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Traumatologie en pratique sportive

Yves Catonné
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Dans la même collection


Suivi biologique du sportif, Mesures biologiques, pathologies, passeport biologique de l’athlète, géno-
mique, de G. Dine et P. Laure, 336 pages, 2018.
Nutrition du sportif, 3e édition, de X. Bigard, C.-Y. Guezennec, 304 pages, 2017.
Dopage, Comprendre et prévenir, de O. Coste, K. Noger, P. Liotard et A. Andrieu, 336 pages, 2017.
Médecine de montagne, Alpinisme et sports de montagne, 5e édition, de J.-P. Richalet et J.-P. Herry,
384 pages, 2017.
Les bases physiologiques du sport, 64 concepts clés, de V. Klissouras, O. Klissouras, A. Klissouras
et P. Jenoure, 208 pages, 2017.
Prescription des activités physiques, En prévention et en thérapeutique, 2e édition, de F. Depiesse
et O. Coste, 544 pages, 2016.
Guide d’isocinétisme, de P. Edouard et F. Degache, 352 pages, 2016.
Musculation : épidémiologie et prévention des blessures, de I. Prothoy et S. Pelloux-Prayer, 264 pages,
2015.
Rééducation en traumatologie du sport. Tome 1, Membre supérieur. Muscles et tendons, de J.-C.
Chanussot et R.-G. Danowski, 352 pages, 2005.
Rééducation en traumatologie du sport. Tome 1, Membre inférieur et rachis, de J.-C. Chanussot
et R.-G. Danowski, 448 pages, 2005.

Autres ouvrages :
Anatomy Trains, Les méridiens myofasciaux en thérapie manuelle, de T. W. Myers, 344 pages, 2018.
Manuel de palpation osseuse et musculaire, Points gâchettes, zones de projection et étirements,
2e édition, de J. E. Muscolino, 568 pages, 2018.
Mésothérapie : place en traumatologie et rhumatologie, de J. le Coz, 256 pages, 2020.
Traumatologie en pratique
sportive

Yves Catonné
Professeur des universités, ancien chef de service de chirurgie orthopédique,
hôpital Pitié-Salpêtrière, université Paris-Sorbonne.

Frédéric Khiami
Professeur des universités, hôpital Pitié-Salpêtrière, université Paris-Sorbonne.

Frédéric Depiesse
Praticien hospitalier spécialiste de médecine physique et réadaptation, médecin du sport.
Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France

Traumatologie en pratique sportive d’Yves Catonné, Frédéric Khiami et Frédéric Depiesse.


© 2021 Elsevier Masson SAS
ISBN : 978-2-294-76819-4
e-ISBN : 978-2-294-76860-6
Tous droits réservés.

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concordent avec la pratique de la communauté médicale. Elles peuvent, dans certains cas particuliers, différer des normes définies
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Chapitre 5 Vidéo 6.6


Ressaut biceps fémoral clinique. © Y. Catonné
Vidéo 5.1
Échographie dynamique d’un ressaut antérieur de hanche. Vidéo 6.7
Ressaut biceps échographie dynamique. © J.-L. Brasseur.

Chapitre 6 Vidéo 6.8


Friction biceps vue per-opératoire. © A. Wajsfisz, J. Amzallag.
Vidéo 6.1
Rupture du LCP. Tiroir postérieur. Chapitre 7
Vidéo 6.2 Vidéo 7.1
Auto-réduction du tiroir postérieur. Augmentation de la flexion dorsale.

Vidéo 6.3 Vidéo 7.2


Testing d’une triade antéro-externe. Signe de Thompson.

Vidéo 6.4 Vidéo 7.3


Instabilité fémoro patellaire. © F. Khiami. Luxation des tendons fibulaires.

Vidéo 6.5
Syndrome essuie-glace recoupé flexion. © J.-L. Brasseur.
Liste des collaborateurs

Éric Abehsera, Chirurgie orthopédique, Clinique Léo Borrini, Médecine physique et réadaptation,
du Sport – Paris Rééducation fonctionnelle et Traumatologie du
Marine Ankri, Chirurgie orthopédique, Hôpital Sport, Hôpital d’instruction des armées de
Pitié Salpêtrière, Sorbonne Université Percy, Clamart
Ahlam Arnaout, Chirurgie orthopédique, Hôpi- Nicolas Bouscaren, Fédération française de ski,
tal Armand-Trousseau, Sorbonne Université, Annecy
AP-HP, International Wrist center Clinique Bizet Jean-Louis Brasseur, Radiologie, Hôpital Pitié-
Paris Salpêtrière, Sorbonne Université, Paris
Julie Attye, Fédération française de ski, Annecy Arthur Brulé, Fédération française de ski, Annecy
Manon Bachy-Razzouk, Chirurgie orthopédique Stéphane Bulle, Fédération française de ski,
pédiatrique, Hôpital Armand-Trousseau, Sor- Annecy
bonne Université, AP-HP, Paris
Adeline Cambon-Binder, Chirurgie orthopé-
Olivier Barbier, Chirurgie orthopédique, Profes- dique, Maître de conférences des universités –
seur des Armées, Hôpital Sainte-Anne, Toulon Praticien hospitalier, Hôpital Saint-Antoine,
Nicolas Barizien, Médecine physique et réadapta- Sorbonne Université, Paris
tion, Hôpital Foch, Suresnes
Yves Catonné, Chirurgie orthopédique, Profes-
Cyril Barthomeuf, Fédération Française de Ski, seur des universités, Hôpital Pitié-Salpêtrière,
Annecy Sorbonne Université, Paris
Wael Bayoud, Chirurgie orthopédique, Hôpital Vincent Chassaing, Chirurgie orthopédique,
Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, Paris Hôpital privé d’Antony
Sylvie Besch, Médecine physique et réadaptation, Jean-François Chermann, Neurologue, Ancien
rééducation fonctionnelle et traumatologie du
interne et ancien chef de clinique assistant des
sport, Hôpitaux de Saint-Maurice
hôpitaux de Paris, attaché à l’hôpital européen
Pierre Billard, Médecine du sport, Médecin fédé- Georges-Pompidou, attaché à l’Institut natio-
ral national FFGym, Président de la commis- nal psychiatrique Marcel Rivière, DEA neuro­
sion médicale en charge de la SMR, Praticien sciences université Paris-VIII, Paris
hospitalier urgences, Paris
Camille Choufani, Chirurgie orthopédique,
Nicolas Bocahut, Chirurgie orthopédique, Hôpi- Hôpital Sainte-Anne, Toulon
tal Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, Paris
Jean-Baptiste Courroy, Médecine du sport, Ins-
Yoann Bohu, Chirurgie orthopédique, Clinique
titut de l’Appareil Locomoteur Nollet, Paris
du Sport, Paris
Raphaël Bonaccorsi, Chirurgie orthopédique, Michel Crema, Radiologie, INSEP, Paris
Praticien hospitalier, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Romain Dayan, Chirurgie orthopédique, Hôpital
Sorbonne Université, Paris Pitié-Salpétrière, Sorbonne Université, Paris
XIV Liste des collaborateurs

Stéphane De Jésus, Fédération française de ski, Sophie Gleizes Cervera, Pôle Occitanie de hand-
Annecy ball, Medipôle, Toulouse
Jacques de Lecluse, Médecine du sport, médecine Mathilde Gras, Chirurgie orthopédique, Institut
physique et réadaptation, Institut de l’Appareil de l’Appareil Locomoteur Nollet, Paris
Locomoteur Nollet, Paris Olivier Grimaud, Chirurgie orthopédique, Cli-
Frédéric Depiesse, Médecine du sport, médecine nique du sport, Paris
physique et réadaptation, Ancien président
Henri Guerini, Radiologie, Centre d’imagerie
de la commission médicale nationale de la
Léonard de Vinci, Paris
FFA, Ex-membre European Athletics et World
Athletics, Praticien Hospitalier en disponibilité, Alice Guyon, Fédération française de ski, Annecy
médecin, Clinalliance Villers-sur-Orge , Institut Alexandre Hardy, Chirurgie orthopédique, Cli-
Mutualiste de Montsouris Paris nique du sport, Paris
Jules Descamps, Chirurgie orthopédique, Hôpital Serge Herman, Chirurgie orthopédique, Clinique
Bichat, AP-HP, Paris du sport, Paris
Flore Devriese, Chirurgie orthopédique, Hôpital Olivia Judet, Radiologie, Clinique Jouvenet, Paris
Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, Paris
Thierry Judet, Chirurgie orthopédique, Profes-
Pascal Edouard, Médecine physique et réadapta- seur des universités, Clinique Jouvenet, Paris
tion, Professeur des universités de Physiologie,
Praticien Hospitalier en médecine physique et Gérard Juin, Médecin des équipes de France,
réadaptation, Hôpital Nord, CHU, Saint-Étienne Directeur médical national de la Fédération
française de handball, Gentilly
Gauthier Eloy, Chirurgie orthopédique, Hôpital
Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, Paris Frédéric Khiami, Chirurgie orthopédique et trau-
matologie du sport, Professeur des universités,
Marc-Antoine Ettori, Chirurgie orthopédique,
Hôpital Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université,
Institut de l’Appareil Locomoteur Nollet, Cli-
Paris
nique Maussins-Nollet, Paris
Jean-Marie Fayard, Fédération française de ski, Shahnaz Klouche, Chirurgie orthopédique, Cli-
Annecy nique du sport, Paris
Benjamin Ferembach, Chirurgie orthopédique, Yohann Knafo, Chirurgie orthopédique, Hôpital
CHRU Trousseau, Chambray-lès-Tours Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, Paris
Olivier Fichez, Rhumatologie, Médecine du sport, Fabien Koskas, Chirurgie vasculaire, Professeur des
Saint-Raphaël universités, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Sorbonne
Frank Fitoussi, Chirurgie orthopédique pédia- Université, Paris
trique, Professeur des universités, Hôpital Romain Laurent, Chirurgie orthopédique, Hôpi-
Armand-Trousseau, Sorbonne Université, tal Armand-Trousseau, Sorbonne Université,
AP-HP, Paris AP-HP, Paris
Didier Fontes, Chirurgie orthopédique, Clinique Nicolas Lefevre, Chirurgie orthopédique, Clinique
du sport, Paris du sport, Paris
Alain Frey, Médecine du sport, CHU Poissy/ Franck Le Gall, Médecin de l’équipe de France de
Saint-Germain, Poissy football, Médecin de l’Olympique de Marseille,
Antoine Gerometta, Chirurgie orthopédique, D, Centre national de Football, Clairefontaine-
Clinique du sport, Paris en-Yvelines
Liste des collaborateurs XV

Dominique Le Viet, Chirurgie orthopédique, Mireille Peyre, Médecine physique et réadapta-


Professeur, Clinique Jouvenet, Paris tion, Hôpitaux de Saint-Maurice
Jacky Maillot, Directeur médical de l’équipe Jérôme Renoux, Radiologie, INSEP, Paris
cycliste professionnelle Groupama FDJ, Direc- Jacques Rodineau, Médecine du sport, Médecine
teur pôle médical fédéral FFC, Montigny Le physique et réadaptation, Professeur, Paris
Bretonneux
Éric Rolland, Chirurgie orthopédique, Ancien
Laura Marie-Hardy, Chirurgie orthopédique, médecin du PSG, Hôpital Pitié-Salpêtrière,
Hôpital Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, Sorbonne Université, Paris
Paris
Romain Rousseau, Chirurgie orthopédique, Ins-
Olivier Matarese, Fédération Française de Ski, titut de l’Appareil Locomoteur Nollet, INSEP,
Annecy Paris
Christophe Mathoulin, Chirurgie orthopédique, Marie-Philippe Rousseaux-Blanchi, Fédération
Professeur, International Wrist Center, Cli- française de ski, Annecy
nique Bizet, Paris
Marc Rozenblat, Médecine du sport, Ozoir-
Éric Meinadier, Directeur pôle médical fédéral la-Ferrière
FFC, Montigny-le-Bretonneux
Pascale Saliba, Fédération française de ski, Annecy
Lorenzo Merlini, Chirurgie orthopédique, Inter-
Elhadi Sariali, Chirurgie orthopédique, Profes-
national Wrist Center, Clinique Bizet, Paris
seur des universités, Hôpital Pitié-Salpêtrière,
Alain Meyer, Chirurgie orthopédique, Clinique Sorbonne Université, Paris
du sport, Paris
Bertrand Tamalet, Médecine du sport, FIFA
Bernard Montalvan, Médecine du sport, Fédéra- Medical Centre of Excellence – Centre Natio-
tion française de Tennis, Paris nal du Football, Clairefontaine
Gérard Morvan, Radiologie, Centre d’imagerie Laurent Thomsen, Chirurgie orthopédique, Cli-
Léonard de Vinci, Paris nique Drouot, Paris
Thông Nguyen, Chirurgie plastique et recons- Idriss Tourabaly, Chirurgie orthopédique, Cli-
tructrice, Maître de conférences des Universi- nique des Maussins, Paris
tés, Université Paris-Descartes, Paris
Arabelle Vanderzwalm, Odontologie, Chirurgien-
Emmanuel Orhant, Médecine et traumatologie dentiste, Maître de conférence des universités,
du sport, Centre national du football, Centre Membre de la Commission médicale nationale
médical sportif de Clairefontaine, FFF, Claire- de fédération française du sport universitaire,
fontaine-en-Yvelines Université Paris-Descartes, Clinique Drouot,
Jacques Parier, Rhumatologie, Médecine phy- Paris
sique, Fédération française tennis, Paris Gilbert Versier, Chirurgie orthopédique, Profes-
Hugues Pascal-Moussellard, Chirurgie orthopé- seur des armées, Clinique Drouot, Paris
dique, Chef de service, Professeur des uni- Raphaël Vialle, Chirurgie orthopédique pédia-
versités, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Sorbonne trique, Professeur des universités, Hôpital
Université, Paris Armand-Trousseau, Sorbonne Université,
David Petrover, Radiologie, Hôpital Lariboisière, AP-HP, Paris
Clinique Drouot, Paris
Préface

La traumatologie du sport constitue un domaine pour ne pas le nommer) avait rappelé l’excep-
en pleine expansion et dont la prise en charge tionnelle compétence dans la revue « Maitrise
doit être pluridisciplinaire. C’est de plus en plus Orthopédique » dont le Directeur de la publica-
évident et nécessaire. tion n’était – et n’est toujours- que l’autre auteur
La traumatologie du sport se situe à un véri- de cette préface : Gérard Saillant pour le nom-
table carrefour de la médecine, de l’imagerie et de mer. De cet entretien on peut rappeler quelques
la chirurgie, où se rejoignent – et se confrontent termes : « O.Troisier, c’était le grand prêtre de la
parfois – les idées de chacun sur l’importance du médecine orthopédique ... Passionné de l’examen
bilan clinique, les critères de choix de l’imagerie clinique, l’esprit toujours en éveil, l’idée nouvelle
et la recherche de la stratégie thérapeutique la sans cesse renouvelée, il (m’) a donné un goût
plus efficace qu’elle soit médicale ou chirurgicale. extrême pour cette façon d’appréhender le pro-
Confrontés aux mêmes problèmes de recherche blème posé par un patient qui « repose sur des
d’un diagnostic précoce et précis et d’un traite- principes bien établis par Cyriax » . Ce James H
ment efficace, se retrouvent côte à côte le “clan Cyriax, sujet britannique, au départ chirurgien
des cliniciens” regroupant : médecins du sport, orthopédique au St. Thomas’Hospital de Londres
médecins de Médecine Physique, rhumatologues, fut le véritable père de la médecine orthopédique
chirurgiens orthopédistes généralistes ou parfois et l’auteur du Textbook of Orthopaedic Medicine ,
spécialisés dans telle ou telle pathologie : épaule, ouvrage d’une richesse incommensurable et qui
coude, poignet et main, bassin, articulation coxo- pourtant demeure méconnu, en particulier de
fémorale, genoux, cheville, pied, rachis ; mais nombreux praticiens français. Cyriax était parti
aussi chirurgiens viscéraux, vasculaires et parfois de quasiment rien à une époque où n’existait
neuro-chirurgiens et le “clan des imageurs” dis- aucun traité et pratiquement aucune publication
posant de moyens diagnostiques allant du clas- sur le sujet. Au terme d’un énorme travail, il fut
sique bilan radiographique aux technologies le premier au monde à entreprendre une étude
modernes : l’échographie en perpétuel dévelop- systématique et approfondie des affections des
pement, la tomodensitométrie aux rayons X et tissus mous de l’appareil locomoteur, réussissant à
l’arthroscanner toujours bien implantés, l’IRM développer au fil des ans un système de diagnostic
et l’arthro-IRM et leur formidable potentiel de dans lequel les pathologies sont cataloguées selon
développement, sans oublier la scintigraphie leur image clinique et proposant des solutions
pour qu’un traitement spécifique soit appliqué
à chacune d’entre elles. Son credo fut, tout au
Pour les cliniciens long de ce labeur, le suivant : « toute douleur
nait d’une lésion, tout traitement doit atteindre
La prise en charge du blessé doit toujours reposer la lésion et tout traitement doit exercer un effet
« sur une triple démarche intellectuelle » telle bénéfique sur la lésion. » Ce qui peut se résumer
que l’avait magistralement montré le maitre de la par ces mots : tout traitement doit être fondé sur
« Médecine orthopédique » en France : Olivier un diagnostic lésionnel précis. C’est la grande
Troisier dont l’un d’entre nous (Jacques Rodineau leçon qu’a su si bien transmettre O.Troisier :
XVIII Préface

