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Cardiopathies et grossesse

V. Laudenbach

Service de pédiatrie néonatale et réanimation et Laboratoire UPRES EA2122, CHU Charles


Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France
e-mail : vincent.laudenbach@chu-rouen.fr

POINTS ESSENTIELS
· Les maladies cardiaques ne sont pas rares chez la femme enceinte (0,5-1 %). Les
cardiopathies congénitales en constituent la première étiologie, avant les valvulopathies. La
fréquence des cardiopathies ischémiques semble en augmentation.

· La grossesse entraîne une augmentation du débit cardiaque (+ 50 %). Lors du travail


obstétrical, il augmente encore de 10 à 40 %.

· Certaines cardiopathies, équilibrées, s'adaptent au surcroît de travail qu'entraînent la


grossesse et l'accouchement. En revanche, un mauvais statut fonctionnel (stades NYHA III-
IV), une HTAP ou une cardiopathie obstructive sévère sont hautement prédictifs de
complications graves (trouble du rythme, défaillance cardiaque, accident thrombo-embolique)
et de décès. La morbi-mortalité fœtale est également très élevée dans ces situations.

· La plupart des traitements cardiologiques courants peuvent être prescrits, exception faite des
inhibiteurs de l'enzyme de conversion et des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine,
formellement contre-indiqués. La cardioversion par choc électrique externe est possible.

· Si la maladie cardiaque est contrôlée, l'accouchement par voie basse est souvent la meilleure
option. En revanche, une atteinte aortique menaçante (dissection, dilatation) ou une HTAP
sévère imposent l'extraction par césarienne. Dans la majorité des cas et en dehors des contre-
indications (anticoagulants), l'anesthésie péridurale, seule ou combinée avec la rachianesthésie,
est la meilleure option. Toutefois, l'anesthésie générale reste possible. Elle fait appel à des
drogues respectant au mieux l'hémodynamique (étomidate, morphiniques, curares) et comporte
une séquence d'induction rapide. Un monitorage hémodynamique adapté, invasif si nécessaire,
doit être mis en œuvre.

· En cas d'arrêt cardiaque au troisième trimestre, la réanimation cardiopulmonaire est réalisée


chez une patiente en décubitus latéral (30-45o) selon les mêmes principes et avec les mêmes
drogues qu'en dehors de la grossesse. En l'absence de récupération d'une activité circulatoire
spontanée en moins de 5 minutes, l'extraction fœtale est impérative.

· La prise en charge d'une femme enceinte ayant une cardiopathie est multidisciplinaire et doit
être menée dans un centre spécialisé, permettant la réanimation de la mère et de l'enfant.

INTRODUCTION

Dans les pays industrialisés, 0,5 à 1 % des femmes enceintes ont une cardiopathie [1].
L'équipe soignante peut être confrontée à une patiente porteuse d'une maladie cardiaque
connue et qui souhaite une grossesse. Dans d'autres cas, la patiente consulte une fois la
grossesse constatée. Les modifications importantes de la physiologie, notamment
cardiovasculaire et respiratoire, observées chez la femme enceinte sont susceptibles
d'aggraver une cardiopathie préexistante. Il faut donc déterminer les capacités d'adaptation
cardiovasculaire de la patiente afin d'optimiser conseils et prise en charge. La maladie
cardiaque peut également être révélée pendant la grossesse ou en post-partum, voire
directement induite par la grossesse. Bien que ces situations complexes ne soient documentées
que par des cas ou séries analysées de façon rétrospective ou observationnelle, la Société
européenne de cardiologie a récemment émis des recommandations afin de guider leur prise
en charge [2].

PHYSIOLOGIE CARDIOVASCULAIRE
DE LA FEMME ENCEINTE

Au cours du premier trimestre, la pression artérielle (PA) diminue. La pression artérielle


diastolique (PAD) diminue plus que la pression systolique (PAS), d'où un élargissement de la
différentielle. La PA ré-augmente progressivement à partir du milieu de la grossesse pour
revenir aux valeurs pré-conceptionnelles au troisième trimestre. À l'origine de l'abaissement
des résistances vasculaires systémiques (RVS), on trouve notamment la production de
médiateurs abaissant le tonus vasculaire (progestérone, prostaglandines, NO) et le
développement d'une circulation placentaire à bas niveau de résistance. En parallèle, la
volémie augmente dès la cinquième semaine de la grossesse et croît rapidement jusqu'à la fin
du sixième mois, pour augmenter ensuite plus lentement. L'augmentation totale est de l'ordre
de 50 %. La majoration proportionnellement plus importante du volume plasmatique par
rapport au volume globulaire se traduit par un abaissement de l'hématocrite, mais une valeur
inférieure à 30 % est anormale. La rétention hydrosodée est d'origine multifactorielle, due
notamment à une activation du système rénine-angiotensine par les œstrogènes, mais aussi à
des variations d'autres systèmes hormonaux dont l'axe hypophyso-corticosurrénalien.

