Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Points de grammaire :
l'interrogation
la synonymie -l'antonymie
l’expression de la cause et de la conséquence
les différentes subordonnées conjonctives
Exprimer l’opposition et la concession
Il faut être toujours ivre. Tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir
l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre,
il faut vous enivrer sans trêve.
Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans
la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà dimi-
nuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'hor-
loge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui
chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague,
l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ! Pour ne
pas être les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans
cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise.
Texte N°2 :
Poésies, 1970.
Encore un jour
Romancier et poète, Claude Roy évoque dans son œuvre son expérience
multiple. Les thèmes du temps et de l’amour occupent dans ses poèmes une
place privilégiée.
Claude Roy
TEXTE N°3 :
ZONE
« Zone », situé en tête d’Alcools, constitue en quelque sorte un manifeste de la
poésie moderne. C’est aussi le bilan provisoire d’une vie, comme le montrent
ces deux séquences de tonalité différente.
Texte n° 4 :
Le Pont Mirabeau
Texte n° 5 :
Marie
Vous y dansiez petite fille
Y danserez-vous mère-grand
C'est la maclotte qui sautille
Toute les cloches sonneront
Quand donc reviendrez-vous Marie
1. Des Iroquois et des Hurons : deux noms de peuples amérindiens. Cette remarque s’ins-
crit dans la lignée des récits de voyage qui se multiplient au XVIIème s. et accom-
pagnent le développement des grandes explorations et l’essor de la colonisation. Par
un déplacement du regard, la cour est regardée comme un pays étranger.
Texte N° 9 :
« L’Homme et son Image »
Pour M.L.D.D.L.R. (1)
Un Homme qui s'aimait sans avoir de rivaux
Passait dans son esprit pour le plus beau du monde :
Il accusait toujours les miroirs d'être faux,
Vivant plus que content dans son erreur profonde.
Afin de le guérir, le Sort officieux (2)
Présentait partout à ses yeux
Les Conseillers muets dont se servent nos Dames :
Miroirs dans les logis, miroirs chez les Marchands,
Miroirs aux poches des Galands (3),
Miroirs aux ceintures des femmes.
Que fait notre Narcisse ? Il se va confiner
Aux lieux les plus cachés qu'il peut s'imaginer,
N'osant plus des miroirs éprouver l'aventure.
Mais un canal (4) formé par une source pure,
Se trouve en ces lieux écartés :
Il s'y voit, il se fâche ; et ses yeux irrités
Pensent apercevoir une Chimère vaine (5).
Il fait tout ce qu'il peut pour éviter cette eau.
Mais quoi, le canal est si beau
Qu'il ne le quitte qu'avec peine (6).
On voit bien où je veux venir :
Je parle à tous ; et cette erreur extrême
Est un mal que chacun se plaît d'entretenir.
Notre âme c'est cet Homme amoureux de lui-même ;
Tant de miroirs, ce sont les sottises d'autrui ;
Miroirs de nos défauts les Peintres légitimes ;
Et quant au canal, c'est celui
Que chacun sait, le Livre des Maximes (7).
Notes :
1 - M. le duc de La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes.
2 - Le Sort officieux : le sort (le hasard) qui rend un bon office (service).
3 - Galands : galants (avec un « t »). Personnage gracieux, distingué, courtois.
4 - Un canal : le lit d’un ruisseau ou d’une rivière.
5 - Une chimère vaine : une illusion. Dans la mythologie, la chimère est un
monstre (à poitrail de lion, ventre du chèvre et queue de dragon, crachant des
flammes) vaincu par Bellérophon.
6 - Il se va confiner : il va s’enfermer, se retirer.
7 - Le Livre des Maximes : le livre de La Rochefoucauld auquel est dédiée cette
fable.
Texte N°11 :
LA PEAU DE CHAGRIN, BALZAC, 1831.
Au premier coup d’œil les joueurs lurent sur le visage du novice quelque horrible mystère :
ses jeunes traits étaient empreints d’une grâce nébuleuse, son regard attestait des efforts
trahis, mille espérances trompées ! La morne impassibilité du suicide donnait à son front une
pâleur mate et maladive, un sourire amer dessinait de légers plis dans les coins de sa bouche,
et sa physionomie exprimait une résignation qui faisait mal à voir. Quelque secret génie
scintillait au fond de ses yeux, voilés peut-être par les fatigues du plaisir. Était-ce la
débauche qui marquait de son sale cachet cette noble figure jadis pure et brûlante,
maintenant dégradée ? Les médecins auraient sans doute attribué à des lésions au cœur ou à
la poitrine le cercle jaune qui encadrait les paupières, et la rougeur qui marquait les joues,
tandis que les poètes eussent voulu reconnaître à ces signes les ravages de la science, les
traces de nuits passées à la lueur d’une lampe studieuse. Mais une passion plus mortelle que
la maladie, une maladie plus impitoyable que l’étude et le génie, altéraient cette jeune tête,
contractaient ces muscles vivaces, tordaient ce cœur qu’avaient seulement effleuré les
orgies, l’étude et la maladie. Comme, lorsqu’un célèbre criminel arrive au bagne, les
condamnés l’accueillent avec respect, ainsi tous ces démons humains, experts en tortures,
saluèrent une douleur inouïe, une blessure profonde que sondait leur regard, et reconnurent
un de leurs princes à la majesté de sa muette ironie, à l’élégante misère de ses vêtements. Le
jeune homme avait bien un frac de bon goût, mais la jonction de son gilet et de sa cravate
était trop savamment maintenue pour qu’on lui supposât du linge. Ses mains, jolies comme
des mains de femme, étaient d’une douteuse propreté ; enfin depuis deux jours il ne portait
plus de gants ! Si le tailleur et les garçons de salle eux-mêmes frissonnèrent, c’est que les
enchantements de l’innocence florissaient par vestiges dans ses formes grêles et fines, dans
ses cheveux blonds et rares, naturellement bouclés. Cette figure avait encore vingt-cinq ans,
et le vice paraissait n’y être qu’un accident. La verte vie de la jeunesse y luttait encore avec
les ravages d’une impuissante lubricité. Les ténèbres et la lumière, le néant et l’existence s’y
combattaient en produisant tout à la fois de la grâce et de l’horreur. Le jeune homme se
présentait là comme un ange sans rayons, égaré dans sa route.