ne pas « soigner » une épaule douloureuse ou un La nécessité d’un examen clinique « consis-
coude douloureux ou un genou douloureux mais tant », programmé, s’impose donc dans tous les
avant tout traitement établir un diagnostic précis cas. Il conduit à rechercher des signes cliniques
par une triple démarche : pathologiques au cours de différentes séquences
– ANALYSER les symptômes dont le patient se dont chacune a une signification particulière :
plaint. Cette analyse peut et doit suggérer aux – l’inspection ;
praticiens un certain nombre de diagnostics – la mobilité active ;
possibles ; – la mobilité passive ;
– RECHERCHER des signes physiques qui, par – les tests musculo-tendineux réalisés en isomé-
leur regroupement et leur concordance avec trique contre résistance ;
les symptômes recueillis lors de l’interrogatoire, – la recherche de signes de laxité et de signes de
permettent d’affiner les probabilités diagnos- coincement ;
tiques ; – la palpation qui, pratiquée seulement en fin
– FAIRE CORRELER, dans le domaine des d’examen, permet d’une part de confirmer tout
patho­logies organiques, l’ensemble de ces don- ce que l’examen préalable a permis de suspecter
nées anamnésiques et cliniques avec une ou des et d’autre part de mettre le doigt- au vrai sens
lésions connues et reconnues comme potentielle­ du mot à la condition que la structure lésée
ment responsables d’une telle symptomatologie soit accessible au toucher- sur la lésion qu’elle
et d’une sémiologie clinique comparable. soit osseuse, capsulo-ligamentaire, tendineuse
« Cliniciens avant tout » telle pourrait être le ou musculaire.
positionnement, les principes de ces médecins et Les clés d’un diagnostic clinique précis ne
chirurgiens qui, comme nous, n’ont jamais conçus peuvent se concevoir que de la façon suivante :
que l’on puisse se priver d’un interrogatoire et d’un – une véritable connaissance de l’anatomie fonc-
examen physique des plus rigoureux avant d’évo- tionnelle et topographique pour être capable de
quer un diagnostic que viendront obligatoire­ment traduire les données cliniques en lésions anato-
confirmer ou infirmer des examens complémen- miques et appliquer par la suite un traitement
taires guidés. adapté véritablement à la structure lésée ;
Dans le domaine des pathologies ostéo- – une évaluation standardisée et reproductible pas-
articulaires, traumatiques ou microtraumatiques, sant en revue toutes les structures susceptibles
liées aux activités sportives, de nombreux élé- de « faire souffrir » ce qui nécessite de solides
ments anatomiques peuvent être concernés : notions de la physiopathologie, des différents
– le squelette osseux car le périoste et les vais- caractères, de l’évolution normale de la lésion
seaux intra-osseux sont riches en terminaisons qu’on est susceptible d’avoir diagnostiquée
nerveuses appartenant au système nociceptif ; Ces clés qui excluent tout examen clinique
– les cartilages au niveau desquels le mécanisme incomplet et, dans la mesure du possible, tout
de la douleur est complexe, mais sans doute diagnostic clinique imprécis pourrait donc tenir en
plus indirect que direct ; quelques mots mais elles exigent des praticiens :
– les membranes synoviales en relation avec la rigueur dans la démarche clinique et aussi humilité
distension que l’excès de synovie entraine au en acceptant qu’à chaque consultation, le praticien
niveau des gaines et des capsules ; s’avoue qu’il ne sait encore pas tout de la raison
– les ligaments, riches en terminaisons nocicep- pour laquelle le patient le consulte et qu’il n’est
tives, ils déclenchent des douleurs lors de leur jamais -ou presque- à l’abri d’une erreur.
mise en tension passive ;
– les tendons dont les mécanismes susceptibles de Pour les imageurs
déclencher des douleurs sont plusieurs : la mise
en tension active, la mise en tension passive La radiographie standard demeure un outil
et la compression (l’impingement des Anglo- diagnostique incontournable dans l’évaluation
saxons). de nombre des traumatismes liés à la pratique
Préface XIX

sportive, qu’il s’agisse d’une luxation ou d’une toutes les anomalies de la moelle osseuse, offrant
entorse. Elle est aisément et rapidement acces- des renseignements incomparables sur la présence
sible. Elle est économique. En des mains compé- de contusions plus ou moins banales mais aussi
tentes, elle fournit aux cliniciens un nombre de fractures occultes. Elle renseigne sur l’état des
considérable de renseignements. Toutefois, toutes ménisques et des cartilages, des ligaments et des
les fractures ne peuvent pas être diagnostiquées tendons, de la synoviale. L’adjonction d’un pro-
aux Rayons-X, toutes les luxations ne peuvent duit de contraste permet l’analyse fine de certaines
pas bénéficier des incidences nécessaires à les lésions comme une lésion ou une déchirure du
confirmer, toutes les entorses ne s’accompagnent labrum de l’épaule ou de la hanche, la rupture
pas de signes radiographiques formels. d’un ligament collatéral ou des brides synoviales
L’émergence de nouvelles technologies permet au coude, une lésion ligamentaire intracarpienne
d’affirmer le diagnostic lorsque les clichés standard au niveau du poignet, des franges synoviales au
ne peuvent pas expliquer la symptomatologie. niveau de la cheville. Son efficacité est nettement
La tomodensitométrie montre parfaitement majorée lorsque le clinicien prend l’habitude de
certaines fractures comme celles des petits os fournir à l’imageur des renseignements précis – et
du carpe (hamulus de l’hamatum) ou du pied si possible pertinents – sur la lésion qu’il suspecte.
(apophyse latérale du talus). Elle permet facile- Cette façon de procéder permet à l’imageur de
ment la mise en évidence de certaines luxations mieux choisir les paramètres qu’il utilisera comme,
comme la luxation postérieure de l’épaule, parfois par exemple, le plan et l’épaisseur des coupes ainsi
difficile à diagnostiquer sur des clichés standard. que les dimensions du champ.
Les nouvelles générations de tomodensitométrie L’arthro-IRM est largement répandue aux
autorisent une grande rapidité d’acquisition des Etats-Unis et semble y constituer actuellement
images. Au prix d’une moindre irradiation des l’imagerie de référence. En France, son utilisation
patients, elles permettent une remarquable éva- est nettement moins développée bien qu’elle soit
luation de la totalité des structures de l’appareil censée améliorer la qualité des images IRM grâce
locomoteur. Les appareils multibarettes assurent au remplissage de l’articulation, à l’amélioration
des reconstructions de grande qualité et permet- de la résolution spatiale, à la diminution des arté-
tent la réalisation d’images multiplanaires en 3D facts. C’est le cas pour l’épaule où sa résolution
d’une remarquable définition. anatomique parait supérieure à celle de l’arthro­
En combinaison avec l’arthrographie, la tomo­ scanner. C’est le cas aussi pour la hanche et le
densitométrie est un remarquable examen. L’ar­thro­ genou à la différence de la cheville où l’arthro­
scanner (arthro-TDM) est surtout utilisé pour scanner conserve une meilleure résolution.
rechercher une origine à des douleurs articulaires, L’échographie est une technique rapide, peu
tout particulièrement lorsque ces dernières sont coûteuse et totalement inoffensive. Elle analyse
persistantes et demeurent inexpliquées. C’est le finement, en statique et en dynamique, l’état des
cas notamment pour l’épaule lors de la recherche ligaments (depuis la simple distension jusqu’à
d’une rupture tendineuse, en particulier des ten- la rupture ou la désinsertion, notamment au
dons de la coiffe, mais aussi dans un contexte niveau du cou-de-pied) et des tendons (depuis le
d’épaule douloureuse et instable (EDI). C’est le banal épaississement jusqu’à la rupture partielle
cas également dans la recherche de lésions ostéo- ou totale, notamment pour les tendons de la
chondrales du dôme du talus (LODA). coiffe des rotateurs). Elle note la présence de
L’IRM connaît un essor considérable depuis une lésions bursales et l’importance des épanchements
vingtaine d’années. De nos jours, elle est devenue intra-articulaires. Elle détecte certains corps
indispensable pour explorer les très nombreuses étrangers intra-articulaires qui apparaissent avec
pathologies observées chez des sportifs à l’occa- un cône d’ombre variable selon leur nature et leur
sion d’un accident brutal, de microtraumatismes volume, ainsi que les granulomes chondromateux.
répétés ou simplement d’une surutilisation (over­ Toutefois elle nécessite une très bonne connais-
use des anglo-saxons). Elle est capable d’identifier sance de l’anatomie dans des plans orthogonaux.
XX Préface

Elle demande aussi un matériel sophistiqué et activités sportives. A la condition toutefois que
coûteux. En revanche, son évaluation de l’état des l’on s’adresse à des praticiens compétents dans
structures osseuses est loin d’être aussi pertinente l’anatomie, la physiologie, l’anatomopathologie,
que celle obtenue par la tomodensitométrie ou la physiopathologie, l’évaluation clinique, la perti-
l’IRM dont elle n’a pas la résolution anatomique. nence de l’imagerie de ces lésions potentiellement
La scintigraphie osseuse aux disphosphonates liées aux activités sportives.
marqués au technécium 99m constitue un bon Dans la prise en charge de ces lésions, deux
examen de repérage d’une anomalie osseuse en grands types de pathologie doivent être bien dis-
permettant sans préparation l’exploration du tinguées sur le plan thérapeutique : les lésions
squelette et des articulations. En traumatologie aiguës qui conduisent à une prise en charge qui ne
du sport, grâce à la mise en évidence de zones s’éloigne pas obligatoirement de celle de toutes
où le renouvellement de l’os est excessif et trop les lésions aigües de l’appareil locomoteur, mais
rapide, elle conserve un intérêt, en particulier peuvent s’en différencier dans certains cas comme
pour déceler une fracture de fatigue bien que, de une première luxation de l’épaule, une fracture du
nos jours, elle soit de moins en moins utilisée car scaphoïde, une rupture du LCA, etc. et les lésions
l’IRM lui est souvent préférée. chroniques d’hyperutilisation, les lésions d’over­
Lorsqu’elle est réalisée, elle est souvent fusionnée use des Anglo-saxons, qui peuvent présenter des
avec la tomodensitométrie : c’est le SPECT-CT particularités thérapeutiques en fonction des dif-
(Single Photon Emission Computed Tomography) férentes activités sportives, de l’âge et du niveau
qui permet de localiser avec plus de précision les de pratique pour ne citer que celles qui sont
lésions anatomiques. spécifiques des activités sportives. C’est le cas de
Au total, toutes les techniques d’imagerie consti- certaines tendinopathies des membres supérieurs
tuent un atout majeur dans l’analyse des lésions. A et des membres inférieurs, de plusieurs syndromes
nous “cliniciens” de savoir faire des demandes canalaires, de quelques fractures de fatigue.
justifiées, guidées par nos constatations cliniques, L’étude approfondie et pertinente du traite-
en raisonnant toujours dans l’intérêt (à tous les ment de ces deux catégories de lésions, aigües
sens du mot) des patients. A vous “imageurs poly- et chroniques, en fonction d’une part, des diffé-
valents” de nous fournir les meilleurs documents rentes localisations et d’autre part des pratiques
possibles, de choisir rationnellement les incidences sportives ainsi que des motivations, de l’âge et
les plus conformes au but recherché, et d’éviter du niveau des sportifs blessés est largement déve-
la multiplication des techniques d’imagerie sous loppée dans cet ouvrage par une véritable kyriade
prétexte que les images demandées n’ont pas d’auteurs de grande notoriété.
permis d’aboutir à un diagnostic lésionnel précis. Au total, parvenir à une présentation didac-
tique et claire de l’examen clinique, des examens
complémentaires, en particulier iconographiques,
Sur le plan thérapeutique du diagnostic, du traitement des pathologies de
Nul domaine de la médecine au sens large du l’appareil locomoteur liées aux activités sportives
mot ne rapproche autant spécialistes de méde- a été l’objectif de tous les auteurs de cet ouvrage.
cine physique et chirurgiens orthopédiques que Qu’ils en soient sincèrement remerciés.
la prise en charge des traumatismes liés à des Jacques RODINEAU et Gérard SAILLANT
Prologue

L’enseignement de la traumatologie du sport de la Pitié-Salpétrière. Nous avons par ailleurs laissé


est relativement récent. Ceux qui ont fait leurs volontairement de côté les sujets de traumatologie
études médicales avant 1980 peuvent témoigner qui, tout en pouvant survenir éventuellement en
de l’absence quasi complète d’enseignement orga- pratique sportive, ne présentent pas de particu-
nisé, consacré à cette spécialité, pendant leurs larités par rapport à la traumatologie courante
études universitaires. Pourtant déjà certaines per- habituellement enseignée. Ainsi les sujets de trau-
sonnalités du monde médical s’étaient intéressées matologie routière (fractures du cotyle, fractures
à la pathologie sportive et avaient publié dans ce fémorales et tibiales en dehors des fractures de
domaine. Ainsi en France, parmi les chirurgiens, fatigue) et des fractures du sujet âgé (col fémoral,
Albert Trillat (puis toute l’école lyonnaise) et par exemple) ont-ils été volontairement écartés. La
Roger Lemaire font, parmi d’autres, figures de traumatologie du sport peut-être également envi-
précurseurs. Jacques Rodineau fut le premier, dès sagée de façon différente selon le terrain sur lequel
1978, à créer un diplôme d’Université (DU) de elle survient : ainsi la pathologie traumatique de
traumatologie du sport (à la Pitié-Salpétrière), l’enfant sportif fait-elle l’objet d’un chapitre à part.
bientôt rejoint en 1980 par Gérard Saillant. Ils Le niveau sportif doit également être évoqué : un
ont ensemble développé l’enseignement de cette professionnel sera parfois traité, pour des raisons
spécialité, rapidement rejoints par d’autres DU économiques en particulier, de façon différente
dans de nombreuses universités. Cet enseignement d’un sportif de loisir. Nous avons demandé aux dif-
a la particularité de concerner différentes spéciali- férents auteurs de tenir compte de ces différences.
tés : médecine du sport, médecine physique et de Enfin, nous avons consacré le dernier chapitre du
réhabilitation, radiologie, chirurgie (orthopédique, livre à une synthèse des principales pathologies
pédiatrique, maxillo-faciale, neuro-chirurgie etc.). rencontrées dans la pratique de certains sports, en
Au cours de ces dernières années, de nombreux faisant appel à des spécialistes reconnus. Il se peut
progrès ont été réalisés dans ces différentes spé- que certains aspects aient été volontairement ou
cialités, aussi bien en ce qui concerne le diagnostic involontairement oubliés ou peu développés selon
clinique, que l’imagerie, le traitement conserva- le choix de l’auteur : n’hésitez pas à nous faire vos
teur et les techniques chirurgicales. Cet ouvrage a remarques sur le site de l’éditeur ou directement
l’ambition de faire le point, en 2020, sur l’ensem- aux coordonnateurs.
ble des connaissances en traumatologie du sport. Nous remercions vivement l’ensemble des col-
Il intéressera les étudiants et les professionnels de laborateurs ayant participé à l’élaboration de cet
santé qui veulent mieux comprendre la pathologie ouvrage collectif.
des sportifs. Pour sa rédaction, nous avons décidé Yves Catonné, Frédéric Khiami, Frédéric Depiesse
d’utiliser le plan général et dans de nombreux cas
les enseignants du DU de Traumatologie du sport
Abréviations
99mTc technétium 99m EMG électromyogramme
ACR arrêt cardiorespiratoire ESSKA European Society of Sports Traumatology
ACSM American College of sports medicine Knee surgery and Arthroscopy
AFLD Agence française de lutte contre EULAR European League Against Rheumatism
le dopage EVA échelle visuelle analogique
AINS anti-inflammatoire non stéroïdien FABER flexion, abduction, rotation externe
AL antérolatéral FADRI flexion, adduction, rotation interne
AMA Agence mondiale antidopage FAST focused assessment with sonography
AOFAS American Orthopaedic Foot & Ankle in trauma
Society FCS fléchisseur commun superficiel
APS aponévrose plantaire superficielle FCP fléchisseur commun profond
ARM angiographie par résonance FCU flexor carpi ulnaris
magnétique FDS flexor digitorum superficialis
ASIA American Spinal Injury Association FF fracture de fatigue
ATF anterior talofibular ligament FFJDA Fédération française de judo, jujitsu,
ATM articulation trapézométacarpien kendo et disciplines associées
AUOC apophyse unciforme de l’os crochu FFR Fédération française de rugby
AUT autorisation d’usage à visée thérapeutique FOG fracture, ostéonécrose, géode
BAVU ballon autoremplisseur à valve FP flexion plantaire
unidirectionnelle FPH fléchisseur propre de l’hallux
BIE bronchospasme induit par l’effort FUC fléchisseur ulnaire du carpe
CACI certificat d’absence de GAC greffe autologue de chondrocytes
contre-indication GAF gymnastique artistique féminine
CEIA corps étranger intra-articulaire GAM gymnastique artistique masculine
CF ligament calcanéofibulaire GIRD glenohumeral internal rotation deficit
CNOM Conseil national de l’ordre des médecins GREC glace, repos, élévation, contention
CPK créatine phosphokinase GT gorge de la trochlée
DAC disjonction acromioclaviculaire HAS Haute Autorité de santé
DASH Disabilities of the Arm, Shoulder HIA head injury assessment
and Hand ICRS International Cartilage Repair Society
DES diplôme d’études spécialisées IKDC International Knee Documentation
DIDT droit interne et du demi-tendineux Committee fonctionnel
DISI dorsal intercalated scapholunate IL interleukine
instability ILMI inégalité de longueur des membres
DIU diplôme interuniversitaire inférieurs
DOMS delayed onset muscle soreness IMC indice de masse corporelle
DU diplôme universitaire IMP instabilité patellaire majeure
ECRB extensor carpi radialis brevis IPD articulation interphalangienne distale
ECU extensor carpi ulnaris IPO instabilité patellaire objective
EDC extensor digitorum communis IPP articulation interphalangienne proximale
EDI épaule douloureuse instable IPP instabilité patellaire potentielle
EIAI épine iliaque antéro-inférieure IRM imagerie par résonance magnétique
EIAS épine iliaque antérosupérieure IRME Institut pour la recherche sur la moelle
EL épicondylite latérale épinière
XXIV Abréviations

ISAKOS International Society of Arthroscopy, PRICE Protection, Rest, Ice, Compression,


Knee Surgery and Orthopaedic Sports Elevation
Medicine PRP plasma riche en plaquettes
KJOC Kerlan-Jobe Orthopaedic Clinic PT pronator teres
LAC ligament acromiocoracoïdien PTC posterior talofibular ligament
LARS ligament advanced reinforcement PTG prothèse totale de genou
system PTH prothèse totale de hanche
LCA ligament croisé antérieur RC résultat de consultation
LCAE ligament croisé antéro-externe RCP responsabilité civile professionnelle
LCL ligament collatéral latéral RE rotation externe
LCM ligament collatéral médial RI rotation interne
LCP ligament croisé postérieur RICE Rest, Ice, Compression, Elevation
LCR ligament collatéral radial SAMU service d’aide médicale d’urgence
LCU ligament collatéral ulnaire SCAT5 Sport Concussion Assessment Tool
LFH long fléchisseur de l’hallux 5thedition
LFP Ligue de football professionnel SDA syndrome douloureux antérieur
LGHI ligament gléno-huméral inférieur SDP syndrome douloureux patellaire
LIMP ligament intermalléolaire postérieur SFA Société française d’arthroscopie
LIO ligament interosseux SFP syndrome fémoropatellaire
LIPUS low intensity pulsed ultra-son SLAC wrist scapholunate advanced collapse
LNR Ligue nationale de rugby SLAP superior labrum from anterior
LODA lésion ostéochondrale du dôme to posterior
de l’astragale SNAC wrist scaphoid nonunion advanced collapse
LTFAI ligament tibiofibulaire antéro-inférieur SNMS Syndicat national de médecine
LTFPI ligament tibiofibulaire du sport
postéro-inférieur SOFCOT Société française de chirurgie
M1, M2… 1er métacarpien, 2e métacarpien… orthopédique et traumatologique
MAVRIC multiacquisition variable-resonance SPE nerf sciatique poplité externe
image combination SPECT/CT single photon emission computed
MCE massage cardiaque externe tomography/computed tomography
MCP métacarpophalangienne STIR short tau inversion recovery
MKDE masseur-kinésithérapeute diplômé TA tubérosité antérieure
d’État TDM tomodensitométrie
MOC myosite ossifiante circonscrite TE temps d’écho
MOCART magnetic resonance observation TEMP tomographie par émission
of cartilage repair tissue monophotonique
MPFL medial patellofemoral ligament TEP tomographie par émission de positons
MTP massage transverse profond TFP tibiofibulaire proximale
NATA National Athletic Trainers’ Association TNF tumor necrosis factor
OATS osteochondral autograft transfer system TOC thérapie par ondes de choc
OMG Observatoire de médecine générale TTA tubérosité tibiale antérieure
OPN os propres du nez UCI Union cycliste internationale
OR odds ratio UEFA Union of European Football
OT os trigone Associations
P1 phalange proximale UNMF Union nationale des médecins fédéraux
P2 phalange moyenne VALFE valgus forcé en légère flexion
PAPI point d’angle postéro-interne et rotation externe
PAPL point d’angle postérolatéral VARFE varus en flexion et rotation neutre
PET positron emission tomography ou externe
PM postéromédial VARFI varus en flexion–rotation interne
POLICE Protection, Optimal loading, Ice, VIH virus de l’immunodéficience humaine
Compression, Elevation WOSI Western Ontario Shoulder Instability
PPLTT processus postérolatéral du talus Index
Chapitre 1
Généralités
1. Examen clinique Douleur
en traumatologie du sport Le site de la douleur permet dans un premier
temps d’évoquer différents diagnostics : dans un
Y. Catonné remarquable ouvrage publié en 1999, Rodineau
a montré cette possibilité à propos de 50 sites
douloureux tout en précisant que « se fonder sur
L’examen clinique a une importance fondamentale la seule localisation des douleurs lors de la descrip-
en traumatologie du sport : avant les années 1980 tion faite par le patient ou sur la simple palpation
et le développement formidable de l’imagerie, il était une aberration pour établir un diagnostic
représentait quasiment le seul outil pour établir lésionnel ».
un diagnostic. La tendance actuelle serait plutôt de Le site indiqué par le patient peut cependant
recourir systématiquement à l’imagerie (scanner, être trompeur et induire en erreur le clinicien.
imagerie par résonance magnétique ou IRM) et
de minimiser le rôle de la clinique. Celle-ci reste
cependant primordiale et permet de déterminer si Mécanisme causal
un examen complémentaire est nécessaire et sur- du traumatisme
tout quelle imagerie choisir.
En pratique sportive, l’examen clinique peut être Quel est le mécanisme causal ?
pratiqué dans deux circonstances bien différentes : • Quel est le traumatisme initial ? Quel est le type
• soit en urgence ou semi-urgence en cas d’un de mouvement ?
traumatisme récent des membres ou du rachis ; • Quel est le mécanisme (choc direct ou méca-
• soit dans le cadre d’une consultation à distance nisme indirect) ?
du traumatisme ou pour des symptômes apparus • Quel est le point d’impact ? Par exemple, chute
en l’absence de tout traumatisme : il peut alors sur le moignon de l’épaule, torsion du genou
s’agir de séquelles d’un accident initial ou de ou de la cheville.
lésions microtraumatiques liées à la répétition • Quelle est l’énergie du traumatisme (haute,
de certains mouvements au cours de l’activité moyenne, faible ou absence de traumatisme) ?
sportive.
La conduite de l’examen sera bien entendu dif- Quels sont les signes
férente selon les circonstances, mais globalement accompagnateurs ?
elle peut être réalisée selon les règles habituelles :
interroger le patient puis l’examiner. • Certains signes sont évocateurs : craquement,
suggérant par exemple une rupture ligamen-
taire, hémarthrose immédiate ou secondaire.
Interrogatoire • D’autres signes ont succédé au traumatisme :
blocage, impression d’instabilité.
Il permet parfois à lui seul de faire un diagnostic. • Quelle est la gêne fonctionnelle après le trau-
La douleur demeure le maître symptôme et il est matisme ? Le sportif a-t-il continué son activité
très important d’en préciser les caractéristiques. sportive ou a-t-il dû l’interrompre ?

