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La croissance endogène : Introduction

AES L3 AGE, AGT, CAI

2016-2017
Objectifs de ce document

1. Donner une définition de la croissance endogène.


2. Comprendre le rôle central de la P mk.
3. Présenter le modèle de base de croissance endogène : le
modèle AK.
4. Comprendre que la politique économique influence la
croissance en influençant la P mk : Exemple avec
l’introduction de l’efficacité du système financier.
5. justifier la formulation AK par l’introduction d’une
externalité : Frankel (1962).
6. Comprendre que si le modèle AK explique la croissance par
tête, il ne permet plus d’avoir de convergence.
1- Qu’est ce que la croissance endogène ?

La croissance endogène regroupe les modèles de croissance pour


lesquels le taux de croissance de long terme est déterminée par
les variables du modèle, et non pas de manière exogène (comme
le PT chez Solow).

Hulten (2000) dit de la théorie de la croissance endogène que


"ce qui est nouveau [dans la théorie] est l’hypothèse que la
productivité marginale du capital constante, au lieu de
diminuer comme dans les théories classiques."
2- Tout est dans la Pmk...
I Chez Solow, la P mkt est décroissante. C’est la raison pour
laquelle la croissance par tête finissait par atteindre 0.
I Chez Solow la P mk tend vers l’infini lorsque le capital tend
vers 0. C’est la raison pour laquelle les économies
convergeaient vers un état stationnaire (en réalité il suffit
que :
lim P mkt > n + δ
kt →0
Tout est dans la Pmk ... suite

Il suffit donc de trouver un moyen pour empêcher la P mk de


décroître en dessous de n + δ pour obtenir de la croissance sans
l’aide du progrès technique exogène.
3- Le modèle "AK" de Romer 1987 et Rebelo 1991
Romer et Rebelo remettent au goût du jour le modèle de
Domar. Ils posent la fonction de production :

Yt = AKt

La similitude avec le modèle de Domar est évidente puisque


A = 1/v. On garde les hypothèses suivantes :

sYt = It

DKt = It − δKt
DLt
n=
Lt
Avec cette fonction de production la P mk reste constante :

P mkt = A
Que représente A ?

Habituellement A représente le niveau de technologie dans le


modèle de Solow. Ici A est conçue comme la rentabilité brute
du capital. Donc cette variable peut être influencée par la
politique économique, la politique fiscale, l’environnement
économique ... c’est un peu fourre tout !
Représentation graphique
L’équation dynamique du capital par tête est :
Dkt = syt − (n + δ)kt = sAkt − (n + δ)kt
Soit un taux de croissance du capital :
Dkt
= sA − (n + δ)
kt
Conséquence d’une P mk constante

Si la constance de la P mk permet d’avoir de la croissance


perpétuelle expliquée autrement que part l’introduction du
progrès technique, en revanche on perd la possibilité de de
convergence des pays entre eux !
La croissance dépend complètement des variables du
modèle

Si l’on observe l’expression du taux de croissance, on observe


que le taux de croissance d’état régulier d’un pays i dépend
seulement les paramètres du modèle (c’est ce qui justifie le
terme de croissance endogène).

γki = γyi = si Ai − (ni + δ)


Alors que chez Solow, quelque soient les paramètres du modèle,
la croissance d’état stationnaire était nulle.
Représentation graphique du modèle "AK"

On constate que dès lors que sA > n + δ il n’existe plus d’état


stationnaire.
Comparaison du modèle "AK" avec le modèle de Solow
avec progrès technique.

Pour comprendre d’apport du modèle "AK" par rapport au


modèle de Solow, il est utile de comparer les deux modèles.

Nous allons voir qu’une hausse du taux d’épargne n’a pas le


même effet dans les deux modèles.
I Dans le modèle "AK" une hausse du taux d’épargne
entraîne une hausse de la croissance à long terme.
I dans le modèle de Solow, une hausse du taux d’épargne
entraîne une croissance temporaire. Il y a juste un effet de
niveau sur y.
Effet sur la production d’un hausse du taux d’épargne
Effet sur la croissance d’une hausse du taux d’épargne
4- Système financier et croissance : une conséquence du
modèle AK

Puisque l’augmentation du taux d’épargne a un effet sur la


croissance, nous pouvons établir un résultat surprenant à savoir
qu’une baisse de la P mk a moins de conséquence en perte de
croissance dans un pays qui a un système financier moins
développé que dans un pays ayant un système financier
développé.
Qu’est ce qu’un système financier efficace ?

I un Système financier peut facilité ou non la rencontre de


l’épargne et de l’investissement.

It = φSt avec 0<φ<1

Plus φ est faible, moins l’épargne se transforme en


investissement. Le système financier est inefficace.
I Un système financier très efficace, permet également à
l’agent de gérer sa chronique de consommation de façon
intertemporelle. C’est le modèle avec épargne
endogène.
Modèle avec efficacité du système financier

On a :
Y = AKt
It = φSt
St = sYt
DKt = It − δKt
L’équation dynamique du capital par tête est :

Dkt = φsAkt − (n + δ)kt

Soit un taux de croissance :

γ = φsA − (n + δ)
Conséquence de la baisse de la rentabilité du capital

L’impact d’une baisse de la P mk est donné par :


∂γ
− = −φs
∂A
On voit clairement qu’une mauvaise politique économique qui
entraîne une baisse de la rentabilité du capital a d’autant moins
d’effet sur la croissance que le le système financier est peu
développé.
Le modèle AK avec épargne endogène

On suppose toujours la même fonction de production mais le


problème est maintenant :

c1−σ
Z +∞
−1
max e−ρt t
Lt dt
ct t=0 1−σ
Sous la contrainte :

