Vous êtes sur la page 1sur 105

Produits de

charcuterie et
salaisons
A - Introduction
 Filière ancestrale dédiée à la conservation
des viandes et produits carnés
 Charcuterie = produit destructuré, plus ou
moins reconstitué
 Salaisons = pièce entière, conservée à
l’aide du sel
Introduction
 1. Bases techniques de la conservation
 Obstacle essentiel à la conservation : les micro-
organismes
 Conserver = empêcher leur développement
 Première voie possible = désinfection : opération
impossible autrement que physiquement
(stérilisation), mais l ’effet obtenu n’est que transitoire.
Méthodes chimiques présentant un danger logique
pour le consommateur
Bases techniques de la conservation

 Alternative = rendre le milieu nutritif inapte


au développement des micro-organismes
 Résultat pouvant être obtenu par
abaissement de la quantité d ’eau disponible
(aw = activité de l ’eau). Grande sensibilité des
micro-organismes à ce paramètre
Bases techniques de la conservation

 Les bactéries ne se développent pas pour des


aw < 0,86 (en fait 0,90 pour la majorité des
espèces)
 Moisissures beaucoup plus résistantes,
tolèrent bien les milieux jusqu ’à 0,80 (et
même bcp moins pour certaines d ’entre
elles)
 Voie la plus simple d ’abaissement de
l ’activité de l ’eau = séchage
Bases techniques de la conservation

 Le séchage n’est cependant pas une


méthode « facile »
 Les produits secs à la valeur adéquate sont
largement dénaturés, et souvent difficilement
consommables, car à une aw de 0,80
correspond en fait une teneur en eau
beucoup plus faible : problèmes de texture
Bases techniques de la conservation
 Le séchage n’est pas non plus facile à conduire, car il
requiert des conditions thermiques appropriées,
suffisamment hautes pour inhiber tout développement
microbien en cours d ’opération, suffisamment basses
pour conduire à un produit acceptable
 En approche traditionnelle, applications limitées à des
cas favorables : fort ensoleillement, forts mouvements
d ’air alliés à une hygrométrie basse, séchage
complémentaire à d ’autres méthodes d ’abaissement
de l ’activité de l ’eau, « boucanage » des viandes.
 Alternative au séchage : recours à des agents
dépresseurs de l’activité de l’eau
Bases techniques de la conservation

 Agent dépresseur de l ’activité de l’eau = substance


susceptible d ’induire, en solution, une baisse d ’aw
beaucoup plus forte que ce que sa concentration
permettrait d ’espérer en solution idéale.
 Le sel et le sucre ont cette capacité, et sont des
molécules consommables
 Avec le sel, on atteint en solution saturée (à 250g/l)
une aw de 0,75, avec le sucre, on a des valeurs
proches, mais avec 670 g/l
Bases techniques de la conservation

 Historiquement, le sel était le seul disponible,


d’où un poids ancestral important de la
salaison. Le sucre est réservé à des
applications plus spécifiques
 Produits de ces techniques ancestrales
souvent un peu « ingrats » à la dégustation !
Bases techniques de la conservation

 Sans intervenir à proprement parler sur l’aw,


on peut influer sur l’acidité du milieu
 Les micro-organismes ne se développent pas
à des pH < 4,2, valeur assez facile à obtenir
sans recourir à des techniques irréalistes
Bases techniques de la conservation

 Mise en œuvre très ancienne de la technique


de la marinade, par le vinaigre, qui possède
en outre de bonnes dispositions à
l ’attendrissement des viandes, paramètre
important pour les gibiers ; mais les effets sur
le goût ne sont pas négligeables (comme
pour toutes les méthodes exposées…)
 Acidification possible par la voie fermentaire
Bases techniques de la conservation

 Dernier procédé, enfin, précurseur des


méthodes modernes d ’emballage :
l’isolement du produit vis-à-vis du milieu
extérieur, pourvu qu’il ait préalablement été
assaini
 Techniques de confisage dans la graisse, la
phase grasse jouant le rôle de barrière vis-à-
vis des micro-organismes extérieurs au
produit
Bases techniques de la conservation