Le débit cardiaque augmente d'environ 50 %, suivant une courbe dont la cinétique est proche
de celle de la volémie. L'augmentation du volume d'éjection systolique (VES) est plus
importante que celle de la fréquence cardiaque. En décubitus dorsal, la compression de la
veine cave inférieure par l'utérus gravide est responsable d'une réduction du retour veineux
susceptible d'induire, chez la mère, malaises, lipothymies voire syncope. La compression cave
(et aortique) peut également entraîner une hypoperfusion utéroplacentaire. Ce syndrome de
compression cave est symptomatique chez environ 10 % des patientes à terme mais peut avoir
une traduction hémodynamique infraclinique dès le début du deuxième trimestre [3]. Il peut
être prévenu par le positionnement en décubitus latéral gauche modéré ou droit complet.

Lors d'un accouchement par voie basse, la consommation en O2 est triplée. Le débit cardiaque
augmente encore de 10 à 40 % par rapport aux valeurs pré-partum. Les contractions utérines,
responsables d'une « chasse veineuse », et la levée de la compression cave participent à la
majoration, parfois brutale, du retour veineux lors de l'expulsion. La PA augmente lors des
contractions, en particulier lors de la deuxième partie du travail. Les valeurs de fréquence
cardiaque et de débit cardiaque reviennent aux niveaux pré-partum dès la fin de la première
heure après l'expulsion, la PA et le VES font de même dans les 24 heures. En revanche,
l'adaptation circulatoire gestationnelle n'est résolutive que très progressivement, en 12 à 24
semaines selon les paramètres [4].

ÉVALUATION CARDIOVASCULAIRE
AU COURS DE LA GROSSESSE
L'analyse de la symptomatologie cardiaque est rendue difficile par l'existence de signes qui
peuvent être associés à une grossesse normale (dyspnée, lipothymies, œdèmes, turgescence
jugulaire). Les modifications de l'auscultation accompagnant la grossesse peuvent rendre
délicate la détection d'une anomalie. L'électrocardiogramme (ECG) peut également être
modifié : changements d'axe du QRS, onde Q en DIII, élévation de l'onde R en V1V2,
fréquence accrue des extrasystoles auriculaires (ESA) et ventriculaires (ESV). Des sous-
décalages du segment ST, mimant une ischémie sous-endocardique mais ne s'accompagnant
d'aucun trouble de cinétique en échographie, ont été rapportés au cours de césariennes sous
anesthésie générale (AG) [5] [6]. En échocardiographie, on observe un élargissement
physiologique de l'ordre de 20 % pour les cavités droites et 6-12 % à gauche, persistant
parfois plusieurs mois après l'accouchement. La dilatation des anneaux mitral, tricuspide et
pulmonaire est responsable de fuites valvulaires modérées. Un épanchement péricardique de
faible abondance est courant en fin de grossesse.

CLASSIFICATION ÉTIOLOGIQUE
DES CARDIOPATHIES DE LA FEMME ENCEINTE

Cardiopathies congénitales

L'amélioration de leur prise en charge durant l'enfance a permis à un grand nombre de


femmes de parvenir à l'âge d'avoir un enfant, au point que ces cardiopathies sont désormais
les plus fréquentes (50 à 80 %) auxquelles soient confrontées les équipes
obstétricales [7] [8] [9]. Cependant, le déroulement de la grossesse est généralement bon chez
les patientes opérées dans l'enfance. Pour les autres, la tolérance des cardiopathies avec shunt
gauche-droit est habituellement meilleure que celle des shunts droit-gauche, aggravés par
l'augmentation du débit cardiaque et l'abaissement des RVS de la femme enceinte. Si
l'intervention n'a pas eu lieu dans l'enfance mais est néanmoins nécessaire, elle doit être
réalisée idéalement avant la conception. Celle-ci n'est alors programmée qu'après un recul
d'au moins six mois. Dans une série rétrospective de 96 grossesses chez 44 patientes porteuses
de cardiopathies cyanogènes, 41 (43 %) ont donné naissance à un enfant vivant, dont 15
(37 %) nés prématurément. Un taux d'hémoglobine en début de grossesse inférieur à 20 g/dl et
une saturation artérielle en O2 supérieure à 85 % étaient des éléments de bon pronostic pour le
devenir fœtal [10]. Le taux de complications cardiovasculaires engageant le pronostic vital
maternel (défaillance cardiaque, accidents thrombo-emboliques, endocardites, troubles du
rythme) était de 32 %. Plus récemment, un travail multicentrique canadien a analysé de façon
prospective 599 grossesses chez 562 patientes porteuses de cardiopathies congénitales (74 %),
acquises (22 %) ou arythmiques (4 %). Dans cette série, la classe fonctionnelle de la New
York Heart Association (NYHA), l'existence d'une cyanose, d'une pathologie obstructive
cardiaque gauche, d'une défaillance de la fonction systolique du ventricule gauche (VG) ou un
antécédent d'événement cardiovasculaire, notamment d'arythmie, étaient prédictifs de
complication cardiovasculaire maternelle (13 %) [9]. Comparant une partie de leur cohorte à
une population contrôle, Siu et al. ont confirmé un taux accru de complications
cardiovasculaires maternelles (17 % versus 0 %) ainsi que de complications néonatales (18 %
versus 7 %). Pour ce qui concerne le nouveau-né, l'âge inférieur à 20 ans ou supérieur à 35
ans, le tabagisme ou un traitement anticoagulant constituaient un facteur aggravant dans ce
contexte [9] [11].

