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Transferrine Tableau 15.

Valeurs usuelles de la transferrine,


de la CTST et du CS-Tf
Valeurs usuelles Transferrine CTST CS-Tf
La transferrine (Tf) ou sidérophiline est une glyco- Unités g/l μmol/l %
protéine sérique (de masse relative environ 80 kDa), Homme 20 à 40
migrant avec les â 1-globulines à l’électrophorèse. Elle Adultes Femme en période 1,8 à 3,2 45 à 80
15 à 35
présente un polymorphisme génétique se traduisant par d’activité génitale
l’existence d’une vingtaine d’isotransferrines. Le géno- Nouveau-né à 2 mois 1,6 à 2,8 40 à 70 55 à 65
type TfC1 est retrouvé chez plus de 95 % de la popula- Enfants 2 mois à 1 an 1,9 à 3,7 47 à 92 10 à 30
tion européenne. L’isofocalisation de la transferrine 1 an à puberté 2,2 à 4 55 à 100 15 à 40
montre plusieurs bandes correspondant à une variation
de la composition en acides aminés des chaînes protéi-
ques. Cette hétérogénéité ne semble pas avoir de signifi- ration de la transferrine, qui reflète les besoins de
cation physiopathologique, car la capacité de fixation l’organisme.
du fer de ces différentes transferrines est identique. À La transferrine est aussi un facteur de croissance cellu-
l’intérieur de cette variabilité, l’isoélectrofocalisation laire.
met en évidence une microhétérogénéité de la transfer-
rine dépendant du contenu en fer et du degré de sialyla- Son dosage utilise des méthodes immunologiques :
tion. On peut observer une variation de la répartition néphélémétrie ou turbidimétrie. Le calibrateur doit être
des différentes fractions lors de certains états patho- titré en référence à l’étalon international CRM 470.
logiques (exemple : dans l’éthylisme, augmentation de Grâce à ce standard international, la précision des
la fraction Tf 5,7). dosages est bonne.
La synthèse de la transferrine a lieu essentiellement Les valeurs usuelles varient en fonction de l’âge et du
dans les hépatocytes, les macrophages des organes lym- sexe (tableau 15).
phoïdes et, accessoirement, les lymphocytes. Sa demi- On observe une diminution de la transferrine dans :
vie est de 8 jours. Le taux de synthèse par l’hépatocyte • les réactions inflammatoires chroniques, subaiguës ou
est inversement proportionnel à la quantité de fer pré- aiguës sévères : la transferrine est une protéine
sente dans la cellule. Ainsi, une diminution des réserves « négative » de l’inflammation ;
en fer entraîne une augmentation de la transferrine
alors qu’une surcharge martiale la diminue. Le taux de • l’insuffisance hépatocellulaire : la détermination du
synthèse journalier est de 16 mg/kg. Les lieux de cata- rapport IgA/transferrine constitue une aide au diag-
bolisme sont peu connus (tube digestif, macrophages, nostic et au pronostic des affections cirrhotiques.
cellules mononucléées). L’augmentation de ce rapport suit la baisse de la
transferrinémie, dont la diminution est proportion-
Son rôle physiologique est le transport du fer et plus
nelle au degré d’insuffisance hépatocellulaire ;
accessoirement du zinc et du cuivre, chaque molécule
de transferrine pouvant lier deux atomes de fer trivalent • les états de dénutrition ;
qui seront cédés aux érythroblastes ou aux hépatocytes. • les fuites protéiques glomérulaires, gastrointestinales
La transferrine intervient ainsi dans le métabolisme ou cutanées (brûlures) ;
martial à plusieurs niveaux :
• les surcharges en fer (de façon inconstante et
• elle assure le transfert du fer des macrophages médul- modérée) ;
laires aux érythroblastes pour les besoins de l’érythro-
