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Regards juridiques africains n°076-05-24

Affaire Fridolin Cardinal Ambongo : entre les poursuites


internationalement illicites d’un Procureur Général et la pertinence des
immunités diplomatiques d’un agent public du Saint-Siège (de l’Etat de
la cité de Vatican ? De l’Eglise Catholique ?).

Éric BILALE

ABSTRACT
Dans la Guerre de Troie n’aura pas lieu, Jean Giraudoux rappelle que le Droit est
la plus puissante des écoles de l’imagination, car jamais poète n’a aussi librement
interprété la nature que le juriste la réalité. C’est rendant compte de cette exigence
de l’interprétation libre et correcte de la réalité juridique que nous nous efforcerons,
dans les présentes lignes, à fournir des éléments de connaissance nécessaires à
appréhender la vérité juridique. Cette contribution intervient dans un contexte tendu
et de méfiance entre le Gouvernement et l’Eglise Catholique en République
Démocratique du Congo. Dans un contexte où tous les pavillons de la quiétude
diplomatique sont en berne car pour la toute première fois et sans une base
procédurale solide – si l’on doit parler de soubassement et de fondement juridique
– et compte non tenu de droit et pratique diplomatiques en la matière, un Procureur
Général, sans au préalable demander la levée des immunités au Tribunal de
Vatican, a ordonné l’ouverture d’une information judiciaire à l’encontre d’un agent
public du Saint-Siège, un membre des services de la Curie, agent porteur des
immunités diplomatiques lesquelles sont absolues et intangibles à l’égard de toute
juridiction pénale nationale des Etats. Démontrer, au regard du droit des gens (ius
gentium), la « pertinence » ou l’« opérance » de la qualité officielle de Fridolin
Cardinal AMBONGO, membre « Eminent » de la Curie Romaine, à travers des
immunités diplomatiques dont il est porteur au regard de la juridiction nationale
pénale congolaise, d’une part, et, de l’autre, explorer les hypothèses du droit
d’accès au juge en se référant à l’idée de la renonciation volontaire à l’immunité
diplomatique, reste l’essentiel de présentes lignes. L’intérêt est d’autant plus grand
que toute la société sera éclairée et que certains charlatans seront contraints de
garder silence et de laisser la société savante épiloguer sur ces choses de l’esprit.

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I. La demande d’ouverture d’une information judiciaire contre un Membre


Eminent de la Curie Romaine, agent public de l’Etat de la Cité de Vatican,
sans observer le formalisme préalable requis, est une violation du droit
international dans le Chef de la République Démocratique du Congo.

Dans cette partie, nous tacherons, pour éviter des confusions multiples et
habituelles de notre société, d’abord, d’éclairer la religion des uns et des autres
sur les trois notions « Eglise Catholique », « Saint-Siège » et « Etat de la Cité de
Vatican », ce que J.-P. SCHOUPPE appelle le phénomène « trinitaire »1,
considérant que ces trois entités, bien que réalités distinctes, ont des rapports
importants entre elles2 (1) ; ensuite brièvement, il sera clairement démontré
qu’en tant qu’un Etat à part entière (Etat Pontifical), le Vatican bénéficie du
principe de l’égalité souveraine des Etat et de tous les privilèges diplomatiques
et consulaires, codifiés (conventions de Vienne sur les relations diplomatiques
et consulaires) ou non écrits (la coutume internationale) (2) et ; enfin, à la
lumière de toutes ces démonstrations péremptoires, faire constater les immunités
diplomatiques de Son Eminence Fridolin Cardinal Ambongo, Membre de la
Curie Romaine et, depuis le 15 octobre 2020, Secrétaire Adjoint du Conseil des
Cardinaux, immunités dont la violation par la RDC entrainerait sa responsabilité
internationale (3).

1. Eglise Catholique, Saint-Siège et Etat de la Cité de Vatican : trois entités


distinctes mais enchevêtrées.

Si l’Eglise Catholique désigne toute la communauté des « personnes qui ont


été baptisées et qui suivent les préceptes de la Bible », autrement dit «
l’ensemble de catholiques », il est tout aussi vrai que cette communauté se
trouve sous l’autorité du Pape et regroupe (mis à part les fidèles catholiques
dans le monde), au niveau fonctionnel, « plus de quatre mille évêques et
archevêques, quatre cent mille prêtres et près d’un million de religieuses » .
Une entité propre certes, mais dont l’action internationale se fait uniquement
à travers le Saint-Siège. Oui, le Saint-Siège ou le Siège Apostolique, c’est le
Gouvernement de l’Eglise Catholique lequel est basé à Rome, près de Saint
Pierre Apôtre (« The Holy See is to the Church what the government is to the
state ») avec la particularité d’être à la fois sujet du droit canonique et du
droit international. Dans la parfaite composition de ce Gouvernement telle
que le relève le droit des droits, le droit le plus perfectionné, le droit
canonique, l’on retrouve le « Pontife Romain » à côté duquel sont institués
« les organes de la Curie ». Le Saint-Siège, malgré sa haute dimension
1
J.-P. SCHOUPPE, « Le Saint-Siège en tant que sujet et acteur de droit international » in
Religion and International Law/ La religion et le droit international, Leiden, Regensburg,
2016, à paraître, p. 2.
2
J.-B. NOE, Géopolitique du Vatican : la puissance de l’influence, Paris, PUF, 2015, p. 9.