 Nombreuses applications, là aussi : confits de


viande, rillettes, fromages conservés dans
l’huile…
 Méthode sympathique, mais coûteuse dans
sa mise en œuvre, et nécessitant une bonne
préparation du produit
2. Impact actuel des procédés
traditionnels
 L’expérience ancestrale a permis la mise au
point de méthodes complexes, résultant de la
combinaison de plusieurs techniques
 Au final, les résultats sont souvent
performants, et sont surtout satisfaisants sur
le plan sensoriel, où ces techniques
représentent une vraie alternative de
préparation
Impact actuel des procédés
traditionnels
 Les salaisons, et tout particulièrement la
charcuterie, constituent actuellement un pan
important des activités agro-alimentaires
 Le confisage au sucre demeure utilisé, mais
ne peut être considéré comme une technique
en développement
 Les marinades et confisages à la graisse
ont une portée moindre, largement artisanale,
mais jouissant d ’une bonne image de marque
Impact actuel des procédés
traditionnels
 Indéniablement, l ’émergence au XX°siècle des
techniques de réfrigération, la maîtrise des
traitements thermiques ont joué en défaveur de ces
méthodes, parfois contestées sur le plan diététique
 Le souci de « l’authentique », ou leur ancrage dans
les pratiques alimentaires ont permis de les maintenir
 Le développement de nouveaux produits a également
permis d’en accroître la diffusion
B – L’industrie et ses bases
 1. Introduction
 Porc = animal omniprésent depuis l ’Antiquité
 Animal omnivore, facilement domestiqué, se
nourrissant de tout ce qu ’il trouve : glands,
châtaignes, pommes de terre, son, farine, déchets
ménagers…
 Animal de voirie au Moyen-Âge, présent dans les
rues des villes
 Animal sociable, intelligent, malheureusement
rentable seulement après sa mort !
1. Introduction

 Rituel de l ’abattage = grand moment, où


nombre de techniques sont mises en œuvre
pour sa conservation
 Les disponibilités locales ont permis
l ’extension de ces méthodes à d ’autres
types de viandes
 Industrialisation tardive, au début du XX°
siècle
1. Introduction

 Maintien d ’une forte présence artisanale (7000


artisans-charcutiers qui fabriquent pour partie leurs
produits)
 Forte évolution de la filière dans la seconde moitié du
XX° siècle, pour répondre aux préoccupations
diététiques :
 Fabrications moins grasses
 Elaboration de nouveaux produits plus légers
 Innovation par élargissement du champ d ’application des
techniques
2. Données économiques de la filière

 France = second pays producteur européen,


avec environ 1,2 Mt derrière l ’Allemagne (2,3
Mt), devant l ’Italie (1,1 Mt) et l ’Espagne (0,95
Mt)
 Chiffre d ’affaires annuel supérieur à 6
milliards d ’euros
2. Données économiques de la filière

 Nombre d ’entreprises industrielles en forte


baisse depuis 20 ans, actuellement de l ’ordre
de 350, dont les 2/3 ont moins de 50 salariés,
pour seulement 12 % du CA global
 Un peu plus de 30000 salariés employés, en
baisse légère depuis 1950 (35000 salariés
alors)
2. Données économiques de la filière

 Répartition géographique des productions :


 Bretagne : 27,2 %
 Pays de Loire : 14,4 %

 Rhône Alpes : 14,3 %

 Ile de France : 7,9 %

 Nord : 6 %

 Transforme 75 % de la production porcine


française
2. Données économiques de la filière

 Production porcine française déficitaire


jusqu ’en 1993 (jusqu ’à 300000 t/an),
excédentaire depuis d ’environ 10 %
 La France n ’importe pratiquement pas de
carcasses, mais des pièces ou morceaux, en
général provenant de l ’UE
 Consommation stable, voire en hausse (crise
bovine en 2000-2001)
2. Données économiques de la filière

 Porc = 37 % de la viande consommée, contre 29 aux


bovins, 27 aux volailles, 6 aux ovins et 1 aux équidés
 Consommation de charcuterie stable : 19 kg/an pour
les hommes, 12 kg/an pour les femmes, les
agriculteurs étant les plus gros consommateurs
 La France est une petite consommatrice de porc
(35,8 kg/an), par comparaison au Danemark (62,5), à
l ’Espagne (55,5), à l ’Allemagne (55,1) ou à
l ’Autriche (54,4)
2. Données économiques de la filière

 Production française de charcuterie en


constante progression
 Salaisons (Jambons cuits, secs, lardons,
poitrines) = 38 % de la production
 Plats cuisinés : 16 %
 Charcuteries (saucisses, saucissons cuits,
pâtés ) = 35 %
 Saucissons secs = 8 %
2. Données économiques de la filière

 France largement exportatrice de produits de


salaison et de charcuterie, mais seulement
depuis 1993, l ’UE (44 %) et l ’Europe hors
UE (39 %) étant les principales destinations
des produits exportés
 La part des produits traiteur est en hausse
constante et représente aujourd ’hui plus de
15 % du tonnage
2. Données économiques de la filière

 La coupe (vente au détail) reste de peu (48


%) le premier mode de vente et de
conditionnement, devant le préemballé (libre-
service)(42 %)
 Les conserves (8 %) et le surgelé (2 %) sont
des modes assez mineurs de distribution
3. Définitions et réglementation

