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UNITÉ 10
Les poètes : voyageurs de la modernité
Durée approximative : 7 h 30
Cette unité 10 poursuit le thème du cycle 4 : REGARDER LE MONDE, INVENTER DES MONDES, sur lequel tu as déjà tra-
vaillé à l’unité 1. C’est à nouveau sous l’aspect des Visions poétiques du monde que l’étude sera construite.
Dans cette unité, tu vas partir en voyage et parcourir le monde, de Montmartre à New York, en passant par la Sibérie. Tu
voyageras en train, en auto ou en bateau, mais toujours en compagnie de poètes. Au XXe siècle, les progrès techniques
ont considérablement modifié le rapport que les hommes entretiennent avec l’espace. Les poètes que tu vas découvrir
ont su capter et fixer dans leurs textes les particularités du voyage moderne. Pour cela, ils ont dû renouveler les formes
poétiques traditionnelles et en forger d’autres, plus souples, plus libres, capables de recueillir et de transcrire les vibra-
tions, parfois les soubresauts, d’un monde en pleine mutation. C’est donc également à un voyage à travers la modernité
poétique que cette unité t’invite maintenant.
Alors accepte la proposition de Rimbaud, rédigée dans un wagon, le 7 octobre 1870 :
L’hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien…
SÉANCE 1
Je m’évalue 104
Notes :
1. « mobilisation » : mise sur le pied de guerre des forces militaires d’un pays par le rappel dans les armées de
tous ceux qui sont désignés pour y servir en temps de paix.
Pour vérifier ta bonne compréhension du poème, réponds maintenant aux questions qui suivent.
JE RETIENS
Une forme poétique moderne : le calligramme
Au début du XXe siècle, les peintres cubistes comme Picasso introduisent des lettres et des collages dans leurs
dessins. Apollinaire intègre à son tour le dessin à sa poésie par l’emploi du calligramme. Un calligramme est un
poème dont les vers sont disposés de manière à figurer un objet en rapport avec le poème. Il incarne un nouveau
mode d’expression qui donne à la poésie un aspect visuel et suggère une autre manière de lire.
JE RETIENS
Orthographe et accord de leur
Employé comme déterminant possessif et placé devant un nom, leur s’accorde en fonction du nombre d’objets
possédés :
Les villages ont perdu leur tranquillité. / Les hommes abandonnent leurs habitudes.
Employé comme pronom personnel complément, et placé devant un verbe, leur ne prend pas d’s : c’est le pluriel
de « lui ».
Les affiches de mobilisation leur apprennent l’entrée en guerre.
SÉANCE 2
Étudier un poème en vers libres : « Ode », Valery Larbaud
Durée approximative : 1 h 30
Dans cette séance, tu vas monter à bord des trains de luxe, en compagnie de Valery Larbaud. Sous le pseudonyme de
A. O. Barnabooth, le poète, disposant d’une immense fortune personnelle, nous fait partager ses voyages dans les paque-
bots et les trains de luxe. Cette séance sera pour toi l’occasion d’étudier une autre forme poétique moderne, le vers libre.
Prends maintenant ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le travail
demandé.
Lis attentivement le texte qui suit. Tu peux aussi l’écouter à la piste 30.
ODE1
1. « ode » : poème lyrique destiné à célébrer des événements importants ou de grands personnages.
2. « bruit » : (du verbe bruire) fait du bruit.
3. « loquets » : sorte de verrou.
4.
« Harmonika-Zug » : mot allemand signifiant « train harmonica ». L’Harmonika-Zug était un célèbre train de nuit
au début du XXe siècle en Allemagne.
5. « Nord-Express » : train, créé en 1896, qui relie les grandes capitales d’Europe.
6. « Wirballen et Pskow » : villes de Lituanie et de Biélorussie.
7. « Samnium » : région montagneuse de l’Italie.
8. « Castille » : région du centre de l’Espagne.
9. « mer de Marmara » : mer qui relie la mer Noire à la mer Égée.
Notes :
1. « Orient-Express » : train de luxe, créé en 1883, qui relie Paris à Istanbul, en passant par Vienne.
2. « Sud-Brenner-Bahn » : train du sud de l’Autriche.
3. « chanterelle » : corde la plus fine, ayant le son le plus aigu, dans un instrument à corde.
Vérifie ta bonne compréhension du texte en répondant aux questions qui suivent.