2
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spirituelle, reste reconnu par l’ensemble de la Communauté internationale


comme exerçant la souveraineté qui lui est propre et dont la juridiction s’étant
à toute l’humanité.

La Curie Romaine, comme tout Gouvernement d’un Etat souverain, est


organisé de façon pyramidale et hiérarchique. La « Secrétairie d’Etat »
(comparable à la Primature) est à la tête de la Curie et est dirigé par un
« Secrétaire d’Etat », un Cardinal nommé par le Pape, celui que la pratique
générale des Etats forgée en « opinio juris » appelle communément « le
numéro deux du Vatican »3 lequel a pour fonction principale d’ordonner « les
dicastères » (les ministères). Les dicastères ou ministères se recoupant en 12
conseils pontificaux (qui exercent la pure politique interne et internationale
du Saint-Siège en tant que sujet du droit international), en 9 congrégations
qui ont une vocation beaucoup plus religieuse, en un nombre important de
commissions, de services et de tribunaux. L’on pourrait bien avancer des
chiffres. Bref, plus 27 000 personnes travaillent au Vatican dont 400 dans la
gouvernance de l’Eglise et 260 travaillant dans la « Secrétairie d’Etat »4 (tous
agents publics du Vatican).

L’Etat de la Cité de Vatican, comme l’indique l’expression, est le plus petit


Etat souverain du monde avec sa superficie de 44 hectares, soit moins d’un
quart de la superficie de Monaco, servant à la fois de support aux activités
du Saint-Siège et ayant son propre mode de fonctionnement politique en tant
que « Monarchie absolue élective » dont le Souverain Absolu est le Pape qui
concentre entre ses mains tous les pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire).
Sur pied de la Constitution (Loi fondamentale) de la Cité de Vatican, le
Souverain Pontife est assisté dans ses fonctions par la Commission
pontificale pour l’Etat de la Cité du Vatican, « composée d’un cardinal
président et d’autres cardinaux nommés pour 5 ans ». Neuf directions et
offices centraux dépendent également de cette commission, dont les
directeurs sont aussi renouvelés tous les 5 ans et coordonnent les activités et
décisions dépendant de leurs compétences 5. L’on rappelle que la trinité

3
J.-B. D’ONORIO, « Le Saint-Siège et le droit international » in Le Saint-Siège dans les
relations internationales, Actes du colloque organisé les 29 et 30 janvier 1988 à la Faculté de
droit et de sciences politique d’Aix-en-Provence par le Département des sciences juridiques et
morales de l’Institut Portalis, Paris, Cerf/Cujas, 1989, p. 36.
4
GEOPOLITIS, « Vatican et Saint-Siège : qui gouverne quoi ? », vidéo du 16 septembre 2012,
https://www.rts.ch/play/tv/geopolitis/video/vatican-et-saint-siege-qui-gouvernequoi?
id=4263878&station=a9e7621504c6959e35c3ecbe7f6bed0446cdf8da (consulté le 04 mai
2024)
5
Lire la Loi fondamentale de l’Etat de la Cité du Vatican du 26 novembre 2000 et la Loi
organique sur le gouvernement de la Cité du Vatican du 16 juillet 2002 ; Voir aussi LA
CROIX, « Organisation du Saint-Siège », https://www.la croix.com/Urbi-et-

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« Eglise Catholique », « Saint-Siège » et « Etat de la Cité de Vatican »


s’étend aussi largement à l’international, à l’extérieur de la Cité de Vatican
d’autant plus qu’elle dispose de nombreux diplomates. Ces derniers, à
l’instar du Pape et des Cardinaux, sont des citoyens du Vatican (ressortissants
de l’Etat de la Cité de Vatican) et sont couverts des immunités diplomatiques
absolues, mais c’est surtout pour le compte du Saint-Siège qu’ils exercent
leurs missions. Certains esprits faibles et non vêtus de la philosophie du droit
tombent, très souvent, dans le réductionnisme et cèdent face à l’ambiguïté
qui se cache derrière cette haute et parfaite construction politique et juridique
vaticane, ainsi que tous les enchevêtrements flous et, par moment occultés,
qui existent entre les trois entités. Ici, l’occasion de relever que les
enseignements universitaires de droit constitutionnel et de droit international
public en République Démocratique du Congo se limitent généralement et
superficiellement à raconter – et sans le prouver par ailleurs – que l’Eglise
Catholique est la Société la mieux organisée du monde, suivie de
l’Organisation des Nations Unies. C’est aussi dans ce sens-là que la présente
contribution donne une claire vision de la chose. L’auteur, un chercheur en
droit public, demeure profondément convaincu que la méthodologie, par
exemple, dans le cadre de l’étude de la grande théorie des sujets de droit
international, doit consacrer tout un chapitre fourni à l’étude de cette trinité
« Eglise Catholique », « Saint-Siège » et « l’Etat de la Cité de Vatican » pour
permettre aux étudiants en droit de maîtriser certaines notions élémentaires
et faire éviter, dans l’avenir, des fautes professionnelles graves dans
l’exercice de hautes fonctions au sein de la magistrature nationale ou au sein
des organisations internationales. Une petite ignorance d’un seul individu qui
n’a pas bien assimilé ses préceptes juridiques peut jeter en pâture toute la
Nation.

