quali é/non-quali é

Ces hypothèses pourront en partie relâchées par la suite.

Technologie :

Qu’est-ce qui sous-tend la fonction de production agrégée F ? Qu’est-ce qui fait que l’on
obtienne un niveau de production (au niveau agrégé) à partir des quantités données de capital et
de travail ?
La réponse est l’état de la technologie disponible (ou la technologie).
La technologie détermine le niveau de production qui peut être obtenu à partir d’une quantité
donnée de facteurs.

Qu’entend-on par technologie ?


Dans un sens restreint, c’est l’ensemble des techniques de production (plans de fabrication,
méthodes de travail permettant de produire) disponibles à l’échelle d’une rme ou d’un pays.
Dans un sens large, la technologie intègre aussi l’organisation interne des entreprises, du
fonctionnement du marché, de tout le système de lois et réglementations, les institutions,
l’environnement politique. (Sens retenu en macro)

On peut explicitement faire apparaître l’in uence de la technologie sur la fonction de production
via un paramètre, noté en général T : Y = F (K, N, T)
Double intérêt :
• Comparer di érents pays au regard de leur « avancée » technologique
• Évaluer l’impact d’une modi cation de la technologie dans le temps sur la production (in uence
du changement technologique / progrès technique)

T est parfois considéré comme un « troisième input » de la fonction de production. C’est


notamment le cas lorsque l’on souhaite examiner un e et particulier de la technologie (ou du PT)
sur un des autres inputs (travail ou capital)
—>PT incorporé au capital ou au travail
Par la suite, pour faciliter la présentations la technologie est donnée ou invariante, on ne fera pas
apparaître, sauf nécessité, T dans F(.)

La fonction de production capture l’ensemble des techniques mobilisables (non dominées) qui
assurent la transformation des services du capital et du travail en produit
ff
fi
fi
fl
fl

fi
ff
fl
fi
fl
fl
-Chaque point de la fonction de production correspond à une technique particulière (associant
une combinaison donnée de facteurs et une quantité donnée d’output produite)

La technique choisie par une entreprise dépend en général des coûts des intrants, de la
productivité de la technique elle-même et du prix de vente de la production.

Substituabilité / complémentarité des facteurs de production :

Deux grandes classes de fonctions de production sont en général considérées selon la manière
dont on peut combiner les di érents facteurs dans le processus de production :
- 1/ La fonction de production à facteurs substituables (ou à proportions variables)
- 2/ La fonction de production à facteurs complémentaires (ou à proportion xes ou
fonction de Léontief)

1/ La fonction de production à facteurs substituables :

Deux facteurs sont substituables quand on peut remplacer une certaine quantité d’un des
facteurs par une quantité supplémentaire de l’autre tout en gardant le même niveau de production
Plusieurs combinaisons de facteurs (à la limite une in nité) peuvent être considérés pour
produire une (même) quantité donnée d’output
Exemple de la fonction de production Cobb-Douglas :

Isolante de cette fonction, correspondant au niveau d’output q:

Relation entre K et N pour produire N. Prend la forme d’une hyperbole:


Ensemble des combinaison de facteur qui permettent de créer U0
Au fur et à mesure qu’on augmente la quantité de capital et on diminue le travail on a besoin de
moins en moins de quantité de de travail pour compenser—> TMS décroissant
ff
fi
fi
2/ La fonction de production à facteurs complémentaires :

Deux facteurs sont dits complémentaires lorsqu’ils doivent toujours être combinés dans les
mêmes proportions ( xes). Il faut donc une combinaison unique d’inputs pour produire une
quantité donnée d’output (en étant pleinement utilisés). La technologie se caractérise alors par
une relation linéaire entre les inputs et l’output et par une proportion xe entre les inputs (pris
deux à deux). Une seule combinaison d’inputs assurant leur plein emploi permet de produire une
quantité d’output donnée

Exemple : pour produire 1 unité d’output, supposons qu’il faille a unités de capital et b unités de
travail. a et b sont appelés les coe cients techniques
Soient K et N, les stocks de capital et le niveau de la main-d’œuvre disponibles, alors

(En termes de facteurs utilisés, Y=Nu/b= Ku/a)


—>C’est le facteur dont on dispose le moins (facteur limitant) qui détermine le niveau de
la production
fi
ffi
fi
Au niveau macro, on retiendra plutôt une fonction de production à facteurs substituables. Il existe
en e et des possibilités de substitution entre capitale et travail dans l’ensemble de l’économie,
même si les technologies des rmes sont strictement complémentaires.
Les coe cients techniques des di érentes rmes ne sont pas homogènes : certaines utilisent
plus de main-d’œuvre, d’autres plus de capital

Par ailleurs, la possibilité de substituer du capital au travail joue un rôle fondamental dans
l’examen du processus de croissance car elle conditionne de fait l’existence même d’une
dynamique de (K/N) et donc de (Y/N).
Cette substituabilité est fondamentalement mise en œuvre via la exibilité du prix des facteurs sur
la trajectoire de croissance.