Traumatologie en pratique sportive


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2 Traumatologie en pratique sportive

Quelles sont les caractéristiques Examen physique


de la douleur ?
• Quel est le mode de survenue (brutale ou pro- La technique de l’examen physique a beaucoup
gressive) ? progressé au cours des dernières décennies, grâce
• Quel est le rythme (douleur permanente, inter- à l’accumulation progressive des connaissances des
mittente) ? différentes pathologies. On n’examine plus, par
• Quel est le retentissement fonctionnel sur la vie exemple, une articulation comme on le faisait aupa-
de tous les jours (marche, montée d’escaliers, ravant : devant un tableau d’épaule douloureuse,
etc.) ? on pouvait dans le passé terminer un examen avec
• Quel est le retentissement sportif ? Quelles sont un diagnostic de « péri-arthrite de l’épaule », vaste
les conséquences sur l’activité sportive ? fourre-tout dans lequel on regroupait la pathologie
Blazina a proposé une classification pour quan- inflammatoire et microtraumatique autour et dans la
tifier les douleurs dans les tendinopathies (enca- scapulo-humérale. Actuellement, de nombreux tests
dré 1.1). cliniques peuvent déterminer avec précision quel est
le tendon atteint et quel est son degré d’atteinte.
Sport pratiqué et niveau sportif
Il est très important de préciser quel est le sport Inspection
pratiqué par le patient et à quel niveau : est-il un
Elle apporte parfois des renseignements impor-
sportif occasionnel, de loisir, de compétition, de
tants : existence d’une déformation, d’un gonfle­
haut niveau, professionnel ?
ment localisé, d’une ecchymose. Par exemple,
La quantité d’entraînement est également
elle est fondamentale pour l’examen d’une épaule
importante à considérer : nombre de kilomètres
paralytique et permet de différencier une atteinte
parcourus par semaine pour les coureurs à pied
du nerf long thoracique ou du nerf suprascapulaire.
ou les cyclistes, nombre d’entraînements et fré-
Au niveau des membres inférieurs, l’inspection
quence des matchs pour les pratiquants d’un sport
permet de rechercher une anomalie constitution-
d’équipe. On recherche également les change-
nelle dans le plan frontal, sagittal ou rotationnel,
ments éventuels et récents du nombre d’entraîne­
et de faire le diagnostic d’instabilité des fibulaires
ments ou de matériel qui ont pu influencer
ou d’un ressaut du genou.
l’apparition d’une douleur.
Palpation
Encadré 1.1 La palpation des points douloureux permet de
préciser le siège exact de la douleur : sur un frag-
Classification de Blazina ment osseux, une articulation, un tendon.
• Stade 1 – douleurs après le sport, disparais- Les signes sont fonction du siège (épaule, genou)
sant au repos. et de la pathologie : os, articulations, tendinobur-
• Stade 2 – douleurs pendant le sport et à sites.
la fatigue ; il existe souvent un dérouillage
La palpation peut être sensibilisée par une
matinal.
manœuvre : par exemple tests de Noble ou de
• Stade 3 – douleurs persistant plusieurs
Renne pour le diagnostic d’un syndrome de la
jours après l’arrêt du sport, réapparaissant à
la reprise : bandelette iliotibiale.
– 3a – limitant l’entraînement ;
– 3b – gênant la vie quotidienne. Étude des mobilités articulaires
• Stade 4 – douleurs permanentes empê-
Elle concerne tous les types de mobilité :
chant toute activité sportive et gênant les
activités de la vie quotidienne. • mobilité active ;
• mobilité passive ;
Chapitre 1. Généralités 3

• mobilité contre résistance ou mobilité contra- ment remplacé par celui de tendinopathie, plus
riée : sa recherche n’est effectuée que dans extensif.
certaines circonstances cliniques, car elle n’est En cas de suspicion de tendinopathie, la fameuse
pas toujours possible en traumatologie aiguë. triade si souvent évoquée par Rodineau est
systématiquement recherchée : douleur à la pal-
Étude de la stabilité articulaire pation, à l’étirement du tendon, à la contraction
(par exemple, genou, épaule) contrariée. Certains tests sont spécifiques d’une
lésion. Ainsi, le test de Finkelstein est théorique-
Devant des symptômes évoquant une instabilité ment pathognomonique d’une ténosynovite de
articulaire, il est nécessaire de pratiquer des tests De Quervain au niveau du poignet : il consiste
d’appréhension : manœuvre en rotation externe en la mise en tension des tendons du premier
d’épaule évoquant une instabilité scapulo-humérale, compartiment.
manœuvre de Smillie dans les instabilités patellaires. En cas de rupture tendineuse, certains tests sont
La recherche des laxités (parfois impossible très importants, telle la manœuvre de Simmonds-
dans un contexte traumatique aigu) comporte des Thompson pour le diagnostic d’une rupture de
tests spécifiques pour chaque articulation : épaule tendon calcanéen.
(tiroir), genou (test de Lachman, jerk test), cheville.

Examen programmé
Orientation du diagnostic : des articulations
os, articulations, tendons ?
En dehors du contexte d’urgence, il existe actuelle-
L’examen clinique permet d’orienter le diagnostic ment un examen programmé de chaque articula-
vers une pathologie osseuse, articulaire ou péri- tion tenant compte des aspects pratiques de tout
articulaire (tendinopathie ou rupture tendineuse). examen : par exemple, nécessité de regrouper les
tests faits en position debout, de face et de dos,
Pathologie osseuse à la marche, en décubitus ventral et dorsal. Cet
examen est bien entendu orienté par le contexte
La présence d’une douleur sur un fragment osseux clinique et l’interrogatoire.
doit faire redouter, selon les circonstances, une
fracture non déplacée méconnue ou une fracture
de fatigue. Conclusion
Pathologie articulaire : L’examen clinique garde une grande importance
instabilité, raideur malgré les énormes progrès de l’imagerie. Lorsque
le patient est vu « à froid », cet examen doit tou-
La présence d’une hémarthrose initiale, d’une jours être pratiqué avant de prendre connaissance
hydarthrose secondaire évoque une atteinte arti- de celle-ci. Il permet parfois à lui seul de faire
culaire : instabilité en cas de lésions ligamentaires un diagnostic : par exemple, devant des épisodes
(tests d’appréhension, laxité clinique), rétraction typiques de blocage en flexion du genou associés
articulaire (capsulite) en cas de raideur. à une douleur médiale, un bon interrogatoire
permet d’affirmer que le patient présente une
Pathologie abarticulaire lésion du ménisque médial avec anse de seau.
(ou péri-articulaire) : Il ne dispense cependant pas le plus souvent de
tendinopathie, bursite demander une imagerie (en l’occurrence pour cet
exemple, une radiographie standard et une IRM).
Le terme de tendinite, qui laisse supposer une ori- L’imagerie reste cependant très souvent indis-
gine inflammatoire systématique, a été progressive­ pensable en traumatologie du sport pour écarter
4 Traumatologie en pratique sportive

un diagnostic différentiel et préciser les indica- Quel est le responsable de ce péché contre l’esprit ?
tions thérapeutiques. L’examen clinique permet Le manque de temps, de disponibilité, de compé-
de choisir l’imagerie la plus adaptée, le clinicien tence ou d’expérience des cliniciens ?
restant le médecin prescripteur, et de donner aux Et si pour changer, vous, cliniciens, posiez
radiologues les renseignements cliniques néces- une question et nous, radiologues, y répondions
saires. Le diagnostic reste fondamentalement lié à clairement ?
la collaboration entre le clinicien et le radiologue. Cette première dérive majeure est potentialisée
par une seconde, presque aussi grave : dans plus de
huit cas sur dix, les renseignements cliniques qui
figurent sur la demande sont inexistants ou limités
2. Imagerie à deux ou trois mots insuffisants pour que le
en traumatologie du sport radiologue fasse un examen adapté au problème.
D’où ce paradoxe : un aveugle qui demande à un
G. Morvan voyant de le guider, mais refuse de lui dire où il va.
Nous marchons sur la tête.
Quelle imagerie ?
Trois petits mots simples recouvrant des réalités
plurielles :
• Quelle imagerie ? Celle élémentaire, disponible Radiographie
sur place ou celle de seconde ligne, beaucoup
plus sophistiquée ? La radiographie standard,
• Quelle traumatologie ? Le macrotraumatisme une science qui se perd
unique à haute énergie pendant une descente à
ski ou les millions de microtraumatismes accu- Les radiographies, de moins en moins enseignées
mulés lors de la marche sportive ? aux jeunes générations au profit des diverses
• Quel sport ? La randonnée familiale du dimanche imageries en coupes, sont en perte de vitesse…
ou le traumatisme de la star du football qui va Compréhensible en pathologie viscérale ou car-
faire la une des journaux ? diovasculaire, où l’indication des examens fondés
Tous ces cas de figure différents nécessitent des sur les radiographies a connu une chute dras-
gestions différentes. tique, cette évolution l’est moins en pathologie
Notre monde judiciarisé est un monde de preuves. de l’appareil musculosquelettique où la radiogra-
Le traitement des traumatismes sportifs a long- phie demeure un des piliers du diagnostic. De ce
temps suivi, sans autre forme de procès, un diagnos- déficit d’enseignement découlent en cascade des
tic purement clinique. Temps révolu. Actuellement, incidences approximatives, des radiographies trop
même un tableau évident, par exemple une rupture rapidement lues, d’où un appauvrissement des
du croisé antérieur typique, aura en pratique une renseignements fournis par ces dernières.
imagerie. Plusieurs raisons à cela : dans un monde Comme la démocratie, la radiographie « est
d’images, l’intime conviction ne suffit plus. La un mauvais système, mais c’est le moins mau-
médecine d’aujourd’hui demande des preuves tan- vais de tous les systèmes » (W. Churchill).
gibles et les patients qu’on leur montre de quoi ils Les radiographies ne montrent que le squelette
souffrent. Cette « icono-dépendance » a un coût et avec une sensibilité très moyenne. Pour voir
et est source d’une surconsommation d’imagerie. une fracture, il faut qu’elle soit enfilée par les
La France, ta clinique fout le camp ! rayons X ou déplacée d’où un grand nombre de
La primauté de la clinique a longtemps été un faux négatifs (fractures de côtes, fractures en os
dogme incontesté, d’où un besoin limité d’exa- spongieux…). Cependant, malgré ses défauts, la
mens « complémentaires », et l’imagerie ne fai- radiographie reste le meilleur examen d’ensemble
sait pas exception. Progressivement, celle-ci est d’une région, la technique qui permet les compa-
devenue de moins en moins « complémentaire », raisons les plus fines dans le temps et qui demeure
jusqu’à parfois se substituer à l’examen clinique. la plus répandue et la moins chère.
Chapitre 1. Généralités 5

Radiographie et irradiation arthroscanner, gold standard bien supérieur à


l’IRM pour l’étude du cartilage, des fissures
Jusqu’à ces dernières années, on a fait comme si méniscales, labrales ou tendineuses ouvertes dans
les rayons X n’irradiaient pas. Or – c’est prouvé – la cavité articulaire : cheville, épaule, genou,
l’irradiation répétée des zones sensibles entraîne hanche, poignet… Malgré leur rareté (un cas pour
à terme une augmentation statistique de la fré- plusieurs milliers d’arthrographies), les risques
quence des cancers. Dieu merci, les mentalités ont infectieux et allergiques sont réels et potentielle-
changé ! Deux cas de figure existent : ment graves. Ainsi, l’arthroscanner n’est demandé
• les radiographies occasionnelles des extrémités. que si une IRM préalable n’a pu répondre à la
Ce sont des zones peu radio-sensibles qui ne question.
posent pas de problème ;
• les radiographies répétitives des zones radio-
sensibles : des yeux à la racine des membres infé- Infiltration radio-guidée
rieurs, épaules incluses (par exemple, suivi des
scolioses, des spondylolisthésis, des pathologies De plus en plus fréquemment indiquée, celle-ci
de hanches, etc.). Notamment chez les jeunes nécessite également une injection de produit de
(jusqu’à 35–40 ans), les risques de l’irradiation contraste pour s’assurer de la bonne position
doivent être sérieusement pesés. C’est le travail de l’aiguille avec le risque allergique que cela
des prescripteurs et des radiologues que de comporte. Dans les cas qui s’y prêtent, il est sou-
veiller à la réelle indication des radiographies, haitable de remplacer le contraste par du sérum
à la limitation de leur nombre, à l’utilisation physiologique, voire de privilégier les injections
de techniques peu irradiantes avec protection échographiques guidées pour limiter l’irradiation
des gonades (capteurs plans, EOS…) et de du patient et de l’opérateur ainsi que supprimer
privilégier l’IRM par rapport au scanner : par le produit de contraste.
exemple, le bilan d’une lombalgie chez un
adolescent peut être effectué à l’aide de clichés
face et profil sur système EOS et d’une IRM, Scanner
avec une irradiation quasi nulle.
Petit-fils de la radiographie, les nouveaux scanners
se sont considérablement améliorés.
Radiographie et échographie Ils ont cependant conservé leurs caractéris-
tiques génétiques :
Radiographie et échographie forment un couple
• des points positifs :
indissociable. L’échographie ne voit que de la peau
– rapidité : quelques secondes suffisent actuelle-
au périoste et méconnaît complètement l’intérieur
ment pour l’acquisition des images, d’où des
des os. Lors de l’échographie d’une articulation, un
examens en apnée,
bilan radiographique a minima est donc indispen-
– absence de flou cinétique : possibilité d’exa-
sable, sous peine d’erreurs diagnostiques grossières :
men même chez les patients algiques ou agités,
par exemple, passer à côté d’une omarthrose ou
– précision : coupes de quelques dixièmes de
d’une coxarthrose radiographiquement évidentes.
millimètre d’épaisseur, jointives, à matrice
très élevée ; reconstructions planes et 3D
Arthrographie (radiographie d’excellente qualité…,
et produit de contraste) – absence de tunnel, donc pas de claustro-
phobie,
Compte tenu du peu de sensibilité des radiogra- – aucune limitation de champs,
phies pour l’étude des parties molles, l’utilisation – possibilité de coupes étagées (mesure de rota-
d’un produit de contraste est souvent néces- tion des membres),
saire. En pratique, les arthrographies actuelles – logiciels de diminution des artefacts métal-
sont le premier temps d’une infiltration ou d’un liques permettant l’étude des prothèses,
6 Traumatologie en pratique sportive

même massives, ou du matériel d’ostéosyn- préopératoires des instabilités et des lésions tendi-
thèse et de leur voisinage immédiat, neuses de l’épaule (l’arthro-IRM, non irradiante,
– mode « scout-view » du scanner pouvant concurrence de plus en plus l’arthroscanner dans
être utilisé pour faire des radiographies de la ce site sensible), les pathologies chondrales et
colonne en décubitus très peu irradiantes (bilan labiales de la hanche, certains bilans du genou (car-
de scoliose, réductibilité d’une cyphose…) ; tilage de la patella, contrôles postopératoires des
• des points négatifs : gestes méniscaux) et la pathologie de la cheville.
– les coupes tomodensitométriques sont tou- En revanche, le scanner reste un examen de
jours source d’une forte irradiation. Bien que seconde intention en matière de colonne, où
les nouveaux appareils irradient beaucoup l’IRM lui est préférable.
moins que les précédents, ils demeurent la
principale source d’irradiation médicale,
– faire attention aux zones radio-sensibles des Échographie
jeunes chez qui l’indication d’un scanner de
la colonne, du bassin, des épaules doit être Beaucoup plus difficile qu’on ne le croit, cette
mûrement réfléchie et, si faire se peut, rem- technique n’appartient à personne.
placée par l’IRM. En revanche, au-delà d’un Ni les radiologues ni les cliniciens ne peuvent
certain âge, la notion d’irradiation devient en revendiquer la propriété, ni même l’usage. En
anecdotique et ne doit plus être considérée revanche, si tous les médecins peuvent y avoir
comme un obstacle, accès, les règles du jeu et le prérequis sont les
– faible sensibilité pour l’étude des parties mêmes pour tous : un niveau de formation élevé,
molles, d’où la même nécessité de produit de reconnu par un diplôme national officiel et une
contraste que pour les radiographies. remise à niveau continue des connaissances.
L’échographie n’est pas et ne sera jamais le
« prolongement naturel de la main du clinicien ».
Scanner et fractures C’est même l’inverse : l’échographie musculos­
quelettique est la plus difficile des imageries
La précision et la capacité de reconstruction
musculosquelettiques. C’est celle qui exige
2D et 3D du scanner en font l’examen de base
l’investissement intellectuel le plus lourd et les
pour la recherche ou le bilan de fractures. Une
connaissances anatomiques les plus exhaustives,
exception : certaines fractures non déplacées en os
longues à acquérir et à entretenir. L’échographie
spongieux peuvent passer inaperçues au scanner
est une maîtresse séduisante, mais terriblement
(scaphoïde, plateaux tibiaux), d’où l’IRM.
exigeante à de multiples points de vue.
L’échographie « ostéo-articulaire » n’étudie
Scanner et arthroscanner paradoxalement ni l’os, ni les articulations.
des articulations Pour des raisons physiques, les ultrasons ne
voient pas l’intérieur des os, mais seulement sa sur-
Bien qu’en perte de vitesse par rapport à l’IRM, face. Une lésion intra-osseuse, évidente en radio-
l’arthrocanner reste très utilisé en France pour graphie, passera donc inaperçue en échographie.
l’étude du cartilage, des labrums et capsules arti- C’est une limite majeure de cette méthode par
culaires, de la lame sous-chondrale et de l’os nature incomplète dès lors que la zone étudiée
spongieux adjacent, d’où son importance en trau- inclut un os, d’où l’indissociable couple radio-
matologie du sport. Il nécessite parfois un premier graphie–échographie. En matière d’articulation,
temps sans préparation (ce qui double l’irradia- l’échographie voit les surfaces osseuses ou cartila-
tion) pour ne pas manquer un corps étranger gineuses accessibles, les récessus synoviaux, certains
intra-articulaire. C’est le gold standard actuel en ligaments collatéraux, les tendons et les parties
France pour l’étude des cartilages et des ligaments molles péri-articulaires. La demande « échographie
du poignet, du coude traumatique, les bilans de la hanche pour douleur » n’a donc pas de sens :
Chapitre 1. Généralités 7

c’est du ressort de la radiographie ou de l’IRM. En ligaments, synoviales, surfaces osseuses). La qua-


revanche, la demande « échographie/radiographie lité des images étant à peu près inversement pro-
de l’épaule à la recherche d’une lésion de la coiffe » portionnelle au carré de la distance, la profondeur
est pertinente. L’échographie n’est qu’un outil de la cible ne doit pas excéder une limite raison-
parmi d’autres au sein d’une boîte à outils où nable. Une graisse sous-cutanée épaisse absorbe
l’imageur doit pouvoir choisir l’outil le plus adapté. les ultrasons et dégrade considérablement l’image.
Encore faut-il qu’il ait le choix ! Dès lors, un peu de bon sens : l’échographie d’une
Une bonne échographie de l’appareil moteur petite formation située à 10 cm de profondeur
implique du matériel de qualité. Les résultats de dans une zone anatomique complexe a toutes les
l’échographie dépendent étroitement de la qualité chances d’être non contributive ; mieux vaut pas-
de celui-ci. Or, le bon matériel a un coût élevé. ser directement à l’IRM, sans étape échographie.