2. L’Etat de la Cité de Vatican bénéficie de tous les privilèges


internationaux dus aux Etats souverains. Tout le droit international lui
est applicable.

Parmi les privilèges dont bénéficie l’Etat de la Cité de Vatican (le Saint-
Siège) au regard du droit international se trouvent les immunités
diplomatiques. Il est tout aussi vrai que la Cour européenne des droits de
l’homme a déjà eu l’occasion de se prononcer sur l’absence de violation du

Orbi/Archives/Documentationcatholique-n-2335/Organisation-du-Saint-Siege-2013-04-
16944541 (consulté le 05 mai 2024).

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droit d’accès à un tribunal en matière d’immunité de juridiction des Etats6.


Cette immunité a pour objectif, selon la Cour, de soustraire son bénéficiaire
à la compétence des tribunaux nationaux des autres Etats. Concernant le
Saint-Siège qui est un Etat Souverain, c’est dans la droite lignée de sa
jurisprudence que la Cour Européenne des Droits de l’Homme a conclu que
« les principes de droit international reconnu en matière d’immunité des
Etats sont applicables au Saint-Siège de sorte que le rejet d’une action civile
intentée contre lui (Saint-Siège) n’est pas contraire au droit d’accès à un
Tribunal garanti par l’article 6, §1, de la Convention européenne des droits
de l’homme. » (CEDH 12 oct. 2021, J.C et autres c/Belgique, n°1165/17).
Ceci voudrait dire que par-devant la juridiction nationale ne peut être intentée
aucune action contre le Saint-Siège. Cette haute position en dernière instance
confirmait le jugement de première instance du Tribunal de Gand rendu le
1er octobre 2013 où ce dernier se déclara sans juridiction (incompétent) à
l’égard du Saint-Siège7, ce que la Cour d’Appel de Gand confirma dans son
arrêt du 25 février 2016 jugeant qu’elle ne disposait pas d’une juridiction
suffisante pour trancher le litige en raison de l’immunité de juridiction du
Saint-Siège. En des termes clairs, les juges, tels que démontrés, reconnaissent
au Saint-Siège la qualité de Souverain étranger de sorte qu’il dispose des
mêmes droits et obligations qu’un Etat. Le fondement juridique ici c’est que
le souverain n’a pas de juge, mais il peut renoncer à son droit de souverain,
pour comparaitre volontairement devant un juge.

Ces immunités sont à la fois celles d’exécution et celles liées aux fonctions
du Souverain Pontife et des agents publics du Vatican membres des services
de la Curie et des Nonces. Personne n’est sans ignorer qu’un Cardinal est un
Membre Eminent de la Curie (Membre du Gouvernement d’un Etat
Souverain) et à ce titre, il est porteur des immunités diplomatiques lesquelles
sont absolues.

Pendant longtemps, les immunités entre Etats ne furent concédées et


respectées qu’en vertu de la coutume internationale8. Les conventions de
Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires ne relèvent que d’une
partie de la codification, d’autant plus qu’une grande partie des pratiques des
Etats en matière diplomatique et consulaire n’est pas du tout reprise dans les

6
CEDH, gr. Ch., 21 nov. 2001, McElhinney c/Irlande, n°31253/96 ; Al-Adsani c/ Royaume-
Uni, n°35763/97, AJDA 2002.
7
Gand (1ère ch.), Verschueren et al c. Saint-Siège, évêques belges et supérieurs religieux, 25
février 2016, 203/AR/2889, n. 3.3 (non publié – obtenu par J.-P. SCHOUPPE).
8
I. PINGEL, (sous la direction de), Droit des immunités et exigences du procès équitable,
actes du colloque du 30 avril 2004 tenu à Paris et organisé par le Centre de recherches
communautaires (Cerco-Cde) de la Faculté de droit à Paris Saint-Maur, Paris, Pedone, 2004,
p. 7.