Valvulopathies
Les cardiopathies rhumatismales restent un problème majeur dans les pays sous-développés.
Dans nos contrées, elles ne concernent pratiquement que des individus migrants. Bien que
moins fréquentes que les cardiopathies congénitales, elles constituent une source de difficultés
plus importante pour certains centres, en raison notamment d'un suivi cardiologique
insuffisant avant la grossesse et du caractère instable de l'atteinte cardiaque. Le rétrécissement
mitral (RM) constitue la manifestation la plus fréquente [12]. Il expose au risque de
fibrillation auriculaire (FA) et d'œdème pulmonaire aigu (OAP). Ce dernier est favorisé par la
tachychardie (avec raccourcissement de la diastole) et la diminution de la pression oncotique
plasmatique qui accompagnent la grossesse voire, éventuellement, par des apports liquidiens
excessifs en péri-partum ou la perte de la systole auriculaire en cas de FA. Un RM serré (< 1,5
cm2) est associé à une mortalité maternelle de 5 %, alors qu'elle est inférieure à 1 % dans les
formes peu symptomatiques [7] [12]. Les insuffisances mitrale (IM) ou aortique (IA) de la
femme jeune sont également le plus souvent d'origine rhumatismale. Elles sont généralement
bien tolérées au cours de la grossesse, exception faite des formes les plus sévères. En dehors
du contexte post-rhumatismal, le prolapsus valvulaire mitral (maladie de Barlow) est la cause
la plus fréquente d'IM chez les femmes jeunes. L'abstention thérapeutique est la règle en
l'absence de troubles du rythme. Le rétrécissement aortique, rhumatismal ou congénital, est
beaucoup plus rare. Une forme serrée (< 1 cm2, gradient de pression supérieur à 50 mmHg)
peut être incompatible avec l'élévation du débit cardiaque qu'entraîne la grossesse et menacer
alors la mère et l'enfant. D'une façon générale, les fuites valvulaires ont une meilleure
tolérance gravidique que les valvulopathies sténosantes, en raison de l'abaissement des RVS.

Maladies aortiques : syndrome de Marfan, dissection aortique

Au cours de la grossesse, le syndrome de Marfan est susceptible de complications telles que la


dilatation (responsable de fuite valvulaire et d'insuffisance cardiaque congestive) et la
dissection aortiques (DA) [1]. Sur le plan obstétrical, ces patientes sont à risque
d'incompétence cervicale, d'insertion basse du placenta et d'hémorragie du post-partum. Le
risque de complication vasculaire ne semble pas significativement augmenté lorsque le
diamètre aortique est inférieur à 40 mm et en l'absence d'événement cardiovasculaire dans les
antécédents, mais il est d'au moins 10 % dans le cas contraire. Les efforts physiques doivent
impérativement être évités, la patiente réévaluée régulièrement et la PA strictement contrôlée
par un traitement bêtabloquant prophylactique [13]. Toutefois, un traitement anti-hypertenseur
doit, de façon générale, être prudent de façon à ne pas compromettre la circulation utéro-
placentaire qui n'est pas autorégulée. Outre le syndrome de Marfan (compliqué de DA dans
1 % des grossesses), l'incidence de la DA en cours de grossesse est clairement augmentée
chez les patientes porteuses d'une coarctation ou d'une bicuspidie aortique [14]. Elle est plus
fréquente au cours du troisième trimestre et en post-partum. Le diagnostic fait appel
préférentiellement à l'échographie transœsophagienne (ETO). Les formes non chirurgicales
peuvent être suivies par IRM, une dilatation du calibre aortique au-delà de 5 cm imposant
finalement l'intervention.

Cardiomyopathies

Dans le cas des cardiopathies hypertrophiques avec obstruction intra-ventriculaire modérée,