Qui fait l’échographie ? Les plus de l’échographie


Le radiologue ou le clinicien ?
• L’effet Doppler, disponible sur tous les écho-
L’opérateur est radiologue. L’important n’est pas graphes actuels, permet de déceler très simple-
tant qu’il soit convaincu du diagnostic qu’il a fait, ment une hyperhémie, donc une inflammation,
mais que le clinicien le soit pour lui permettre information importante pour le diagnostic.
de choisir le meilleur traitement. Cette trans- • La possibilité d’études dynamiques aisées (liga-
mission est l’une des principales difficultés de la ments, tendons, muscles…) constitue l’une des
méthode. En dépit de tous les efforts d’annotation grandes originalités de la méthode. On ne la
et d’orientation des images, la relecture des écho- retrouve dans aucune autre imagerie en coupes.
graphies est difficile et, dans une certaine mesure, • La faculté de suivre un nerf ou un vaisseau sur
le clinicien doit faire confiance à l’échographiste : une grande distance (« manœuvre de l’ascen-
c’est la fameuse opérateur-dépendance ! C’est la seur ») constitue une seconde originalité, aussi
raison pour laquelle le clinicien préfère souvent précieuse.
l’IRM ou le scanner, dont il maîtrise mieux la
relecture.
L’opérateur est clinicien. Le plus souvent, cet Ponctions sous guidage
opérateur est aussi le prescripteur. D’où le pro- échographique
blème d’être à la fois juge et partie. Un clinicien
La technique des échographies interventionnelles
opérateur/prescripteur aura du mal à être objectif
est maintenant au point. Les actes d’échogra-
et on peut penser que la performance de son écho-
phie guidée sont de plus en plus pratiqués dans
graphie, orientée, peut s’en ressentir. Par ailleurs,
de multiples indications : ponctions–évacuations
être autoprescripteur n’est probablement pas la
d’articulation, de kyste…, infiltrations intra-
meilleure manière d’être objectif dans l’apprécia-
articulaires, péritendineuses, périlésionnelles…,
tion de la qualité de ses propres examens.
arthrographie, aspiration–lavage de calcifications,
etc. La sous-cotation extrême de ces actes pose un
Indications de l’échographie problème économique.
musculosquelettique et limites L’échographie interventionnelle commence
également à concurrencer certains gestes chirur-
À condition de respecter les règles de la méthode gicaux : ablation de corps étrangers, section de la
(voir ci-dessus), ses indications sont multiples : poulie A1 (doigt à ressaut), section du retinacu-
étude de toutes les parties molles superficielles des lum du premier compartiment des tendons exten-
membres et des parois du tronc accessibles aux seurs du poignet (ténosynovite de De Quervain)
échographies (peau, graisse sous-cutanée, nerfs, ou des fléchisseurs du poignet (syndrome du canal
vaisseaux, fascias, muscles, tendons, retinaculums, carpien).
8 Traumatologie en pratique sportive

Imagerie par résonance Cette extrême sensibilité est précieuse pour le diag-
magnétique nostic, mais a des inconvénients : elle voit des
lésions minimes qui ne nécessitent pas toujours de
traitement. Elle a tendance à surestimer les lésions
Des énormes progrès en cas d’examen précoce (par exemple, les ruptures
en quelques années partielles des croisés), d’où la difficulté à affirmer la
fin de la guérison en cas de petit œdème résiduel
Depuis des années, l’imagerie par résonance
intramusculaire. En revanche, sa faible spécificité ne
magnétique (IRM) monte en puissance : champs
permet pas toujours de mettre une étiquette sur ces
magnétiques plus homogènes, gradients plus puis-
images. Le problème n’est tant pas de voir quelque
sants, antennes plus performantes, temps d’acqui-
chose d’anormal, mais souvent de dire ce que c’est.
sition nettement plus courts et meilleure définition
des images… De nouvelles séquences révolution-
naires sont apparues : Des contraintes techniques
• séquences volumiques pondérées en T1 et STIR importantes
(short tau inversion recovery) – IRM CUBE
– permettant d’obtenir des coupes submillimé- Le tunnel est source de claustrophobie. L’immo-
triques jointives en haute définition sur des bilité absolue nécessaire (pendant au minimum 15
volumes importants : genou, bassin, colonne à 20 min) est difficile à obtenir chez les jeunes
lombaire, pied et cheville… Ces séquences, enfants ou les personnes âgées, en cas de douleur,
qui permettent une étude 3D et des recons- d’anxiété (respiration forte), de tremblements,
tructions planes fines dans tous les plans de d’indiscipline. Le champ de vue étudié doit être
l’espace, sont de plus en plus utilisées : colonne, réduit et les coupes fines si l’on désire une bonne
ménisques, bassin… ; définition anatomique (main, pied, nerf…), ce qui
• séquences anti-artefacts métalliques (multiac- pose fréquemment problème : douleurs mal sys-
quisition variable-resonance image combination tématisées, bilatérales…
ou MAVRIC) permettant l’étude de l’os et
des parties molles à proximité immédiate des Des inconvénients non négligeables
prothèses et du matériel d’ostéosynthèse et à
l’origine d’une nouvelle sémiologie encore en • Prix : L’IRM est un examen cher (au moins
cours de gestation et en passe de bouleverser quatre fois le prix d’un scanner), ce que l’on
l’imagerie des prothèses ; peut ne pas passer sous silence à notre époque
• séquences à temps d’écho (TE) court, voire de difficultés budgétaires.
nul, en voie de finalisation permettant d’obtenir • Accès : certaines zones géographiques sont
une imagerie calcique de type scanner ; correctement pourvues, mais d’autres restent
• séquences spéciales pour la moelle et la colonne. notoirement sous-équipées, avec des délais
incompatibles avec le bilan de lésions sportives.
• Hétérogénéité du parc : certains appareils
L’IRM, très sensible, datent et sont loin de posséder les possibilités
mais peu spécifique énoncées ci-dessus.
• Manque de spécialistes en IRM de l’appareil
Du fait de son extraordinaire sensibilité, l’IRM est
moteur.
apte à mettre en évidence le moindre œdème de
la moelle osseuse, normalement graisseuse, ou des
structures conjonctives (tendons, ligaments, fas- Un examen incontournable
cias…), normalement uniformément noires. D’où en imagerie du sport
l’énorme potentiel diagnostique de la méthode
pour la mise en évidence des lésions trauma- L’IRM est d’ores et déjà l’examen de référence dans
tiques : fractures minimes, contusion osseuse, nombre de situations : genou traumatique, hanche,
œdème sous-chondral, entorse, tendinopathie, etc. cheville complexe, colonne, épaule, poignet, main…
Chapitre 1. Généralités 9

Conclusion sur une prescription médicale associée à un diag-


nostic médical et leur bilan kinésithérapique. La
Si notre boîte à outils diagnostiques est théorique­ place de la rééducation dans le traitement des
ment bien garnie, la réalité de tous les jours est lésions liées à la pratique sportive est incontour-
parfois moins reluisante. nable, elle vise à guider la cicatrisation lésionnelle
et la récupération fonctionnelle du sport pour per-
mettre un retour sur le terrain dans un minimum
Points clés de temps, à un niveau de performance comparable
• L’imagerie n’a nulle vocation à remplacer la clinique :
au niveau antérieur et en minimisant le risque de
c’est contre sa nature. récidive lésionnelle. La démarche se fonde sur
• Cliniciens, si vous voulez une réponse précise, la demande fonctionnelle du patient qu’il faut
commencez par poser une question claire ! entendre, mais parfois savoir modérer par des
• De bonnes radiographies bien faites et bien lues res- explications claires et prouvées (ainsi qu’auprès de
tent souvent irremplaçables. Attention à l’irradiation et l’entourage : entraîneur, préparateur physique…).
au produit de contraste ! Cette rééducation du sportif est parfois spécifique
• Utilisez le scanner avec modération et, si possible, pas au sport pratiqué (biomécaniques, contraintes tis-
dans les zones sensibles (tronc et ceintures).
sulaires, saisonnalité…).
• L’échographie n’a rien d’instinctif, c’est même l’ima-
gerie la plus difficile. Tout le monde peut la pratiquer,
Le bilan kinésithérapique vise à déterminer les
mais avec les mêmes règles du jeu pour tous (diplôme plaintes fonctionnelles (douleurs, troubles tro-
officiel, remises à niveau régulières). phiques…), les déficiences (déficits d’amplitude,
• L’IRM n’a pas que des avantages, mais c’est l’exa- de force, proprioceptifs…) et les incapacités (limi-
men globalement le plus performant en imagerie du tation dans les activités).
sport. Son coût important doit inciter à la raison. La première phase de la rééducation, commune
à tous les blessés, est incontournable et correspond
au temps nécessaire pour passer le cap de la res-
triction fonctionnelle, de la douleur et de l’œdème
3. Traitements important pour une meilleure cicatrisation ou
consolidation de la lésion. La deuxième phase est
conservateurs celle de la rééducation proprement dite. Ces deux
en traumatologie du sport premières phases de rééducation ne sont pas spéci-
fiques aux patients sportifs. Durant cette période,
F. Depiesse, P. Edouard il est indispensable que les sportifs pratiquent des
exercices appropriés pour garder une bonne condi-
tion physique cardiorespiratoire et musculaire sur
Les traitements conservateurs sont des approches les parties non lésées du corps. On favorisera aussi
thérapeutiques non chirurgicales. Réalisés en le plus possible avec le MKDE l’autorééducation
amont, en aval ou indépendamment de la chirur- du sportif dans un objectif d’autonomie.
gie, ils représentent une grande part des stratégies La troisième phase est spécifique aux sportifs,
thérapeutiques en traumatologie du sport, au il s’agit de la réathlétisation ou réadaptation au
sein desquelles sont distingués les traitements sport ou de retour sur le terrain. En effet, lorsque
physiques et médicamenteux. les amplitudes articulaires, la force musculaire et la
souplesse se sont normalisées, le sportif peut débu-
ter un entraînement spécifique ayant pour but
Traitements physiques de lui redonner toutes les capacités physiques et
techniques nécessaires à la pratique de son sport.
Généralités sur la rééducation Selon la discipline pratiquée, il faudra insister plus
particulièrement sur la récupération de l’endu-
La rééducation est réalisée par les masso-kinésithé- rance, de l’explosivité, de la souplesse ou de l’équi-
rapeutes diplômés d’État (MKDE), qui s’appuient libre. Cette phase de reprise sportive se termine
10 Traumatologie en pratique sportive

sur le terrain avec la collaboration du MKDE, du sportif, on utilisera pour cela l’arsenal des différents
préparateur physique et de l’entraîneur. modes de contraction musculaire1.
Cette progression nécessite un ajustement per-
manent des exercices en fonction de l’évolution
de la récupération et de la tolérance du blessé aux Électrostimulation du sportif
exercices prescrits. Cela implique un suivi régulier
L’électrostimulation musculaire est efficace pour
du MKDE et du médecin et une collaboration
prévenir et traiter l’amyotrophie sous la forme
active du blessé à sa rééducation.
de courants de basse fréquence qui permettent
Nous décrirons succinctement quelques-unes
un recrutement spatial important des unités
(mais pas toutes) des méthodes et techniques
motrices. Quant à son utilisation comme moyen
propres à la rééducation du sportif (à visée
de renforce­ment musculaire, elle n’a d’intérêt que
d’antalgie, de gain d’amplitude) : renforcements
si elle est associée aux contractions volontaires.
musculaires (isométrique, isotonique, concen-
Elle est donc un adjuvant intéressant à certaines
trique, excentrique, pliométrique, isocinétique),
phases de la rééducation du sportif blessé sur la
travail en chaînes cinétiques, travail proprioceptif,
zone lésée ainsi qu’en maintien des acquis de
massages, étirements, physiothérapie, électros-
force et d’endurance musculaire sur les parties non
timulation… Le lecteur trouvera facilement des
lésées du corps.
ouvrages spécialisés sur ce sujet.
Le médecin du sport doit connaître les différents
modes de renforcement musculaire, mais aussi Physiothérapie
savoir soigner les troubles trophiques et prescrire
les méthodes complémentaires à la rééducation Les différentes techniques de physiothérapie sont
comme la balnéothérapie (et le travail en décharge), les suivantes : thermothérapie (chaud froid), ultra-
la cryothérapie (locale et corps entier), les ondes sons, ionisation, électrothérapie, massages, ondes
de choc (focalisées ou radiales), les techniques de magnétiques pulsées, ondes courtes… On doit
médecine manuelle ostéopathique ou autres. les prescrire à bon escient à visée antalgique, anti-
inflammatoire, en récupération… Elles complètent
le travail manuel du MKDE mais ne le rempla-
Renforcement musculaire cent pas.
Par exemple, la cryothérapie est soit localisée
La perte de force musculaire est systématique et et partielle (pose de glace sur une articulation, ou
précoce lors de toute immobilisation totale ou immersion du bas du corps en eau froide), soit sous
partielle, temporaire ou définitive, comme c’est une forme de refroidissement global dite corps
le cas après un traumatisme ou une intervention entier dans des chambres de froid et sa variante
chirurgicale. On estime que la diminution de la qui laisse la tête et le cou hors de la machine de
force musculaire est de 3 à 4 % par jour lors de cryothérapie.
la première semaine d’immobilisation. De même, la Nous ne discuterons pas ici des avantages et
force du quadriceps diminue de 20 à 60 % après inconvénients de ces techniques ni de leurs indi-
30 jours d’immobilisation type bed rest et un déficit cations qui sont encore scientifiquement discutées.
moyen de 11 à 16 % a été rapporté sur la taille des Sachez que ces méthodes font partie de l’arsenal
muscles extenseurs de genou après une immobili- de soins pour le sportif blessé et sont utilisées en
sation sans appui. Si la perte de force est rapide, la prévention, mais jamais comme traitement exclusif.
récupération de l’état initial est très longue. Ainsi,
un déficit de 10 à 20 % de la force et de la taille
du quadriceps peut persister pendant des années
1. Pour une description complète des différents modes de
après les interventions chirurgicales, malgré des
contraction musculaire, voir Rivière D. (dir.) Médecine du
efforts de rééducation intense. Limiter la perte et la sport pour le praticien. Elsevier Masson ; 2020 et Edouard P,
fonte musculaire est donc un enjeu capital pour le Degache F. Guide d’isocinétisme. Elsevier Masson ; 2016.
Chapitre 1. Généralités 11