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deux conventions. Il est important de préciser que le Saint-Siège fut l’un des
précurseurs du développement de la diplomatie puisqu’on trouve, déjà au
Vème siècle, des signes de relations entre Etats par la représentation de
l’Evêque de Rome par des « apocrisarri » à la Cour impériale de
Constantinople. Par ailleurs, tout au long de la Question Romaine et malgré
toutes les controverses que cette dernière a pu susciter, les Etats n’ont jamais
réellement mis un terme à ces rapports et le Saint-Siège a continué à
bénéficier des règles coutumières du droit diplomatique.

Dans la pratique internationale et au regard de la jurisprudence, les


immunités diplomatiques des membres Eminents de la Curie Romaine et des
nonces apostoliques sont absolues. Seul le Saint-Siège saisi au préalable, sur
la demande d’un Etat, peut apprécier la levée de ces immunités aux fins des
poursuites pénales, sauf lorsqu’un Cardinal ou un Nonce renonce
volontairement à ses immunités aux fins de comparaître. Le cas le plus récent
du Cardinal LUIS LADARIA FERRER est emblématique. Le Vatican, par
une note verbale du 17 septembre 2018, a informé le ministère français des
affaires étrangères qu’il refusait de notifier au Cardinal LADARIA
FERRER, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, une citation à
comparaitre devant un tribunal lyonnais dans l’affaire Cardinal Barbarin,
invoquant ainsi son immunité diplomatique qui est absolue.

En effet, pour le Tribunal de l’Etat de la Cité de Vatican, saisi par le Saint-


Siège comme d’usage, après avoir reçu, par la voie diplomatique, la citation
à comparaître des plaignants, cette requête n’est pas acceptable, le Cardinal
LADARIA ayant échangé avec le Cardinal BARBARIN comme un ministre
« dans l’exercice de ses fonctions ». Le Droit international reconnaît en effet
aux chefs d’Etat et aux ministres une immunité de juridiction pour les actes
relevant de l’exercice de leurs fonctions quand ils sont liés à la souveraineté
de l’Etat. La Cour de Cassation française l’a rappelé en 2013 en soulignant
que « la coutume internationale qui s’oppose à la poursuite des Etats devant
les juridictions pénales d’un Etat étranger s’étend aux organes et entités qui
constituent l’émanation de l’Etat ainsi qu’à leurs agents en raison d’acte qui
(…) relèvent de la souveraineté de l’Etat concerné. » En vertu de ce principe,
le Tribunal du Vatican a considéré l’instance inacceptable et a établi qu’il ne
procéderait pas à la notification de la citation au Cardinal LADARIA.

Pour rappel, la comparution du Cardinal BARBARIN a été volontaire, il a


tout fait pour renoncer à ses immunités diplomatiques en démissionnant afin
d’être devant la barre. En réalité, le Cardinal BARBARIN était accusé de
n’avoir pas pris des mesures adéquates pour dénoncer la pédophilie d’un
prêtre de sa juridiction. Le Cardinal LADARIA avait conseillé au Cardinal

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BARBARIN « de prendre les mesures disciplinaires adéquates tout évitant


le scandale public. »

En l’espèce, le cas particulier de Fridolin Cardinal Ambongo n’est pas du


tout différent. Membre Eminent de la Curie Romaine, porteur des immunités
diplomatiques, aucune juridiction pénale étrangère ne peut le poursuivre sans
au préalable demander, par la voie diplomatique (Affaires étrangères), la
levée de ses immunités par le Saint-Siège. Pour rappel, le Tribunal du
Vatican ne décide de la levée des immunité d’un Nonce ou d’un membre
Eminent de la Curie que lorsqu’il est, au-delà de tout doute raisonnable,
établi que les faits lui reprochés sont « vrais » et « ont été commis en dehors
de la mission lui confiée par le Saint-Siège. » Hors, la souveraineté du Saint-
Siège n’est pas du tout matérielle se manifestant sur un territoire limité. C’est
une souveraineté spirituelle avec comme conséquence que la fonction même
de représentation et des agents publics est avant tout spirituelle, faite sur la
Sainte Eglise, sur l’Eglise Peuple Dieu, cristallisée dans la doctrine sociale
de l’Eglise Catholique et dans son Catéchisme.
Dans le même sens, il est important de préciser que même lorsque, par
impossible, un Cardinal, membre Eminent de la Curie Romaine, commettra
les crimes internationaux, la juridiction pénale d’un Etat sera toujours dans
l’incapacité de le poursuivre et de le juger tant que le Saint-Siège de lèvera
pas ses immunités diplomatiques. Ce raisonnement s’applique mutantis
mutandis à l’égard des membres des gouvernements de tous les Etats
souverains.

