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OE 

3 : La poésie du XIXe au XXIe siècle


Parcours associé « Alchimie poétique : la boue et l’or »
Textes et questions
__________________________________________________________________________

Introduction au corpus, enjeux du parcours

Dans un épilogue qu’il avait prévu d’insérer à la suite de la section « Tableaux parisiens », dans
l’édition 1861 des Fleurs du mal, Baudelaire, s’adressant à la ville de Paris, écrit : « Ô vous, soyez témoins que
j’ai fait mon devoir / Comme un parfait ________ et comme une âme sainte / Car j’ai de chaque chose
extrait la ___________1. / Tu m’as donné ta _____ et j’en ai fait de l’___. » On trouve aussi dans ses notes
sur des poèmes inachevés, une formule plus condensée et plus frappante encore : « J’ai pétri2 de la _____ et
j’en ai fait de l’or. »

En rapprochant ces deux termes __________, la boue et l’or, Baudelaire propose une définition de son
art - une poésie d’association et de rencontre des _________. Il met en évidence, en ce sens, un des pouvoirs
de la poésie : elle transforme, trans_______ les éléments du réel, d’une part pour les sublimer et en révéler
la beauté cachée, d’autre part pour atteindre une vérité essentielle, la vérité _________ du monde3.

Dans cette opération de transfiguration, qui tient tout autant de la magie que du sacerdoce4, le poète est
un « chimiste » et « une âme sainte » tout à la fois. En effet, au-delà de la morale traditionnelle et commune, il
transforme, non sans provocation, le _____ en œuvre d’art, de la même manière que l’alchimiste transmue le
_______. Il invite ainsi à repenser le monde, à dépasser les frontières imposées par la __________.

Liste des textes constituant le corpus 

1. « J’aime l’araignée et j’aime l’ortie », III, 27, Les Contemplations de Victor Hugo (1856).
2. « Vénus anadyomène », 1er cahier des Cahiers de Douai d’Arthur Rimbaud (1870).
3. Chant IV, strophe 4, extrait, Les Chants de Maldoror d’Isidore Ducasse (1874).
4. « Les Usines », extrait, Les Villes tentaculaires d’Emile Verhaeren (1895).
5. « Ode inachevée à la boue », extrait de Pièces de Francis Ponge (1962).
6. « La Limace », extrait de Battre la campagne de Raymond Queneau (1968).

Consignes
- Complétez l’introduction ci-dessus.
- Lisez l’ensemble des textes avec attention.
- Numérotez-les tous les cinq vers ou lignes.
- Préparez sérieusement au brouillon les questions posées sur chaque texte.
- Répondez aux questions de synthèse.

Bonne lecture et bon travail !

1
____________ : aboutissement d’opérations alchimiques, résultat de distillations successives. Le terme renvoie ici à l’essence,
c’est-à-dire la partie pure, la plus concentrée d’une substance.
2
Pétrir : travail du boulanger qui pétrit sa pâte > poète = un art___ oui mais avant tout un arti__.
3
Cf. Paul Eluard : « La terre est bleue comme une orange », extrait du recueil L’amour, la poésie.
4
Sacerdoce : fonction de prêtre. Par analogie, désigne toute fonction qui exige du dévouement.
1. « J’aime l’araignée et j’aime l’ortie », III, 27, Les Contemplations de Victor Hugo (1856).

Victor Hugo est reconnu comme le chef de file du mouvement romantique en France. Dans son recueil
Les Contemplations, publié en 1856, il évoque la mort tragique de sa fille Léopoldine, treize ans plus tôt. La
poésie est alors l’occasion pour le poète de méditer sur la fragilité de la vie et de la mort.

J’aime l'araignée et j’aime l'ortie,


Parce qu’on les hait ;
Et que rien n’exauce et que tout châtie5
Leur morne souhait ;

Parce qu’elles sont maudites, chétives,


Noirs êtres rampants ;
Parce qu’elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;

Parce qu’elles sont prises dans leur œuvre ;


Ô sort ! fatals nœuds !
Parce que l’ortie est une couleuvre,
L’araignée un gueux;

Parce qu’elles ont l’ombre des abîmes,


Parce qu’on les fuit,
Parce qu’elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit.

Passants, faites grâce à la plante obscure,


Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !

Il n’est rien qui n’ait sa mélancolie ;


Tout veut un baiser.
Dans leur fauve6 horreur, pour peu qu’on oublie
De les écraser,

Pour peu qu’on leur jette un œil moins superbe7,


Tout bas, loin du jour,
La vilaine bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !

Questions Texte 1

a. Identifiez la forme poétique utilisée.


b. En quoi l’ouverture du poème est-elle surprenante ?
c. Quel effet l’énumération des raisons pour lesquelles le poète aime l’araignée et l’ortie crée-t-elle ?
d. Comment les trois dernières strophes invitent-elles le lecteur à changer son regard sur « la vilaine bête
et la mauvaise herbe » (vers 27) ?
e. Langue : précisez la nature de la proposition subordonnée « Parce qu’on les hait » (vers 2). Grâce à
quel procédé, comprend-on que cette proposition a une portée générale ?
2. « Vénus anadyomène», 1er cahier des Cahiers de Douai d’Arthur Rimbaud (1870).
5
Châtie : punit.
6
Fauve : couleur roux vif.
7
Superbe : orgueilleux.
Arthur Rimbaud a seulement seize ans lorsqu’il compose les poèmes en vers des deux Cahiers de
Douai ; poèmes qui témoignent de sa précocité poétique mais aussi de son goût pour la provocation. Dans le
poème qui suit, il décrit le cadavre d’une prostituée.

Vénus anadyomène8

Comme d’un cercueil vert en fer-blanc9, une tête


De femme à cheveux bruns fortement pommadés10
D’une vieille baignoire émerge, lente et bête,
Avec des déficits11 assez mal ravaudés12 ;

Puis le col gras et gris, les larges omoplates


Qui saillent13 ; le dos court qui rentre et qui ressort ;
– La graisse sous la peau paraît en feuilles plates ;
Et les rondeurs des reins semblent prendre l’essor…

L’échine14 est un peu rouge, et le tout sent un goût


Horrible étrangement, – on remarque surtout
Des singularités qu’il faut voir à la loupe…

Les reins portent deux mots gravés : Clara Venus15 ;


– Et tout ce corps remue et tend sa large croupe16
Belle hideusement d’un ulcère17 à l’anus.

27 juillet 1870.

Questions Texte 2

a. Identifiez la forme poétique utilisée.


b. Quel rapport pouvez-vous établir entre le titre du poème et le 1er quatrain ?
c. Montrez la façon dont le poète maintient une tension entre la laideur du cadavre et la dimension
poétique de la description.
d. Qu’est-ce qui rend les deux derniers vers surprenants ? Comment comprenez-vous la formule « Belle
hideusement » au vers 14 ?
e. Langue : quelle est la nature et la fonction grammaticale du groupe « D’une vieille baignoire » (vers
3). En quoi cette précision est-elle ironique ?
f. HDA (Histoire des arts) : trouvez le tableau, peint au XVe siècle par Botticelli, qui pourrait être mis en
relation avec le poème d’Arthur Rimbaud. Expliquez dans quelle mesure Rimbaud joue, dans ce poème,
avec la tradition.

3. Chant IV, strophe 4, extrait, Les Chants de Maldoror d’Isidore Ducasse (1874).

8
Anadyomène : du grec, « surgie des eaux ».
9
Fer-blanc : tôle de fer.
10
Pommadés : couverts de pommade.
11
Déficits : trous.
12
Ravaudés : réparés.
13
Qui saillent : qui sortent, formant ainsi un relief.
14
Echine : colonne vertébrale.
15
Clara Venus : en latin, « Illustre Vénus ».
16
Croupe : bas du dos et postérieur de la femme, par analogie familière avec la croupe du cheval.
17
Ulcère : plaie.
Isidore Ducasse, comte de Lautréamont, est l’auteur d’un très long poème en prose intitulé Les Chants
du Maldoror. Cet ouvrage, passé inaperçu en son temps, donne la parole à un être indéfinissable, Maldoror,
qui fait, dans ce passage, son portrait.