 Pas de définition avant 1912, pas de


renouvellement de ces définitions obsolètes
 1969 : les fabricants, conscients du vide légal
autorisant toutes les dérives, définissent les
produits dans le premier Code des usages
de la charcuterie, de la salaison et des
conserves de viandes
3. Définitions et réglementation
 Le Code n ’est pas une réglementation, mais
un consensus entre fabricants, qui estiment
que le respect du Code garantit l ’absence de
tromperie pour le consommateur
 Seuls produits définis par décret : les foies
gras et préparations « à base de » (décret
93/999)
3. Définitions et réglementation
 Code revu régulièrement depuis 1969,
s ’adaptant aux nouvelles demandes des
consommateurs
 Code reprend la législation en vigueur, et y
rajoute des règles complémentaires :
 d ’étiquetage, non définies par les textes
 des règles de composition des produits de
charcuterie, salaisons et conserves de viande
d ’origine française comme étrangère
3. Définitions et réglementation
 A côté de ce Code, les produits de charcuterie
et de salaison sont soumis à l ’ensemble des
textes pouvant les concerner, notamment
ceux relatifs aux viandes hachées,
préparations de viande et préparations de
viandes hachées
3. Définitions et réglementation
 Les règles applicables aux PCS sont les
réglementations usuelles :
 La composition permet de distinguer 3
classes d ’ingrédients :
 Matières premières fondamentales : maigre, abats,
gras…
 Ingrédients autres qu ’additifs : lait, œufs, gelée,
épices et aromates..
 Additifs, à fonction exclusivement technologique
4. Classification
 Code des usages définit 16 classes :
 1, 2, 3 : Pièces et morceaux
 1 : Pièces crues, salées, saumurées, étuvées et/ou fumées
 2 : Pièces crues maturées / séchées
 3 : Pièces et morceaux de viandes cuits
 4, 5, 6 : Saucisses et saucissons
 4 : Chair à saucisse, saucisses et saucissons cuits ou
précuits
 5 : Saucisses et saucissons secs
 6 : Saucisses et saucissons cuits
4. Classification
 7 : Pâtés, mousses, terrines, crèmes,
galantines, ballotines et confits de foie
 8 : Rillettes, frittons et grattons

 9 : Produits à base de tête et/ou de langue

 10 : Andouilles, andouillettes

 11 : Tripes, tripoux, pieds


4. Classification
 12 : Boudins noirs
 13 : Boudins blanc, quenelles

 14 : Conserves à base de viande bovine

 15 : Foie gras et produits à base de foie gras

 16 : Autres produits (préparations

d ’assemblage)
C. Matières premières
 1. Définitions
 Décret 84/1147 du 7/12/84 : ingrédient =
« toute substance, y compris les additifs,
utilisée dans la fabrication ou la préparation
d ’une denrée alimentaire, et qui est encore
présente dans le produit fini, éventuellement
sous une forme modifiée »
1. Définitions
 Viande (arrêté du 22/1/93) : « toutes les
parties d ’animaux domestiques, de lapins
domestiques, de gibier d ’élevage et de gibier
sauvage susceptibles d ’être livrés au public
en vue de la consommation »
2. Espèces animales
 a) Porc
 En France, les Large White et les Landrace
dominent (+ qq races hybrides)
 Toutes les parties sont consommées (« Dans le

cochon, tout est bon »)


 20 % seulement consommés en viande fraîche

(longe, jambon découpé (rouelles), en rôtis et


côtelettes)
2. Espèces animales
 Porc charcutier : mâle ou femelle, non
reproducteur, ayant achevé sa période
d ’engraissement. Abattu vers 6 mois, poids de
100 kg environ. Au-delà, la production de gras
l ’emporte sur le maigre.
 Truie ou coche : porc femelle après la mise bas

 Verrat : porc mâle reproducteur

 Porcelet ou cochon de lait


2. Espèces animales
 Seuls les porcs charcutiers sont utilisés, la
coche pouvant toutefois l ’être pour les
saucissons secs et les rillettes.
 Pas d ’utilisation des verrats, à cause de
fortes odeurs sexuelles
 Verrassons utilisables en faible proportion,
s ’ils n ’ont pas d ’odeur sexuelle
2. Espèces animales
 b) Bœuf, veau
 Bœuf autrefois matière première complémentaire
du porc. L ’utilisation optimisée de l ’ensemble de
la carcasse a rendu économiquement
inintéressante cette pratique, entretenue
seulement dans quelques produits typiques.
 c) Mouton, chèvre
 Utilisation sans intérêt technique ou sensoriel…
piège à touristes !
2. Espèces animales
 d) Cheval, âne, mulet
 Usages dans la fabrication de saucissons secs
typiquement régionaux
 Arles = transformation en saucissons secs