Contentions dans le sport non-douleur et des trois directions libres dans le


schéma en étoile (figure 1.1).
Les contentions sont utiles en phase aiguë pour Seuls les médecins et les kinésithérapeutes peu-
une immobilisation relative à visée de cicatrisa- vent prendre en charge des soins sur pathologie
tion, de lutte contre l’œdème et d’antalgie. On organique. Le décret de compétence des ostéo-
les utilise aussi à visée préventive pour un rappel pathes, non professionnels de santé, ne leur permet
proprioceptif de l’articulation à contrôler. On dis- de traiter que des pathologies fonctionnelles ; donc
tingue les bandages élastiques (strapping) de ceux dans le sport, ils seront plutôt sollicités pour des
non élastiques et adhésifs (taping). On n’oubliera soins de bien-être et non pour des pathologies
pas les bas de contention veineuse pour la lutte aiguës. La responsabilité des dirigeants et du méde-
contre la stase veinolymphatique. Il existe aussi cin responsable du club ou de l’événement pourrait
les orthèses, qui sont une alternative à l’immo- être mise en cause en cas de problème sur un sportif.
bilisation stricte et permettent la mobilité en
secteur et direction protégés (chevilles, genoux,
doigts…), et les contentions rigides comme les Autres méthodes et médecines
attelles (thermoformable, résine et plâtre). alternatives « utilisées »
en traumatologie du sport
Médecine manuelle Il s’agit de : l’acupuncture (aiguilles sur des
méridiens énergétiques en médecine chinoise),
La médecine manuelle a une place dans le diag-
le dry-needling (aiguille sur des points muscu-
nostic et le traitement des affections musculos-
laires douloureux ou points gâchettes), l’élec-
quelettiques communes. Son intérêt tient à son
troacupuncture, la prolothérapie (injection de
efficacité (niveau de preuves élevé, en particulier
diverses substances – dextrose, glycérine et phé-
dans les lombalgies communes), à un faible coût,
nol – à l’intérieur des ligaments ou des tendons
à sa iatrogénicité rare (dissection artère verté-
endommagés entraînant une irritation et une
brale, apparition de signes radiculaires ± déficit
moteur…), à la simplicité de sa mise en œuvre, dès
lors qu’existent des praticiens qui sont médecins,
correctement formés. Issues de plusieurs courants,
les formations de médecine manuelle et d’ostéopa-
thie ont évolué avec des apports multiples et variés
de thérapeutes de tout horizon sur les manipula-
tions par technique : myotensive, contre résistance
(strain–counterstrain), d’impulsion (thrust), de
levée de tension musculaire. Leur pratique est
aujourd’hui courante dans le milieu sportif. Les
contre-indications doivent être connues, respec-
tées, et surtout il ne faut jamais sauter l’étape du
diagnostic médical avant manipulation.
Le traitement des dérangements interverté-
braux mineurs a été développé par Maigne. Il
s’agit de traiter des douleurs souvent intercostales
par des manœuvres dites à « haute vélocité et
faible amplitude » décrites par Maigne comme des Figure 1.1. Étoile de report de l’examen clinique
« manœuvres articulaires brèves et sèches qui por- du rachis selon Robert Maigne, on y note les limitations
d’amplitude et la douleur.
tent une articulation au-delà de son jeu physiolo- E : extension ; F : flexion ; LFD : latéroflexion droite ;
gique sans dépasser ses limites anatomiques ». Les LFG : latéroflexion gauche ; RD : rotation droite ;
manipulations doivent ici respecter la règle de la RG : rotation gauche.
12 Traumatologie en pratique sportive

inflammation locales et permettant de stimuler et ce malgré une toxicité bien connue, tant au
la croissance cellulaire et de réparer les tissus), la niveau rénal, que gastrique, intestinal et cardiovas-
luminothérapie. culaire. Depuis les années 2000, leur efficacité sur
Ces méthodes sont parfois utilisées par des pro- les troubles musculosquelettiques est débattue.
fessionnels à la limite de leurs décrets de compé- L’inhibition de la réponse inflammatoire précoce
tence. Il appartient alors aux traumatologues du pourrait altérer la cicatrisation naturelle d’une
sport de bien informer les sportifs afin de leur lésion et avoir un impact négatif sur le processus
permettre un usage éclairé de ces techniques de réparation ultérieure. Lors de tendinopathie
qui, comme les produits homéopathiques, sont chronique où il n’y a pas à proprement parler de
parfois utilisées dans le milieu sportif sans preuves phénomène inflammatoire, les AINS ne sont pas
scientifiques ni études indiscutables. recommandés. Il convient aussi de les éviter après
une fracture en raison de leurs effets délétères sur
la formation osseuse. Enfin, les études ne démon-
Traitements médicamenteux trent pas d’intérêt notable à leur utilisation lors de
lésions musculaires aiguës. Ils restent utilisés dans
On distingue : les lésions ligamentaires et tendineuses aiguës ou
• les traitements locaux des moyens généraux ; alors certains attendent 1 semaine avant de les
• les méthodes de prise : soit topiques locaux utiliser selon l’évolution et d’autres les emploient
(ex. : pommade), sous-cutanés (ex. : mésothé- d’emblée mais en cure courte de 3 à 5 jours
rapie), intra-articulaires et péri-articulaires (ex. : environ.
infiltrations), soit per os, parentérales, intramus- Au final, au même titre que les antalgiques, une
culaires. réflexion s’impose donc pour savoir s’il est jus-
tifié de masquer les symptômes douloureux d’un
sportif afin de lui permettre une interruption la
Antalgiques plus courte possible de sa pratique sportive, au
détriment peut-être de sa guérison.
Ils sont non spécifiques aux sportifs. On notera
toutefois que certains comme le tramadol sont
décriés pour leurs effets de baisse de vigilance
(risque de chute en cyclisme) et de diminution Facteurs de croissance
de la douleur, donc d’amélioration des capacités plaquettaire sous la forme
d’effort, donc « dopants », même s’ils ne sont de plasma riche en plaquette
pas inscrits sur la liste officielle des produits inter-
Les plasmas riches en plaquettes (PRP) ont été pro-
dits par la réglementation antidopage. En cyclisme,
posés dans le traitement des lésions musculaires,
ils sont bannis, depuis mars 2019, du peloton
puis ligamentaires et tendineuses. Aujourd’hui,
professionnel par une règle sur la protection de la
les résultats des PRP sont très controversés et les
santé de l’Union cycliste internationale (UCI). La
études difficilement comparables. Les PRP sem-
codéine est juste surveillée en compétition et sans
blent surtout efficaces pour les tendinopathies
sanction en 2020. D’autres antalgiques (narcotiques
chroniques, ils le sont moins pour les lésions mus-
dont la morphine) sont inscrits sur la liste des subs-
culaires aiguës et chroniques et les tendinopathies
tances dopantes interdites en compétition. De plus,
aiguës. Des essais récents semblent rapporter une
le risque de trop masquer la douleur peut être aussi
efficacité dans l’arthrose. Même si on ne connaît
dangereux pour guider une rééducation de blessure.
pas encore toutes les règles à respecter dans la
synthèse des PRP, les mesures suivantes semblent
Anti-inflammatoires non stéroïdiens acquises :
• nécessité d’absence des leucocytes et des éry-
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) throcytes dans le produit récupéré après cen-
sont les médicaments les plus utilisés en sport trifugation ;
Chapitre 1. Généralités 13

• ne pas utiliser d’anesthésie locale ou de prise


d’AINS ;
4. Traitement chirurgical
• pratiquer les infiltrations sous échographie ; en traumatologie
• systématiser la rééducation post-infiltration car
la charge mécanique est nécessaire au processus
du sport
cicatriciel.
F. Khiami

Glucocorticostéroïdes
Depuis ces trente dernières années, les progrès
Les indications de glucocorticostéroïdes et leur en matière de chirurgie ont été considérables à
usage en médecine du sport ont fortement dimi- plusieurs niveaux.
nué ces dernières années, toutefois bien prescrits
ils restent de très bons outils pour le trauma-
tologue du sport. On sera prudent du fait des Collaboration
risques de rupture tendineuse et d’insuffisance médico-chirurgicale
surrénale aiguë en plus de toutes les précautions
d’emploi connues (diabète, risque infectieux…).
L’amélioration de la connaissance lésionnelle n’est
Ils sont classés dans la liste des produits S9
pas un hasard. Elle est le fait d’une collaboration
interdits en compétition par l’Agence mondiale
médico-chirurgicale au service du patient. Cette
antidopage (AMA). En cas de prise par voie
collaboration précieuse amenant la confrontation
orale, intraveineuse, intramusculaire ou rectale,
des points de vue et des retours d’expérience
ils devront être déclarés en demandant une auto-
a permis le perfectionnement et la systématisa-
risation d’usage à visée thérapeutique (AUT)
tion de l’examen clinique, la mise en valeur des
à l’Agence française de lutte contre le dopage
points importants pour chacun et l’élaboration
(AFLD) pour les sportifs de niveau national ou à
de consensus de prise en charge. Un exemple
la fédération internationale à laquelle un sportif
simple est la prise en charge de la rupture du
de haut niveau relève pour la période de compé-
ligament croisé antérieur : si celle-ci était autrefois
tition. Le médecin prescripteur aide le sportif à
réservée à des « experts », elle respecte désormais
remplir son AUT.
un consensus sur les lésions qui sont à opérer de
façon formelle et sur celles pouvant ne pas l’être
Acide hyaluronique et ce, grâce à la multitude de confrontations
en infiltration intra-articulaire de points de vue, aux retours d’expérience des
experts médicaux et des chirurgiens et à l’organi-
L’acide hyaluronique est un constituant du liquide sation des sociétés savantes.
synovial et du cartilage. Sa supplémentation est La lésion est donc mieux analysée sur le plan
utilisée dans le cadre de l’arthrose et du vieillisse­ clinique, et l’examen clinique « programmé »,
ment articulaire dans un objectif d’amélioration rigoureux et exhaustif, permet de mieux cerner
symptomatique. la gravité de la lésion, son retentissement fonc-
En 2020, la viscosupplémentation n’est plus tionnel et son potentiel évolutif. D’autant que les
remboursée, le service médical rendu ayant été progrès de l’imagerie ont permis de mieux mettre
jugé défavorable par la Sécurité sociale. en corrélation une lésion proposée par le clinicien
Les indications en sport restent les douleurs et confirmée par le radiologue. L’avènement de
d’origine cartilagineuse : ostéochondrite trauma- l’échographie et de l’IRM a permis de revisi-
tique au début, coxarthrose, gonarthrose avec ou ter certaines lésions, et d’en découvrir d’autres,
sans ménisque lésé, arthrose de cheville. Environ autorisant des traitements plus ciblés, plus précis
50 % des sportifs rapportent une efficacité sur et plus adaptés. La pathologie méniscale illustre
leurs symptômes. ces progrès. La qualité des images IRM voire
14 Traumatologie en pratique sportive

échographiques des ménisques a permis d’établir mais avec une faiblesse résiduelle de la force de
des classifications lésionnelles précises desquelles flexion du genou et une perturbation sportive. Les
découlent des traitements ciblés. Si autrefois, en progrès de l’imagerie qui ont permis de cartogra-
cas de pathologie méniscale, le traitement pou- phier la lésion, l’utilisation d’ancres de réinsertion
vait consister en une méniscectomie totale à ciel fiables et le perfectionnement des protocoles post-
ouvert, il est possible actuellement de différencier opératoires ont permis d’élargir les indications
les lésions de profil aigu traumatique de celles qui opératoires dans cette pathologie, autrefois traitée
sont de profil dégénératif, de dépister des lésions quasi exclusivement de façon fonctionnelle.
des racines méniscales et de cartographier la
lésion selon l’orientation de la déchirure. Avec le
développement de l’arthroscopie, le mini-invasif Recherche scientifique
a supplanté la chirurgie conventionnelle, permis
de préserver les ménisques et l’avenir du cartilage Un des points de faiblesse en traumatologie du
en faisant des chirurgies de reconstruction et de sport était l’absence de recherche scientifique orga-
sutures méniscales ou des méniscectomies très nisée et dédiée, contrairement aux pathologies
ciblées et économes. orthopédiques mieux codifiées et depuis long-
temps, comme la chirurgie prothétique de hanche.
Progressivement, les sociétés savantes et les congrès
Matériel chirurgical autour de la pathologie sportive se sont organisés,
ont développé des protocoles de recherche, consti-
Le perfectionnement du matériel chirurgical a per- tué des bases de données et alimenté la littérature
mis là encore de franchir des caps. Le développe­ scientifique au service de la preuve scientifique
ment d’ancres de réinsertion, de fils incassables, d’un succès ou d’un échec d’une technique chirur-
l’explosion des techniques arthroscopiques, les gicale. Pour exemple, depuis longtemps la butée
plaques d’ostéosynthèse osseuse quasi anato- antérieure d’épaule dans le traitement de l’insta-
miques, les matériaux résorbables de fixation tendi- bilité chronique faisait référence, mais a été remise
neuse ou ligamentaire, l’utilisation des allogreffes en question par les traitements arthroscopiques
en pratique courante, les mini-amplificateurs de moins agressifs et moins délétères. Pourtant la
brillance ou la navigation chirurgicale peropéra- preuve scientifique a montré que les résultats de
toire sont autant de progrès techniques au service l’arthroscopie n’étaient pas ceux attendus dans de
d’une chirurgie rapide, efficace et précise dimi- nombreuses situations et a précisé les indications
nuant la longueur des suites opératoires, les délais de cet outil thérapeutique, en redonnant sa place
d’indisponibilité et les dommages collatéraux des à la chirurgie conventionnelle. De même, toutes
chirurgies plus conventionnelles. Par exemple, les recherches autour de la chirurgie du ligament
dans les ruptures corporéales du tendon calcanéen, croisé antérieur (LCA) ont fait évoluer la prise en
il est possible à l’heure actuelle de réparer la lésion, charge de cette pathologie. L’anatomie du LCA
sous anesthésie locorégionale, en ambulatoire, en a été précisée, la connaissance biomécanique de
percutané ou mini-invasif, par une suture aiguillée chacun de ses faisceaux a évolué, les techniques
avec harpon dédié, sous contrôle échographique de reconstruction ont été comparées, la position
peropératoire… Nous sommes loin des abords des tunnels osseux pour la fixation des ligamento-
larges qui gardent encore des indications mais qui plasties a été optimisée, la gestion des lésions
tendent à diminuer. Une autre lésion est particulière­ méniscales associée a été codifiée, les raisons des
ment intéressante dans l’évolution de sa prise en faillites techniques ont été analysées, le tout faisant
charge. La rupture haute des ischiojambiers était de la ligamentoplastie du LCA, une intervention
rarement opérée. Certes, les patients pouvaient la presque banale sur le plan technique pour des chi-
plupart du temps reprendre une activité sportive, rurgiens formés, garantissant un résultat de qualité.
Chapitre 1. Généralités 15

Rôle du sportif indiquée chez le sportif exigeant, alors que le


traite­ment de référence demeure l’immobilisation
Enfin, les exigences et la motivation des sportifs simple. Certaines fractures non déplacées, comme
font parfois modifier ou élargir certaines indica- une fracture des plateaux tibiaux, relèvent d’un
tions opératoires et qui ne le seraient pas chez traitement orthopédique, mais seront opérées chez
des patients sédentaires ou à faible demande fonc- le sportif afin de permettre une récupération rapide
tionnelle. Ceci est rendu possible par la meilleure et d’éviter le déconditionnement neuromusculaire.
codification lésionnelle, la meilleure connaissance
des délais de récupération et des résultats du traite-
ment conservateur, la meilleure prise en charge en Conclusion
rééducation pré- et postopératoire par des équipes
spécialisées disposant d’outils performants tels que Actuellement, le chirurgien du sport est aussi un
l’isocinétisme, la cryothérapie ou les dispositifs médecin du sport dans son approche clinicienne.
de reprise de la course à pied en décharge, par Entouré du médecin du sport, du rééducateur et
exemple. La fracture de la base du 5e métatarsien du radiologue, il doit analyser la lésion, connaître
est généralement traitée orthopédiquement chez son potentiel évolutif, discuter les bénéfices et les
le patient sédentaire, mais dans l’optique d’accé- risques dans le choix entre un traitement conser-
lérer la récupération, le sportif de haut niveau sera vateur et une chirurgie et il doit savoir utiliser ces
opéré. Il en est de même avec la fracture de la techniques au service d’une récupération rapide
clavicule pour laquelle la chirurgie est largement et de qualité.
Chapitre 2
Épaule

le patient se présente en attitude des traumatisés


1. Fracture de la clavicule du membre supérieur et soutient son avant-bras.
Il est capital de vérifier la peau à la recherche
Y. Knafo d’une ouverture cutanée ou de simples excoria-
tions qui contre-indiquent tout abord chirurgical.
L’inspection retrouve un hématome, un œdème
en regard de la fracture et une saillie osseuse sous-
cutanée, surtout du fragment proximal, tracté vers
Physiopathologie le haut par la contracture du muscle sterno-cléido-
et classification mastoïdien. La palpation perçoit des craquements
sous-cutanés correspondant aux fragments osseux.
Les fractures de clavicule sont fréquentes (1,3 % En cas de fracture du 1/4 externe sans déplace-
de l’ensemble des fractures) surtout chez le spor- ment, seule une contusion peut être visible.
tif. Le traumatisme habituel correspond à une Une fracture du 1/3 moyen conduit le plus
chute sur le moignon de l’épaule ou le bras en souvent à un accourcissement de la clavicule et une
abduction forcée, mais un traumatisme direct est médialisation du moignon de l’épaule. Les frag-
retrouvé 9 fois sur 10. ments peuvent être saillants et menacer la peau.
D’apparence banale et de pronostic favorable, sa L’examen doit préciser l’état vasculaire et neu-
situation sous-cutanée la rend vulnérable à l’infec- rologique du membre supérieur traumatisé, à la
tion (surtout en cas de chirurgie), aux complications recherche d’une complication immédiate de type
pulmonaires (pneumothorax) et vasculonerveuses ischémique ou une atteinte du plexus brachial.
(artère et veines subclavières, plexus brachial).
Dans 75 % des cas, la fracture est diaphysaire, les
lésions des extrémités étant moins fréquentes, de Imagerie
l’ordre de 15 % latéralement et 5 % médialement.
Il est important de comprendre et de connaître Une simple radiographie de face claviculaire per-
l’anatomie de la clavicule et de ses insertions met de faire un diagnostic du type de fracture
ligamentaires et musculaires pour faire la part et du type de déplacement dans le plan fron-
des choses entre les fractures stables et celles qui tal. Des clichés centrés sur les extrémités peuvent
sont instables, et pour comprendre l’origine des être nécessaires pour ces variétés lésionnelles. Une
déplacements fragmentaires sur les radiographies radiographie pulmonaire de face fait partie du bilan
(figures 2.1 et 2.2). à la recherche d’une complication pleurale associée
(pneumothorax). Pour les fractures du 1/4 latéral,
une analyse plus fine peut nécessiter un scanner afin
Clinique d’examiner plus proprement les traits et les déplace­
ments, et une échographie pour préciser l’atteinte
La présentation clinique varie selon la localisation des ligaments coracoclaviculaires et le diagnostic
du ou des traits de fracture. Dans tous les cas, lésionnel d’instabilité de la fracture.

Traumatologie en pratique sportive


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18 Traumatologie en pratique sportive

Figure 2.1. Fractures du 1/4 externe : classification de Neer.


Type I : fracture en dehors des ligaments coracoclaviculaires (faible déplacement, pas d’atteinte de l’articulation
acromioclaviculaire). Type IIA : fracture en dedans des ligaments coracoclaviculaires. Type IIB : fracture au niveau
des ligaments coracoclaviculaires. Type III : fracture passant dans l’articulation acromioclaviculaire.
Source : Carole Fumat.

durée de 3 semaines, relayée par une écharpe simple


pour 3 semaines supplémentaires. Il faut déconseil-
ler l’utilisation des anneaux en 8 qui nécessitent un
resserrage quotidien difficile à mettre en œuvre en
pratique et qui génèrent des cisaillements cutanés
et des compressions vasculonerveuses ; ils n’ont par
ailleurs pas prouvé de supériorité.
Figure 2.2. Fracture de Latarjet : 3e fragment
comportant l’insertion des ligaments coracoclaviculaires.
Source : Carole Fumat. Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical consiste à réduire et
Traitement stabiliser la fracture. Il existe plusieurs types de
traitements selon la localisation de l’atteinte.
Fracture du 1/3 médial Les fractures du 1/3 moyen relèvent en général
d’une ostéosynthèse par une plaque antérosupé-
Cette variété de fracture est par définition stable, rieure ou antérieure pure, suivie d’une immobi-
par la présence du ligament costoclaviculaire qui lisation par écharpe pendant 1 mois et associée
relie la clavicule à la 1re côte et au sternum. d’emblée à une rééducation douce (figure 2.3).
Le traitement orthopédique est la règle, sauf en
cas de grand déplacement surtout postérieur qui
comprimerait le médiastin. Une écharpe contre
Fractures du 1/4 externe
écharpe pour 3 semaines relayée par une écharpe
simple pour 3 semaines suffit. La réduction et l’ostéosynthèse sont réalisées
actuellement sous arthroscopie à l’aide d’endo-
Fracture du 1/3 moyen bouton.
Ces techniques nouvelles, très exigeantes tech-
Traitement orthopédique
niquement, lorsqu’elles sont maîtrisées et mises
Le traitement orthopédique consiste en une immo- en œuvre rapidement (moins de 5 à 7 jours),
bilisation par une écharpe contre écharpe pour une apportent d’excellents résultats.
Chapitre 2. Épaule 19

Figure 2.3. Fracture du 1/3 moyen (a) et ostéosynthèse par plaque vissée (b).