Je suis sale. Les poux me rongent. Les pourceaux, quand ils me regardent, vomissent. Les croûtes et les
escarres18 de la lèpre19 ont écaillé ma peau, couverte de pus jaunâtre. Je ne connais pas l’eau des fleuves, ni la
rosée des nuages. Sur ma nuque, comme sur un fumier, pousse un énorme champignon, aux pédoncules
ombellifères20. Assis sur un meuble informe, je n’ai pas bougé mes membres depuis quatre siècles. Mes pieds
ont pris racine dans le sol et composent, jusqu’à mon ventre, une sorte de végétation vivace, remplie d’ignobles
parasites, qui ne dérive pas encore de la plante, et qui n’est plus de la chair. Cependant mon cœur bat. Mais
comment battrait-il, si la pourriture et les exhalaisons 21 de mon cadavre (je n’ose pas dire corps) ne le
nourrissaient abondamment ? Sous mon aisselle gauche, une famille de crapauds a pris résidence, et, quand
l’un d’eux remue, il me fait des chatouilles. Prenez garde qu’il ne s’en échappe un, et ne vienne gratter, avec sa
bouche, le dedans de votre oreille : il serait ensuite capable d’entrer dans votre cerveau. Sous mon aisselle
droite, il y a un caméléon qui leur fait une chasse perpétuelle, afin de ne pas mourir de faim : il faut que chacun
vive. Mais, quand un parti22 déjoue complètement les ruses de l’autre, ils ne trouvent rien de mieux que de ne
pas se gêner, et sucent la graisse délicate qui couvre mes côtes : j’y suis habitué.

Questions Texte 3

a. Identifiez la forme poétique utilisée.


b. Quelle impression ce passage produit-il ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur le texte.
c. Quels mots vous semblent inattendus ? Pourquoi ?
d. Dans quelle mesure peut-on qualifier ce texte de poétique ? Argumentez.
e. Langue : étudiez la composition de l’adjectif « jaunâtre » en repérant le radical et le suffixe. Quelle est
la valeur du suffixe utilisé ?

4. « Les Usines », extrait, Les Villes tentaculaires d’Emile Verhaeren (1895).

Dans ce recueil, le poète belge Emile Verhaeren décrit précisément les grandes villes modernes et
industrielles du XIXe siècle. Il fait état, avec une grande force poétique, de la misère ouvrière mais garde
l’espoir que le progrès, technique et scientifique, amènera des jours meilleurs pour l’humanité. Dans « Les
Usines », la laideur industrielle acquiert ainsi, de façon progressive, une beauté presque surnaturelle,
fantastique.

Les Usines

Se regardant avec les yeux cassés de leurs fenêtres


Et se mirant dans l’eau de poix23 et de salpêtre24
D’un canal droit, marquant sa barre à l’infini,
Face à face, le long des quais d’ombre et de nuit
Par à travers les faubourgs lourds

18
Escarres : croûtes noirâtres et dures qui se forment sur une plaie.
19
Lèpre : maladie infectieuse grave, entraînant des lésions importantes sur la peau.
20
Pédoncules (tiges des fleurs, pieds des champignons) ombellifères (de forme sphérique).
21
Exhalaisons : odeurs qui se dégagent d’un corps.
22
Parti : camp.
23
Poix : matière visqueuse à base de goudron de bois.
24
Salpêtre : petits cristaux blanchâtres présents sur les murs humides.
Et la misère en guenilles25 de ces faubourgs,
Ronflent terriblement les fours et les fabriques.

Rectangles de granit, cubes de briques,


Et leurs murs noirs durant des lieues26,
Immensément, par les banlieues ;
Et sur leurs toits, dans le brouillard, aiguillonnées
De fers et de paratonnerres,
Les cheminées.
Et les hangars uniformes qui fument ;
Et les préaux, où des hommes, le torse au clair
Et les bras nus, brassent et ameutent d’éclairs
Et de tridents27 ardents, les poix et les bitumes ;
[…]

Se regardant de leurs yeux noirs et symétriques,


Par la banlieue, à l’infini,
Ronflent le jour, la nuit,
Les usines et les fabriques.

Oh les quartiers rouillés de pluie et leurs grand’rues !


Et les femmes et leurs guenilles apparues,
Et les squares, où s’ouvre, en des caries
De plâtras28 blanc et de scories29,
Une flore pâle et pourrie.

Aux carrefours, porte ouverte, les bars :


Etains, cuivres, miroirs hagards30,
Dressoirs31 d’ébène et flacons fols32
D’où luit l’alcool
Et son éclair vers les trottoirs.
Et des pintes33 qui tout à coup rayonnent,
Sur le comptoir, en pyramides de couronnes ;
Et des gens soûls, debout,
Dont les larges langues lapent, sans phrases,
Les ales34 d’or et le whisky, couleur topaze35.