— — — —
— — — —
— — — —
b) Certains de ces lieux sont associés à une caractéristique précise. Retrouve-les en reliant les propositions
suivantes.
Le bruit La musique
b) Quel vers exprime une harmonie entre la voix du poète et les bruits du train ?
c) En quoi l’expression « Harmonika-Zug » associe-t‑elle une sensation visuelle et une sensation auditive au train ?
4. a) Quel nom, employé au vers 11, traduit le plaisir ressenti par le poète lors de ses voyages en train ?
b) Retrouve dans le début du poème un adjectif de la même famille.
c) Comment pourrais-tu résumer en quelques mots l’impression générale ressentie par le poète lors de ses
voyages à bord des trains de luxe ?
Compare tes réponses avec celles du corrigé puis lis et mémorise le « Je retiens » qui suit.
JE RETIENS
L’écriture poétique du voyage
L’évocation du voyage dans la poésie s’appuie sur l’emploi des procédés suivants :
— La présence de termes géographiques connotant l’exotisme et suscitant le rêve.
— Le champ lexical du mouvement, ainsi que celui du train (ou du bateau)
— Le lexique des sensations (couleurs, bruits…) et des sentiments
JE RETIENS
Le poème en vers libres
Un poème en vers libres se caractérise par un retour à la ligne qui crée des vers de longueur irrégulière (et
pouvant largement dépasser les 12 syllabes de l'alexandrin) et par l’abandon des rimes. La musicalité du poème
est assurée par l’utilisation régulière d’assonances et d’allitérations. Les rimes traditionnelles sont remplacées
par des jeux d’homonymie et de paronymie dont le poète exploite habilement les ressources. Plus souple que
le poème à forme fixe, le poème en vers libres permet une grande variété d’effets. Ainsi, dans ce poème, Valery
Larbaud fait le choix de la forme libre pour faire entendre dans son écriture même la musique particulière des
trains.
À la fin du XIXe siècle, l’attrait pour les voyages est favorisé par le développement des chemins de fer et l’appa-
rition de grands paquebots qui permettent de traverser le monde. Des trains de luxe, aux noms évocateurs,
parcourent les continents, laissant dans leur sillage un parfum de mystère et d’exotisme :
• le Nord-Express (1896) relie les grandes capitales européennes.
• l’Orient-Express (1883) assure la liaison entre Paris, Vienne et Istanbul.
• le Transsibérien (à partir de 1891) relie Moscou à Pékin ou Vladivostok (sur la côte pacifique).
La littérature exploitera abondamment l’imaginaire associé à ces trains de luxe (tu peux lire un célèbre roman
policier : Le Crime de l’Orient Express d’Agatha Christie).
SÉANCE 3
Analyser un poème de la modernité : « La Prose du Transsibérien et de la petite
Jehanne de France », Blaise Cendrars
Lis attentivement le texte qui suit. Tu peux en écouter le début à la piste 31.
v. 1 […] J’ai passé mon enfance dans les jardins suspendus de Babylone
Et l’école buissonnière, dans les gares devant les trains en partance
Maintenant, j’ai fait courir tous les trains derrière moi
Bâle1-Tombouctou2
v. 5 J’ai aussi joué aux courses à Auteuil et à Longchamp
Paris-New York
Maintenant, j’ai fait courir tous les trains tout le long de ma vie
Madrid-Stockholm
Et j’ai perdu tous mes paris
v. 10 Il n’y a plus que la Patagonie3, la Patagonie, qui convienne à mon immense tristesse, la Patagonie, et un
voyage dans les mers du Sud
Je suis en route
J’ai toujours été en route
Je suis en route avec la petite Jehanne de France
Le train fait un saut périlleux et retombe sur toutes ses roues
v. 15 Le train retombe sur ses roues
Le train retombe toujours sur toutes ses roues
Notes :
Notes :
—
Gino Severini (1883-1966), Le Train entre les maisons
© The Bridgeman Art Library / ADAGP
Compare tes réponses avec celles contenues dans le corrigé avant de continuer ton travail.
C. La modernité de l’écriture
1. a) Quelle forme poétique Blaise Cendrars adopte-t‑il dans ce poème ? Tu étudieras notamment les vers em-
ployés, et la présence ou non de rimes.
b) Ce poème est-il ponctué ? Justifie ta réponse.
c) « Le monde s’étire s’allonge et se retire comme un accordéon qu’une main sadique tourmente » (v. 36) :
qu’exprime la longueur démesurée de ce vers ?
d) Relève dans le poème un vers monosyllabique (= ne comportant qu’une seule syllabe).
e) Compare ce poème à celui de Valery Larbaud, « Ode » (séance 2) : lequel des deux te paraît se libérer le plus
radicalement de la poésie traditionnelle ? Justifie ta réponse.