Dans l’Affaire de mandat d’arrêt international devant la Cour internationale


de Justice (RDC c/Belgique), alors que la Belgique, à travers son juge
d’instruction et en vertu de la compétence universelle, avait, en date du 11
avril 2000, lancé un mandat d’arrêt international contre Abdoulaye
YERODIA, ministre des affaires étrangères de la République Démocratique
du Congo, en vue de son arrestation, puis de son extradition vers la Belgique
en raison des prétendus crimes constituant « des violations graves du droit
international humanitaire », la Cour a fait remarquer, dans son arrêt du 14
février 2002, « qu’en droit international coutumier, les fonctions d’un
ministre des affaires étrangères sont telles que, pour toute la durée de sa
charge, il bénéficie d’une immunité de juridiction pénale et d’une
inviolabilité totale à l’étranger. Dans la mesure où l’objectif de cette
immunité et de cette inviolabilité est d’éviter qu’un autre Etat fasse obstacle
à l’exercice des fonctions du ministre, il n’est pas possible d’opérer de
distinction des actes opérés par ce dernier à titre « officiel » et ceux qu’il
aurait été « à titre privé », pas plus qu’entre les actes accomplis avant qu’il
n’occupe les fonctions de ministre et ceux accomplis durant l’exercice (…) »

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Ministre d’un Gouvernement étranger (Curie Romaine), toute poursuite


pénale à l’étranger d’un Cardinal romain est subordonnée par la levée des
immunités par le Saint-Siège. Pour l’instant, la justice congolaise n’a qu’à
saisir les affaires étrangères qui vont transmettre au Saint-Siège, par des
canaux diplomatiques, la demande de levée des immunités diplomatiques
d’un Cardinal.

3. La RDC a violé le droit international par le simple fait de cette note du


Procureur Général tendant à obtenir l’ouverture d’une information
judiciaire à l’encontre d’un membre éminent de la Curie Romaine.

Le non-respect de ce qui est requis de la justice congolaise (l’Etat congolais)


en droit international, la conduite d’une procédure cavalière à l’encontre d’un
membre éminent de la Curie Romaine, la tracasserie judiciaire surtout
l’inobservance de la procédure diplomatique préalable requise avant toute
émission d’un mandat de justice à l’égard d’un membre de gouvernement
d’un Etat étranger est constitutif d’un fait internationalement illicite,
attribuable à la République Démocratique du Congo, fait qui engage sa
responsabilité9 en l’espèce.

Il convient de rappeler que, conformément au projet d’articles de la CDI, il


y a fait internationalement illicite de l’Etat lorsqu’un comportement
consistant en une action ou une omission : a) est attribuable à l’Etat en vertu
du droit international ; et b) constitue une violation d’une obligation
internationale de l’Etat.

Traditionnellement, en droit des gens, on reconnait la compétence d’engager


sur le plan international un Etat aux seuls chefs d’Etat et ministres des
affaires étrangères10, mais la nécessité d’interdépendance perpétuelle entre
différents acteurs de la société internationale, plus particulièrement les Etats,
a engendré un impact considérable sur la pratique diplomatique de ceux-ci.
Depuis, l’indispensable besoin de coopérer en tous domaines et à tous
niveaux s’est imposé et son « caractère diplomatique s’atténue parce qu’(elle
n’est plus) élaboré(e) par ceux dont la mission normale est de représenter

9
Projet d’articles sur la responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite, texte
adopté par la Commission à l’Assemblée générale à sa cinquante-troisième session, en 2001,
reproduit dans Documents officiels de l’Assemblée générale, cinquante-sixième session,
Supplément n° 10 (A/56/10). Le texte reproduit ci-dessus est repris de l’annexe à la résolution
56/83 de l’Assemblée générale 12 décembre 2001.
10
Victor Rodriguez Cedeno, Rapporteur spécial, Troisième rapport sur les actes unilatéraux,
Doc. Off. CDI NU, 52ème sess., Doc. A/CN.4/505 (2000) au para. 115 à l’art.3 § 1.

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l’Etat au dehors »11. Les officiels gouvernementaux jouent un rôle de premier


plan dans cette coopération interétatique, que ces officiels émanent des
autorités centrales ou qu’ils proviennent des entités décentralisées 12. Les
canaux diplomatiques plus informels dans lesquels ces acteurs opèrent, tels
les réseaux gouvernementaux, accordent une importance prédominante aux
compétences techniques13. Ainsi, « les titulaires des ministères techniques
exercent généralement des pouvoirs dans les relations extérieures portant sur
leur domaine de compétence »14. Le droit jurisprudentiel international nous
enseigne que les agents15, représentants16 ou fonctionnaires17 avaient la
compétence pour engager leur Etat.

« Une personne est considérée comme habilitée par l’Etat pour accomplir
en son nom un acte unilatéral s’il ressort de la pratique (…) ou d’autres
circonstances (qu’il avait) l’intention de considérer cette personne comme
habilitée pour agir en son nom à ces fins »18.