Par à travers les faubourgs lourds


Et la misère en pleurs de ces faubourgs,
Et les troubles et mornes voisinages,
Et les haines s’entrecroisant de gens à gens
Et de ménages à ménages,
Et le vol même entre indigents36,
Grondent, au fond des cours, toujours,
Les haletants battements sourds

25
Guenilles : haillons, vêtements usés et abîmés.
26
Lieues : une lieue est une unité de mesure équivalant à quatre kilomètres environ.
27
Tridents : fourches à trois dents.
28
Plâtras : débris de plâtre.
29
Scories : déchets liés à la métallurgie (fabrication des métaux).
30
Hagards : hébétés, égarés.
31
Dressoirs : étagères ou buffets sur/dans lesquels on entrepose la vaisselle.
32
Fols : fous.
33
Pintes : récipients contenant environ un litre de bière.
34
Ales : bières anglaises blondes.
35
Couleur topaze : jaune comme la pierre précieuse.
36
Indigents : pauvres, miséreux.
Des usines et des fabriques symétriques.
Ici : entre des murs de fer et de pierre,
Soudainement se lève, altière37,
La force en rut38 de la matière :
Des mâchoires d’acier mordent et fument ;
De grands marteaux monumentaux
Broient des blocs d’or, sur des enclumes,
Et, dans un coin, s’illuminent les fontes
En brasiers tors39 et effrénés qu’on dompte.

Plus loin, un vacarme tonnant de chocs


Monte de l’ombre et s’érige par blocs ;
Et, tout à coup, cassant l’élan des violences,
Des murs de bruit semblent tomber
Et se taire, dans une mare de silence,
Tandis que les appels exacerbés
Des sifflets crus et des signaux
Hurlent soudain vers les fanaux,
Dressant leurs feux sauvages,
En buissons d’or, vers les nuages.
[…]

L’aube s’essuie
A leurs carrés de suie
Midi et son soleil hagard
Comme un aveugle, errent par leurs brouillards ;
Seul, quand au bout de la semaine, au soir,
La nuit se laisse en ses ténèbres choir40,
L’âpre effort s’interrompt, mais demeure en arrêt,
Comme un marteau sur une enclume,
Et l’ombre, au loin, parmi les carrefours, paraît
De la brume d’or qui s’allume.

Questions Texte 4

a. Relevez les éléments qui dans les 2ères strophes, mettent en évidence la laideur et la misère des
quartiers industriels de la ville.
b. Quels éléments, mentionnés dans la 1ère strophe, sont repris dans la 3ème ? Quel effet ces reprises et
leurs variations créent-elles ?
c. Montrez que les quatre dernières strophes transfigurent le monde des usines et lui confèrent une
certaine beauté visuelle.
d. Langue : avec quel nom l’adjectif « altière » (vers 47) s’accorde-t-il ? Indiquez sa fonction
grammaticale.

37
Altière : fière.
38
En rut : en état d’excitation sexuelle.
39
Tors : tordus.
40
Choir : tomber.
5. « Ode inachevée à la boue », extrait de Pièces de Francis Ponge (1962).

Le poète Francis Ponge est célèbre pour son recueil de poèmes en prose Le Parti pris des choses. Dans
ce recueil, il cherche à décrire le plus exactement possible la nature des objets du quotidien. Il exploite pour
cela les ressources du langage poétique. Dans Pièces, il poursuit cette recherche.
Ode inachevée à la boue

La boue plaît aux cœurs nobles parce que constamment méprisée.


Notre esprit la honnit41, nos pieds et nos roues l’écrasent. Elle rend la marche difficile et elle salit : voilà ce
qu’on ne lui pardonne pas.
C’est de la boue ! dit-on des gens qu’on abomine, ou d’injures basses et intéressées. Sans souci de la honte
qu’on lui inflige, du tort à jamais qu’on lui fait. Cette constante humiliation, qui la mériterait ? Cette atroce
persévérance!
Boue si méprisée, je t’aime. Je t’aime à raison du mépris où l’on te tient. De mon écrit, boue au sens propre,
jaillis à la face de tes détracteurs !

Tu es si belle, après l’orage qui te fonde, avec tes ailes bleues !


Quand, plus que les lointains, le prochain devient sombre et qu’après un long temps de songerie funèbre, la
pluie battant soudain jusqu’à meurtrir le sol fonde bientôt la boue, un regard pur l’adore : c’est celui de l’azur
agenouillé déjà sur ce corps limoneux42 trop roué43 de charrettes hostiles, – dans les longs intervalles
desquelles, pourtant, d’une sarcelle44 à son gué45 opiniâtre46 la constance et la liberté guident nos pas.