2. Un peu plus loin dans son long poème, dans un passage non reproduit dans cette unité, Cendrars écrit : « J’ai
déchiffré tous les textes confus des roues »
a) Relève dans les vers 26 à la fin le champ lexical des bruits et de la musique.
b) On appelle onomatopée un mot créé pour retranscrire un son. Relève dans la fin du poème une onomatopée.
Quel bruit transcrit-elle ?
c) La « musique » des trains te paraît-elle aussi harmonieuse dans ce poème que dans « Ode », le poème de
Valery Larbaud ? Relève un vers à l’appui de ta réponse.
Pour aller plus loin…
3. Le trajet en train est fait, nous dit Cendrars, de « chocs » et de « rebondissements ». Observe attentivement les
trois vers qui suivent :
« Le train fait un saut périlleux et retombe sur toutes ses roues
Le train retombe sur ses roues
Le train retombe toujours sur toutes ses roues »
a) Si l’expression surlignée exprime le « choc », par quel procédé les rebondissements sont-ils traduits ?
b) En quoi la musicalité de ces trois vers fait-elle entendre parfaitement le « faux accord » et le « broun-roun-
roun » des roues ?
Tu peux maintenant vérifier tes réponses dans le livret de corrigés.
JE RETIENS
Orthographe et accord de tout (tous, toute, toutes)
• Employé comme déterminant indéfini et placé devant un nom (ou un pronom), tout s’accorde en genre et
en nombre avec le nom qu’il introduit :
J’écoute de la musique tous les jours et je connais toutes les nouveautés.
• Employé comme pronom indéfini, tout varie en genre et en nombre :
Tout va bien ! J’ai recompté les cartes, elles sont toutes là.
• Employé comme adverbe, tout (= entièrement) est invariable sauf devant un adjectif féminin commençant
par une consonne ou un h aspiré :
La demeure était tout illuminée avec ses escaliers tout blancs et ses portes toutes bleues.
SÉANCE 4
Étudier un poème en prose « Pensée en mer », Paul Claudel
Durée approximative : 1h30
Dans cette séance, tu vas découvrir et étudier une autre forme poétique moderne : le poème en prose. Paul Claudel, écri-
vain et diplomate, exerça les fonctions de consul aux États-Unis, puis en Chine, et fut ambassadeur de France au Japon.
Grand voyageur, il évoque dans son recueil Connaissance de l’Est, ses différents séjours en Asie.
Prends maintenant ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le travail
demandé.
Lis attentivement le texte qui suit.
PENSÉE EN MER
1 Le bateau fait sa route entre les îles ; la mer est si calme qu’on dirait qu’elle n’existe pas. Il est onze
heures du matin, et l’on ne sait s’il pleut ou non.
La pensée du voyageur se reporte à l’année précédente. Il revoit sa traversée de l’Océan dans la nuit et
la rafale, les ports, les gares, l’arrivée le dimanche gras1, le roulement vers la maison, tandis que d’un
5 oeil froid il considérait au travers2 de la glace souillée de boue les fêtes hideuses de la foule3. On allait lui
remontrer les parents, les amis, les lieux, et puis il faut de nouveau partir. Amère entrevue ! comme s’il
était permis à quelqu’un d’étreindre4 son passé.
C’est ce qui rend le retour plus triste qu’un départ. Le voyageur rentre chez lui comme un hôte5 ; il
est étranger à tout, et tout lui est étrange. Servante, suspends seulement le manteau de voyage et ne
10 l’emporte point. De nouveau, il faudra partir ! À la table de famille le voici qui se rassied, convive suspect
et précaire6. Mais, parents, non ! Ce passant que vous avez accueilli, les oreilles pleines du fracas des
trains et de la clameur de la mer, oscillant7, comme un homme qui rêve, du profond mouvement qu’il sent
encore sous ses pieds et qui va le remporter, n’est plus le même homme que vous conduisîtes au quai
fatal8. La séparation a eu lieu, et l’exil9 où il est entré le suit.
— Paul Claudel, Connaissance de l’Est © Mercure de France, 1900.
Notes :
1. « le dimanche gras » (l. 4) : un jour gras est un jour où l’Église permet aux fidèles de manger de la viande.