La technique à ciel ouvert, plus délabrante et à cause du taux de pseudarthrose : en 1960, la


invasive, consiste à proposer une ostéosynthèse par cohorte de Neer (2235 clavicules) avait un taux
une plaque à vis verrouillée adaptée au 1/4 externe de pseudarthrose de 0,13 % et celle de Rowe en
ou par une plaque à crochet permettant d’ajouter 1968 (566 clavicules) avait un taux de pseudar-
en stabilité en passant sous l’acromion (figure 2.4). throse de 0,8 %. Cela reste d’actualité dans le cas
de fractures non déplacées.
Par contre, plusieurs études plaident en faveur
Indications de la chirurgie dans les cas de déplacement impor-
tant à cause d’un taux de pseudarthrose élevé.
Les indications de traitement orthopédique res- Certains articles ont également mis en évidence
tent valables dans tous les cas pour les fractures chez les sportifs de bon niveau des risques impor-
fermées, non déplacées et stables au 1/3 moyen, tants de fracture itérative et de dysfonction scapu-
les variétés Neer type I et type III des 1/4 laté- lothoracique due au raccourcissement claviculaire
raux et les fractures du 1/3 médial. de plus de 2 cm.
Les indications chirurgicales indiscutables sont
la fracture ouverte, le péril cutané, les complica-
tions vasculonerveuses, les atteintes pulmonaires Résultats et retour au sport
ainsi que le syndrome omo-cléido-thoracique.
Les fractures du 1/4 latéral instables (Neer Une revue systématique de la littérature portant
type II et fracture de Latarjet) nécessitent une sur 555 fractures (1991–2015) a évalué le délai
réduction et une ostéosynthèse en urgence. de retour au sport pour des patients âgés de 19
Les fractures du 1/3 moyen claviculaire (envi- à 44 ans. Les fractures étaient fermées et concer-
ron 70 % des fractures de clavicule chez les spor- naient le 1/3 moyen ou le 1/4 externe claviculaire.
tifs) ont des indications sujettes à discussion. En Globalement, le taux moyen de retour au sport
effet, il est historiquement reconnu que le traite­ était de 92 % à 13,7 semaines (81 % au même
ment orthopédique a la préférence à la chirurgie niveau).
20 Traumatologie en pratique sportive

Figure 2.4. Fracture du 1/4 externe (a) et ostéosynthèse sous arthroscopie par endobouton (b).

Concernant les fractures du 1/3 moyen, s’il n’y Il ressort donc de cette revue systématique un
avait pas de différence significative entre les frac- intérêt important à opérer les fractures déplacées
tures non déplacées traitées orthopédiquement et du 1/3 moyen claviculaire chez les sportifs afin
celles opérées, lorsqu’un déplacement important de leur permettre un retour rapide au sport et au
n’était pas opéré, les résultats se détérioraient même niveau (ce qui est fréquent en particulier
(tableau 2.1). chez les cyclistes de compétition).
Les taux de consolidation étaient très bons avec :
– pour les fractures du 1/3 moyen, un taux de
consolidation moyen de 98 % à 10,3 semaines ; Complications
– pour les fractures du 1/4 externe, un taux de
consolidation moyen de 98 % également à 11 Le traitement orthopédique ne comporte pas de
semaines. complications majeures avec des pseudarthroses

Tableau 2.1. Reprise du sport après fracture de clavicule.


Taux de reprise du sport Délais de reprise du sport Niveau sportif
Fracture du 1/3 moyen
Fracture non déplacée non opérée 95 % 10,6 semaines 95 %
Fracture déplacée non opérée 93 % 21,5 semaines 69 %
Fracture déplacée opérée 98 % 9,4 semaines 97 %
Fracture du 1/4 latéral
Fracture déplacée opérée 85 % 19,4 semaines 77 %
Fracture non déplacée non opérée 100 % 14 semaines 100 %
Chapitre 2. Épaule 21

exceptionnelles pour des fractures non déplacées, orthopédiques les plus courantes à l’épaule (9 %
sauf en cas d’ouverture cutanée, d’écart frag- des traumatismes de l’épaule dans la population
mentaire de plus de 2 cm ou de non-respect de générale) mais surtout dans une population de
l’immobilisation. jeunes athlètes et sportifs de contact.
En cas de fragments déplacés, le traitement Un traumatisme indirect résulte généralement
orthopédique comporte jusqu’à 57 % de fractures d’une chute sur un bras en adduction et tendu,
itératives et 7,5 % de paresthésies temporaires. ce qui contraint la tête humérale sous l’acromion
En cas de stabilisation chirurgicale, les compli- entraînant ainsi l’articulation acromioclaviculaire
cations peuvent être nombreuses et sérieuses, elle-même. La gravité de cette affection est direc-
telles que l’infection, des douleurs sur la plaque, tement liée à la force de l’impact induisant des
3 % de pseudarthrose, un déplacement secondaire lésions croissantes des structures anatomiques de
sur faillite du matériel, une cicatrice hypertro- stabilisation acromio- et coracoclaviculaire.
phique et jusqu’à 5 % de fractures itératives néces- Dans la population générale, l’incidence des
sitant une ré-intervention. disjonctions acromioclaviculaires (DAC) est esti-
mée à 1,8 pour 10 000 habitants avec un sex-ratio
de 8,5 hommes pour 1 femme. On ne retrouve
pas de différence entre bras dominant et bras
Conclusion controlatéral. L’âge moyen de survenue de la
lésion est de 36–37 ans tant chez les femmes
Les fractures de la clavicule sont fréquentes chez que chez les hommes. C’est la pratique sportive
le sportif. Une prise en charge adaptée permet qui est la principale étiologie (cyclisme, football,
une consolidation rapide et un délai de retour basket-ball, roller…) suivie des accidents de la
au sport optimisé. Les fractures du 1/3 moyen voie publique.
déplacées doivent être opérées pour améliorer les
chances de récupération. Les fractures du 1/4
externes instables et/ou déplacées doivent être Anatomopathologie
opérées par endobouton sous arthroscopie afin de
limiter les risques de complications. L’articulation acromioclaviculaire est une diar-
throse à pans obliques, la présence d’un « ménisque »
y est variable.
La stabilisation est tributaire de trois éléments
2. Entorses et luxations distincts (figure 2.5) :
• le ligament intrinsèque acromioclaviculaire supé-
acromioclaviculaires rieur au sein des ligaments capsulaires assure
typiquement la stabilisation horizontale de l’arti-
D. Fontes, É. Abehsera culation, c’est le premier frein au mécanisme de
disjonction ;
• les ligaments extrinsèques conoïde et trapézoïde
tendus du coude de l’apophyse coracoïde à la
face inférieure de la clavicule assurent sa stabili-
Épidémiologie, sation verticale. Ils s’insèrent environ 3 à 4 cm
physiopathologie en dedans de l’articulation acromioclaviculaire ;
• la chape musculo-aponévrotique deltotrapé-
Les données concernant l’épidémiologie des bles- zienne contribue au verrouillage dynamique
sures sont rarement fiables et exhaustives. Néan- des précédentes structures.
moins, des rapports récents ont indiqué que les La scapula est ainsi suspendue à l’extrémité
lésions acromioclaviculaires sont parmi les lésions latérale de la clavicule et un impact violent sur
22 Traumatologie en pratique sportive

Figure 2.5. Différents moyens ligamentaires et musculo-aponévrotiques assurent la suspension de la scapula


sous l’extrémité latérale de la clavicule.
Source : Carole Fumat.

le moignon de l’épaule pourra occasionner la déformation de la région acromioclaviculaire en


chute du bras par lésion successive des différents rapport avec un hématome sous-jacent, néan-
systèmes de stabilisation. Le mouvement autour moins la stabilité de l’articulation n’est que peu
de l’articulation acromioclaviculaire peut être ou pas impactée.
décrit principalement comme un mouvement de Dans les DAC de plus haut grade, on recherche
glissement, avec une composante rotationnelle la classique « touche de piano », mais il sera plus
minimale. logique d’empoigner le bras et de le remonter sous
la clavicule afin de réduire la chute de l’omoplate
sans appuyer sur la clavicule nécessairement dou-
Clinique et imagerie loureuse et responsable d’une contracture nocicep-
tive susceptible de minorer le degré d’instabilité
L’examen physique doit porter non seulement sur clinique (figure 2.6). Le retentissement scapulo-
l’articulation acromioclaviculaire, mais également thoracique doit aussi être évalué car s’associent
sur les articulations gléno-humérale et scapu- volontiers une dyskinésie scapulothoracique et un
lothoracique et doit comporter une évaluation décollement caractéristique de la scapula.
neurologique et vasculaire attentive. L’évaluation radiographique (figure 2.7)
La détection des troubles de l’articulation acro- commence généralement par des radiographies
mioclaviculaire comporte la palpation directe de simples, centrées sur l’articulation acromiocla-
l’articulation acromioclaviculaire. viculaire, et comparatives permettant la mesure
Le test de Paxinos consiste à appliquer simulta- de l’espace coracoclaviculaire et du déplacement
nément une pression antérosupérieure sur l’acro- frontal de la clavicule. Des vues latérales axillaires,
mion et une pression postéro-inférieure au tiers quant à elles, permettent d’apprécier le degré de
moyen de la clavicule ; un test positif provoque subluxation postérieure. Un scanner avec recons-
une douleur au niveau de l’articulation acromio- truction 3D peut éventuellement compléter un
claviculaire. diagnostic incertain ou éliminer une fracture asso-
Le test d’adduction croisée (cross arm test) ciée, notamment de la coracoïde ou de la clavicule.
couramment utilisé, bien que sensible, est relati- Une imagerie par résonance magnétique (IRM)
vement non spécifique. pourra préciser le stade lésionnel et démasquer
La déformation clinique est souvent assez des lésions associées au niveau de l’articulation
caractéristique et témoigne des différents stades gléno-humérale, pouvant survenir dans 18 % des
lésionnels. cas. Cependant l’IRM peut apporter des surdia-
Les entorses de bas grade occasionnent une gnostics de SLAP (superior labrum from anterior
impotence fonctionnelle douloureuse ainsi qu’une to posterior).
Chapitre 2. Épaule 23

Figure 2.6. Aspect clinique caractérisant la disjonction acromioclaviculaire réductible en « remontant » le bras.

Figure 2.7. Bilan radiologique comparatif : luxation acromioclaviculaire avec augmentation de la distance
coracoclaviculaire.
24 Traumatologie en pratique sportive

Classification lésionnelle été généralement admis que les lésions de type


I et II peuvent être traitées de manière non
La classification le plus couramment utilisée pour chirurgicale avec une immobilisation brève, un
les blessures acromioclaviculaires est celle de repos, des anti-inflammatoires, de la glace et une
Rockwood (figure 2.8). Elle prend en compte thérapie fonctionnelle et rééducative. Les lésions
non seulement l’articulation acromioclaviculaire de type IV, V et VI sont considérées comme
elle-même, mais également les ligaments coraco- instables et ont généralement des résultats supé-
claviculaires, la chape deltotrapézienne, ainsi que la rieurs après chirurgie. Cependant, les lésions de
direction de la luxation de la clavicule par rapport type III restent controversées, sans consensus
à l’acromion. clair sur leur gestion qui dépendra alors aussi
L’une des vertus de cette classification est en grande partie du patient et de sa demande
son application à la décision thérapeutique. Il a fonctionnelle.

Figure 2.8. Classification de Rockwood.


Source : Carole Fumat.
Chapitre 2. Épaule 25

Indications thérapeutiques suivi à moyen et à long terme, avec une satis-


faction de 80 à 90 % des patients.
Lésions de type I et II
de la classification de Rockwood Lésions de type IV, V et VI
de la classification de Rockwood
Il existe un consensus général sur le traitement
non chirurgical des lésions de ce type. En fonction Il existe relativement peu d’études randomisées sur
de la douleur et de l’état fonctionnel, il faut les lésions de haut grade de DAC. McKee et al.,
généralement une courte période d’immobilisa- pour la Canadian Orthopaedic Trauma Society,
tion (autour de 2 semaines) pendant laquelle une ont réalisé un essai prospectif randomisé compa-
mobilisation prudente du membre supérieur sera rant le traitement opératoire à un traitement non
autorisée afin de limiter les risques d’enraidisse­ chirurgical pour les lésions de type III, IV et V
ment. Un protocole de rééducation fonctionnelle dans une population générale non sportive. Les
et de physiothérapie est ensuite prescrit afin patients étaient randomisés pour bénéficier d’une
d’obtenir une récupération rapide des amplitudes intervention chirurgicale en utilisant une plaque
articulaires, puis progressivement de la force de à crochet par rapport à un traitement non opé-
la ceinture scapulaire tout en agissant sur les phé- ratoire. Dans l’ensemble, les deux groupes sont
nomènes douloureux et inflammatoires. En règle passés d’un niveau significatif d’invalidité initiale
générale, les activités sportives sont reprises vers la à un bon ou excellent résultat. Les scores DASH
2e semaine pour les lésions de type I et entre la 3e (Disabilities of the Arm, Shoulder and Hand) et de
et la 6e semaine pour celles de type II. Cependant, Constant étaient significativement meilleurs dans
ce délai est souvent prolongé, en fonction des le groupe non opératoire à 6 semaines et à 3 mois,
symptômes, pour les athlètes nécessitant un geste mais il n’y avait pas de différence à 6 mois, 1 an ou
sportif de lancer exerçant des contraintes sur l’arti- 2 ans. Les résultats radiographiques étaient supé-
culation acromioclaviculaire. En cas de douleur rieurs dans le groupe chirurgical. Cette étude ne
persistante, des injections d’anesthésique local et/ portait que sur l’utilisation de la plaque à crochet
ou de corticostéroïdes peuvent être envisagées. qui n’est probablement pas le meilleur traitement
Le traitement non chirurgical des lésions de de ces lésions et demeure très peu utilisée.
type I et II est généralement associé à de bons Le plus souvent, la prise en charge des dis-
résultats à court terme chez la majorité des jonctions aiguës de haut grade est chirurgicale
patients, bien que peu de séries prennent en et vise à rétablir l’anatomie acromioclaviculaire
compte une pratique sportive impliquant les et sa stabilité. Mais malgré la fréquence de ces
sports overhead. Quoi qu’il en soit, les résultats blessures, les stratégies chirurgicales restent assez
à moyen et à long terme suggèrent que la mor- variées et surtout très controversées. Plus de 160
bidité des traumatismes acromioclaviculaires de techniques opératoires ont ainsi été décrites, ce
faible grade pourrait être sous-estimée. Parmi la qui indique qu’il n’y a pas de consensus clair
population de l’Académie navale des États-Unis, sur l’approche optimale. Les options de stabilisa-
Bergfeld et al. ont constaté que jusqu’à 9 % des tion comportent du matériel métallique (broches
patients avec lésions de type I et 23 % des patients de Kirshner, plaque à crochet), un transfert de
avec lésions de type II avaient signalé la persis- ligament coraco-acromial (techniques selon
tance de douleurs avec limitation des activités sur Weaver-Dunn, de Cadenas ou d’Augereau), une
un suivi allant jusqu’à 3,5 ans. Mouhsine et al. ont fixation de l’espace coracoclaviculaire avec des
examiné rétrospectivement 33 patients présentant techniques rigides (technique de la vis Bosworth)
des lésions de type I ou II et ont signalé que près et non rigides (dispositifs de suspension avec
de 50 % des patients continuaient à présenter des ancres de suture, endoboutons, TightRope®…),
symptômes après un recul moyen de 6,3 ans. En des implants synthétiques et de reconstruction des
revanche, plusieurs auteurs font état de résultats ligaments acromioclaviculaire et/ou coracoclavi-
fonctionnels allant de bons à excellents lors du culaire (avec une allogreffe ou une autogreffe)…
26 Traumatologie en pratique sportive

Lésions de type III Virk et al. ont réalisé une méta-analyse de


de la classification de Rockwood 14 études comparant le traitement opératoire au
traitement non chirurgical de lésions de type III
Le traitement idéal des lésions de type III est sujet avec un total cumulé de 706 patients et une durée
à controverse. Virk et al. ont résumé les concepts moyenne de suivi respectivement de 67,1 mois et
actuels, mais pas spécifiquement pour les sportifs. de 57,8 mois. Un résultat clinique favorable a été
Dans leur étude, une réduction imparfaite de rapporté chez 88 % des patients opérés et 86 %
l’articulation acromioclaviculaire ne signifie pas des patients non opérés sans que la différence soit
systématiquement un résultat médiocre. Ensuite, statistiquement significative. Ils n’ont pas trouvé
des phénomènes séquellaires chroniques au niveau de preuves suffisantes pour justifier de recomman-
de l’articulation acromioclaviculaire, tels que der une intervention chirurgicale de routine chez
l’ostéolyse, la chondropathie ou la calcification les athlètes et plus particulièrement ceux néces-
des ligaments coracoclaviculaires ne présagent pas sitant des élévations répétées du bras. Le retour
non plus d’un pronostic sombre ou d’une épaule au travail ou aux entraînements sportifs a été plus
douloureuse. Enfin, bien que la difformité ne dis- rapide pour les patients non opérés (près de la
paraisse pas complètement avec le temps, elle peut moitié des cas). Les limites de cette étude sont son
diminuer quelque peu et devenir moins disgra- caractère multicentrique, son absence de robus-
cieuse. Enfin, il existe une proportion significative tesse, l’hétérogénéité des techniques réalisées ainsi
de patients qui ne répondent pas bien avec un que des moyens d’évaluation. En 2018, Tang et al.
traitement non opératoire, même si cela n’est pas ont réalisé une méta-analyse de dix essais et n’ont
encore bien défini. pu mettre en évidence de différence significative
Dans le but d’améliorer l’approche clinique et entre le traitement chirurgical et le traitement
thérapeutique des lésions de type III, l’Internatio- conservateur en termes de douleur, de force,
nal Society of Arthroscopy, Knee Surgery and Ortho- de sensibilité au toucher, d’arthropathie post-
paedic Sports Medicine (ISAKOS) a proposé une traumatique, de critères subjectifs. Néanmoins, le
classification plus précise en stratifiant ces lésions traitement chirurgical était le seul à maintenir une
en type IIIA et IIIB. Le type IIIA est défini par réduction anatomique et aucune différenciation
une articulation acromioclaviculaire stable, sans des techniques n’a été réalisée de même que l’indi-
dysfonctionnement scapulaire significatif, alors vidualisation d’une population de sportifs. Longo
que le type IIIB est considéré comme instable, et al. ont effectué une autre revue systématique
responsable d’un dysfonctionnement scapulaire axée sur le taux de récurrence et les résultats.
résistant au traitement médical et fonctionnel, Quatorze études ont ainsi été incluses pour un
la clavicule restant déplacée sur le bilan radio- total de 646 épaules. Aucune différence signifi-
graphique de suivi. La recommandation est de cative entre les deux approches n’a été mise en
proposer une prise en charge initiale non opéra- exergue en termes d’arthropathie postopératoire,
toire de toutes les lésions de type III mais avec de douleur et de score de Constant. Une perte de
une évaluation clinique et radiographique répétée réduction postopératoire a été notée dans 14 % des
à la 3e et à la 6e semaine afin de déterminer les cas toutes techniques confondues, mais les auteurs
affections de type IIIA versus celles de type IIIB, semblent retenir une indication opératoire chez les
les premières relevant définitivement d’une prise travailleurs manuels et les sportifs.
en charge non opératoire, alors que les secondes
relèvent d’un traitement chirurgical. L’inconvé-
nient de ce protocole est de retarder une éven- Quel est le moment
tuelle intervention chirurgicale et de se priver du de la chirurgie ?
potentiel de cicatrisation spontanée des ligaments
coracoclaviculaires et acromioclaviculaires dès lors Les preuves sont insuffisantes pour justifier d’un
que les structures osseuses auraient été réduites en traitement chirurgical précoce ou différé des trau-
position anatomique. matismes articulaires de haut grade.
Chapitre 2. Épaule 27