Ainsi devient un lieu sauvage le carrefour le plus amène47, la sente48 la mieux poudrée49.

La plus fine fleur50 du sol fait la boue la meilleure, celle qui se défend le mieux des atteintes du pied ; comme
aussi de toute intention plasticienne 51. La plus alerte52 enfin à gicler au visage de ses contempteurs 53. Elle
interdit elle-même l’approche de son centre, oblige à de longs détours, voire à des échasses.

Ce n’est peut-être pas qu’elle soit inhospitalière ou jalouse; car, privée d’affection, si vous lui faites la moindre
avance, elle s’attache à vous.

Chienne de boue, qui agrippe mes chausses et qui me saute aux yeux d’un élan importun ! […]

Questions Texte 5

a. Quels reproches, habituellement faits à la boue, le poète rappelle-t-il ?


b. Quelle place l’humour occupe-t-il dans ce poème ? Justifiez votre réponse.
c. Cherchez la définition de l’ode (cf. FT Le vocabulaire et les notions propres à la poésie). Dans quelle
mesure le titre du poème vous semble-t-il correspondre à cette définition ?
d. Langue : quelle est la nature grammaticale du mot « desquelles » (ligne 15) ? Justifiez son accord.

41
La méprise, la condamne.
42
Limoneux : qui contient ou transporte des débris organiques.
43
Roué : parcouru par les roues, qui a subi le supplice de la roue. Par analogie : brisé de douleur et de fatigue.
44
Sarcelle : oiseau des marais.
45
Gué : endroit peu profond d’un cours d’eau.
46
Opiniâtre : têtue.
47
Amène : charmant.
48
Sente : petit chemin.
49
Poudrée : couvert de poussière.
50
Fleur du sol : poudre.
51
Plasticienne : artistique.
52
Alerte : prompte, rapide.
53
Contempteurs : personnes qui critiquent.
6. « La Limace », extrait de Battre la campagne de Raymond Queneau (1968).

Dans Battre la campagne, Raymond Queneau évoque avec humour les transformations du monde rural
à l’ère de l’industrialisation. Il évite la nostalgie du passé autant que la célébration du progrès technique.

La Limace

Limace pure et sans tache


dont la bave trace dans le dédale54 des bourraches55
son espace tout en surface
limace vorace dont la fringale56
ravage la salade automnale
limace âme sagace57
semblable aux sargasses58 humaines
limace brave qui perpétue ta race
vivace malgré la haine du campagnard
limace trisyllabe limace méconnue
il faut te donner un peu d’affection
pour que tu continues paisiblement ton chemin
et que sur ta face s’efface la trace de ton angoisse
et celle de ta bave aussi
sur les soucis

Questions Texte 6.

a. Identifiez la forme poétique utilisée.


b. Montrez que le poème mêle deux points de vue. Quel point de vue le poète semble-t-il partager ?
c. En vous appuyant sur les sonorités du poème et en particulier sur le vers 10, montrez que le poète joue
avec le langage.
d. Sur quel jeu de mots le poème se conclut-il ?
e. Langue : quelle est la nature de la proposition « qui perpétue ta race / vivace malgré la haine du
campagnard » (vers 8-9) ? En quoi cette proposition justifie-t-elle l’emploi, par le poète, de l’adjectif
« brave » pour qualifier la limace ?

Questions de synthèse sur l’ensemble des textes du corpus

a. Après avoir lu l’ensemble des poèmes, faites une synthèse des images et éléments surprenants que les
poètes ont convoqués et décrits. En quoi permettent-ils de voir autrement le monde qui nous entoure ?

b. Araignée, poux, limace ; pourquoi l’animal est-il l’objet d’une telle attention de la part des poètes
selon vous ? Après avoir répondu à cette question, vous ferez un relevé efficace des animaux
emblématiques du recueil des Fleurs du mal et préciserez leur fonction. Enfin, vous direz dans quelle
mesure les figures animales convoquées dans d’autres recueils de poésie sont eux-aussi symboliques (cf.
le pélican dans l’œuvre de Musset, le rossignol dans les Poèmes saturniens de Verlaine, le hibou dans Le
Bestiaire ou Cortège d’Orphée d’Apollinaire, par exemple).

54
Dédale : labyrinthe.
55
Bourraches : plantes à fleurs bleues.
56
Fringale : faim (fam.).
57
Sagace : qui fait preuve de finesse d’esprit.
58
Sargasses : algues brunes flottantes.

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