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Cas : DANONE

Danone, groupe alimentaire mondial, représente 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires, dont 60 % hors d’Europe, et
100 000 employés, couvre 140 pays et se positionne sur 4 métiers (produits laitiers frais, eaux, nutrition infantile,
nutrition médicale).
En plein essor aux Etats-Unis et sur les marchés émergents grâce à ses produits light, le groupe se met au régime. Son
plan de restructuration vise à faire face à la stagnation européenne. En quelques années, le profil du groupe Danone s'est
singulièrement modifié : la première marque d'eau minérale distribuée actuellement par l'entreprise ? Ce n'est ni Evian ni
Volvic, mais... Aqua, une eau de source livrée exclusivement sur l'immense marché indonésien. Son plus gros succès
commercial l'an dernier ? Le boom du yaourt grec aux Etats-Unis (Oikos), dont les ventes ont plus que doublé en un an.
Un produit miracle, vieux comme le monde en Europe, mais qui a permis à Danone de s'installer en tête des produits
laitiers frais outre-Atlantique, devant General Mills/Yoplait. Le premier pays contributeur au chiffre d'affaires 2012 ? La
Russie, au coude à coude avec la France, grâce à un investissement récent dans Unimilk. Autant d'exemples qui
expliquent pourquoi les pays « en croissance » (pays émergents et Etats-Unis) contribuent pour 60% du chiffre d'affaires
total du groupe, une première dans son histoire.
Mais à côté de ces succès, plusieurs clignotants se sont allumés, indiquant un début de freinage. Les ventes totales ont crû
de seulement 5,4% l'an dernier, la rentabilité commence à décliner pour rejoindre l'étiage des géants mondiaux de
l'agroalimentaire. Et l'annonce d'une restructuration sonne la fin de l'aisance pour le groupe du boulevard Haussmann.
1. Surmonter la mauvaise conjoncture en Europe
Danone paie chèrement son exposition aux marchés d'Europe du Sud. En premier lieu en Espagne, où la crise
économique, ajoutée à la hausse de la TVA, a poussé les consommateurs à privilégier les marques de distributeur, deux
fois moins chères. Dans ce pays où sa part de marché dépassait les 50%, le groupe limite la casse en laissant filer les prix,
au risque de miner ses marges. Mais les ventes ont tout de même chuté de 10% l'an passé, au point que l'entreprise doive
fermer une usine à Séville (80 salariés).
En France, la situation n'est pas aussi alarmante, mais les ventes de produits laitiers stagnent, un élément de fragilité face à
la hausse des matières premières. En Allemagne, où il est moins présent, Danone a également connu des difficultés et ce
pays est sorti du « top 10 » local, fraîchement remplacé par le Brésil. Au total, les ventes de Danone en Europe ont fléchi
de 3% en un an, et le résultat opérationnel a fondu de plus de 10%. « Le problème, dans la région, est bel et bien lié au
lait, avance le PDG du groupe, Franck Riboud. Et ce n'est pas parce que nous grandissons sur les autres continents que
nous ne devons pas nous occuper de l'Europe. Nous avons déjà commencé il y a deux ou trois ans sur le segment des
eaux. L'équation est réglée. »
Comment ? Pas en réutilisant les recettes du passé. Lors des dernières années difficiles (2007-08), le groupe avait riposté
par des parades classiques, en faisant des promotions et en coupant dans les dépenses de publicité. Mais aujourd'hui, plus
question de faire le gros dos. Sur le Vieux Continent, la crise est là pour durer : « L'idée n'est pas de passer de -3 à 10%.
Oubliez ça, insiste Franck Riboud. On n'a pas non plus l'intention d'augmenter nos prix en Chine juste pour soutenir les
marges en Europe. Nous devons remettre cette région d'aplomb avec des solutions européennes. »
2. Gagner en agilité en restructurant le groupe
D'où le plan de restructuration en cours - une démarche tout à fait inhabituelle dans l'entreprise - qui ne touchera pas les
usines, correctement chargées, mais les effectifs de cadres. Soit 900 personnes dans 26 pays (dont plus de 200 en France),
qui partiront dans les deux ans à venir. Le groupe veut mutualiser certaines fonctions support comme les achats ou la
logistique, et simplifier l'organisation composée d'une kyrielle de business units (67 au total), allant des eaux à la nutrition
infantile, et dupliquées sur tous les grands marchés. Désormais, les grands pays s'occuperont aussi des petits, pour faire la
chasse aux doublons. Ce plan doit engendrer une économie récurrente de 120 millions d'euros, mais se traduira d'abord
par un coût ponctuel de 450 à 500 millions d'euros, selon les analystes, car il faudra remercier des cadres rémunérés pour
certains 200 000 euros par an.
Cette cure d'austérité révélerait-elle que le groupe vivait grand train ? « La rigueur prend le pas sur le rêve de grandeur.
Alors que Franck Riboud a été un des premiers à livrer un diagnostic sombre sur la conjoncture, ses troupes vivaient sans
