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I.Introduction
• La colonisation, phénomène majeur, à la périphérie du sujet du cours mais bien dans son cadre chronologique.
Les Grecs sont partis de cités-mères pour construire ex-nihilo des villes, les colonies, en général proches de la
mer.
• Hérodote (484-420) date le départ de Théra de 638.
• Cyrène est la colonie d’une colonie (Théra) qui se dit minyenne et spartiate d’origine. Le mythe des origines
de Cyrène est très complexe et nous l’aborderons.
• Historiquement, il y a eu deux générations de colons (Crétois puis Doriens ; Hérodote souligne le rôle des
Crétois).
• La fondation de Cyrène nous est connue par 3 textes dont deux principaux. Le texte le plus périphérique est la
quatrième ode de Pindare. Hérodote est beaucoup plus prolixe dans le livre 4 de son Ι σ τ ο ρ ι α ; nous
avons aussi la stèle dite des fondateurs.
• Cette stèle fut gravée au début du IVème siècle alors que le serment date de vers 630. Le fait que l’on ait
utilisé du marbre, difficile à tailler, témoigne de l’importance de stèle, destinée principalement aux habitants
de Cyrène et de Théra. Il s’agit de rappeler leur origine et leur légitimité aux premiers et d’attirer les seconds
dans la ville. Il s’agit d’un décret d’isopolitie, ie d’égalité de droits.
• Du point de vue stylistique, on note un redoublement, fréquent dans les langues anciennes, notamment en
grec. Nous ne disposons ici que de la seconde partie du texte mais la première dit à peu près la même chose.
• Texte original car gravé d’après un texte existant depuis longtemps (2 siècles) et non réalisé pour l’occasion,
ce que prouve l’étude de la langue et des formulations. Mais l’authenticité du texte reste sujette à débat. Le
fait de fixer par écrit est important car cela donne un caractère solennel et durable (la pierre de la stèle est faite
pour durer) à un texte qui est par essence oral (le serment) dans une société où l’art oratoire oral donc est très
développé. Le serment oral transmis de génération en génération est très fort mais il était peut-être devenu
insuffisant au IVème siècle, quand Cyrène avait besoin de se légitimer et d’attirer de nouveaux habitants.
• Le graveur est anonyme mais c’est la ville qui parle ; l’auteur est donc Cyrène.
• L’utilisation du discours indirect, ie non de paroles rapportées dans leur forme mais seulement dans leur sens,
fait pencher en faveur d’une certaine authenticité.
• Du point de vue des temps, les actions sont au passé et les recommandations et injonctions au présent et au
futur, ce qui donne un aspect daté à la fondation mais un caractère intemporel au serment (cf marbre), aux
décisions et aux imprécations.
• Le texte oscille entre plusieurs visions de la colonisation. En quoi montre-t-il à la fois une fondation religieuse
rigide, systématique et contrainte et une colonisation nécessaire sur le plan économique et favorisée sur le
plan social, à une époque où Cyrène vient de défaire des Battiades et est en quête de légitimité et veut faire
venir de nouveaux habitants particulièrement de Théra ?
V.Conclusion
• Un effort collectif organisé pour résoudre un problème de surpopulation, avec des départs contraints et en
théorie des départs volontaires (mais on ne sait pas vraiment dans quelle mesure cela a joué à Théra ;
l’attachement des Grecs à la terre est très fort, particulièrement sur les petites îles où l’insularité renforce ce
sentiment ; l’émigration volontaire serait plus le fait de Péloponnésiens, notamment de Spartiates, habitants de
la ville qui est la cité-mère de Théra).
• Il faut préserver l’harmonie (Homonoïa/Omonia/Concordia, sœur de la paix (grenade et rameau d’olivier ;
présence sur les monnaies hellénistiques).
• Les Cyrénéens possèdent légitimement leur terre. Battos le fondateur est glorifié mais les autres Battiades
sont oubliés. Avec ce décret d’isopolitie, Cyrène essaie de faire venir de nouveaux habitants, notamment de
Théra.
• Il y a une ritualisation avec un rituel archaïque pour Bertrand, celui des statues de cire, et une malédiction.
• Le manque de terre explique la colonisation. La raison n’était probablement pas commerciale à l’origine
(reconstruction d’Hérodote probable à partir de ce qu’il voit et veut donc expliquer) ; l’hypothèse d’un conflit
interne est peu vraisemblable et la raison religieuse est insuffisante, surtout si l’on suit Hérodote qui affirme
que le premier oracle n’a pas été entendu.
• Cyrène est une colonie à part, dans sa fondation et dans son développement. Mais elle nous permet de voir les
principales modalités et causes de la colonisation grecque. La ville de Battos était promise à un bel avenir,
avec une grande prospérité commerciale et à l’époque hellénistique et romaine la présence d’une école
renommée de mathématiciens (Eratosthène(s), 276-194).
VI.Bibliographie
Sources antiques
• Hérodote, Enquête, livre 4.
• Pindare, Quatrième Ode Pythique.
