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INTUBATION TRACHEALE

DIFFICILE
Safouen yamoun CHU CHARLES NICOLE –TUNIS
SERVICE D’ANESTHESIE REANIMATION
Définition
● Intubation difficile :

Selon SFAR/SRLF
1) > 2 laryngoscopies + petits moyens ( position de la tète optimisée , manœuvre
laryngée , mandrin ,etc. ,,,) et/ou mise en œuvre d’une technique alternative

2) Operateur expérimenté
● La fréquence d’intubation difficile est plus élevée en obstétrique et en
chirurgie ORL carcinologique.

● L’incidence d’IOT difficile est plus élevée en réanimation qu’au bloc opératoire

● Malgré l’évaluation préopératoire, 15 à 30% des intubations difficiles ne sont


pas dépistées
Une ventilation inefficace:

Une ventilation au masque est inefficace:

● s’il est impossible d’obtenir:


- ampliation thoracique suffisante
- Capnogramme satisfaisant
- maintien SpO2 > 92%,
● s’il est nécessaire d’utiliser le by-pass d’oxygène à plusieurs reprises, ou d’appeler
un autre opérateur
● si la pression d’insufflation > 25 cmH2O
Le dépistage de la VMD doit être systématique et documenté chaque fois qu’une
intubation est prévue.

Présence de 2 des 6 critères suivants :


● Âge > 55 ans
● IMC > 26 kg/m2
● Édentation
● Impossibilité de protrusion mandibulaire
● Ronfleur
● Présence barbe
Signe de ventilation au masque inadéquate :
● Mouvement thoracique absent ou inadéquat

● Passage de l’air dans l’estomac / dilatation gastrique

● Cyanose

● Changements hémodynamiques dues à l’hypoxémie /hypercapnie

● Diminution de la saturation en O2

● Absence w mauvaise courbe de CO2 expiré


Facteurs de risque d’intubation difficile
Une intubation difficile dépend de :
L’ opérateur : évaluation inadéquate
préparation inadéquate du matériel
manque d’expérience
technique pauvre

Matériel : non fonctionnel


non disponible

Patient : causes congénitales /acquises


Causes congénitales
Syndrome Pierre Robin
Treacher Collins Syndrome
Trisomie 21 :
Syndrome de Klippel -Feil

Fusion congénitale des vertèbres


 Limitation du mouvement cervical
Causes acquises
Causes infectieuses :
● Épiglottite  œdème laryngé
● Trachéolaryngite  œdème laryngé
Angine de Ludwig / Cellulite cervico-faciales
● Infection bilatérale de l’espace submandibulaire (composé de 2 compartiments :
sublingual + submaxillaire )

● Intubation difficile par : Encombrement des VAS


Trismus
Causes rhumatismales : ( PR , SPA )
● Ankylose de la jonction temporo-mandibulaire

● Déviation / diminution de mobilité du rachis cervical

● Sclérodermie  microstomie +++


causes tumorales :
● Tumeurs laryngo- pharyngées par :

- obstruction des VAS

-Adhérence laryngée au structures avoisinantes ( modification anatomique


)
● Post Radiothérapie ( fibrose et perte de l’élasticité des tissues au niveau des VAS
Brulures cervico-faciales :
● Œdème des VAS ( phase aigue )

● Rétraction cutanée ( limitation de l’extension cervicale /ouverture buccale)


Traumatismes maxilo –faciales :
● Ouverture buccales limitée ( par la douleur + consolidation )

● ATTENTION : si fracture date de > 14 jours ( ouverture buccale peu ne pas


s’améliorer après anesthésie + curarisation )
Traumatismes du rachis cervical :
● Limitation de la mobilité cervicale

● Risque d’apparition /aggravation des signes neurologiques lors de l’extension


cervicale
Femme enceinte :
Œdème des VAS -par rétention hydro sodée

-aggravation du score de Mallampati au cours du travail ,


accouchement et jusqu’à 48 après l’accouchement
- Boutonnet M, Faitot V, Katz A, Salomon L, Keita H. Mallampati class changes during pregnancy, labour and after delivery: can these be predicted? Br J Anaesth 2010;104:67—
70.
- Kodali BS, Chandrasekhar S, Bulich LN, Topulos GP, Datta S. Airway changes during labor and delivery. Anesthesiology 2008;108:357—62.

-favorisé par la pré- éclampsie , perfusion de fluides , l’ocytocine


Femme enceinte
● Hypertrophie mammaire

● Reflux gastro-œsophagien ( par imprégnation en progestérone) risque d’inhalation

● CRF diminuée ( diminution du temps d’apnée  désaturation )

● Contexte d’urgence !!!!


