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DÉBATS • GUADELOUPE
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Livre. Un demi-siècle plus tard, on ignore encore le nombre de morts. Huit, Daté du samedi 16 décembre
officiellement. Quelques dizaines, vraisemblablement. Ce bilan impossible
témoigne de « l’effacement mémoriel » d’un événement occulté de l’histoire
française : la répression mortelle, par les forces de l’ordre, de manifestations à la
Guadeloupe les 26 et 27 mai 1967. Oublié en métropole, Mé 67 reste un
traumatisme profond sur place. Car il s’agit bien d’un « massacre », selon le terme
figurant dans le rapport officiel de l’historien Benjamin Stora. Chargé en 2014 par
le gouvernement d’une mission sur le sujet, il évoque un « massacre (…) ordonné
sciemment sur le terrain et approuvé par le gouvernement sous la présidence du
général de Gaulle ». Massacrer et laisser mourir : le sous-titre de cet essai dirigé par
la philosophe Elsa Dorlin contient aussi une référence à la formule « faire vivre et
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laisser mourir » qui résume le concept de biopouvoir de Michel Foucault,
signalant l’ambition à la fois historique et conceptuelle de ce court mais dense
Lire les éditions précédentes
ouvrage, analysant la politique de maintien de l’ordre.
Le chercheur reconstitue la trajectoire saisissante qui, des colonies à la Seine- 1 Guy Marchand, acteur et
musicien, est mort
Saint-Denis dont il fut le premier préfet, permet de saisir à travers sa carrière les
circulations « de la doctrine française de guerre antisubversive, depuis son
élaboration en Indochine, à travers son industrialisation en Algérie, son influence à
La Réunion, son déploiement contre les révoltes de mai 1967 en Guadeloupe et enfin
2 En direct, Israël-Hamas : le
conseiller à la sécurité
dans la genèse de l’ordre sécuritaire en Seine-Saint-Denis au début des années nationale de la Maison
Blanche estime qu’il ne serait
1970 ». Une correspondance directe est ainsi établie entre les prototypes de
pas « juste » qu’Israël occupe
« commandos de police » impulsés par le préfet Bolotte pour « pacifier » l’Algérie la bande de Gaza à long terme
des années 1950 et la toute première brigade anticriminalité (BAC), créée en
Seine-Saint-Denis sous son action, en 1971. Ce « schéma de guerre policière » forgé
dans un contexte colonial s’insère, selon la troisième contribution signée par Elsa
3 En direct, guerre en Ukraine :
Kiev demande le déblocage de
Dorlin, dans un dispositif plus vaste de « gouvernementalité impériale contre
l’aide européenne en janvier
l’unité caribéenne ».
« Guadeloupe, mai 67. Massacrer et laisser mourir », sous la direction d’Elsa Dorlin, Libertalia, 160 pages,
10 euros.
Youness Bousenna
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