doute avec un peu trop d'aisance », avance un analyste. Un commentaire réfuté au siège : « Nous ne vivons pas du tout au-
dessus de nos moyens : chez nous, les cadres roulent en Renault, il y a longtemps que l'on ne vole plus en business sur les
moyen-courriers, et nos bureaux du siège sont organisés en open space... » Le but du plan, ajoute-t-on, c'est plutôt de
gagner en agilité en Europe, à l'heure où les dépenses alimentaires des ménages sont sous pression, et où les
consommateurs sont de moins en moins fidèles aux marques.
3. Continuer à se différencier sur les produits
La clé du redressement des marges paraît si simple lorsqu'elle est énoncée par le professeur Riboud... « L'idée, c'est de
faire croître d'abord les volumes, ensuite de jouer sur le "mix", ainsi nous allons améliorer nos marges. Ce n'est pas facile
à faire, mais cela fonctionne. Nous ne sommes pas là pour faire de la haute technologie : notre boulot, c'est de faire la
différence sur les étagères. On ne peut pas continuer à faire de la productivité en réduisant la qualité des packs, ou celle du
mix », expliquait-il lors de la présentation de ses résultats annuels. Loin de faire des produits sous marque de distributeur,
comme le groupe a pu le faire dans le passé, ou de suivre les concurrents ordinaires comme Cristaline dans l'eau, Danone
« doit au contraire continuer à travailler sur la nutrition, rechercher le meilleur produit, investir dans les nouveaux
ferments pour avoir la meilleure texture. »
Résultats de ce discours de la différence : le déploiement, par exemple, des nouveaux pots de yaourt (nom de code
interne : projet Kiss) qui vont progressivement remplacer les archiclassiques pots Danone ou Activia. Arrondis à la base,
ils facilitent le passage de la cuillère jusqu'au fond ; plus brillants, ils sont ainsi plus visibles au milieu des concurrents.
Ces nouveaux pots seront installés dans des linéaires eux aussi repensés. Testés depuis 2011 en France et en Espagne, en
version foncée, pour mettre en valeur le produit, ils sont éclairés par des LED et non plus de vieux néons.
4. Renforcer l'axe de l'alimentation santé
Côté produits, Danone s'en tient plus que jamais au recentrage, décidé à partir de 1996, autour de quatre métiers : produits
laitiers, eaux, nutrition infantile et médicale. Ces métiers suivent la même logique - ils accompagnent tous les âges de la
vie -, ils se complètent bien en matière de R&D, et envoient un message fort autour du thème prometteur de l'alimentation
santé, décline Laurent Sacchi, directeur délégué à la présidence. Certes, ce profil accuse une certaine faiblesse par rapport
aux géants comme Unilever ou Nestlé, beaucoup plus gros en chiffre d'affaires, mais il représente aussi une vraie force et
une cohérence marketing. Contrairement aux années William Saurin, Liebig ou Kronenbourg, à l'époque d'Antoine
Riboud, la direction « appréhende quelque peu la problématique de l'obésité », avance Pierre Tegner, analyste chez
Natixis. Du reste, ce profil « light » n'a pas empêché Danone de passer de 15 à 20 milliards de chiffre d'affaires en
seulement trois ans. Comment ? En misant sur les pays émergents et les Etats-Unis. Sans chercher à être présent partout,
mais en ciblant d'abord les marchés ou les métiers « où nous avons la capacité de devenir le numéro 1 local », ajoute
Laurent Sacchi. Et pas seulement avec les marques historiques comme Evian, Taillefine ou Danette.
5. Avancer sur tous les marchés en même temps
C'est ainsi que l'entreprise est devenue incontournable au Mexique avec son eau Bonafont, aux Etats-Unis avec son yaourt
grec Oikos, ou en Chine avec l'alimentation infantile de Dumex. Ce dernier produit, avec ses marges proches de 20%,
représente une incontestable réussite dans les pays émergents : « Sa valeur ajoutée est très visible. Détaille Pierre Tegner.
Là-bas, les mères veulent reprendre rapidement leur travail après une naissance. Elles ont besoin que leur bébé soit en
bonne santé et ne veulent pas choisir du bas de gamme. Durant quelques mois, elles sont donc prêtes à payer plus cher
pour de la bonne qualité. »
Mais tout en investissant massivement dans ces nouveaux marchés, Franck Riboud prend soin de ne pas négliger le Vieux
Continent, où la consommation de yaourts est très supérieure à celle du reste du monde. « L'Europe pose problème tandis
que les émergents explosent, mais personne ne sait où l'on en sera dans cinq ou dix ans. Les émergents présentent aussi
des difficultés », estime le PDG. Notamment une inflation des coûts fixes plus importante qu'ailleurs, qui relativise les
ronflants taux de croissance organique et l'effet de levier offert par le boom démographique. D'où la volonté d'avancer
partout en même temps. Source : D. Fainsilber, « Danone veut tout alléger », Enjeux Les Échos, n° 299, 1er avril 2013

Travail à faire :
Analyser l’entreprise et son environnement en utilisant la matrice S.W.O.T.

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