d ’animaux tués aux arènes


 Intérêt sensoriel tout à fait réel
2. Espèces animales
 e) Lapins, volailles
 Usage ancestral dans la fabrication des
pâtés, terrines et galantines
 Oie dédiée essentiellement aux rillettes
 Fort développement aujourd ’hui de la dinde
 Oies et canards gavés : foie gras, magrets et
confits ; reste de la carcasse en rillettes
2. Espèces animales
 e) Gibier
 Protection des espèces animales sauvages :
la viande de gibier provient essentiellement
soit d ’importations, soit d ’élevages
 Essentiellement pour la fabrication des pâtés,
terrines et galantines
 Quelques fabrications de saucissons secs de
sanglier
3. Le maigre
 Maigre = ensemble des muscles striés de la
carcasse, après désossage, découennage et
parage (séparation des masses graisseuses,
tendons, aponévroses, nerfs)
 Unité de base = fibre musculaire, qui n  ’est
conservée que dans les pièces, morceaux,
rillettes
3. Le maigre
 Caractéristique fondamentale = pouvoir de
rétention d ’eau ou PRE
 Conditionne le rendement, mais aussi la
qualité sensorielle du produit : plus le PRE est
bas, plus la texture est « sèche »
 En pratique, les maigres sont toujours traités
dans la période de post-rigor
3. Le maigre
 Pendant l ’établissement de la rigor mortis, le pH
baisse plus ou moins rapidement, en 24 h
environ, puis remonte durant la maturation
 Au plus bas pH, les réserves de glycogène sont
à peu près épuisées, l ’ATP est transformée et le
calcium libéré : les protéines sont soudées par
des ponts entre chaîne : hydrogène et disulfures
(détruits par la chaleur), électrostatiques et
ponts formés par des ions divalents.
3. Le maigre
 A ce moment, la structure est fermée : les
molécules d ’eau de constitution ont du
mal à rester accrochées aux protéines,
l ’eau ajoutée a du mal à les rejoindre
 La rupture de ces liaisons conduit à une
structure dite ouverte, où l ’eau peut
atteindre les sites hydrophiles et s ’y
accrocher
3. Le maigre
 En fait, presque tous les procédés font
intervenir, à un moment donné, une addition
d ’eau (saumure, bouillon, glace…) ; laquelle
précède souvent une opération où l ’eau est
retranchée (fumage, cuisson, séchage…)
 Structure ouverte = coloration foncée : la
structure absorbe les rayons lumineux ;
structure fermée = couleur claire, car les
rayons lumineux ne pénètrent pas et sont
réfléchis
3. Le maigre
 Structure ouverte = coloration foncée :
la structure absorbe les rayons lumineux
 Structure fermée = couleur claire, car les
rayons lumineux ne pénètrent pas et sont
réfléchis
3. Le maigre
 Deux paramètres jouent un rôle vraiment
fondamental : le pH et la teneur en ions
calcium.
 Le pH : aux abords du point isoélectrique,
les charges négatives et positives sont en
nombre à peu près égal : l ’attraction
électrostatique entre les chaînes est
maximale, le PRE au plus bas.
3. Le maigre
 Si pH > pHi (= 5,0 à 5,2), les formes COO-
prédominent, et les répulsions sont alors fortes :
plus le pH est élevé, plus le PRE est élevé
 Si pH < pHi, il y a prédominance des formes
NH3+. La répulsion existe effectivement, mais la
gamme est moins facilement praticable, et
l ’intensité des répulsions moins grande
3. Le maigre
 La teneur en ions Ca2+ est le second
paramètre important, car ceux-ci, même
en zone de pH élevé, vont « ponter » les
groupements COO- et diminuer
sensiblement le PRE
3. Le maigre
 La modification du pH en vue
d ’augmenter le PRE est délicate : le
pouvoir tampon des protéines est
considérable, et l ’élévation du pH
compromet les aptitudes à la conservation
 Par contre, l ’ajout de sel est un bon
moyen de rompre les liaisons
électrostatiques
3. Le maigre
 L ’ajout de polyphosphates, qui rompent
les liaisons calcium
 Ou encore l ’usage de liants,
susceptibles de retenir l ’eau avant qu ’elle
ait migré
 Les liants sont interdits pour la fabrication
des pièces cuites, attention alors au PRE
naturel des viandes !
3. Le maigre
 Autre paramètre important : le pouvoir
émulsifiant
 Même fonctionnement que pour le PRE :
le PE est dû à l ’existence de segments
lipophiles (chaînes hydrocarbonées) et
sera d ’autant plus élevé que ceux-ci
seront stériquement accessibles
3. Le maigre
 Plus il y a de pontages, plus bas est le PE
 Rôle déterminant du sel et des
polyphosphates, répercussions
importantes sur la fabrication des pâtes
émulsionnées (mousses de foie,
saucisses à pâte fine…).
4. Viandes normales, défauts des viandes