2. « au travers de la glace souillée » (l. 5) : à travers la vitre de la voiture.
3. « les fêtes hideuses de la foule » (l. 5-6) : Le dimanche gras est le dernier dimanche avant le Carême. Situé entre
le Jeudi gras et le Mardi gras, il fait partie des célébrations du Carnaval.
4. « étreindre » (l. 7) : serrer, retenir.
5. « hôte » (l. 8) : ici, personne que l’on invite, à qui l’on offre l’hospitalité.
6. « précaire » (l. 11) : incertain, passager.
7. « oscillant » (l. 12) : animé d’un mouvement alternatif, se balançant.
8. « quai fatal » (l. 14) : quai où l’on fait les adieux.
9. « exil » (l. 14) : situation de celui qui est banni de sa patrie ou obligé de vivre loin de chez lui.
A. Le souvenir du retour
1. a) Dans quel endroit le poème prend-il naissance ? Les informations données sur ce lieu sont-elles précises ?
b) Relève, dans les deux premières lignes, deux expressions qui montrent que la réalité qui entoure le voyageur
est imprécise
c) En quoi les conditions décrites dans ces lignes favorisent-elles la rêverie du voyageur ?
Concentre-toi maintenant sur le paragraphe compris entre les lignes 3 et 7.
2. a) Quelle expression marque le début du souvenir ?
b) Résume en une ou deux phrases les souvenirs évoqués.
3. a) Quelles sont les trois étapes qui constituent le voyage du retour ?
b) « Il revoit sa traversée de l’Océan dans la nuit et la rafale […]. » (l. 3-4)
À quel grand voyageur de la mythologie grecque cette expression peut-elle faire penser ?
c) Quelle expression est employée par le poète à la ligne 5 pour désigner les festivités populaires qui se dé-
roulent dans la rue ? Cette expression est-elle péjorative* ou méliorative* ?
d) Le voyageur est-il heureux de retrouver sa famille ? Justifie ta réponse en citant le texte.
e) Relève, dans la fin de ce paragraphe, une expression qui résume l’impression laissée au voyageur par la visite
dans sa famille.
Vérifie tes réponses dans le livret de corrigé puis poursuis ton travail.
JE RETIENS
Le poème en prose
Le poème en prose se développe dans la seconde moitié du XIXe siècle, avec des auteurs comme Baudelaire
ou Rimbaud. Il ne comporte ni vers ni rimes mais s’appuie sur des échos sonores internes (assonances et alli-
térations). Le poème en prose accorde également une grande importance au rythme et à la construction des
phrases, et emploie souvent un lexique soutenu.
E. Expression écrite
Pour terminer cette séance, tu vas faire un petit exercice d’écriture.
Voici le début d’un poème de Joachim Du Bellay, évoquant la joie du retour parmi les siens :
« Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge ! »
Penses-tu, comme Claudel, que le retour soit plus triste que le départ, ou crois-tu, avec Du Bellay, qu’il est bon
de rentrer chez soi après un long voyage ? Tu développeras ton point de vue dans un paragraphe argumenté de
quelques lignes.
Pour réussir cet exercice tu dois :
— exposer clairement ton point de vue : la thèse
— employer deux ou trois arguments à l’appui de ton point de vue
— proposer quelques exemples précis pour illustrer tes arguments
— vérifier l’orthographe, les accords sujet/verbe et la ponctuation.
Fais d’abord cet exercice sur ta feuille de brouillon. Vérifie ensuite que tu as bien respecté les consignes en complétant le
tableau ci-dessous.
SÉANCE 5
Découvrir le regard du poète sur une ville moderne :
« À New York » Léopold Sédar Senghor
Durée approximative : 1 h 30
C’est à New York que s’achève cette unité consacrée aux poètes voyageurs. Dans le poème que tu vas lire, Léopold Sédar
Senghor, écrivain d’origine sénégalaise, évoque la ville de New York où il s’est rendu lors d’un voyage officiel à l’O.N.U. Tu
vas découvrir le regard du poète sur la grande ville moderne à travers un extrait de son poème « À New York ».
Prends maintenant ton cahier. Note le numéro et le titre de la séance en rouge. Souligne-les. Fais ensuite le travail
demandé.
Lis attentivement le texte qui suit.