l'évolution favorable est la règle pour la mère comme pour le fœtus [2]. Le risque de
complications engageant le pronostic maternel et/ou fœtal (troubles du rythme ventriculaire
ou supra-ventriculaire, défaillance cardiaque, syncope) n'est cependant pas nul. Dans les cas
de formes familiales, le risque de récurrence dans la descendance peut atteindre 50 %.
Les cardiopathies dilatées sont plus rarement rencontrées chez la femme enceinte, leur
existence préalable conduisant le plus souvent à contre-indiquer la grossesse, surtout si la
fraction d'éjection du VG (FEVG) est inférieure à 50 % [2]. La cardiomyopathie du péri-
partum (CMPP) est définie comme survenant au dernier mois de la grossesse ou dans les cinq
mois suivant l'accouchement, chez une patiente sans antécédents. Son incidence varie de
1/1 000 à 1/15 000 selon les régions du globe. Les signes sont non spécifiques : asthénie,
dyspnée, douleurs thoraciques, palpitations, embolies systémiques ou pulmonaires, prise de
poids excessive. L'ECG révèle divers troubles du rythme, de la conduction ou de la
repolarisation. Il s'agit d'une cardiopathie dilatée globale, avec atteinte prédominante de la
fonction systolique du VG, susceptible d'évolution fulminante. Elle est plus fréquente après
30 ans, chez les patientes multipares, porteuses de grossesses multiples. Les patientes sont en
moyenne plus jeunes que dans la plupart des autres cardiomyopathies. La CMPP évolue
favorablement avec régression des signes dans les mois suivant l'accouchement dans la
majorité (50-60 %) des cas, mais la récurrence est possible lors de grossesses ultérieures,
même chez des patientes ayant retrouvé une fonction VG normale [15]. En cas d'évolution
défavorable, la transplantation cardiaque peut être envisagée, éventuellement après recours
transitoire à un dispositif d'assistance circulatoire mécanique. Le taux combiné de décès et
transplantation est de l'ordre de 12 à 18 % [16] [17]. Les études histologiques ont indiqué la
présence de signes évocateurs de myocardite, mais l'étiologie exacte de ce syndrome reste
inconnue.

Le traitement des cardiomyopathies en cours de grossesse n'est pas spécifique. Cependant, les
inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IEC) (ainsi que les antagonistes des
récepteurs de l'angiotensine) sont formellement contre-indiqués car tératogènes et comportant
un risque d'insuffisance rénale aiguë chez le fœtus. Un traitement anticoagulant est
recommandée par la plupart des auteurs, en raison du risque d'embolies cruoriques [2] [7].
Dans le cas d'une menace d'accouchement prématuré chez une patiente porteuse d'une
cardiopathie hypertrophique, les agonistes bêta-2-adrénergiques doivent être évités au profit
d'autres agents (Mg++, antagonistes calciques, atosiban).

Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP)

La mortalité de l'HTAP révélée par la grossesse varie de 30 à 60 % [17]. Le décès est dû à une
défaillance ventriculaire droite réfractaire ou à une mort subite (ischémie myocardique,
embolie, trouble du rythme). Il survient le plus souvent en post-partum, parfois de façon
nettement décalée, la majorité des décès étant recensés entre la naissance et le 14e jour, voire
jusqu'à 35 jours après la naissance [17]. Les facteurs responsables de cette chronologie
particulière sont notamment l'augmentation des taux de catécholamines et du retour veineux
liés au travail et à l'expulsion (cf. supra), éventuellement associées à une hypoxémie et à des
phénomènes thrombo-emboliques. L'HTAP primitive et le syndrome d'Eisenmenger
(cardiopathies congénitales avec shunt gauche-droit évoluant vers l'HTAP fixée avec
inversion du shunt) ont, avec une mortalité de 30 à 36 %, un pronostic moins défavorable que
l'HTAP secondaire compliquant, par exemple une cardiopathie gauche, une maladie
respiratoire, un traitement amphétaminique ou une maladie thromboembolique, la mortalité
globale de ces dernières lors d'une grossesse étant plus proche de 55 % [17]. Le taux
d'avortement spontané, d'accouchement prématuré et de retard de croissance intra-utérin
(RCIU) est élevé. Sur le plan thérapeutique, l'emploi des prostacyclines est déconseillé
pendant la grossesse en raison des doutes concernant d'éventuels effets sur la circulation
utérine et sur le développement embryonnaire. En revanche, l'administration de NO inhalé
lors de la naissance a été proposée avec succès chez plusieurs patientes en complément de
l'anesthésie, quel que soit le mode d'accouchement [18]. L'anticoagulation par héparine est
classiquement proposée au troisième trimestre et en post-partum.

Coronaropathies

Le risque d'atteinte coronaire compliquée à l'occasion d'une grossesse, bien que faible, semble
en augmentation en particulier chez les patientes âgées de plus de 30 ans, traitées par
œstroprogestatifs, ayant une HTA ou fumeuses (1 infarctus pour 10 000 grossesses) [2] [7].
Les grossesses multiples constituent également un facteur de risque [19]. L'infarctus est plus
souvent décrit à partir du début du troisième trimestre. En dehors de l'athérosclérose, la
coronarographie peut mettre en évidence une dissection coronaire (de l'artère
interventriculaire antérieure dans 80 % des cas). Elle peut également être normale, suggérant
la survenue d'un spasme qui serait, pour certains auteurs, favorisé par l'administration
d'ocytocine ou de bromocriptine en post-partum. Le diagnostic peut être retardé, en particulier
en raison du faible degré de suspicion par l'équipe médicale dans ce contexte, ce qui explique
sans doute en partie les chiffres de mortalité élevés (25 à 50 %). De plus, certains signes ECG
observés lors de grossesses normales peuvent être trompeurs (cf. supra). Les taux sanguins de
myoglobine, CPK et CPK-MB augmentent dans les suites immédiates de l'accouchement, ce
qui impose le dosage de la troponine I. Par ailleurs, les hémorragies du post-partum sont
fréquemment responsables d'ischémie myocardique, comme l'ont récemment démontré
Karpati et al. [20].