En l’espèce, il est clair que le Procureur Général, en faisant cette réquisition


à son inférieur et ce, en violation du droit international, est habilité à le faire

11
Jules Basdevant, « La conclusion et rédaction des traités et des instruments diplomatiques
autres que traités » (1926) 15 R.C.A.D.I. 601 à la p. 624.
12
Maximiliano Bernad y Alvarez de Eulate, « La coopération transfrontalière régionale et
locale » (1993) 243 R.C.A.D.I. 293 aux pp. 393, 408.
13
Anne-Marie Slaughter, « Sovereignty and Power in a Networked World Order” (2004) 40
Stan. J. Int’1 L.283 aux pp.288-289.
14
Jean Salmon, « Les accords non formalisés ou ‘’solo consensu’’ » (1999) 45 A.F.D.I. 1 à la
p. 27.
15
Air France c. Commission des Communautés européennes, T-3/93, (1994) E.C.R. II-121
aux paras 1, 45-52 (Air France) ; Affaire concernant le filetage à l’intérieur du Golfe du Saint-
Laurent (Canada c. France) (1986),19 R.S.A. 224 à la p. 265 (filetage) ; Affaire des zones
franches de la Haute-Savoie et du pays de Gex (France c. Suisse) (1932), C.P.J.I. (ser. A/B)
n°46 aux pp. 169-170 (Zones franches) ; Affaire relative à certains intérêts allemands en
Haute-Silésie polonaise (fond) (Allemagne c. Pologne) (1926), C.P.J.I. (ser. A) n°7 à la p. 13
(Haute-Silésie)
16
Affaire des concessions Mavrommatis à Jérusalem (Grèce c. Grande-Bretagne) (1925),
C.P.J.I. (ser. A) n° 5 à la p. 37 (Mavrommatis – Jérusalem) ; Affaire des activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (fond) (Nicaragua c. Etats-Unis), (1986) C.I.J.
rec. Au para. 64 (Nicaragua (fond))
17
Affaire de la délimitation de la frontière maritime dans la région du Golfe du Maine (Canada
c. Etats-Unis), (1984) C.I.J. rec. 246 au para. 142.
18
Affaire de la délimitation de la frontière maritime dans la Région du Golfe du Maine
(Canada c. Etats-Unis), (1984) C.I.J. rec. 246 au para. 139 (Golfe du Maine) ; Voir aussi
Cedeno, Troisième rapport, supra note 27 au para.115 à l’art.3 § 2.

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et a agi dans un domaine de son ressort19, qu’il est compétent20 et selon le


principe retenu par le Projet d’articles de la CDI,

« Le comportement de tout organe de l’Etat est considéré comme un fait de


l’Etat d’après le droit international, que cet organe exerce des fonction
législative, exécutive, judiciaire ou autres, quelle que soit la position qu’il
occupe dans l’organisation de l’Etat, et qu’elle que soit sa nature en tant
qu’organe du gouvernement central ou d’une collectivité territoriale de
l’Etat ; un organe comprend toute personne ou entité qui a ce statut d’après
le droit interne de l’Etat »21.

Il y a violation d’une obligation internationale par un Etat lorsqu’un fait dudit Etat
n’est pas conforme à ce qui est requis de lui en vertu de cette obligation, quelle que
soit l’origine ou la nature de celle-ci (conventionnelle ou coutumière). En l’espèce,
la RDC, à travers son Parquet Général, n’a pas fait ce qui lui est requis en droit
international, spécialement en droit coutumier : « le respect des immunités dues à
Cardinal, membre Eminent de la Curie Romaine. »

Le droit de la responsabilité internationale de l’État a toujours été d’essence


prétorienne. Ce sont les tribunaux arbitraux constitués à la fin du XIXème siècle et
au début du XXème qui en ont posé les bases – surtout dans les affaires opposant
des États européens ou les États-Unis d’Amérique aux pays latino-américains,
sommés de respecter leurs obligations internationales à l’égard surtout des intérêts
étrangers menacés par les révolutions à répétition et l’instabilité régnant alors dans
le sous-continent. C’est la Cour permanente qui l’a figé en des formules bien
frappées devenues aujourd’hui la vulgate du droit de la responsabilité. Et, dans une
large mesure, la C.D.I. a pris note, dans ses Articles de 2001, de ce droit d’essence
jurisprudentielle sans en contester les éléments fondamentaux et en se contentant
d’en combler certaines lacunes et d’en lever des incertitudes, tout en y ajoutant un
geste prudent mais bien venu de développement progressif.

« L’institution de la responsabilité pour fait illicite est au cœur de tout ordre


juridique. S’il n’existe pas de règles définissant les effets juridiques d’une violation

19
Statut juridique du Groenland oriental (Norvège c. Danemark) (1933), C.P.J.I. (ser. A/B)
n°53 à la p. 71 (Groenland oriental) ; Voir aussi Essais nucléaires (Australie), supra à la p.
310 (Opinion individuelle du juge Ignacio-Pinto)
20
Affaire des Minquiers et des Ecréhous (France c. Royaume-Uni), (1953) C.I.J. rec. 47 à la
p. 71.
21
Projet d’articles de la CDI, supra note 26, à l’art. 4.