Néanmoins, Virk et al. ont montré que les aussi conjugué à des erreurs techniques de posi-
résultats étaient meilleurs dans le groupe ayant tionnement) s’est avéré incompétent à maintenir
eu une intervention chirurgicale précoce, à 91 % la réduction dans plus de 41 % des cas. En dehors
contre 73 % dans le groupe ayant eu une interven- de complications générales (infections, capsulites
tion plus tardive. Compte tenu du petit nombre rétractiles…), il a été déploré des fractures de la
de patients (135 précoces et 90 retardés) ainsi clavicule et de la coracoïde, ainsi que des irrita-
que des techniques chirurgicales hétérogènes, il tions douloureuses sur le bouton claviculaire. Les
peut être difficile de généraliser. En outre, pour techniques de canal transcoracoïdien occasionnent
les sportifs professionnels, d’autres critères que un taux important de fractures de l’apophyse avec
purement anatomiques peuvent interférer dans perte réductionnelle faisant préférer un laçage
la décision tels que la période de la saison de autour de la coracoïde à sa transfixion.
compétition et des aspects contractuels. Ainsi, ces différents auteurs insistent sur la
courbe d’apprentissage difficile de ces nouvelles
techniques nécessitant abord arthroscopique et
Techniques chirurgicales contrôle radioscopique avec parfois des compli-
cations majeures. L’utilisation de renforts syn-
La grande hétérogénéité des techniques rend dif- thétiques péri- ou transclaviculaires de type LARS
ficile une appréciation objective des résultats chi- (ligament advanced reinforcement system) n’est
rurgicaux. Parmi les procédures les plus répandues, pas indemne non plus de complications à type
il faut retenir les plaques à crochet, les traitements d’ostéolyse, de perte réductionnelle, de calcifica-
arthroscopiques utilisant les endoboutons (associés tions, de fractures de la clavicule (par cisaillement
ou pas à un ligament artificiel ou une autogreffe) ou ou fragilisation par les orifices transosseux) ou de
encore les ligaments synthétiques à ciel ouvert. démontages, parfois d’ailleurs aussi en rapport avec
Chaque technique a ses propres avantages et ses une infection torpide à Propionibacterium acnes à
inconvénients qui sont affaires de spécialistes. rechercher de manière systématique lors de reprises
De nombreuses complications quelle que soit la chirurgicales de DAC. Les matériaux résorbables
technique utilisée, ont été rapportées, devant faire ne semblent pas à même de maintenir durablement
réfléchir à la justification de l’indication opératoire. la réduction et sont pratiquement abandonnés.
L’étude de la Société française d’arthroscopie La technique de stabilisation acromioclaviculaire
(SFA) a conclu que la stabilisation arthrosco- (Acrolig®) a été rapportée dans une série de 150
pique coracoclaviculaire nécessitait l’adjonction patients dont 85 % de sportifs (dont 35 rugbymen
d’un abord acromioclaviculaire complémentaire professionnels). Tous les sportifs professionnels ont
afin d’accompagner la stabilisation dans le plan retrouvé leur niveau entre le 3e et le 6e mois avec
antéropostérieur. Une immobilisation soutenant le un résultat clinique et radiologique satisfaisant.
bras pendant 6 semaines était nécessaire ainsi que
l’adjonction conseillée d’une greffe biologique
(ligament coraco-acromial) si le délai opératoire Conclusion
dépassait 10 jours. La technique endoscopique
théoriquement mini-invasive n’est pas dénuée de Les lésions ligamentaires acromioclaviculaires bien
complications avec un taux observé de 20,7 % et que courantes, notamment en pratique sportive,
un retour aux sports de contact chez 72 % des demeurent problématiques. Si les lésions de type
patients pratiquant ce type de sport au préalable. I et II ne sont pas chirurgicales, a contrario les
Clavert et al. ont étudié spécifiquement les compli- disjonctions de type IV, V et VI sont considérées
cations de cette étude multicentrique de 116 cas. comme instables et nécessitent généralement une
Ainsi, aucune complication vasculonerveuse n’a intervention chirurgicale. Que ce soit pour la popu-
été déplorée mais d’autres séries ont fait état de lation générale ou chez les sportifs, les lésions de
complications de ce type lors de la perforation type III sont toujours d’indication controversée,
de la coracoïde. Le matériel utilisé (sans doute bien que l’éclosion récente des techniques dites
28 Traumatologie en pratique sportive

mini-invasives a vu s’accroître considérablement jeu et il est donc particulièrement important d’en


les indications chirurgicales dans cette population. faire rapidement le diagnostic, celui-ci pouvant être
Le manque de données spécifiques sur les athlètes retardé du fait de symptômes parfois peu parlants,
overhead et de contact rend les indications difficiles. et d’une pathologie exceptionnelle qui n’est que
Cependant, nous optons pour une approche indivi- rarement recherchée. Cette articulation particu-
dualisée impliquant un modèle décisionnel partagé lièrement stable est maintenue par de puissants
entre le joueur et son staff médical. Si une indica- ligaments (figure 2.9) : sternoclaviculaires pos-
tion opératoire est retenue, il faut alors s’attacher à térieurs assurant la stabilité antéropostérieure ; ster-
traiter toutes les lésions constituant la disjonction noclaviculaires antérieurs limitant le déplacement
et un consensus se dessine dans le traitement associé supérieur de la clavicule ; costoclaviculaires assurant
des lésions coraco- et acromioclaviculaires. Quelle une stabilité supéro-inférieure, antéropostérieure
que soit sa technique de prédilection, le chirurgien et interclaviculaire. Enfin, la bonne congruence
devra ainsi prendre en compte ces considérations. articulaire est assurée par un ménisque situé entre
les deux éléments osseux. Les ligaments sterno-
Points clés claviculaires postérieurs, plus épais et plus puissants
• Les moyens de stabilité de l’articulation acromioclavi-
que leurs homologues antérieurs, expliquent la
culaire sont les ligaments acromioclaviculaires, coraco- rareté des luxations sternoclaviculaires postérieures.
claviculaires et la chape trapézodeltoïdienne.
• La classification de Rockwood rend compte de
l’importance de l’instabilité en corrélation avec la sévé-
Physiopathologie
rité des moyens d’union.
• La touche de piano révèle une rupture des ligaments La luxation sternoclaviculaire est la conséquence
coracoclaviculaires et d’une instabilité de haut grade. d’un traumatisme à haute énergie. On peut en
• Les lésions de type I et II relèvent d’un traitement particulier citer les accidents de la voie publique
conservateur, et les lésions de type IV, V et VI d’un traite- (50 %) mais aussi évidemment les traumatismes
ment chirurgical. sportifs (30 %). Dans cette dernière catégorie,
• Il n’y a pas de consensus sur les lésions de type III,
on citera les sports tels que le rugby et le foot-
mais la préférence est à la chirurgie chez les patients
jeunes et sportifs. ball américain, mais aussi le hockey, le judo. Le
• En cas d’intervention, celle-ci doit être réalisée dans mécanisme peut être un traumatisme direct sur
les 5 à 7 jours, au maximum, suivant la lésion. la clavicule provoquant une luxation postérieure,
ou sur le moignon de l’épaule provoquant une
luxation antérieure ou postérieure (figure 2.10).
Bien plus rarement, ces luxations peuvent survenir
3. Entorses et luxations chez le patient jeune de moins de 25 ans, dans le
sternoclaviculaires
É. Abehsera, D. Fontes

Épidémiologie et anatomie
Les traumatismes de l’articulation sternoclaviculaire
sont rares puisqu’ils ne représentent que 3 % de
l’ensemble des blessures de la ceinture scapulaire.
Les luxations postérieures, jusqu’à dix fois moins
fréquentes que leur forme antérieure, peuvent avoir Figure 2.9. Stabilisateurs de l’articulation sternoclaviculaire.
des conséquences dramatiques, lorsque la clavicule 1. Ligament costoclaviculaire. 2. Muscle sous-clavier.
3. Ménisque. 4. Ligament sternoclaviculaire. 5. Ligament
médiale comprime ou lèse les éléments médias- interclaviculaire.
tinaux. Le pronostic vital peut alors être mis en Source : Carole Fumat.
Chapitre 2. Épaule 29

Figure 2.10. Mécanismes luxants de l’articulation sternoclaviculaire.


Source : Favard L, Berhouet J, Bacle G. Traumatisme de la ceinture scapulaire. EMC - Appareil locomoteur. 2009 : 1-18 [Article 14-035-A-10].

cadre d’une hyperlaxité ou d’une pathologie du


collagène. L’absence de traumatisme important
doit faire évoquer ces facteurs favorisants.

Clinique
Dans un cas sur trois, le diagnostic clinique n’est
fait qu’à distance du traumatisme. L’interrogatoire
est primordial, et on notera, hors hyperlaxité,
un traumatisme important qu’il soit direct sur la
clavicule ou indirect sur le moignon de l’épaule.
Le patient se présente fréquemment avec l’atti-
tude de traumatisé du membre supérieur, celui- Figure 2.11. Aspect clinique d’une disjonction sterno-
claviculaire antérieure, côté droit.
ci étant immobilisé contre le thorax par la main
controlatérale. À l’inspection, on note une vous-
sure, un empâtement œdémateux en regard de seraient présentes dans 8 % des cas. On veillera
la sternoclaviculaire, parfois ecchymotique, avec donc à contrôler les paramètres vitaux, à réaliser
souvent une attitude en enroulement de l’épaule, une auscultation pulmonaire et à examiner sur
de raccourcisse­ment claviculaire du côté lésé. La les plans neurologique et vasculaire le membre
rotation de la tête vers le côté luxé a tendance à faire supérieur homolatéral à la luxation.
diminuer la douleur, alors que celle-ci augmente lors Ces lésions sternoclaviculaires peuvent être clas-
des mouvements d’épaule et en position couchée. sées de manière simple en trois stades :
La palpation permet de préciser le diagnostic • stade 1 : celui de l’entorse simple, il s’agit d’un
en réveillant la douleur au niveau de l’articulation étirement capsulaire et ligamentaire ;
acromioclaviculaire. On peut ressentir une vacuité • stade 2 : rupture capsuloligamentaire avec
en cas de luxation postérieure ou une vous- subluxation articulaire ;
sure en cas de luxation antérieure (figure 2.11). • stade 3 : luxation articulaire.
Il faut aussi, et surtout, rechercher les signes Enfin, deux tableaux particuliers doivent être
associés pouvant témoigner de la gravité d’une cités :
luxation postérieure. En effet, le déplacement • le décollement épiphysaire de la clavicule
postérieur de la clavicule peut comprimer les médiale : il peut mimer une luxation sternoclavi-
éléments médiastinaux (figure 2.12) dans 30 % culaire, tant par son examen que par son histoire
des cas provoquant alors dyspnée, dysphagie, clinique, et ne peut survenir qu’avant l’âge de
modifications de la voix, paresthésies et œdème 25 ans, âge de fusion du cartilage de croissance
du membre supérieur. Les complications vas- claviculaire médial. En cas de déplacement, son
culaires, pouvant mettre en jeu le pronostic vital, traitement sera le plus souvent chirurgical ;
30 Traumatologie en pratique sportive

Figure 2.12. Relation entre articulation sternoclaviculaire


luxée en arrière et éléments médiastinaux.
Figure 2.13. Reconstruction scanner 3D d’une luxation
sternoclaviculaire postérieure gauche.

• les lésions bipolaires de clavicule : résultant


souvent d’un accident de la voie publique à étudier la localisation des vaisseaux en préopéra-
haute cinétique, on notera une luxation sterno- toire. Il faut néanmoins se méfier des faux néga-
claviculaire médiale associée à une fracture de tifs, puisque la luxation sternoclaviculaire peut se
clavicule ou à une disjonction acromioclavicu- réduire spontanément en position allongée dans le
laire, réalisant alors un tableau de « clavicule scanner. Enfin, l’échographie mérite d’être citée,
flottante », dont le traitement chez le patient sa sensibilité étant meilleure que la radiographie
jeune et actif sera systématiquement chirurgical. simple. En cas d’indisponibilité du scanner, l’écho-
graphie reste un bon examen pour confirmer une
suspicion de luxation sternoclaviculaire.
Imagerie
Le cliché radiographique standard de face, Traitement
comparatif, reste d’interprétation difficile du fait
de la superposition du sternum, de la clavi- Entorses et luxations antérieures
cule, du rachis et des tissus mous qui diminuent
nettement la visibilité de l’articulation explorée. Concernant les entorses sans luxation (grades 1 et
C’est principalement l’asymétrie des clavicules 2), un traitement conservateur peut être réalisé,
qui permet d’évoquer le diagnostic. Enfin, ce cli- avec une immobilisation courte de 10 à 15 jours
ché permet de ne pas méconnaître une fracture du par écharpe pour un grade 1 et de 3 à 4 semaines
tiers médial de la clavicule, voire un décollement pour un grade 2.
épiphysaire possible jusqu’à l’âge de 25 ans. Concernant les luxations, De Jong et Sukul ont
Le cliché de thorax permet la recherche d’une évalué sur une moyenne de 63 mois les résultats à
complication telle que le pneumothorax ou long terme des luxations sternoclaviculaires anté-
l’hémothorax. Des incidences plus spécifiques à rieures traitées par antalgiques simples et immobi-
l’analyse de l’articulation sternoclaviculaire ont été lisation. Sur dix patients, sept ont obtenu un bon
décrites, sans souvent permettre une étude assez résultat clinique, seul un patient a eu un résultat
fiable de l’articulation pour se passer d’autres exa- fonctionnel jugé mauvais. La luxation antérieure
mens paracliniques. En cas de suspicion clinique, peut être réduite sous anesthésie générale par une
un scanner doit être réalisé. La reconstruction manœuvre de traction à 90° du membre supé-
3D permet une analyse fiable de l’articulation rieur associée à une pression antéropostérieure
sternoclaviculaire et des éventuels conflits avec sur le versant médial de la clavicule. Le membre
les éléments médiastinaux lors des luxations pos- supérieur est ensuite immobilisé par coude au
térieures (figure 2.13). L’injection de produit de corps pour une durée de 4 semaines. Il est à noter
contraste peut être un complément utile pour que l’important taux de luxation itérative, variant
Chapitre 2. Épaule 31

de 21 à 100 %, pourrait limiter l’intérêt d’une l’articulation sternoclaviculaire ; elle sera retirée
réduction sans chirurgie, d’autant plus que ces entre 3 et 6 mois selon les auteurs ;
luxations, chronicisées, sont souvent peu sympto- • la suture capsuloligamentaire par ancres : les
matiques. La conduite à tenir consisterait donc en moignons ligamentaires sont fixés à l’os par
une prise en charge chirurgicale en cas d’instabilité ancres après réduction de la luxation, en asso-
chronique symptomatique. Néanmoins, il reste ciant une plicature de la capsule articulaire
licite, et plus encore chez un patient sportif, de sternoclaviculaire ;
lui donner l’opportunité de rétablir l’anatomie • la résection du quart médial de la clavicule avec
sternoclaviculaire en proposant une simple réduc- fixation du moignon claviculaire à la 1re côte.
tion sous anesthésie générale suivie d’une immo- Le maintien par broches est proscrit du fait
bilisation. Celle-ci peut permettre d’éviter une du risque majeur de migration du matériel en
chirurgie de stabilisation future, dont les résultats intramédiastinal.
sont moins bons que ceux d’une réduction simple
stable. Il convient d’en discuter avec le patient, en
l’informant bien du risque de luxation itérative. Complications
Entorses et luxations postérieures Les séries concernant les stabilisations sterno-
claviculaires sont souvent restreintes, raison pour
La réduction de ces luxations est bien moins dis- laquelle il est difficile de chiffrer le taux de compli-
cutable. En effet, elle est nécessaire car plus symp- cations de ces gestes.
tomatique, avec un réel risque pour les éléments On peut néanmoins citer les complications
médiastinaux, en particulier vasculaires, ainsi que infectieuses qu’elles soient profondes (arthrite
pour le plexus brachial. Dans le cadre d’une luxa- septique) ou superficielles (infection de cicatrice).
tion aiguë (< 3 semaines), sans lésion médiasti- La fixation par broches peut se compliquer de
nale, la réduction par manœuvres externes au bloc migration du matériel en intramédiastinal avec
opératoire sous anesthésie générale doit être réa- des conséquences vasculaires parfois dramatiques
lisée. La manœuvre est la même que celle réalisée allant jusqu’au décès. Enfin, le risque de lésion
lors d’une luxation antérieure associée à une pres- d’éléments nobles existe, bien qu’exceptionnel.
sion antéropostérieure sur le moignon de l’épaule. Les éléments les plus proches sont la veine bra-
L’immobilisation postopératoire par anneaux dure chiocéphalique droite (à 6 mm de la sterno-
6 semaines. Dans le cadre d’une instabilité persis- claviculaire droite) et la veine brachiocéphalique
tante avec luxation itérative, ou d’une instabilité gauche (à 7 mm de la sternoclaviculaire gauche).
chronique, le traitement chirurgical devient néces-
saire. En effet, ces luxations sont à haut risque de
complications, telles que la compression du plexus
brachial, les érosions vasculaires, les compressions Résultats
trachéale ou œsophagienne. Quelle que soit la
technique utilisée, il reste vivement conseillé de Concernant les luxations antérieures aiguës, le
pratiquer l’intervention en présence d’un chirur- taux de luxation itérative avoisine les 50 %, mais
gien thoracique ou vasculaire. 70 % des patients obtiendront malgré tout un
Plusieurs moyens de stabilisation sternoclavicu- résultat qualifié de bon à excellent. Glass et al.
laire peuvent être utilisés : ont noté un taux de bons ou excellents résultats
• la greffe tendineuse ; un greffon tendineux de 92 % pour les réductions seules contre 76 %
(gracilis, semi-tendineux, sterno-cléido-mastoï- pour les réductions à ciel ouvert. Seul le résultat
dien, long palmaire) est prélevé et faufilé dans clinique est ici relevé, sans information sur le taux
la clavicule et le sternum. Un ligament artificiel de luxation itérative.
peut remplacer ce greffon ; Concernant les luxations postérieures, Tepolt
• la plaque d’ostéosynthèse : la réduction est sta- et al. ont montré dans une méta-analyse un taux
bilisée par une plaque d’ostéosynthèse pontant de luxation itérative de 44 % après réduction
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COCOA-NUT GINGERBREAD.