B) Propriétés de la fonction de production

Quelles restrictions peut-on imposer raisonnablement sur la fonction de production ?

• Propriétés de base

P1 : Si la quantité d’inputs est nulle, la production est nulle


F(0, 0) = 0

P2 : La fonction de production est croissante pour chacun des facteurs de production.


Pour une quantité donnée de capital (travail), on peut produire plus en utilisant plus de travail
(capital)

FK (ou FN) : produit (productivité) marginale du capital (ou travail)

On notera :
• pmL pour la productivité marginale du travail : pmL = FN(K, N)

• pmK pour la productivité marginale du capital : pmK = FK(K, N)

P3 : Rendements des facteurs :


Lorsqu’un seul des deux facteurs augmente, l’autre restant constant, la production augmente
d’autant moins que la quantité initiale de ce facteur est importante.
Loi des rendements (marginaux) (des facteurs) décroissants
En d’autres termes, la productivité marginale du facteur est décroissante avec la quantité de
facteur.
ff
ffi
fi
ff
fi
fl
• Rendements d’échelle :
Imaginons qu’on double à la fois le nombre de travailleurs ET le stock de capital de l’économie.
Si la production de l’économie double, alors la production répond à la propriété des rendements
d’échelle constants : (P4), quand on augmente l’échelle de production alors la quantité de b&s va
suivre (si production *2 alors la quantité aussi)
On peut formaliser cela de la manière suivante :
Y’ = F(2K, 2N) et Y’=2.Y=2.F(K,N)
Plus généralement, pour tout nombre alpha, il y a des rendements d’échelle constants si

3 remarques:
1- Bien distinguer les rendements d’échelle constants et les rendements factoriels
décroissants
2- Les rendements d’échelle s’appliquent icic aux facteurs de production mais pas à la
technologie
3- Les rendements d’ échelle constants induisent que la fonction F est une fonction
homogène de degré 1 (en N et K)

On tout rajouter à ces propriété les conditions d’Inada (CI)


Les propriétés P2, P3, P2 et (CI) dé nissent une fonction de production dite (de type)
néoclassique

Rendements d’échelle constants et rémunération des facteurs : Pour toute fonction de


production à rendements constants (et plus généralement, pour toute fonction homogène de
degré 1), on a d’après le théorème d’Euler :

Si l’on se place dans un environnement proche de la concurrence parfaite les facteurs


sont rémunérés à leur productivité marginale.
On aura alors:

—>Théorème d’épuisement du produit


fi
C) La fonction de production Cobb-Douglas

Fonction largement retenue pour appréhender la fonction de production sous un angle


macroéconomique
—>Propriétés empiriques
Spéci cation retenue :

• Fonction à facteurs substituables


alpha > 0 : elle peut être interprétée sous certaines hypothèses comme une mesure de la part du
capital dans le PIB
On retient implicitement dans la formulation de l’hypothèse des rendements d’échelle constants

• Représentation du rôle de la technologie


A : constante positive interprétée comme un indice de l’état de la technologie / une
mesure de la productivité totale des facteurs (TFP)

Le lien exact avec T dépend de la manière dont on prend en compte l’impact du PT sur la
production (voir plus loin)

Propriétés :
P1 : Il est évident que si K et N valent 0, alors Y vaudra aussi 0.
P2 : SI K ou N augmente, alors Y augmente  Examen du signe du produit marginal du facteur

Quand on augmente le
travail, la quantité de b&s
augmente

P3 : Rendements décroissants des facteurs de production

Comme 0<alpha<1, ces dérivées sont négatives.


Graphiquement, la fonction est concave par rapport à l’axe du facteur concerné.
fi
P4 : Rendements d’échelle constants
Supposons que nous augmentons les intrants des deux facteurs de production, appelée l. De
combien la production augmentera-t-elle ? De lambda

Autres propriétés :
P5 : Une augmentation d’un facteur de production augmente le produit marginal de l’autre facteur
de production.
P6 : Une augmentation du niveau de productivité totale des facteurs (A) augmente les deux
produits marginaux

On peut utiliser moins de travail et moins de capital pour


produire autant

Adéquation de la fonction Cobb-Douglas :


Conjecture : Si une économie fonctionne de manière presque parfaitement concurrentielle et si
une fonction de production Cobb-Douglas caractérise approximativement la production globale,
alors on devrait observer que les parts du travail (salaires) et du capital (pro ts) dans le PIB réel
devraient être plus ou moins stables dans le temps (idéalement, constantes).