Etudes contemporaines
• http://www.es.flinders.edu.au/~mattom/science+society/lectures/illustrations/lecture10/cyrene.html (pour la
carte)
• CH. V. Daremberg et E. Saglio, Dictionnaires des Antiquités Grecques et Romaines, Paris : Hachette, 1877-
1919. Note : livre ancien mais avec l’article le plus complet sur les légendes de Cyrênê.
• http://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/cyrene_et_la_cyrenaique_grecques_aux_epoques_archaique_et_classiq
ue.asp (article de Jean-Jacques Maffre intitulé Cyrène et la Cyrénaïque grecques, aux époques archaïque et
classique et paru en 2002)
• Fr. Létoublon, « le serment fondateur » in Mètis : Anthropologie des mondes grecs anciens, volume 4 n°1,
1989, pages 101 à 115.
• M. C. Howatson (sous la dir. de), Dictionnaire de l'Antiquité : Mythologie, littérature, civilisation, Paris :
Robert Laffont (pour la version française ; Oxford University Press en version originale), 1998 (1989 pour la
première version originale)
• M.C. Amouretti et F. Ruzé, Le monde grec antique, Paris : Hachette Supérieur, 2003.
• J. Boardman, Les Grecs outre-mer colonisation et commerce archaïques, Naples : centre Jean Bérard pour
lédition française (Londres : Thames and Hudson pour la version originale), 1995 (1964 pour la prmeière
édition).
• Cl. Calame, Mythe et histoire dans l’antiquité grecque la création symbolique d’une colonie, Paris : Payot
Lausanne, 1996.
• Cl. Baurin, Les Grecs et la Méditerranée orientale : Des "siècles obscurs" à la fin de l'époque
archaïque, Paris : Presses Universitaires de France, 1997.
• J-M. Bertrand, Inscriptions historiques grecques, Paris : Les Belles Lettres, 2004 (1992 pour la
première édition).
• Cl Mossé, la colonisation dans l’antiquité, Paris : Nathan Fernand Fac, 1992.
VII.Documents
IX.Reprise
• Théra était-elle une monarchie ? Oui ; c’est Grittos qui régnait selon Hérodote à l’époque de la colonisation
de Cyrène. « Γρῖννος ὁ Αἰσανίου ἐὼν Ψήρα τούτου ἀπόγονος καὶ βασιλεύων Θήρης »
(Héodote, Histoires IV, 150 : « Grinus, fils d'Aesanius, descendant de ce Théras, et roi de l'île de Théra, alla à
Delphes pour y offrir une hécatombe »)
• Il faut bien insister sur le fait que, même si le titre du texte contient le mot Cyrène, le texte nous parle surtout
de Théra.
• Ce texte est extrait d’un dossier ; la question de l’isopolitie était plus visible dans l’autre texte.
• Ici, on ce qu’on appelle l’apoïkia, terme qui renvoie de par son étymologie au fait de partir de sa maison, ce
que les Grecs aiment peu, quelque navigateurs qu’ils soient.
• Le silphium a fait la richesse de la ville. Dans le fascicule (et en bas à droite, en couleur), on voit d’ailleurs le
roi de la cité en train de peser la précieuse marchandise sur une céramique de type lacédémonienne (Cyrène
est proche de Sparte).
• Le blé est de manière assez surprenante pour nous l’autre matière première qui a fait la fortune de Cyrène. On
imagine la Libye comme un désert ; en fait, la Cyrénaïque est un vaste plateau bien arrosé et humide. Mais
comme en latitude la ville est très basse par rapport à la Grèce, le blé arrivait à maturité très tôt, avant celui de
toutes les autres villes. Il était mûr au moment de la période redoutée de la « soudure », ie quand le blé était le
plus cher car on commençait à en manquer (peu avant la récolte, il ne reste presque rien à part ce qu’on garde
pour les semailles). Les habitants de Cyrène étaient très appréciés (et ce jusqu’à Rome) car ils aidaient aussi
les habitants des cités grecques en cas de famine.
• Sur les monnaies, on voit dès la période archaïque le silphion sur une face et le roi sur l’autre face (un
Battiade, nommé soit Battos, soit Arcésilas) ; il a des cornes (voir en bas à gauche) qui rappellent la proximité
de l’oracle de Zeus-Ammon à Siwa.
• Cyrène contraste avec Théra : la première va se tailler un gigantesque territoire et de venir une des deux plus
grandes réussites de la colonisation (avec Syracuse) quand la seconde est une petite île volcanique rocailleuse
menacée à tout moment d’exploser.
• Cyrène était très mal partie au début (problème d’organisation) mais malgré les difficultés elle a fini par
devenir une grande cité, pas seulement réputée pour son commerce.
• La question des femmes est essentielle et a posé beaucoup de problèmes à Cyrène avec les autochtones.
• Cyrène est l’une des rares colonies qui soit (relativement) loin de la mer (un peu plus de 20 km ; et la ville se
trouve en altitude).
• Le rituel des statues de cire est unique.