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du droit, la notion d’ordre juridique est vide de sens, car il n’y a pas de différence
entre le comportement conforme au droit et celui qui ne l’est pas. »22

Se bornant à relever, au coup par coup, que telle ou telle disposition des Articles de
la C.D.I. exprime l’état du droit international coutumier aux fins du règlement de
l’affaire qui lui est soumise, la Cour, à juste titre, ne se considère pas comme tenue
de trancher la question de savoir si les Articles de la CDI sur la responsabilité de
l’État – auxquels elle se réfère inégalement selon ses arrêts23– reflètent globalement
des règles coutumières24

Force doit être de réaliser que la responsabilité de l’État est engagée au plan
international lorsqu’un comportement attribuable à l’État constitue une violation
d’une obligation internationale de celui-ci. L’acte posé par le Procureur Général à
l’encontre l’image international d’un Cardinal, membre Eminent de la Curie
Romaine, en violation du droit international coutumier, engage la responsabilité de
la République Démocratique du Congo. Il y a là un préjudice qui est causé lequel
mérite bien réparation.

II. Le Cardinal Fridolin Ambongo, Membre Eminent du Saint-Siège, peut, en


toute discrétion, s’il se reproche moralement, renoncer à ses immunités
diplomatiques par sa démission.

Le Cardinal BARBARIN l’a fait, il a renoncé à ses immunités diplomatiques, il


a déposé sa démission, bien que le Saint-Siège a refusé de prendre acte de sa
démission, le CARDINAL BARBARIN a accepté de comparaître. Il est tout
aussi vrai qu’on ne peut pas comparer les deux situations, d’autant plus que la
justice française, pour atteindre le Saint-Siège, est passée normalement par la
voie diplomatique. La renonciation aux immunités diplomatiques est un acte

22
Ch. Dominicé, « Observations sur les droits de l’État victime d’un fait internationalement
illicite », in L’ordre juridique international entre tradition et innovation. Recueil d’études,
P.U.F., 1997, p. 261.
23
Voir dans son arrêt du 25 septembre 1997, Projet Gabčíkovo-Nagymaros
(Hongrie/Slovaquie), Rec. 1997, p. 7 (ibid., pp. 38 - 39, par. 47, p. 39, par. 50, p. 40, par. 51,
p. 41, par. 53, p. 42, par. 55, p. 46, par. 58, p. 54, par. 79, p. 55, par. 83), alors même qu’il ne
s’agissait que du projet adopté provisoirement par la C.D.I. en première lecture ; mais pas une
seule fois dans le dernier arrêt qu’elle a rendu en matière de responsabilité le 30 novembre
2010 dans l’affaire Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée c. République démocratique
du Congo).
24
C.I.J, arrêt, 26 février 2007, Application de la convention pour la prévention et la répression
du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), Fond, Rec. 2007, par.
414.

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Regards juridiques africains n°076-05-24

volontaire (voir aussi l’affaire RAMAZANI BAYA, Ambassadeur du Zaïre à


Paris).

C’est vrai qu’une partie de la doctrine pense que « les immunités diplomatiques
consacrent l’impunité et bloquent le droit d’accès au juge », mais cela n’est pas
du tout vrai, à la lumière de la jurisprudence récente.

Le droit d’accès au juge est garanti par de nombreux instruments internationaux,


parmi lesquels on trouve l’article 14 du Pacte International relatif aux droits
civils et politiques25, ainsi que l’article 6 de la Convention Européenne des
Droits de l’homme qui parle de « droit à un procès équitable » en ces termes :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement,


publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et
impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et
obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière
pénale dirigée contre elle »26.

Comme vu, l’immunité – qu’elle soit étatique, reconnue au chef d’Etat, ou


diplomatique – est une restriction à ce droit puisqu’elle permet à son bénéficiaire
d’échapper à un recours judiciaire à son encontre, selon les cas. En ce sens, la
victime étant déboutée d’une quelconque demande de réparation à l’encontre du
défendeur pour les dommages potentiellement subis, le privilège d’immunité est
en contradiction avec ce droit d’accès au juge. De plus, certains vont un peu plus
loin et estiment que l’immunité étatique « constitue aussi plus généralement un
frein à la lutte contre l’impunité ».