(Original Receipts.)
Mix well together ten ounces of fine wheaten flour, and six of flour
of rice (or rice ground to powder), the grated rind of a lemon, and
three-quarters of an ounce of ginger: pour nearly boiling upon these
a pound of treacle, five ounces of fresh butter, and five of sugar,
melted together in a saucepan; beat the mixture, which will be
almost a batter, with a wooden spoon, and when quite smooth leave
it until it is perfectly cold, then add to it five ounces of grated cocoa-
nut, and when it is thoroughly blended with the other ingredients, lay
the paste in small heaps upon a buttered tin, and bake them in very
slow oven from half to three-quarters of an hour.
Flour, 10 oz.; ground rice, 6 oz.; rind of 1 lemon; ginger, 3/4 oz.;
treacle, 1 lb.; sugar, 5 oz.; butter, 5 oz.; cocoa-nut, 5 oz.: 1/2 to 3/4
hour.
Or: Flour, 1/2 lb.; ground rice, 1/2 lb.; ginger, 3/4 oz.; rind of 1
lemon; butter, 5 oz.; sugar, 5 oz.; treacle, 1 lb.; cocoa-nut, 6-1/2 oz.
Obs.—The cakes made by them are excellent.
A DELICIOUS CREAM-CAKE AND SWEET RUSKS.

When in very sultry weather cream becomes acid from being sent
to a distance, or from other causes, it may still be made available for
delicate pastry-crust, and superlative cakes, biscuits, and bread; but
if ever so slightly putrid it will be fit only to be thrown away. The
following receipt is given exactly as it was used with perfect success
on the thought of the moment, when we first had it tried. Crumble
down five ounces of good butter into a pound of fine flour, then mix
thoroughly with them half a pound of sifted sugar, a few grains of
salt, and two ounces of candied citron or orange-rind sliced thin; add
something more than half a pint of thick and rather sour cream mixed
with two well whisked eggs, and just before the paste is put into the
moulds, which should be buttered in every part and only two-thirds
filled, beat thoroughly into it half a teaspoonful of the very best
carbonate of soda, which has been perfectly blended with twice the
quantity of sugar and of flour, and rubbed through a fine sieve, or
worked to the smoothest powder in a mortar, or in any other way.
For the convenience of having it baked in a small iron oven, this
quantity was divided into two cakes, one of which was gently pulled
apart with a couple of forks while still hot, and then set again into the
oven and crisped with a gentle heat quite through: it was thus
converted into the very nicest sweet rusks. Sufficient cream should
be used for the cakes to convert the ingredients into a very lithe
paste or thick batter, which can be properly worked or mixed with a
wooden spoon, with the back of which it should be very lightly
beaten up before it is moulded. About three-quarters of an hour will
bake it in a moderate oven. It should be firm on the surface—as all
light cakes should be—that it may not sink and become heavy after it
is drawn out. Turn it from the mould, and lay it on its side upon a
sieve reversed, to cool.
A GOOD LIGHT LUNCHEON-CAKE AND BROWN BRACK.

Break down four ounces of butter into a couple of pounds of flour,


and work it quite into crumbs, but handle it very lightly; mix in a pinch
of salt and four ounces of pounded sugar; hollow the centre, and stir
into it a large tablespoonful of solid well-washed yeast (or an ounce
of German yeast which will ferment more quickly), diluted with three-
quarters of a pint of warm new milk; when sufficient of the
surrounding flour is mixed with it to form a thick batter strew more
flour on the top, lay a cloth once or twice folded together over the
pan, and let it remain until the leaven has become very light: this it
will generally be in an hour and a quarter, or, at the utmost, in an
hour and a half. The fermentation may be quickened by increasing
the proportion of yeast, but this is better avoided, as it may chance to
render the cake bitter; additional time, however, must always be
allowed for it to rise when but a small quantity is used. When the
leaven is at the proper height, add to a couple of well whisked eggs,
sufficient nearly-boiling milk to warm them, and mix them with the
other ingredients; then beat well into the cake by degrees, eight
ounces more of pounded sugar, and half a grated nutmeg; cut from
two to three ounces of candied citron thin, and strew over it; leave it
again to rise, as before, for about three-quarters of an hour; mix the
citron equally with it, put it into a thickly buttered tin or earthen pan,
and bake it in a quick oven for an hour and ten minutes at the least,
and after it is placed in it let it not be moved until it is quite set, or it
will possibly be heavy at the top. The grated rinds of a couple of
lemons will improve its flavour. Fine Lisbon sugar can be used to
sweeten it instead of pounded, but the difference of expense would
be very slight, and the cake would not be so good; the quantity can,
of course, be diminished when it is considered too much. Three-
quarters of a pound of currants can, at choice, be substituted for the
citron. Three ounces of carraway seeds will convert it into common
brown brack, or Irish seed-cake. For the manner of purifying yeast,
see Chapter XXXI.
A VERY CHEAP LUNCHEON BISCUIT, OR NURSERY CAKE.

Two or three pounds of white bread dough taken when ready for
the oven, will make a good light biscuit if well managed, with the
addition of from half to three-quarters of a pound of sugar, a very
small quantity of butter, and a few currants, or carraway-seeds, or a
teaspoonful of mixed spices. The dough should be rather firm; the
butter should first be well kneaded into it in small portions, then the
sugar added in the same way, and next the currants or spice. The
whole should be perfectly and equally mingled, flour being slightly
dredged upon it as it is worked, if needful. It must then be allowed to
rise until it is very light, when it should again be kneaded down, but
not heavily; and when it has once more risen, it should be sent
without delay to the oven. An ounce of butter to the pound of dough
will be sufficient for it. Much richer cakes can be made thus, and they
will be extremely good if care be taken to let them rise sufficiently
before they are baked. We regret that we cannot multiply our
receipts for them. Sultana raisins are an excellent substitute for
currants in these and other common cakes.
ISLE OF WIGHT DOUGH-NUTS.

Work smoothly together with the fingers four ounces of good lard,
and four pounds of flour; add half a pound of fine brown sugar, two
tablespoonsful of allspice, one drachm of pounded cinnamon, half as
much of cloves, two large blades of mace, beaten to powder, two
tablespoonsful of fresh yeast which has been watered for one night,
and which should be solid, and as much new milk as will make the
whole into a rather firm dough; let this stand from an hour to an hour
and a half near the fire, then knead it well, and make it into balls
about the size of a small apple; hollow them with the thumb, and
enclose a few currants in the middle; gather the paste well over
them, and throw the dough-nuts into a saucepan half filled with
boiling lard; when they are equally coloured to a fine brown, lift them
out and dry them before the fire on the back of a sieve. When they
are made in large quantities, as they are at certain seasons in the
island, they are drained upon very clean straw. The lard should boil
only just before they are dropped into it, or the outsides will be
scorched before the insides are sufficiently done.
Flour, 4 lbs.; lard, 4 oz.; sugar, 1/2 lb.; allspice, 2 tablespoonsful;
pounded cinnamon, 1 drachm; cloves and mace, each 1/2 drachm;
yeast (solid), two large tablespoonsful: to rise, 1 to 1-1/2 hour.
Currants, at choice: dough-nuts boiled in lard, 5 to 7 minutes.
QUEEN CAKES.

To make these, proceed exactly as for the pound currant-cake of


page 546, but bake the mixture in small well-buttered tin pans (heart-
shaped ones are usual), in a somewhat brisk oven, for about twenty
minutes.
JUMBLES.

Rasp on some good sugar the rinds of two lemons; dry, reduce it
to powder, and sift it with as much more as will make up a pound in
weight; mix with it one pound of flour, four well-beaten eggs, and six
ounces of warm butter: drop the mixture on buttered tins, and bake
the jumbles in a very slow oven from twenty to thirty minutes. They
should be pale, but perfectly crisp.
A GOOD SODA CAKE.

Break down half a pound[175] of fresh butter into a pound of fine


dry flour, and work it into very small crumbs; mix well with these half
a pound of sifted sugar, and pour to them first, a quarter of a pint of
boiling milk, and next, three well-whisked eggs; add some grated
nutmeg, or fresh lemon-rind, and eight ounces of currants, cleaned
and dried; beat the whole well and lightly together, then strew in a
very small teaspoonful of good carbonate of soda in the finest
powder, which has been rubbed through a sieve and well mixed with
a little sugar, and again beat the cake well and lightly for three or four
minutes; put it into a buttered mould, and bake it from an hour to an
hour and a quarter; or divide it in two, when three-quarters of an hour
will be sufficient for each part.
175. Six ounces would to many tastes be quite sufficient, and the less butter the
cake contains the better.

Flour, 1 lb.; butter, 1/2 lb.; sugar, 1/2 lb.; boiling milk, full 1/4 pint;
eggs, 3; currants, 1/2 lb.; good carbonate of soda, 1 very small
teaspoonful: 1 to 1-1/2 hour. Or: divided in two, 1/2 to 3/4 hour.
Obs.—This, if carefully made, resembles a pound cake, but is
much less expensive, and far more wholesome, while it has the
advantage of being very expeditiously prepared. Great care,
however, must be taken to avoid mixing with it too large a proportion,
or a coarse quality of soda; as either will impart to it a far from
agreeable flavour.
GOOD SCOTTISH SHORTBREAD.

With one pound of flour mix well two ounces of sifted sugar, and
one of candied orange-rind or citron, sliced small; make these into a
paste with from eight to nine ounces of good butter, made sufficiently
warm to be liquid; press the paste together with the hands, and
mould it upon tins into large cakes nearly an inch thick, pinch the
edges, and bake the shortbread in a moderate oven for twenty
minutes, or longer, should it not be quite crisp, but do not allow it to
become deeply coloured.
Flour, 1 lb.; sugar, 2 oz.; candied orange or citron, 1 oz.; butter, 8
to 9 oz.: 20 minutes or more.
Obs.—This, to many persons, is a very indigestible compound,
though agreeable to the taste.
A GALETTE.

The galette is a favourite cake in France, and may be made rich


and comparatively delicate, or quite common, by using more or less
butter for it, and by augmenting or diminishing the size. Work lightly
three-quarters of a pound of good butter into a pound of flour, add a
large saltspoonful of salt, and make these into a paste with the yolks
of a couple of eggs mixed with a small cupful of good cream, or
simply with water; roll this into a complete round, three-quarters of
an inch thick; score it in small diamonds, brush yolk of egg over the
top, and bake the galette for about half an hour in a tolerably quick
oven: it is usually eaten hot, but is served cold also. An ounce of
sifted sugar is sometimes added to it.
A good galette: flour, 1 lb.; butter, 3/4 lb.; salt, 1 saltspoonful; yolks
of eggs, 2; cream, small cupful: baked 1/2 hour. Common galette:
flour, 2 lbs.; butter, 3/4 to 1 lb.; no eggs.
SMALL SUGAR CAKES OF VARIOUS KINDS.

To make very sweet rich sugar cakes mingle, first working it very
small with the fingers, half a pound of butter with each pound of flour:
if more than this proportion be used the paste will be too soft to
permit the addition of the proper number of eggs. Next, blend
thoroughly with these three-quarters of a pound of dry sifted sugar,
and the grated rinds of two small fresh lemons (for lemon-cakes the
strained juice of one is generally added), or a dessertspoonful of
cinnamon freshly pounded; or from one ounce to two ounces of
carraway-seeds; or a similar proportion of the finest powdered
ginger; or three-quarters of a pound of very dry well cleaned
currants. A slight pinch of salt should be thrown in with the sugar. If
to be made into flat cakes proceed to moisten these ingredients
gradually with from two eggs to four slightly whisked, and when they
form a firm paste, proceed quickly to roll and to stamp them out with
a cake tin; for as the sugar dissolves with the moisture of the eggs,
the paste will otherwise become so lithe as to adhere to the board
and roller. When it is to be merely dropped on the baking-sheets, it
will require an additional egg or more. The cakes should then be
placed quite two inches apart, as they will spread in the baking.
Five ounces of butter with six of sugar to the pound of flour, two
large eggs, and a small quantity of milk, will be sufficient for quite
cheap sugar cakes: any flavour can be given to them as to those
which precede, and they can be rendered more or less sweet to the
taste by altering the proportion of sugar: this should always be sifted,
or at least reduced quite to powder, before it is used for them. One
ounce more of butter will render them very good. They should be
rolled a quarter of an inch thick.
Rich: to each lb. of flour, butter, 1/2 lb.; sugar, 3/4 lb.; eggs, 2 to 4.
(Lemon-rinds, cinnamon, carraway-seeds, or ginger, or currants at
choice), small pinch of salt. Slow oven about 20 minutes.
Obs.—The cakes should be but lightly coloured, and yet baked
quite through.
FLEED OR FLEAD CAKES.

These are very much served as a tea-cake at the tables of the


superior order of Kentish farmers. For the mode of making them,
proceed as for flead-crust (see Chapter XVI.); cut the cakes small
with a round cutter, and leave them more than half an inch thick: if
well made they will rise much in the oven. Bake them rather quickly,
but keep them pale.
Flour, 2 lbs.; flead, 1-1/4 lb.; butter, 6 oz.: baked 10 to 15 minutes.
LIGHT BUNS OF DIFFERENT KINDS.

Quite plain buns without butter.—Very good light buns may be


made entirely without butter, but they must be tolerably fresh when
served. To make them, dilute very smoothly an ounce of sweet
German yeast or a large tablespoonful of quite solid and well
washed English yeast with a pint of warm new milk; mix this
immediately with as much flour as it will convert into a rather thick
batter, throw a double cloth over the pan, and place it where the
warmth of the fire will search, without heating it. When it is well risen
and bubbles appear on the top, add a little salt, some pounded
sugar, and as much flour as will form it into a light dough. Leave it to
rise again, when it will probably be too little firm for moulding with the
fingers, and must be beaten up with a strong wooden spoon and put
into cups or tin pans slightly buttered, to be baked. The buns should
be sent to a quick oven, and baked until the entire surface is well
browned. These directions may appear to the reader somewhat
vague; but we must frankly state that we have no precise
memorandum by us of this receipt, though we have had buns made
by it very successfully in former years: we cannot, however, exactly
recall the proportion of flour which was used for them, but believe it
was about two pounds. For this quantity half a pound of sugar would
be sufficient. The batter will be a long time rising to the proper
height; an hour and a half or two hours. Currants, carraways,
nutmeg, or mixed spices, can always be added at discretion.
It is usual to strew a few currants on the tops of the buns before
they are baked.
To render them richer and firmer, it is merely necessary to diminish
the proportion of milk, and to crumble up very small two or more
ounces of butter in the flour which is added to the batter after it has
risen. When again quite light, the dough may then be rolled into
balls, and placed on flat tins some inches apart until they have
spread to the proper shape. Confectioners generally wash the tops
with milk, and sift a little sugar over them.
Exeter Buns.—These are somewhat celebrated in the city whose
name they bear, especially those of one maker whose secret for
them we have recently obtained. Instead of being made into a dough
with milk, Devonshire cream is used for them, either entirely or in
part. If very thick, a portion of water should be added to it, or the
yeast would not ferment freely. The better plan is to dilute it with a
quarter of a pint or rather more of warm water, and when it is
sufficiently risen to make up the buns lightly, like bread, with the
cream, which must also be warm; then to proceed by the receipt
given above.
PLAIN DESSERT OR WINE BISCUITS, AND GINGER BISCUITS.

Rub very small indeed, two ounces of fresh butter into a pound of
flour, and make it into a stiff paste with new milk. Roll it out half an
inch thick, and cut the biscuits with a round cutter the size of half-a-
crown. Pile them one on the other until all are done; then roll them
out very thin, prick them, and lay them on lightly-floured tins, the
pricked side downwards: a few minutes will bake them, in a
moderate oven. They should be very crisp, and but slightly browned.
For the Ginger Biscuits.—Three ounces of good butter, with two
pounds of flour, then add three ounces of pounded sugar and two of
ginger in fine powder, and knead them into a stiff paste, with new
milk. Roll it thin, stamp out the biscuits with a cutter, and bake them
in a slow oven until they are crisp quite through, but keep them of a
pale colour. A couple of eggs are sometimes mixed with the milk for
them, but are no material improvement: an additional ounce of sugar
may be used when a sweeter biscuit is liked.
Plain biscuits: flour 1 lb.; butter, 2 oz.; new milk about 1/2 pint.
Ginger biscuits: flour, 2 lbs.; butter, 3 oz.; sugar, 3 oz.; ginger, 2 oz.
THREADNEEDLE STREET BISCUITS.

Mix with two pounds of sifted flour of the very best quality three
ounces of good butter, and work it into the smallest possible crumbs;
add four ounces of fine, dry, sifted sugar, and make them into a firm
paste with new milk; beat this forcibly for some time with a rolling-
pin, and when it is extremely smooth roll it the third of an inch thick,
cut it with a small square cutter, and bake the biscuits in a very slow
oven until they are crisp to the centre: no part of them should remain
soft. Half a teaspoonful of carbonate of soda is said to improve them,
but we have not put it to the test. Carraway-seeds can be added
when they are liked.
Flour, 2 lbs.; butter, 3 oz.; sugar, 4 oz.; new milk, 1 pint or more:
biscuits slowly baked until crisp.
GOOD CAPTAIN’S BISCUITS.

Make some fine white flour into a very smooth paste with new
milk; divide it into small balls; roll them out, and afterwards pull them
with the fingers as thin as possible; prick them all over, and bake
them in a somewhat brisk oven from ten to twelve minutes. These
are excellent and very wholesome biscuits.
THE COLONEL’S BISCUITS.

Mix a slight pinch of salt with some fine sifted flour; make it into a
smooth paste with thin cream, and bake the biscuits gently, after
having prepared them for the oven like those which precede. Store
them as soon as they are cold in a dry canister, to preserve them
crisp: they are excellent.
AUNT CHARLOTTE’S BISCUITS.

These biscuits, which are very simple and very good, may be
made with the same dough as fine white bread, with the addition of
from half to a whole ounce of butter to the pound kneaded into it
after it has risen. Break the butter small, spread out the dough a
little, knead it in well and equally, and leave it for about half an hour
to rise; then roll it a quarter of an inch thick, prick it well all over, cut
out the biscuits, and bake them in a moderate oven from ten to
fifteen minutes: they should be crisp quite through, but not deeply
coloured.
White-bread dough, 2 lbs.; butter, 1 to 2 oz.: to rise 1/2 hour.
Baked in moderate oven 10 to 15 minutes.
Obs.—To make the biscuits by themselves, proceed as for
Bordyke bread; but use new milk for them, and work three ounces of
butter into two pounds of flour before the yeast is added.
EXCELLENT SODA BUNS.

Work into half a pound of flour three ounces of butter, until it is


quite in crumbs; mix thoroughly with them four ounces of sugar, the
slightest pinch of salt, an ounce, or rather more, of candied orange
or, shred extremely small, and a little grated nutmeg; to these pour
boiling a small teacupful of cream, or of milk when this cannot be
had; mix them a little, and add immediately two eggs, leaving out the
white of one, and when the whole is well mingled, dust over, and
beat well into it, less than half a teaspoonful of good carbonate of
soda, perfectly free from lumps; rub an oven-tin with butter, drop the
buns upon it with a spoon, and send them to a moderate oven.
When they are firm to the touch in every part, and well coloured
underneath, they are done. They resemble good cakes, if properly
made, although in reality they are not rich: to render them so the
proportion of sugar and of butter can be increased, and currants
added also. It is immaterial, we find, whether they be put into the
oven as soon as they are mixed, or an hour afterwards. They are
equally light. These proportions make just a dozen of small buns.
Flour, 1/2 lb.; butter, 3 oz.; sugar, 4 oz.; candied orange-rind, 1 oz.
or more; grated nutmeg; cream (or milk) 1 small teacupful; egg-yolks
2, white 1; good carbonate of soda about the third of a teaspoonful:
15 to 25 minutes, moderate oven.

For Geneva Buns See Chapter 30.

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