poïèse. En effet, seul le fer lié à la transferrine peut • la prise d’androgènes au long cours ;
être fixé par les érythroblastes du fait de la présence • les cancers ;
de récepteurs membranaires de la transferrine à leur • les infections ;
surface ;
• l’atransferrinémie constitutionnelle.
• la transferrine transporte également le fer du plasma
vers l’hépatocyte pour sa mise en réserve ; On observe une augmentation de la transferrine dans :
• elle capte le fer des réserves (foie, cellules du système • les carences en fer ;
réticulo-endothélial) ; • les imprégnations estrogéniques d’origine endogène
• elle joue un rôle capital dans la régulation de (grossesse, certaines thyrotoxicoses) ou iatrogène
l’absorption intestinale du fer. La proportion du fer (contraceptifs oraux, estrogénothérapie de la femme
alimentaire absorbé dépend en effet du degré de satu- ménopausée ou du cancer de la prostate) ;
• la prise de certains médicaments (diurétiques thiazi- • transferrine transportant un atome de fer sur un de
diques) ; ces deux sites (A ou B) ;
• l’hypogonadisme sévère de l’homme, par déficit en • transferrine transportant 2 atomes de fer.
androgènes. Le CS-Tf varie également en fonction de l’âge et du sexe.
Contrairement au fer sérique, la transferrinémie reste
Capacité totale de saturation en fer constante au cours de la journée.
de la transferrine (CTST) L’interprétation des résultats du CS-Tf doit tenir
La possibilité maximale de transport du fer par la trans- compte du fait qu’il est soumis aux mêmes variations
ferrine représente la capacité totale de saturation en fer physiologiques que la sidérémie. En effet, le fer sérique
de la transferrine. Elle est déterminée par calcul à partir suit un rythme circadien, avec un maximum le matin
du dosage de la transferrine selon la formule : (entre 8 et 12 heures), un minimum vers 20 heures,
6 l’écart entre les deux valeurs pouvant atteindre 5 μmol/l
CTST (μmol/l) = 10 × transferrine (g/l) × 2 (20 à 30 %). En cas de franche hypersidérémie ou hypo-
80 000 sidérémie, le rythme a tendance à disparaître.
80 000 = masse moléculaire de la transferrine ;
106 = facteur de conversion des micromoles en moles ; La sidérémie diminue au cours des règles. À l’inverse,
2 = nombre d’atomes de fer par molécule de transferrine ; un repas riche en fer ou la prise médicamenteuse de fer
soit CTF (μmol/l) = transferrine (g/l) × 25
ou CTST (mg/l) = transferrine (g/l) × 1,395.
augmente la concentration postprandiale de fer sérique.
Ce paramètre doit se substituer à l’ancienne TIBC (total Le CS-Tf est augmenté dans différentes situations :
iron binding capacity), qui appréciait la capacité de • surcharges en fer :
fixation du fer par le sérum, et non par la transferrine. – dans l’hémochromatose génétique, c’est le test
Cette technique chimique est empirique et ne peut être phénotypique le plus sensible pour diagnostiquer
standardisée. l’homozygotie C282Y du gène HFE. Dans ce cas,
Figure 2 l’augmentation du fer sérique et la diminution de la
transferrine sont très précoces et le CS-Tf s’élève
bien avant que le fer en excès ne s’accumule dans
Apo
A les tissus ou que la ferritine ne soit augmentée. La
Apo A A A
valeur « seuil » du CS-Tf retenue pour définir un
« phénotype minimal » de surcharge martiale est
de 45 %. À noter cependant que deux pathologies
Tf B B B héréditaires de description récente, l’hémochroma-
tose de type 4 et le syndrome cataracte-hyper-
ferritinémie, ne s’accompagnent pas d’un CS-Tf
La différence entre la capacité totale et la sidérémie élevé ;