On peut en e et montrer que ces parts dont données dans la fonction Cobb-Douglas
respectivement par

Répartition du salaire et du pro t


Ny: La part des salaires sans le PIB (part du
travail dans le PIB)
Ky: part des pro ts (ou du capital) dans le
PIB)

w*N: montant des salaires versés en


proportion du PIB
re*K: montant des pro ts récoltés en
proportion du PIB
ff
fi
fi
fi
fi
Observe-t-on dans la réalité que ces parts sont constantes?
—> C’est ce que l‘on observe plus ou moins

On prend cette régularité empirique comme un élément qui vient conforter l’utilisation de
la fonction Cobb-Douglas

II- Les déterminants de la croissance

On se focalise sur la dynamique du PIB/tête (Y/pop) ou du PIB/travailleur (Y/N) (la di érence:


Y/pop= Y/N*N/pop) ie sur l’évolution de la productivité (moyenne) du travail. On privilégie le PIB
par tête, pas be coup de di érence su N/pop stable.

A) Production et capital par travailleur ( ou par actif)

Sur la base de l’hypothèse des rendements d’échelle constants associés à la fonction de


production, on peut obtenir une relation particulière entre le niveau de la production par travailleur
(Y/N) et le stock de capital par travailleur (K/N). (K/N est aussi appelé l’intensité capitalistique)

—>Pour une valeur donnée


de K/N je vais avoir une
valeur donnée de Y/N
ff
ff
La relation (Y/N) et (K/N) joue un rôle fondamental dans la théorie de la croissance. L’évolution de
la productivité (du travail) est un indicateur synthétique de la croissance. Elle a un rôle
fondamental dans la théorie de la croissance.
On la représente dans le plan (K/N ; Y/N)

B) Les déterminants de la croissance

Pourquoi la production par travailleur augmenterait-elle au cours du temps ?

1/ Une augmentation de la production par travailleur Y/N peut venir d’une augmentation du
capital par travailleur K/N (ou plus brièvement de l’accumulation du capital).
Ce que nous donne l’équation précédente (voir graph précédent).

2/ Une augmentation de la production par travailleur Y/N peut aussi venir d’une
amélioration de la technologie de production. Capturée via un déplacement de la fonction F, Y/
N augmente pour TOUT niveau de capital par travailleur K/N.

Impact d’une modi cation de la fonction de


production elle-même (associée à une motif
de la techno)—>qlq soit le nv du K par tête ou
par travailleur concerné (mais donné), on va
assîtes à une augmentation du PIB par tête
ou par travailleur —> amélioration de la
techno va entrainer une transformation de la
production et donc une amélioration de la
production par tête
<—graphiquement
Passage de A à A’ avec A’ > A.
fi
Conclusion intermédiaire:

On peut considérer que la croissance (i.e. l’augmentation du R par tête) résulte


fondamentalement:
• de l’accumulation du capital
Et/ou
• du PT
Comme on le verra, cependant:
• l’accumulation du capital ne peut pas porter un processus de croissance permettant
l’activité
• La permanence de la croissance requiert la présence d’un PT continu.
C) Intégration du PT

La prise en compte d’une amélioration de la technologie revient à considérer une


modi cation de T.

Comment un changements technologique (PT) modi e-t-il la fonction de production?

Cela dépend en partie de la nature du changement technologique, et de qui le génère


(inventions, nouvelle organisation de la production,…)

—> Questions abordées par les théories de la croissance endogène

Dans un 1er temps, on ignore ce type de questions (on y reviendra ultérieurement)

Hypothèse: PT exogène
« Manne qui tombe du ciel » (Solow (1956))

Simpli cation de l’analyse:

En particulier, on contourne, via cette hypothèse, un problème clé qui est celui de la
rémunération de l’activité d’innovation sous-jacente au PT. En situation de rendements
d’échelle constants, cette rémunération n’est pas possible (théorème de l’épuisement du
produit)

Modéliser l’incidence du PT sur l’activité de production

Trois types de PT sont en général envisagés dans l’analyse de la croissance. Ils sont tous
quali és de « neutres » au sens où les déformations de la fonction de production qu’ils
entraînent, laissent inchangés certains indicateurs mesurant cette activité (coe cient du
capital et du travail, intensité capitalistique, ratio des pm)

Distinction selon les e ets induits sur l’utilisation du travail ou du capital


fi
fi
fi
ff
fi
ffi

Vous aimerez peut-être aussi