 Viandes normales :
 LepH est compris entre 5,6 et 6,2 dans les
24 heures suivant l ’abattage ; le PRE et le PE
sont bons, la couleur homogène et
agréable, la stabilité microbiologique
normale
4. Viandes normales, défauts des viandes

 Viandes PSE :
 De l ’anglais pale, soft and exsudative. La chute de pH est
très rapide à 5,2, la remontée n ’excédant pas 5,4 - 5,5.
 L ’échauffement des muscles est très important (jusqu ’à
40°C).
 La couleur est claire, le PRE très bas, avec une forte
exsudation corrélative, le PE est également très faible
 Ces viandes ne sont guère utilisables que dans des produits
hachés (avec ajout d ’additifs) ou dans des produits secs où
la perte en eau est recherchée
4. Viandes normales, défauts des viandes

 Viandes acides :
 La chute de pH est normalement lente, il n ’y a donc pas
d ’effet thermique comme pour les PSE.
 Une teneur initiale très élevée en glycogène amène
simplement à une forte production d ’acide lactique, ce qui
abaisse le pH à des valeurs très faibles (5,0 - 5,2).
 Le phénomène est fréquent pour la race Hampshire.
 Les rendements en pièces cuites sont très mauvais (faible
PRE).
 A l ’origine des viandes « pommade », grisâtres et
spongieuses, d ’effet désastreux dans les jambons
(délitement à la découpe)
4. Viandes normales, défauts des viandes

 Viandes DFD (Dark, firm, dry)