définit la capacité latente de fixation ou de saturation – en cas de surcharge en fer secondaire (post-
en fer de la transferrine. transfusionnelle, cirrhose hépatique), de troubles de
l’érythropoïèse (insuffisance médullaire, anémie
La CTST varie de façon identique à la transferrine
mégaloblastique, thalassémie), d’anémie hémo-
(tableau 15).
lytique ou de troubles de la synthèse de l’hème (ané-
mie sidéroblastique, saturnisme), le fer sérique peut
Coefficient de saturation en fer être plus ou moins élevé et le CS-Tf augmenté.
de la transferrine (CS-Tf) • dysfonctionnements hépatiques : dans ce cas, le fer
Le rapport entre le taux de fer sérique et la CTST défi- sérique est accru par la cytolyse et la Tf diminuée par
nit le CS-Tf. l’insuffisance hépatocellulaire.
Coefficient de saturation en fer de la transferrine : Dans les cas de surcharge importante ou de cytolyses
massives, le fer sérique peut être supérieur à la capacité
CS-Tf = Fer sérique (μmol/l)
totale. Dans ce cas, le CS-Tf est rendu à 1 car la Tf ne
Capacité totale de fixation de la Tf (μmol/l) peut être saturée à plus de 100 %. Cette situation
À l’état physiologique, la Tf est saturée à environ 30 %. indique l’existence de fer non lié à la Tf ou d’une hyper-
Cela résulte du mélange de quatre espèces moléculaires ferritinémie massive (augmentant significativement le
(figure 2) : taux de fer mesuré dans le sérum).
• apotransferrine ; Le CS-Tf est diminué dans deux situations :
• carences en fer : on observe dans ce cas une capacité
totale de fixation augmentée, avec sidérémie et coeffi-
cient de saturation diminués ;
• syndromes inflammatoires (infectieux, rhumatis-
maux, affections malignes) : on observe dans ce cas
une capacité totale de fixation et une sidérémie dimi-
nuées, avec coefficient de saturation modérément
diminué.
Le tableau 16 résume les variations schématiques des
paramètres du bilan martial (fer sérique, transferrine,
CTST, CS-Tf, ferritine et RST) dans trois situations :
carence martiale, syndrome inflammatoire et surcharge
en fer de l’organisme. Le dosage de la ferritine est sou-
vent prescrit pour compléter le bilan martial. La ferri-
tine est le reflet des réserves en fer de l’organisme. Sa
diminution est un marqueur fiable de la carence. Son
augmentation ne reflète pas toujours une surcharge
martiale, car elle est observée également lors des syn-
dromes inflammatoires, des cytolyses ou de l’alcoo-
lisme. Le dosage du récepteur soluble de la transferrine
(RST) peut compléter le bilan. Il est le reflet de la masse
érythropoïétique. Il augmente également dans les
carences martiales et présente l’avantage de ne pas être
influencé par le contexte inflammatoire.

Tableau 16
Carence Syndrome Surcharge en
martiale inflammatoire fer
Fer sérique ↓ ↓ ↑
CTST N ou ↑ N N
CS-Tf ↓ ↓ ↑↑
Ferritine ↓ N ou ↑ ↑↑
RST ↑ N ou ↓ –

☞ Fer, Ferritine, Hémochromatose héréditaire, Transferrine


(récepteur soluble de la), Transferrine carboxy-déficiente

( Brissot P, Pigeon C, Moirand R, Guyader D, Mendler MH, Sapey T,


Deugnier Y, Lescoat G, Loréal O.
Le métabolisme du fer et son exploration en biologie clinique.
Ann Biol Clin 1998 ; 56 : 5-10.
Vernet M.
Exploration du statut martial.
Rev Prat 2000 ; 50 : 950-956.
Vernet M, Corberand J, David V, Deugnier Y, Frey J, Giraudet P.
Renversez JC, Sebahoun G.
Algorithmes de prescription recommandés pour le diagnostic d’un déficit
et d’une surcharge enfer.
Ann Biol Clin 2001 ; 59/2 : 149-155.

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