Toutefois, bien que la Cour Européenne des Droits de l’Homme reconnaisse le


caractère fondamental du droit d’accès au juge, celle-ci a insisté sur la différence
existant entre « immunité » et « impunité ». Elle rappelle ainsi, dans son arrêt
Al-Adsani c. Royaume-Uni27, que ce droit d’accès au juge n’est pas absolu et

25
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, signé à New-York le 16 décembre
1966.
26
Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à
Rome le 4 novembre
1950, art. 6, §1.
27
Cour eur. D.H., arrêt Al-Adsani c. Royaume-Uni, 21 novembre 2001, req. n°35763/97,
http://www.echr.coe.int (consulté le 03 mai 2024), §48 ; voy. aussi : Cour eur. D.H., arrêt
McElhinney c. Irlande, 21 novembre 2001, req. n°31253/96, http://www.echr.coe.int (consulté
le 03 mai 2024) ; Cour eur. D.H., arrêt Fogarty c. Royaume-Uni, 21 novembre 2001, req.
n°37112/97, http://www.echr.coe.int (consulté le 03 mai 2024) ; Cour eur. D.H., arrêt Jones et

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Regards juridiques africains n°076-05-24

qu’il peut souffrir certaines exceptions. L’immunité en est une puisqu’il s’agit
d’une exception d’ordre procédural en ce sens qu’elle « n’éteint pas le droit
matériel en cause, mais empêche les cours et tribunaux nationaux de statuer sur
ce droit »28

CONCLUSION

Le Cardinal, membre éminent de la Curie Romaine, est porteur des immunités


diplomatiques qui sont absolues. Un Etat qui voudrait engager la procédure
pénale contre une telle personnalité devra au préalable demander la levée des
immunités de cette dernière par le Saint-Siège. La voie pour cette procédure reste
unique et exclusive, c’est la voie diplomatique. C’est-à-dire que les affaires
étrangères saisissent le Saint-Siège de la demande de levée des immunités et
attendent sa réponse. Si la réponse est positive, les poursuites seront
enclenchées, si elle est négative, l’Etat qui veut poursuivre se trouvera bloqué.

L’acte de procédure posé par le Procureur Général près la Cour de la République


Démocratique du Congo, du point de vue de droit, est nul et non avenu en ce
qu’il ne rend pas compte de cette réalité juridique. La méconnaissance du droit
international dans cette procédure enclenchée n’honore pas la République
Démocratique du Congo. Nous devons nous ressaisir. On n’invite pas un
ministre d’un Gouvernement étranger ou d’un Etat souverain de cette manière-
là. Il y a des préalables à rencontrer. Ce faisant, la République Démocratique du
Congo a posé un acte internationalement illicite.

Certains esprits faibles se sont figés sur l’Accord entre le Saint-Siège et la


République Démocratique du Congo, en son article prétendument 8§2, pour
autant que cela soit authentique et vrai, nous tenons à rappeler que « le terme
évêque » visé dans cet accord ne concerne pas un évêque élevé à la dignité
« cardinalice » et membre Eminent de la Curie Romaine. Non, un évêque devenu
Cardinal n’est plus un Evêque ordinaire. Les cardinaux sont, dans une certaine
mesure, papables et électeurs du Pape. Pensons-nous qu’un futur Pape de la
Sainte Eglise Catholique Romaine ne soit pas protégés diplomatiquement par
des immunités? D’où l’importance de veiller sur le contexte d’un Accord
interétatique. Le régime juridique des immunités des membres de la Curie est
international. Le «contexte» comprend le texte du traité, préambule et annexes
inclus, ainsi que certains accords et instruments établis à l’occasion de la

autres c. Royaume-Uni, 14 janvier 2014, req. n°34356/06 et 40528/06, http://www.echr.coe.int


(consulté le 03 mai 2024).
28
A. BELLAL, op. cit., p. 33.

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conclusion du traité dans certaines circonstances29. Interpréter une disposition


dans son contexte consiste à tirer des conclusions compte tenu, par exemple, de
la structure, du contenu ou de la terminologie d’autres dispositions figurant dans
le même accord, en particulier celles qui précèdent et suivent la règle à
interpréter30. Par l’«objet et le but», on entend l’objectif explicite ou implicite de
l’accord appliqué, ou dans certains cas, le but de la disposition particulière
appliquée :

« Celui qui interprète un traité doit d’abord chercher l’objet et le but du traité
dans les termes de la disposition en cause, lue dans son contexte. Dans les cas
où le sens du texte lui-même est ambigu ou n’est pas concluant, ou lorsque l’on
veut avoir la confirmation que l’interprétation du texte lui-même est correcte,
celui qui interprète le traité peut avoir recours à des considérations relatives à
l’objet et au but du traité dans son ensemble. »31

29
Voir l’article 31 2) de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Voir aussi l’Accord
sur les technologies de l’information (ATI). Rapport du groupe spécial CE – Produits des
technologies de l’information, paragraphes 7.376 à 7.383.
30
Rapport de l’Organe d’appel Pérou – Produits agricoles, paragraphe 5.94.
31
Voir le rapport de l’Organe d’appel Etats‑Unis – Crevettes, paragraphe 114. Voir aussi les
rapports des Groupes spéciaux Etats‑Unis – Article 301, Loi sur le commerce extérieur,
paragraphe 7.22; Inde – Brevets (Etats‑Unis), paragraphe 7.18; Etats‑Unis – Vêtements de
dessous, paragraphe 7.18; et le rapport de l’Organe d’appel Argentine – Chaussures (CE),
paragraphe 91.

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