 Faible potentiel en glycogène, baisse de pH
très limitée (souvent supérieur à 6,2).
 Excellent PRE et PE, coloration très sombre,
mais mauvaise stabilité microbiologique ;
nécessité de traitement rapide par la cuisson.
5. Tissu conjonctif
 Enveloppes des fibres musculaires et
muscles, tendons et ligaments, enveloppe
des cellules adipeuses, veines et artères
 Deux constituants principaux : collagène
(protéine la plus répandue du règne
animal) et élastine (rare dans le tissu
musculaire, abondante dans les boyaux et
artères).
5. Tissu conjonctif
 Collagène et élastine ne sont jamais affectés par
la rigor mortis ou la maturation de la viande,
leurs caractéristiques mécaniques les rendant
très « perceptibles »
 Collagène non dénaturé très peu sujet au
gonflement, mais celui-ci devient important sur
du collagène traité par la chaleur ou l ’acidité
(éclatement des saucisses trop riches en
collagène).
5. Tissu conjonctif : collagène
 A l ’état natif, aucune propriété
émulsifiante ou gélifiante ; renforce
toutefois la fermeté des produits (croquant
des saucisses…)
 Dénaturé, devient hydrosoluble et gélifiant
: gélatine ; est alors un bon émulsifiant,
et aussi un excellent fixateur d ’arômes.
5. Tissu conjonctif : collagène
 Industriellement, on utilise des couennes,
nettoyées et épilées mais brutes, ou bien
déshydratées, ou encore des fibres de
conjonctif pour donner de la texture aux
pâtes fines
 L ’incorporation de collagène aux produits
est strictement réglementée dans le Code
des usages
6. Gras
 Porc, oie et canard sont les seuls gras
utilisés en PCS
 Gras de porc :
 Plussouvent de gras de couverture que gras
intramusculaire, le porc étant un « animal
gras à chair maigre »
6. Gras (de porc)
 Gras durs :
 Bardière (gras dorsal),
 utilisé dans les produits hachés crus, mais servant
évidemment aussi à la confection des bardes.
 « L ’amaigrissement » relatif des porcs fait que les bardes
actuelles sont trop fines : bardes aujourd ’hui reconstituées.
 Panne (entoure les rognons),
 à faible assise protéique, fortement saturé, inapte à
l ’incorporation dans les pdts crus (manque d ’assise).
 Utilisé surtout dans les rillettes ou les saucisses à pâte fine.
Les gras durs sont caractérisés par une très faible teneur en
eau
6. Gras (de porc)
 Gras mous :
 teneur en eau beaucoup plus élevée,
 se situent en général entre les muscles, et
sont de fait souvent utilisés avec le maigre.
 On distingue parmi ces gras
 le gras de mouille, situé à la base de l ’abdomen à
la jonction poitrine/jambon
 le ratis (mésentère), repli graisseux soutenant
l ’intestin grêle
6. Gras (de porc)
 La composition en acides gras est
importante, car elle conditionne le point de
fusion, d ’autant plus haut que les graisses
sont saturées.
 L ’insaturation va croissant de l ’intérieur
vers l ’extérieur de l ’animal
6. Gras (de porc)
 Les gras de porc sont globalement très
« saturés »
 lesteneurs en C18:2 excédent rarement 10
%, sauf avec régime alimentaire très insaturé
(maïs, par exemple ; ou maïs + huile de maïs)
 Profil type = 45 à 55 % de saturés, 35 à
45 % de monoinsaturés, 8 à 10 % de
polyinsaturés
6. Gras
 Graisses d ’oie et de canard
 Insaturation plus forte que la graisse de porc,
avec 55-60 % de monoinsaturés, 10-12 % de
polyinsaturés, 25-30 % de saturés
 Point de fusion beaucoup plus bas,
améliorant la tartinabilité (rillettes,
mousses…)
6. Gras
 Altérations des gras
 Lipolyse = hydrolyse des TG, conduit à des acides
gras libres.
 Importance mineure, mais réelle sur produit séchés et
maturés (saucissons secs) où le rôle sensoriel est
important
 Rancissement oxydatif : favorisé par l ’insaturation, la
température, la présence de traces de métaux
catalyseurs (fer, surtout). Evidemment très influent
sur la flaveur des produits
7. Abats
 Curieusement, pas de définition
réglementaire : les abats sont constitués
des parties comestibles de l ’animal autres
que le maigre et le gras.
 En général : foie, reins, cœur, langue,
museau, estomac intestins, pieds oreilles
7. Abats
 Pour l ’agneau et le veau, en plus, le
thymus (ris)
 Pour le porc, la couenne, le sang,
l ’épiploon (crépine)
 Tête de porc entière = abat, mais parties
musculaires séparées = maigre….Sang,
utilisé pour le boudin = abat ; dérivés du
sang = liants ou colorants.
7. Abats
 Usages les plus fréquents dans les
produits hachés, sauf recettes
particulières, toutes entières basées sur
un abat particulier :
 Boudin noir
 Tripes, andouillettes et andouilles
 Foies gras de canard et d ’oie….
D. Ingrédients non carnés
 1. Eau :
 Omniprésente : saumures, bouillons,
réhydratations, composante de mélanges,
glace pour émulsions…
 Quantités ajoutées évidemment strictement
règlementées.
D. Ingrédients non carnés
 2. Sel
 Plus ancien ingrédient utilisé pour la conservation des
viandes
 Rôle conservateur réel, mais vraiment secondaire
actuellement, sauf pour les produits séchés - maturés
(jambons et saucissons secs)
 Teneurs en sel des produits crus et cuits en forte
baisse (3 % vers 1950, 1,8 à 2 % aujourd ’hui) :
influence de la nette progression de la chaîne du froid
et de l ’hygiène plus stricte de nos jours
2. Sel
 Fonctions technologiques fondamentales :
 Solubilitédes protéines myofibrillaires
 PRE de la viande
 a) Influence sur le PRE de la viande
 Le sel rompt les ponts électrostatiques
2. Sel
 b) Influence sur la solubilité des protéines
myofibrillaires
 Le sel augmente la force ionique du milieu, et
favorise la solubilité des protéines
myofibrillaires
 Ces protéines jouent le rôle d ’émulsifiants
dans les pâtes fines, et de « ciment » pour la
cohésion des pièces
2. Sel
 c) Influence sur le goût
 Intensité du goût pas directement liée à la teneur en
sel : pour être perçu, le sel doit être solubilisé en
bouche. Or, dans les salaisons lentes, les ions sont
fixés solidement sur les protéines.
 On supporte ainsi facilement des teneurs de 5 à 6 % ,
insupportables sur des produits plus humides
 La cuisson rompt les liaisons et libère le sel : une
salaison grillée apparaît beaucoup plus salée que le
produit « cru »
2. Sel
 d) Influence sur la microbiologie
 Aucune action microbicide
 Abaissement de l ’activité de l ’eau freinant la
croissance des micro-organismes
 Abaissement tout de même modéré, aux
concentrations usuelles :
 Aw = 0,97 pour une teneur en sel de 4 % dans
la phase aqueuse du produit
2. Sel
 e) Pénétration du sel
 Granulométrie sans incidence sur la
technologie (sauf en cas d ’action mécanique
par massage sur la viande)
 Pénétration lente : 2 cm/24 h à 3°C pour une
saumure à 200 g/l
 D ’autant plus rapide que la température est
élevée, mais alors avec des risques pour
l ’hygiène au-delà de 6°C
2. Sel
 En dessous de 3°C, pénétration quasi-
inexistante
 Quelques cas de saumurage à chaud
(têtes de porc, à cause de la couenne
épaisse)
 Pénétration plus aisée sur viandes à bas
pH, ou dans les viandes décongelées
(parois cellulaires endommagées)
2. Sel
 Facteurs influençant la pénétration :
 Concentration en sel de la saumure
 Rapport poids de saumure / poids de viande
 Degré de parage de la viande : aponévroses peu
perméables
 Taille des morceaux à saler
 Immersion en saumure rarement utilisée seule
(Complète, en fait, une injection)
 Sel insoluble dans la matière grasse, mais soluble
dans l ’eau de constitution de la trame conjonctive
des gras
3. Phosphates et polyphosphates