DÉTERMINATION DU NIVEAU DE RISQUE

Toute patiente appartenant aux classes fonctionnelles NYHA III et IV est à fort risque,
compte tenu de l'absence de réserve permettant de faire face à la nécessaire augmentation du
débit cardiaque. Sur le plan étiologique, les niveaux de mortalité les plus élevés sont observés
chez les patientes atteintes de cardiopathies avec HTAP, de cardiopathies congénitales
cyanogènes (environ 2 %) et de cardiopathies obstructives gauches sévères, valvulaires ou
hypertrophiques. Dans toutes les situations évoquées précédemment, les complications graves
(arythmies, ischémie myocardique, défaillance cardiaque, thromboses, embolies et, selon la
nature de la cardiopathie, greffe bactérienne) sont plus fréquentes, pouvant concerner jusqu'à
50 % des patientes. De plus, au niveau fœtal, la réduction de la perfusion et de l'oxygénation
utéro-placentaire entraîne une morbidité (avortement spontané précoce, accouchement
prématuré, hypotrophie) et une mortalité très supérieures à celles de la population
générale [11]. Un tel niveau de risque contre-indique la grossesse a priori. Dans le cas où elle
serait amorcée, l'interruption doit être proposée, tout en prenant en compte les complications
inhérentes à la procédure d'interruption. Dans certains cas difficiles, la réalisation d'une
épreuve d'effort à l'aide d'un protocole adapté à la femme enceinte peut permettre une
évaluation plus précise du risque encouru en cas de poursuite de la grossesse [2].

PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE

Mesures générales

Une activité physique limitée paraît toujours appropriée. Un suivi rapproché et


multidisciplinaire est indispensable. Il est réalisé en centre spécialisé, comportant les
structures de soins intensifs capables de prendre en charge la mère et l'enfant. L'adaptation
cardiovasculaire est évaluée en échographie à intervalles réguliers. L'hospitalisation précoce
s'impose en cas d'aggravation. Les traitements prescrits font l'objet d'une évaluation
bénéfice/risque (tableau  I). Certains bêtabloquants ont été incriminés dans la survenue de
RCIU [21]. Le cas échéant, des recommandations précises sur l'usage des anticoagulants et les
indications d'antibiotiques doivent également être données (cf. infra). Dans le cas de
cardiopathies connues au préalable, difficiles à équilibrer, une information claire sur les
risques maternels et fœtaux associés à une grossesse doit être donnée à la patiente, si possible
avant la conception. Si les risques paraissent rédhibitoires, une contraception efficace doit être
proposée, en écartant les œstro-progestatifs (risque thrombogène) et, s'il existe un risque de
greffe bactérienne, les dispositifs intra-utérins. D'autre part, selon la nature de la cardiopathie,
un conseil génétique peut être indiqué, précisant notamment le risque de récurrence de
malformations cardiaques dans la descendance (4 à 8 %, voire jusqu'à 17 % dans certaines
séries [8].

Les naissances prématurées sont fréquentes, soit du fait de la pathologie cardiaque elle-même,
soit parce que, parvenu au terme de 32-34 SA à partir duquel on considère généralement la
viabilité de l'enfant suffisante, le pronostic maternel prime et peut amener à la décision de
prématurité consentie. Dans un cas comme dans l'autre, la prescription d'une corticothérapie
de maturation fœtale par bêtaméthasone doit impérativement être discutée. La consultation
d'anesthésie doit être programmée de manière à anticiper l'accouchement prématuré.

Anesthésie et analgésie obstétricales

Les données disponibles, constituées exclusivement d'observations, ne permettent d'émettre


que des recommandations fondées sur l'opinion d'experts. D'une façon générale, un
déclenchement ou une extraction sont planifiés de façon à disposer d'un personnel entraîné en
nombre suffisant. Une collaboration multidisciplinaire est indispensable (obstétriciens,
anesthésistes-réanimateurs, pédiatres néonatologues, cardiologues). Les risques pour la mère
d'une césarienne avant travail (hémorragique, thrombo-embolique, infectieux) sont à mettre
en balance avec ceux d'un accouchement par voie basse, comportant nécessairement une
augmentation du débit cardiaque. En dehors des aspects obstétricaux qui, souvent, priment, la
nature et la sévérité de la cardiopathie conditionnent la décision. À titre d'exemple, la majorité
des patientes porteuses de cardiopathies congénitales ou valvulaires peuvent accoucher par
voie basse, si la situation cardiaque est stable. En revanche, un syndrome de Marfan avec
diamètre aortique supérieur à 4,5 cm, une dissection ou une coarctation aortique ou encore un
rétrécissement mitral mal équilibré sont des indications formelles de césarienne [2].