Identification des patients à risque
Elle est faite lors de la consultation pré anesthésique :

l’interrogatoire: rechercher les situations à haut risque d’intubation difficile:

● ATCD d’intubation difficile


● une maladie rhumatismale (Spondylarthrite ankylosante …)
● un syndrome d’apnée du sommeil,
● une obésité morbide
● des traumatismes maxillo-faciaux
● ATCD de trachéotomie ou d’intubation prolongée.
● radiothérapie cervicale
● grossesse
L’examen clinique: doit être systématisé et minutieux, on évalue :

● L’ouverture buccale: assurée par l’articulation temporomandibulaire: Pas de


valeur de référence, généralement > 5 cm chez adulte, si < 3,5 cm : prudence
● La protrusion de la mandibule: évaluée par Le upper lip bite test ou le Test
de Calder

● Classe A : incisives inférieures pro


tractées devant incisives supérieures
(subluxation > 0)

● Classe B : incisives inférieures


alignées avec les incisives
supérieures (subluxation =0)

● Classe C : incisives inférieures


restent en arrière sans pouvoir être
alignées avec les incisives
supérieures (subluxation < 0)
RETROGNATISME PROGNATISME
● La denture:

- Attention si incisives supérieures proéminentes

- Attention si mauvais état dentaire (ne gène pas l’intubation mais risque d’inhalation

et de saignement gingival)

- Difficulté de ventilation si patient édenté


● Mallampati: examen effectué chez le
patient assis, regard à l’horizontale,
sans phonation

— classe 1 : toute la luette et les loges


amygdaliennes sont visibles ;

— classe 2 : la luette est partiellement


visible ;

— classe 3 : le palais membraneux est


visible ;

— classe 4 : seul le palais osseux est


visible.
● Le « cou court »: défini par la présence d’une distance thyro-mentonnière( la
distance entre la pomme d’Adam et l’extrémité du menton, tête en extension (si pas
de CI)) chez l’Homme < 6,5 cm, chez la femme < 5,5 cm, en pratique inférieure à
trois travers de doigts.
● Extension rachis cervical: par l’appréciation de l’extension atlanto-occipitale,
déterminée par les critères de Bellhouse et Dore:
Au bloc opératoire après laryngoscopie
• Grade de Cormack et Lehane : appréciés lors de la première laryngoscopie au bloc
opératoire.

— grade 1 : toute la fente glottique est vue ;


— grade 2 : seule la partie antérieure de la glotte est vue ;
— grade 3 : seule l’épiglotte est visible ;
— grade 4 : l’épiglotte n’est pas visible.

Une laryngoscopie difficile se définit par l’absence de vision


de la fente glottique (grades 3 et 4).
En conclusion :

● Doivent être toujours évalués:


1) Stade de Mallampati
2) Distance thyromentonnière
3) Ouverture de la bouche
● Au mieux complétés par:
1) Mobilité mandibulaire (protrusion)
2) Mobilité cervicale
Suspecter une intubation difficile si au moins un des
critères suivants est présent:

● Ouverture de bouche < 35 mm


● Mallampati > II
● Distance thyromentonnière < 60 mm.
Remarque:

Une intubation orotrachéale est dite IMPOSSIBLE si


● l’ouverture de bouche < 20 mm
● Rachis cervical bloqué
● Echec lors d’une tentative précédente
Les techniques et moyens d’intubation

Intubation

par voie par voie


orotrachéale transtrachéale

Avec vision sans vision


trachéotomie
glottique glottique
1) IOT avec vision glottique

● Fibroscopie

● Laryngoscopes spéciaux

● Vidéo-laryngoscopes

● Ctraq
Intubation sous fibroscope
● C’est la technique de référence en cas
d’intubation difficile prévue.
● Elle nécessite un apprentissage et une
pratique régulière.
● L’intubation se fait chez un patient
sédaté́ en ventilation spontanée.
● L’intubation se fait habituellement
par le nez ; elle peut être gênée par les
sécrétions et le saignement.
f
Inconvénients matériel coûteux, fragile, long à décontaminer
nécessitant un opérateur expérimenté

Avantages respect de l’axe tête cou tronc


utilisable chez l ’enfant
possible à l’état vigile

Indications traumatisme du rachis, maxillofacial, laryngotrachéal

Technique de référence pour l ’ITD prévue (SFAR 2017)