 Sels de sodium ou de potassium des acides


polyphosphoriques
 Degrés de polymérisation variables :
2 : Di ou pyrophosphates de l ’acide
pyrophosphorique H4P2O7 (les plus utilisés en France)
3 (de H5P3O10), 5 (de H7P5O16), souvent en mélange
 Au-delà,
sels des polymères vrais de l ’acide
métaphosphorique (HPO3)n = métaphosphates
3. Phosphates et polyphosphates

 Influent lourdement sur le pouvoir de rétention


d’eau
 Rôle essentiel de complexant, sur les ions di- et
trivalents (calcium, magnésium, fer, nickel..)
 Ici, les ions calcium complexés ne vont plus
pouvoir générer de ponts : la structure s’ouvre,
et l ’eau peut accéder aux fonctions hydrophiles
des protéines
3. Phosphates et polyphosphates

 Efficacité marquée au cours de la cuisson


 Influence faible sur le pH (faible dosage et
pouvoir tampon de la viande)
 Pertes en eau divisées par 2 avec 0,5 %
de TPP* et 1 % NaCl, à 60°C
 * TPP = tripolyphosphate
3. Phosphates et polyphosphates
 c) Influence sur la solubilité des protéines
myofibrillaires
 Rigor mortis : actine et myosine s ’associent par des
ponts calcium pour donner de l ’actomyosine peu
soluble en milieu salin
 Polyphosphates libèrent les deux protéines : la
myosine retrouve ses propriétés émulsifiantes
 Les tripolyphosphates dépolymérisent toutefois la
myosine, à la différence du chlorure de sodium
 Effets très importants sur la solubilité, même aux
faibles concentrations (solutions 0,01 M)
3. Phosphates et polyphosphates

 d) Influence sur le rancissement et la stabilité


de la couleur
 Complexants des métaux catalyseurs de
l ’oxydation (fer et nickel)
 Vitesses d ’oxydation divisées par 8 à T0, par
20 à T + 7 jours, en moyenne
 Quelques usages hors salaisonneries, pour
ces mêmes raisons (légumes, notamment)
3. Phosphates et polyphosphates

 e) Influence sur la microbiologie


 Inhibition, ou ralentissement de la croissance de nbx
micro-organismes : Pseudomonas, Micrococcus,
Staphylococcus, Streptococcus, Enterobacteriaceae,
Bacillus, Clostridium perfringens
 Probablement par complexation des métaux bivalents
intervenant dans la chaîne respiratoire des bactéries
 Température de cuisson potentiellement plus élevée :
meilleur assainissement par la chaleur
3. Phosphates et polyphosphates

 f) Pour ou contre les polyphosphates


 Pour
 Usage ancestral, au travers des cendres
primitivement utilisées, particulièrement riches en
polyphosphates
 Effets sur la tendreté et la jutosité des produits cuits
indéniablement positifs, sous réserve d ’un dosage
raisonnable
 Influence hygiénique positive
3. Phosphates et polyphosphates

 Contre
 Usages industriels souvent sans justification*,
par exemple sur des produits à cuire
 Abus pouvant conduire à des produits
insipides et dénaturés, risque de tromperie du
consommateur (« eau au prix de la viande »)
 *autre qu ’économique, bien sûr !
4. Nitrites, nitrates, salpêtre
 Avec le sel, additifs fondamentaux, et
indissociables des PCS
 a) Coloration des PCS
 Couleur de la viande liée à la myoglobine, protéine
sarcoplasmique représentant en moyenne 1,4 % des
protéines totales
 Teneurs variables selon l ’âge et l ’espèce :
 1 à 3 mg/g (Veau) - 4 à 10 mg/g (Broutard) - 16 à 20 mg/g
(Bœuf adulte)
 1 à 3 mg/g (Porc charcutier de 90 à 100 kg) - 8 à 12 mg/g
(Porc adulte)
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

 Relais de l ’hémoglobine pour le transport


de l ’oxygène
 Tant qu ’elle n ’est pas dénaturée, chez
l ’animal mort, elle conserve ses aptitudes
à l ’oxydation, la réduction et la fixation
d ’oxygène
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

