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La raison dans l’histoire selon Hegel

La raison dans l’histoire détermine la marche du monde. Hegel affirme


dans La raison dans l’Histoire que l’histoire universelle se déroule rationnellement,
c’est-à-dire qu’elle constitue un processus dans lequel les événements s’enchaînent
rationnellement les uns à partir des autres. Enthousiasmé par la Révolution
française et par le personnage de Napoléon, le philosophe pense saisir le
dynamisme à l’œuvre dans son époque.

La raison dans l’histoire présuppose que le réel est rationnel. Elle n’est en
effet qu’un cas particulier de ce qui vaut pour l’ensemble du réel : tout s’accomplit selon des
lois rationnelles dans le monde. « La raison gouverne le monde, écrit Hegel, et par
conséquent gouverne et a gouverné l’histoire universelle » (La raison dans l’Histoire). Inspiré
par la philosophie d’Anaxagore, le philosophe affirme plus fondamentalement que la
raisonest la teneur intrinsèque de tout ce qui est naturel ou spirituel. L’hégélianisme est donc,
de ce point de vue, une philosophie de l’identité (aussi appelée idéalisme absolu) : tout ce qui
est rationnel est réel, et réciproquement tout ce qui est réel est rationnel. Cette rationalité se
traduit par des lois cohérentes que l’homme a vocation à extraire de la réalité pour former la
connaissance. Pour Hegel, la philosophie a plus précisément pour rôle, dans la lignée de
Platon, de transformer le réel en contenu de pensée, d’en arracher des structures intelligibles
stables. Il estime même que l’histoire de la philosophie a fait en sorte que les idées
platoniciennes ne demeurent pas des structures abstraites, afin que le réel – et notamment
l’histoire – apparaisse dans sa rationalité, c’est-à-dire que les structures rationnelles inscrites
dans le réel (et non pas en dehors de lui) l’épuisent.

Hegel montre que la raison dans l’histoire ruse pour


parvenir à sa fin
La raison dans l’histoire se produit par l’intermédiaire d’une ruse.
Comme le réel est intégralement rationnel, la raison doit s’accomplir dans
l’Histoire y compris à travers ce qui semble le plus irrationnel, et jusque dans le
détail. Hegel considère par conséquent que les individus et les peuples sont des
instruments au service d’un plan supérieur : « les hommes accomplissent leur
intérêt, concède le philosophe, mais quelque chose de plus s’accomplit encore »
(La raison dans l’Histoire). Ainsi, l’histoire n’est pas faite de façon ultime par
l’action des hommes, lesquels « font l’histoire sans savoir l’histoire qu’ils font ».
En apparence source de chaos, les passions humaines sont manipulées en vue du
déploiement de la rationalité. Dès lors, l’histoire donne lieu à des décalages entre,
d’une part, les aspirations des individus et des peuples et, d’autre part, le résultat
effectif des aspirations. Perçu par Hegel comme un des acteurs de l’histoire
moderne qui a dépassé toutes les limites, Napoléon est par exemple en même temps
à l’origine du Code civil, soit un renouvellement majeur du droit – sa passion du
pouvoir a produit un résultat qui le dépasse. Plus généralement, les grands hommes
apparaissent à Hegel comme un moyen au service de l’universel, c’est pourquoi
leurs aspirations individuelles finissent toujours par être déçues : leur rôle
providentiel accompli, « ils tombent comme des douilles vides ».

La raison dans l’histoire aboutira à une fin de l’histoire. Comme le


déroulement rationnel de l’histoire implique qu’elle constitue un processus dans lequel les
événements s’enchaînent rationnellement les uns à partir des autres, elle a forcément un
premier commencement et une fin. Hegel ajoute que si les étapes du processus sont liées
rationnellement les unes aux autres, alors l’ensemble de ce qui survient doit être contenu dans
le point de départ sous la forme de germe. L’histoire a donc nécessairement une structure
ternaire : elle a un commencement, un déploiement de ce qui était compris dans le
commencement, et un accomplissement final. Elle obéit ainsi à une logique que lui donne sa
rationalité, jusqu’à l’épuisement de ce qui n’était au départ qu’à l’état de germe. Hegel
n’évoque toutefois la fin de l’histoire que de manière très spéculative, en la décrivant comme
le moment de la spiritualisation intégrale du monde objectif : « L’Esprit doit donc parvenir au
savoir de ce qu’il est vraiment et objectiver ce savoir, le transformer en un monde réel et se
produire lui-même objectivement. C’est là le but universel » (La raison dans l’Histoire). En
pratique, la fin de l’histoire est située par Hegel à l’avènement de l’État moderne européen
(début XIXe siècle), qui clôt un processus entamé avec le monde oriental.

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