Vidéolaryngoscopes

● Bien que la laryngoscopie directe demeure la méthode d’intubation trachéale la plus


utilisée par les anesthésistes, la vidéolaryngoscopie est de plus en plus répandue et
est souvent utilisée d’emblée dans les cas susceptibles de présenter des difficultés
d’intubation.
● Plusieurs vidéolaryngoscopes sont actuellement disponibles, nous citons:
- Glidescope
- Macgrath
- Airtraq
- C-MAC
● Un Vidéolaryngoscope ne doit pas être utilisé d’emblée si un des cas suivants est
rencontré :
- une ouverture de bouche du patient < 2,5 cm
- un rachis cervical fixé en flexion
- une tumeur des voies aérodigestives supérieures avec stridor
● Il est nécessaire de s'assurer de la possibilité d'introduire un Vidéolaryngoscope dans
la bouche avant d'endormir un patient
Ctraq
● Le CTrach est essentiellement un masque laryngé muni d’une caméra à son extrémité
distale. Celle-ci permet d’apercevoir le passage de la sonde entre les cordes vocales.
Ce dispositif combine la technologie vidéo à celle du masque laryngé d’intubation.
2) IOT sans vision glottique

● Intubation sur guide

● Trachlight ou transillumination

● A travers un masque laryngé ( Fastrach / Proseal)

● Combitube
IOT à travers un masque laryngé
● C’est un dispositif supraglottique permettant la ventilation et l’intubation en urgence.
Il trouve sa principale indication lors d’une IOT difficile avec ventilation au masque
facial inefficace.
● Il existe plusieurs types de masque laryngé dont les plus répandus sont:
- Fastrach
- Proseal
- Igel
Masque laryngé type Fastrach
Masque laryngé type Proseal
Masque laryngé type Igel
Constitué de thermoplastique
élastomère de qualité médicale, l'i-
gel est conçu pour créer une
étanchéité anatomique, sans
bourrelet gonflable en prévenant les
traumatismes dus à la compression.

Lancé en 2007 l'i-gel permet la


ventilation de tous les patients, de
2 à plus de 90Kg. En 2012, les
indications d'utilisation ont été
élargies pour inclure l'utilisation de l'i-
gel comme guide d'intubation (avec
confirmation par fibre optique)
Fastrach Proseal Igel

Intubation à travers un masque laryngé

Etanchéité +++ ++ +++

Facilité d’insertion de ++ +/- +


la sonde d’intubation
Combitube
● Il s’agit d’un dispositif qui comporte
deux conduits, l’un est destiné à
l’insertion œsophagienne et l’autre à
assurer la ventilation supraglottique.
● Il présente deux ballons, l’un a pour
but de sceller l’oropharynx et l’autre
l’œsophage.
Le Combitube possède un
conduit qui entre dans
l’œsophage (ballon œsophagien
: A) et un autre qui se termine
dans l’oropharynx (ballon
oropharyngé : B) et destiné à
assurer la ventilation.
3) Intubation transtrachéale
Intubation rétrograde:
● C’est une technique invasive. Elle consiste à:
- faire une ponction de la membrane cricothyroïdienne (orientation céphalique 45°/
plan horizontal)
- vérifier le positionnement intratrachéal de l ’aiguille (aspiration d ’air)
- monter le guide en direction céphalique ( par un kit de voie centrale, de péridurale ou
pour intubation rétrograde de Cook)
- le guide souple est récupéré dans la bouche par pince de Magill
- glisser la sonde IOT sur le guide maintenu en traction (pince Kocher au point de
ponction)
● Cette technique est utilisée en cas de traumatologie maxillo-faciale ou du rachis
cervical.
● Indications traumatisme maxillo-facial

traumatisme du rachis cervical

● Contre-indications hématome cervical

obstacle glottique ou supraglottique

pas de connaissance pratique de la technique


Ventilation invasive par voie transtrachéale
Devant l’impossibilité d’assurer une ventilation efficace par les différents moyens cités ci
dessus, le geste essentiel consiste à assurer une oxygénation à l’aide d’un cathéter
transtrachéal.
La ventilation se fait par Ambu® ou par jet-ventilation à travers le cathéter.
Cricothyroidotomie
Principe Abord de la membrane cricothyroïdienne
Matériel Technique de Seldinger avec dilatateur Quicktrach® Melker Cook ®