À NEW YORK
(pour un orchestre de jazz1 : solo de trompette)
1 New York! D’abord j’ai été confondu2 par ta beauté, ces grandes filles d’or aux jambes longues.
Si timide d’abord devant tes yeux de métal bleu, ton sourire de givre
Si timide. Et l’angoisse au fond des rues à gratte-ciel
Levant des yeux de chouette parmi l’éclipse du soleil.
5 Sulfureuse3 ta lumière et les füts4 livides5, dont les têtes foudroient le ciel
Les gratte-ciel qui défient les cyclones sur leurs muscles d’acier et leur peau patinée de pierres.
Mais quinze jours sur les trottoirs chauves de Manhattan6
– C’est au bout de la troisième semaine que vous saisit la fièvre en un bond de jaguar
Quinze jours sans un puits ni pâturage, tous les oiseaux de l’air
10 Tombant soudain et morts sous les hautes cendres des terrasses.
Pas un rire d’enfant en fleur, sa main dans ma main fraiche
Pas un sein maternel, des jambes de nylons7. Des jambes et des seins sans sueur ni odeur.
Pas un mot tendre en l’absence de lèvres, rien que des cours artificiels payés en monnaie forte
Et pas un livre où lire la sagesse. La palette du peintre fleurit des cristaux de corail.
15 Nuits d’insomnie o nuits de Manhattan ! si agitées de feux follets, tandis que les klaxons hurlent
[des heures vides
Et que les eaux obscures charrient des amours hygiéniques, tels des fleuves en crue des cadavres
[d’enfants.
— Léopold Sédar Senghor, « New York », Éthiopiques (1956) in Œuvre Poétique
© Éditions du Seuil, 1964, 1973, 1979, 1984, 1990
Notes :
1.
« jazz » : musique afro-américaine née au début du XXe siècle dans les communautés noires du sud des États-Unis.
2. « confondu » (v. 1) : troublé, stupéfait.
3. « sulfureuse » (v. 5) : semblable au soufre, cristal inflammable que la tradition associe à l’enfer.
4.
« fût » (v. 5) : partie du tronc d’un arbre comprise entre le sol et les premières branches. Ici, le terme désigne par
métaphore les gratte-ciel.
5. « livides » (v. 5) : pâles.
6. « nylon » (v. 12) : matière synthétique utilisée pour fabriquer les collants.
7. « Manhattan » (v. 7 et 15) : quartier des affaires de New York où sont concentrés de gigantesques gratte-ciel.
JE RETIENS
Le regard du poète sur la ville moderne
La ville devient un thème poétique dès la deuxième moitié du XIXe siècle, notamment dans les poèmes de Bau-
delaire, Rimbaud ou Verhaeren. Au début du XXe siècle, l’architecture nouvelle de verre, de béton et de métal lui
donne un nouveau visage. Des poètes comme Cendrars et Apollinaire en font l’éloge.
Cependant chez d’autres artistes, l’admiration et l’enthousiasme cèdent la place à un regard critique porté sur
les villes modernes, où règnent les constructions et les relations artificielles. Certains, comme Sédar Senghor,
déplorent l’absence de nature et d’humanité. La figure de la personnification est souvent employée par les
poètes pour décrire la ville.
La négritude
Léopold Sédar Senghor est l’un des fondateurs de la négritude, courant littéraire qui affirme l’originalité de la
culture noire, et invite les écrivains noirs à revendiquer leurs racines. La négritude prend naissance dans un
contexte d’anticolonialisme et s’exprime par les références à la nature et aux civilisations africaines.
C. Expression écrite
Pour conclure cette séance, tu vas faire un petit exercice d’écriture.
Voici un tableau de Marcel Gromaire, représentant New York et le pont de Brooklyn. Observe-le attentivement.
Les caractéristiques de l’écriture poétique du Compléter les phrases suivantes sur les
voyage : poèmes étudiés :
a) L’évocation du train est présente dans
• La présence de nombreux termes les poèmes de _______________ et de
g_____________ qui suscitent le rêve. _______________________.
b) La région que traverse Blaise Cendrars est la
• L’emploi du champ lexical du m______________. _____________.
• Le lexique des s___________ et des c) Valery Larbaud éprouve un sentiment de
s_______________. p____________ lors de ses voyages dans les
trains de luxe.
d) L’emploi du vers libre permet de transcrire le
m________________ et la m____________des
trains.
e) Apollinaire nous rapporte son voyage à bord
d’une ____________________.
f) Claudel considère que le r___________ est plus
triste que le d____________ parce que le voya-
geur est devenu un éternel é___________.