Tableau I. Effets indésirables des drogues cardiovasculaires les plus courantes pour le
fœtus. D'après [1].
Drogue Effets indésirables Sécurité Allaitement
fœtaux/néonataux d'emploi
rapportés pendant la
grossesse
®
Adénosine (Striadyne ) Pas d'effet indésirable Oui Pas de données
rapporté
Amiodarone RCIU, prématurité, Discuté, Non
hypothyroïdie possible
en fin de
grossesse
Bêtabloquants Bradycardie et Oui Oui, avec
hypotension, surveillance
hypoglycémie, RCIU de l'ECG néonatal
Digitaliques Prématurité, faible poids de Oui Oui
naissance
Diurétiques Hypoperfusion Risque potentiel Oui
placentaire
si hypovolémie
Dihydropyridines SFA par hypotension Oui Oui
(nicardipine, maternelle
nifédipine)
IEC Oligoamnios, RCIU, Non Oui
IRA, anémie,
hypotension,
arthrogrypose, défaut
d'ossification, décès
Lidocaïne Hypotonie à fortes doses Oui Oui
Trinitrine et dérivés Bradycardie, Données Pas de données
hypotension, SFA par limitées,
hypotension maternelle, risque potentiel
méthémoglobinémie
RCIU : retard de croissance intra-utérin ; IEC : inhibiteurs de l'enzyme de conversion de
l'angiotensine ; IRA : insuffisance rénale aiguë ; SFA : souffrance fœtale aiguë.

En cas de voie basse, il est indispensable d'éviter l'épreuve d'effort d'un travail long et
douloureux, ainsi que les efforts expulsifs. L'analgésie péridurale, seule ou combinée à la
rachianesthésie, a donc largement sa place (à condition de ne pas être contre-indiquée par des
troubles de l'hémostase ou un traitement anticoagulant). Les modifications hémodynamiques
sont contrôlées par titration des doses d'anesthésique local afin d'éviter un abaissement brutal
de la précharge ventriculaire. Une association morphinique et anesthésique local à faible
dose/concentration doit être privilégiée. Le traitement de l'hypotension artérielle par
phényléphrine à faibles doses ou une association phényléphrine-ephédrine évite l'aggravation
de la tachychardie maternelle sans risque pour la perfusion utérine [22]. La patiente est placée
en position proclive latéralisée à gauche afin de prévenir le syndrome de compression cave.
L'expulsion est généralement abrégée par l'emploi de forceps.

Dans la majorité des cas de césarienne, l'anesthésie péridurale, seule ou combinée à la


rachianesthésie, constitue également le mode d'anesthésie optimal. L'anesthésie générale reste
cependant envisageable. Elle fait appel à des drogues respectant au maximum
l'hémodynamique (étomidate, morphiniques, curares) et comporte une séquence d'induction
rapide qui inclut la succinylcholine. En cas de cardiopathie obstructive, la stratégie
anesthésique doit s'attacher à prévenir toute tachychardie et tout abaissement brutal de la
précharge ventriculaire. Lorsque la cardiopathie impose un traitement chirurgical et que le
fœtus a atteint un terme viable (de préférence au-delà de 31-32 SA), les experts s'accordent
sur le principe d'extraire le fœtus avant de réaliser une circulation extracorporelle (CEC) [2].
Cette décision est cependant toujours délicate et nécessite une analyse collégiale de la
situation, de façon à respecter au mieux les intérêts de la mère et de l'enfant. L'enchaînement
d'une césarienne et d'une chirurgie cardiaque en CEC est a priori peu compatible avec la
réalisation d'une anesthésie médullaire pour le premier temps. Cependant, un tel choix reste
envisageable à condition de limiter le risque d'hématome périmédullaire par l'emploi d'une
aiguille de faible calibre et le respect d'un délai minimal (2 à 4 h) avant anticoagulation et
CEC.

Que l'accouchement ait lieu par voie basse ou non, une surveillance multiparamétrique de
l'hémodynamique et des échanges gazeux est nécessaire, faisant appel notamment à
l'échographie mais aussi fréquemment à des moyens invasifs (cathéter artériel, cathéter
veineux central voire, selon les cas, cathéter de Swan Ganz). L'apport d'oxygène est
systématique. Les apports liquidiens et la diurèse doivent être strictement comptabilisés afin
d'éviter toute surcharge. Une réduction excessive de la PA chez une patiente porteuse d'une
HTAP peut contribuer à l'inversion d'un shunt gauche-droit en shunt droit-gauche, majorant
ainsi une hypoxémie. En cas de cardiopathie obstructive, une réduction brutale de la pré-
charge ventriculaire peut précipiter un collapsus. La prévention de telles situations impose une
évaluation précise et une compensation adéquate des pertes sanguines [23].