Technique Ponction de la membrane entre le cartilage thyroidien et cricoide


Guide + dilatateur + canule de trachéo
Indications Ventilation et intubation impossible
ITD et menace vitale immédiate
Contre-Indications Enfant<10 ans
Complications Sténose sous glottique secondaire (1,6%)
Lésions: cartilage laryngé, œsophage,
Hémorragie, infection
Comment reduire la morbidité liée à la situation
d’intubation difficile ?
● Plan de gestion de risque +++ ( algorithme , protocole du service , selon ressources
humaines et matériel disponible )

● Chariot d’intubation difficile dédié à la salle d’opération ( minimum 1 chariot entre 2


salles )

● Procédures standardisées : -
● -préparation / anticipation
● -améliorer les condition d’oxygénation ( préoxygénation +++)
● -Induction séquence rapide
● Monitorage adéquat ( EtCO2 etc…)
Préparation :

● Aspiration forte , prête et vérifiée


● Chariot d’urgence / IOT difficile
● Masque facial adapté à la morphologie du patient
● Plateau d’IOT complet et vérifié ( piles +++)
● Sondes d’IOT de calibres variés
● Respirateur vérifié et préréglé
Plateau d’intubation
● Laryngoscope (piles ++) ● Manomètre
● Lame métallique ( différentes tailles 3- ● Fixe sonde
4 ++) ● Pince de Magill
● Canule de Guédel
● Mandrin souple / Eschmann /Frova
● Filtre , raccord annulé , capnographe
● Sondes (différent tailles )
● Seringue ● Vidéolaryngoscope
● Gants/masque
● Stéthoscope
La pré oxygénation :
● Objectif :
- réaliser une dénitrogénation , remplacer l’azote par O2
-Augmenter réserve en O2
-Prévenir / différer la désaturation artérielle pendant l’apnée

Cher sujet sain : bonne préO2 6-8 min d’apnée sans désaturation
• CRF = volume pulmonaire en fin
d’expiration passive ( 35ml/kg )
• Site principal de réserve en O2
• sujet de 70kg  CRF = 2400ml

• FAO2 =90%  90% CRF est


oxygéné
• Réserve =2100ml d’O2

• Consommation d’oxygène entre


250-350ml /min
•  90% CRF O2  6-8 min avant
désaturation
Facteurs prédictifs de mauvaise tolérance à l’apnée
● Réduction du volume pulmonaire (obésité /grossesse …)

● Bas rapport ventilation / perfusion ( ATELECTASIE +++ )

● Anémie ( Hémoglobine = transporteur d’O2)

● Augmentation de la consommation en oxygène


VNI (VS AI-PEP)
● Prévention et levée d’atélectasies
● Élévation de la CRF
● Élévation de la PaO2

Augmentation du temps en apnée non hypoxémique

Chez l’obèse
Chez le patient hypoxémique
Baillard, AJRCCM 2006
Induction de l’anesthésie
Intérêts : Contraintes :
● Améliorer le confort du patient
• Durée d’action brève : retour
● Faciliter la laryngoscopie rapide à l’état antérieur si
problème
● Faciliter la visualisation de la glotte
• Estomac plein
● Diminuer la morbidité de l’intubation
• Minimiser le retentissement
hémodynamique

Induction séquence rapide +++


Au terme d’une consultation pré-anesthésique avec un examen minutieux du patient, on va
se trouver devant 3 cas de figures:

1er cas: L’IOT est prévue difficile avec une ventilation au masque faciale prévue efficace

2ème cas: L’IOT est prévue difficile avec une ventilation au masque faciale inefficace

3ème cas: L’IOT est imprévue difficile


1er cas: L’IOT est prévue difficile avec une ventilation au masque faciale

prévue efficace
2ème cas: L’IOT est prévue difficile avec une ventilation au masque

faciale inefficace
Oxygénation transtrachéale
● BUT : oxygéner en attendant trachéotomie ou aide
- Aiguille transtrachéale
- Cricothyroidotomie
● Ventilation : ● Réglage du manujet:

-Ballon - FR =4c/min
-Manu Jet
- Expiration par les voies
naturelles ( luxation , canule de
Guédel)

- CI : Sténose trachéale ou
glottique
3ème cas: L’IOT est imprévue difficile
DANS TOUS LES CAS
CONCLUSION
 IOT geste de la pratique courante , ne doit jamais être banalisé

 L’expérience et la planification jouent un rôle clé dans la


gestion des voies aériennes

 Elaborer une stratégie centrée sur l’oxygénation et la


ventilation

 Pertinence de l’intubation endotrachéale et la probabilité


d’une ventilation supra glottique efficace doivent être
évaluées
MERCIII <3 :*

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