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Poésie du XIX è au XXI è siècle

Parcours associé : émancipations créatrices


Texte 3
Arthur Rimbaud : Cahier de Douai, 1871

Ma Bohème
(Fantaisie)

1. Je m’en allais, les poings dans mes poches crevées ;


2. Mon paletot1 aussi devenait idéal ;
3. J’allais sous le ciel, Muse ! et j’étais ton féal2 ;
4. Oh ! là là ! que d’amours splendides j’ai rêvées !

5. Mon unique culotte avait un large trou.


6. - Petit-Poucet rêveur, j’égrenais dans ma course
7. Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse,
8. - Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou

9. Et je les écoutais, assis au bord des routes,


10. Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
11. De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;

12. Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,


13. Comme des lyres, je tirais les élastiques
14. De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur !

Rimbaud, Cahiers de Douai, 1870.

Rimbaud a fugué à plusieurs reprises, durant ses jeunes années et a traversé, à pied les
Ardennes (région au Nord de la France à le frontière belge).
1. Paletot : gilet usé dans cette situation.
2. Féal : est celui qui reste fidèle à quelqu’un, (mot qui vient du Moyen-Âge)
Ma Bohême
Le sonnet
Il s’agit d’un sonnet qui comporte deux quatrains et deux tercets, forme héritée de la
Renaissance, dont le schéma des rimes est : ABBA, CDDC, EEF GGF. Pétrarque en Italie et
Ronsard et Du Bellay en ont écrits de nombreux.
Il s’agit d’une forme fixe, qui fait l’objet de variations, en particulier sur la disposition des
rimes ; mais aussi avec l’usage du rejet et du contre-rejet.
On trouve de nombreux sonnets dans Les Cahiers de Douai : ce qui peut paraître curieux,
étant donné que Rimbaud cherche à s’émanciper et à créer de nouvelles formes. Le Mal, le
Dormeur du Val… Rêvé pour l’hiver (vers irréguliers ou hétérodoxes).
Si Rimbaud s’affranchit souvent des règles classiques du genre, cependant il s’inscrit dans
l’héritage en choisissant cette forme fixe qu’il modernise en ayant recours au rejet et au
contre-rejet par exemple… ou aux vers hétérodoxes.

Ma Bohême, texte 3
Fantaisie
Ma Bohême, d’Arthur Rimbaud est le dernier poème, écrit en octobre 1870, qui se trouve
dans le deuxième ensemble intitulé, Les Cahiers de Douai, qui sera publié ultérieurement.
Cet ensemble n’est pas constitué par Rimbaud et il est nommé ainsi car les poèmes ont été
recopiés sur des cahiers et conservés, mais ce n’est pas Rimbaud qui a organisé le recueil.

Les deux thèmes de ce poème sont le rapport du jeune poète à la poésie et à la création,
esquissant ainsi un Art poétique et la Nature comme espace de liberté et comme source
d’inspiration. Il développe sa vision de la poésie dans la lettre au voyant, où il dissocie le je
poète et du je et du moi, dans la fameuse formule : « Je est un autre ».
C’est lors de ses fugues qu’il découvre la nature ardennaise mais aussi les champs de
bataille, la guerre entre la France et la Prusse s’y déroulant. N’ayant rien il se déplace en
marchant et traverse de vastes espaces, on le surnomme le marcheur aux semelles de vent.

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