L'ocytocine doit être injectée lentement, en raison du risque d'hypotension artérielle. Une
élévation aiguë des résistances vasculaires pulmonaires a de plus été décrite lors de perfusions
continues. Ce risque est encore plus important avec la PGF2 (Nalador®), contre-indiquée en
cas d'HTAP ou de maladie coronaire. Par ailleurs, le risque d'hémorragie du post-partum
semble accru dans les cardiopathies avec HTAP, même en l'absence de traitement
anticoagulant. Leur dépistage et leur traitement précoce sont donc impératifs. Une
hospitalisation et une surveillance prolongées sont indispensables, les suites immédiates de
l'accouchement imposant de principe le séjour en unité de soins intensifs.

Antibioprophylaxie

Selon les recommandations de l'American Heart Association, une prophylaxie antibiotique


serait inutile dans le cadre d'un accouchement par voie basse non compliqué (sans manœuvre
instrumentale, endo-utérine ou contexte infectieux), à l'exception des patientes porteuses de
prothèses valvulaires, d'un shunt systémico-pulmonaire ou ayant des antécédents
d'endocardites [24]. Toutefois, la difficulté à anticiper une complication obstétricale et les
conséquences potentiellement désastreuses d'une endocardite amènent certains auteurs à
élargir ces indications à toutes les patientes porteuses de cardiopathies congénitales ou
valvulaires accouchant par voie basse, sauf dans le cas des communications inter-auriculaires
ou dans celui de patientes opérées plus de six mois auparavant d'une cure de défect septal ou
d'une ligature de canal artériel persistant [1] [2]. L'antibioprophylaxie est toujours nécessaire
en cas de césarienne.

Traitements anticoagulants

Un grand nombre de cardiopathies, au premier plan desquelles celles nécessitant un


remplacement prothétique valvulaire, imposent une anticoagulation efficace. Les anti-
vitamines K (AVK) sont responsables d'embryofœtopathies et de mort fœtale précoce s'ils
sont employés entre 6 et 12 SA (environ 5 % des patientes selon certains auteurs) [2]. Ils
constituent cependant l'option la plus sûre pour la mère et l'emploi de doses de warfarine
inférieures à 5 mg serait en fait associé à une mortalité fœtale faible [2]. L'héparine non
fractionnée (HNF), si elle ne franchit pas la barrière fœto-placentaire, est associée à un taux
supérieur de thromboses sur prothèse par comparaison aux AVK, surtout si elle est utilisée
tout au long de la grossesse. De plus, l'HNF comporte le risque de thrombopénie induite et
d'ostéoporose. Les données concernant les héparines de bas poids moléculaire sont trop
limitées pour pouvoir les proposer dans ce contexte. Finalement, les attitudes varient : si
certains auteurs privilégient la situation maternelle et maintiennent le traitement par AVK du
début à la fin de la grossesse, d'autres remplacent les AVK par l'HNF pendant le premier
trimestre, avant de revenir aux AVK. En revanche, le risque d'hémorragie intracrânienne
fœtale contemporaine de l'accouchement impose l'arrêt des AVK à 35 SA et le relais par
HNF. Celle-ci sera interrompue lors de l'entrée en travail ou 4 heures avant la césarienne, puis
reprise 6 à 12 heures après la naissance. En cas de travail prématuré sous AVK, l'extraction
par césarienne (après correction de l'hémostase maternelle) est indispensable pour raisons
fœtales. La mortalité associée à la grossesse chez une patiente porteuse d'une prothèse
valvulaire se situe malgré tout entre 1 et 4 %, essentiellement du fait d'accidents
thrombotiques [2].

Troubles du rythme ou de la conduction

Ils peuvent compliquer les cardiopathies énumérées au chapitre IV. Même s'ils n'engagent pas
directement le pronostic vital maternel, ils menacent le fœtus en raison des perturbations
hémodynamiques associées. Leur traitement impose la recherche d'une cause (déséquilibre
ionique, hyperthyroïdie, effets facilitateurs du tabac ou de la caféine). Si un traitement anti-
arythmique est nécessaire, on choisira une drogue sans tératogénicité connue, à la dose
efficace la plus faible (tableau  I). Dans le cas d'un trouble du rythme grave, une cardioversion
par choc électrique externe est possible sans risque démontré pour l'enfant. Plusieurs
observations de grossesses, menées chez des patientes porteuses de pacemaker ou
défibrillateurs implantables, ont été rapportées sans événement particulier.

Dans le cas particulier du syndrome du QT long congénital, un risque accru de syncope,


tachychardie ventriculaire ou mort subite a été démontré, en particulier en post-partum. Le
traitement prophylactique de ces patientes par les bêtabloquants permet de réduire
efficacement ce risque [25].

Cardiopathies ischémiques

Les méthodes coronarographiques ou scintigraphiques comportent un risque tératogène, en


particulier au premier trimestre. La prescription de bêtabloquants et de faibles doses d'aspirine
est possible. En revanche, si les agents thrombolytiques n'ont pas démontré d'effets
tératogènes, ils exposent à un risque hémorragique majeur s'ils sont injectés peu avant ou
après l'accouchement. Dans le cas d'un infarctus du myocarde péri-partum, l'angioplastie
percutanée est la méthode thérapeutique de choix.