 Dans la viande fraîche, plusieurs niveaux de


couleur :
 Myoglobine : couleur pourpre, fer à l ’état + II -
MbFe(II)
 Oxymyoglobine : Rouge vif, fer à l ’état + II, mais
ayant fixé un atome d ’O2 - MbFe(II)O2
 Metmyoglobine : Brune, fer à l ’état + III, produit
d ’oxydation de la myoglobine - MbFe(III)
 Niveaux d ’oxydation supérieurs : Fer à l ’état + IV ou
+ V - MbFe(IV) ou MbFe(V)
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

 Limitation des phénomènes d ’oxydation difficile :


protection vis-à-vis de l ’air et de la lumière, ajout de
réducteurs (acide ascorbique, par ex.), sélection de
viandes à fort potentiel réducteur enzymatique…
 Congélation sans effet sur la couleur de la viande : bon
moyen de stabilisation
 Effet commercial désastreux de l ’oxydation : ventes
diminuées de 50 % quand 20 % du pigment superficiel
est sous forme de metmyoglobine
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

Nitrate transformé en nitrites, sous l ’effet de


nitrates réductases produites par les germes
naturellement présents, ou ajoutés sous formes
de ferments (« starters ») :
 NO3- + 3 H+ + 2 e-  HNO2 + H2O (E0 = 0,94 V)
 Nitrate sans aucune incidence sur la
couleur : c ’est seulement un précurseur du
nitrite
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

 NO2- = oxydant relativement puissant ; mécanisme


d ’action en trois étapes :
 1°) Oxydoréduction nitrite/réducteur (NADH ?)
 NO - + 2 H+ + réducteur  H O + réducteur-NO
2 2
 2°) Formation de la nitrosometmyoglobine
 Mb + réducteur-NO  réducteur + MbFe(III)NO + e-
 MbFe(III)NO = pigment de couleur grise
 3°) Réduction de la nitrosometmyoglobine en
nitrosomyoglobine
 MbFe(III)NO + e- MbFe(II)NO (rose)
 Sous l ’influence d ’un réducteur naturel (NADH ou
ferrocytochrome) ou ajouté (acide ascorbique ou érythorbique)
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

 Stabilité des pigments nitrosés dépendant du traitement


technologique
 Produits crus : faible stabilité
 Produits secs : stabilité accrue par la baisse de l ’aw, et la
protection de la couenne ou du boyau (très faible teneur
en oxygène)
 Produits cuits : au cours de la cuisson, rupture de la
molécule, avec séparation du hème et de la globine,
conduisant à la formation de nitrosoferrohémochrome,
de couleur rose pâle caractéristique
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (coloration)

 Nitrite n ’est pas un colorant !


 L ’intensité de la coloration dépend, en
fait, de la teneur initiale en myoglobine du
muscle
 Ceci explique les colorations hétérogènes
souvent remarquées dans les jambons
cuits, constitués à partir de pièces de
provenance différente.
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (goût)

 b) Influence des nitrites sur le goût


 Rôle incontestable et éminent
 Les nitrites ont une action spécifique sur la
production d ’arômes caractéristiques :
évolution de la « flaveur de porc » vers la
« flaveur de bacon » au fur et mesure de
l ’élévation du taux de nitrites
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (hygiène)

 c) Influence sur la microbiologie


 Pas de certitude quant à la forme active du nitrite
 Germes banaux, enterobacteriaceae très sensibles.
Lactobacilles et streptocoques le sont beaucoup moins
 Clostridium botulinum est l ’espèce la plus visée (mais
tous les Clostridiae sont sensibles aux nitrites)
 Nitrites chauffés beaucoup plus efficaces que non
chauffés (« Effet Perigo »).
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (risques)

 d) Toxicité des nitrites


 Toxicité aiguë importante : poison
méthémoglobinisant
 Par combinaison avec des amines, donne
des nitrosamines aux métabolites parfois
cancérigènes
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (risques)

 La loi limite l ’incorporation à 150 mg/kg


(exprimé en NaNO2) pour les nitrites, avec des
doses résiduelles limitées à :
 50 mg/kg pour les produits non cuits ou séchés
 100 mg/kg pour les autres produits
 175 mg/kg pour le bacon traité en salaison (compte
tenu de la perte de poids au séchage)
4. Nitrites, nitrates, salpêtre (risques)

 Nitrates limités eux à 300 mg/kg (exprimé


en NaNO3), avec dose résiduelle à 250
mg/kg
 Usage de nitrites purs interdit : sel nitrité à
< 1 % (0,6 % est la valeur courante)

Vous aimerez peut-être aussi