Chirurgie cardiaque et radiologie interventionnelle

Dans le cas d'une cardiopathie valvulaire non contrôlée par le traitement médical, deux
options sont envisageables : interrompre la grossesse puis planifier une cure chirurgicale de
l'anomalie valvulaire avant un nouveau projet parental ou programmer une intervention. Les
sténoses valvulaires, en particulier mitrales et pulmonaires, sont fréquemment accessibles à
une valvuloplastie percutanée. La morbidité et la mortalité materno-fœtale des procédures
rapportées dans la littérature sont très nettement inférieures à celles d'une chirurgie,
notamment en raison d'une meilleure stabilité hémodynamique [2]. L'irradiation fœtale est
limitée autant que possible, notamment à l'aide d'une protection plombée. Certaines équipes
réalisent ce geste sous guidage échographique. Le risque de fuite mitrale sévère dans les suites
de ce geste reste cependant de l'ordre de 5 % [26]. La survenue d'une telle complication peut
imposer le recours urgent à la chirurgie. Pour cette raison, l'ensemble de la procédure doit
impérativement avoir lieu dans un centre spécialisé.

Dans une revue de la littérature publiée entre 1984 et 1996, il a été identifié 161 cas de
chirurgie cardiaque lors de la grossesse, dont 137 avec CEC [27]. La mortalité fœtale et
néonatale apparaît élevée, de l'ordre de 30 %. La mortalité maternelle est comprise entre 6 et
14 %, le pronostic maternel semblant d'autant plus défavorable que l'intervention est tardive,
au cours du dernier trimestre ou lors de la période post-partum, pour des indications urgentes
(dissections aortiques, embolectomies chirurgicales) [27]. Si le fœtus est viable, une
extraction préalable à la chirurgie cardiaque doit être proposée [2]. La surveillance du rythme
cardiaque fœtal, en cas de chirurgie avant la naissance, pourrait théoriquement guider
l'optimisation de l'hémodynamique utéro-placentaire (pression et débit de perfusion) mais elle
reste controversée.

Grossesse et transplantation cardiaque

Branch et al. ont analysé rétrospectivement l'évolution de 47 grossesses menées chez 35


patientes greffées. Sur 35 premières grossesses, 26 enfants sont nés vivants et 10 grossesses
ont été interrompues spontanément ou sur décision médicale. Le taux de complications
maternelles était de 40 % (HTA, pré-éclampsie, insuffisance rénale aiguë ou aggravation
d'une insuffisance rénale chronique, infections) et le taux de prématurité de 50 %. La survie
actuarielle globale des mères était de 75 %. Il existait, dans le groupe des 12 patientes
multipares, une tendance non significative à l'augmentation des complications maternelles et
fœtales lors de la seconde grossesse [28]. Aucun cas de malformation congénitale n'a été
observé.

Réanimation d'un arrêt cardiorespiratoire

Les principales causes d'arrêt cardiorespiratoire (ACR) au cours de la grossesse sont résumées
dans le tableau  II.

Les grandes lignes de la réanimation cardio-pulmonaire (RCP) sont strictement identiques à


celles recommandées en dehors de la grossesse et qui ont récemment donné lieu à un
consensus international [30]. Cependant, ces recommandations ont inclus un chapitre
spécifique à la grossesse, précisant essentiellement deux points-clés :

1) Au cours du troisième trimestre, la RCP est totalement inefficace si conduite sur une
patiente en décubitus dorsal, en raison de la compression cave. Placer la patiente en décubitus
latéral gauche (30-45o) avec l'aide d'un assistant ou d'un dispositif prévu à cet effet est donc
indispensable. Au minimum, on doit s'attacher à déplacer manuellement l'utérus sur le côté.

2) En présence d'un ACR sans récupération d'une activité circulatoire spontanée en moins de
5 minutes chez une patiente au-delà de 24 SA, l'extraction fœtale en urgence est
recommandée, aussi bien pour tenter de sauver l'enfant que pour améliorer l'hémodynamique
maternelle. Cette recommandation semble encore trop peu appliquée [31].

CONCLUSION

La prise en charge analgésique et anesthésique d'une femme enceinte porteuse d'une


cardiopathie est associée à un risque très variable selon la nature et la sévérité de celle-ci. Elle
ne se conçoit, hors urgence, que dans un centre spécialisé, disposant de tout l'environnement
humain et matériel nécessaire, et doit être planifiée de façon précoce. La technique
d'anesthésie idéale est déterminée au cas par cas, idéalement au décours d'une discussion
collégiale et multidisciplinaire. Les indications d'anesthésies locorégionales sont larges, en
dehors des troubles sévères de l'hémostase.

Tableau II. Principales causes d'arrêt cardiorespiratoire en cours de grossesse.


D'après [29].
Causes obstétricales Causes non-obstétricales
· Hémorragie · Embolie pulmonaire
· Pré-éclampsie, HELLP syndrome · Sepsis
· Embolie amniotique · Cardiopathies, maladies aortiques
· Cardiomyopathie du post-partum · Vascularites
· Complications anesthésiques · Anomalies métaboliques

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