Dkt = Akt − ct − (n + δ)kt

On avait vu que la décision de consommation des agents était :


Dct 1
= (rt − ρ)
ct σ
Le taux de croissance

On sait que rt = P mkt − δ = A − δ donc le taux de croissance


de l’économie est :

1
γ= (A − δ − ρ)
σ

L’effet sur la croissance d’une baisse de la P mk est mesuré par :


∂γ 1
− =−
∂A σ
Empiriquement σ est de l’ordre de 1-2.
Comparaison des modèles (épargne exogène vs épargne
endogène)

La baisse de la P mk entraîne une perte de croissance de :


I −φs dans le modèle avec épargne exogène
I −1/σ dans le modèle avec épargne endogène

Si on fixe σ = 2, φ = 0, 8 et s = 0, 2 une baisse de 1% de la


P mk entraine :
I Une baisse de 0, 8 × 0, 2 = 0, 16 points de croissance dans le
modèle avec épargne exogène
I une baisse de 1/2 = 0, 5 points de croissance dans le modèle
avec épargne endogène.
Comment expliquer ce résultat ?

Dans le modèle avec épargne endogène, le taux d’épargne


dépend de la rentabilité du capital (s = s(A)). Un baisse de la
P mk (baisse de A) va entrainer un effet direct de baisse du
taux de croissance mais également un effet indirect de baisse du
taux d’épargne et donc du taux de croissance.

Démonstration : Le taux de croissance est une fonction de A


et de s(A) donc :

∂γ[A, s[A]] ∂γ[A, s[A]] ∂s(A) ∂γ[A, s[A]]


− =− −
∂A | ∂A
{z } ∂A ∂s(A)
| {z }
Effet direct Effet indirect
Conséquences de ce résultat

L’implication d’une mauvaise politique économique (baisse de la


rentabilité du capital) a un impact plus fort sur la croissance
dans un pays qui a un système financier développé que dans un
pays ou le système financier est moins développé.

Ainsi les agents avec un moins bon système financier peuvent


perpétuer les mauvaises décisions de politique économique
puisque celle ci on moins d’impact sur la croissance.

L’État joue donc un rôle primordial dans les modèles


de croissance endogène.
5- Comment expliquer le rendement constant du
capital ?

En posant la fonction de production Yt = AKt afin d’obtenir


une P mk constante, on rejette donc le fait qu’une entreprise ait
des rendements décroissants dans l’augmentation de son propre
capital.

L’idée de Frankel (1962) consiste à introduire une externalité


dans la fonction de production. Cette externalité dépend du
stock total de capital dans l’économie.

Il est plus facile pour une entreprise de produire lorsque les


autres entreprises produisent également !
Intuition du modèle de Frankel

On suppose l’existence de N entreprises identiques dont la


fonction de production par tête est du type :
N
X
yi = AK η kiα avec K= ki
i=1

K η est une externalité positive dont bénéficie chaque entreprise.

On constate qui si l’entreprise i augmente son capital ki cela se


fera à rendements décroissants 0 < α < 1 mais elle contribue
(un peu) à l’augmentation du stock total de capital.
Comme on a fait l’hypothèse de N entreprises identiques on en
déduit que : ki = K/N . La production totale dans l’économie
est :
N
X
Y = yi
i=1

Soit : α
K

Y = N yi = N AK η
N
En arrangeant :
Y = K η AK α N 1−α

I Le terme K η représente l’externalité


I Le terme AK α N 1−α est la fonction de production
néoclassique
La productivité marginale du capital "privé"

A cause de la présence d’une externalité, il existe Une P mk


privée (celle que voit l’entreprise si elle augmente son capital)
qui est calculé à partir de la fonction de production de
l’entreprise :

∂yi
yi = AK η kiα ⇒ P mk Privé = = αAK η kiα−1
∂ki
Clairement on voit que cette P mk est décroissante.
La productivité marginale sociale du capital

La P mk sociale est calculée à partir de la fonction de


production macroéconomique. Mais avant de la calculer nous
allons poser :
Ā = AN 1−α
Ainsi la fonction de production macroéconomique
Y = AK α+η N 1−α va s’écrire :

Yt = ĀK α+η

La P mk sociale est donc :

P mk Sociale = (α + η)ĀKtα+η−1

Clairement la P mk est constante dès lors qu’elle ne dépend plus


du capital soit lorsque α + η = 1.
Remarques

I Si α + η < 1 la P mk Sociale est décroissante, cela ne permet


pas d’obtenir de la croissance endogène.

I Si α + η > 1 la P mk Sociale est croissante, cela veut dire que


la P mk Sociale augmente et donc que l’on n’obtiendrait pas
de croissance à taux constant mais à taux croissant (ce qui
est contraire aux faits).

I La ressemblance du modèle de Frankel avec le modèle "AK"


n’est possible que si α + η = 1. L’avantage du modèle de
Frankel est donc d’unifier le modèle de Solow et le modèle
"AK" en introduisant une externalité qui permet de
préserver les rendements décroissants du capital pour
chaque entreprise.
Pourquoi la P mk Sociale diffère de la P mk Privée ?

Lorsqu’un entrepreneur étudie la conséquence d’une


augmentation de son capital sur sa production, il ne prend pas
en considération que l’augmentation de son capital augmente
l’externalité.

Comme il s’agit d’une externalité positive chaque entreprise


privé devrait accumuler plus de capital physique.

Un dictateur bienveillant investirait plus générant plus


d’externalité positive. C’est la raison pour laquelle :

P mk Sociale > P mk Privée


6- Le débat entre partisans du modèle "AK" et du
modèle néoclassique

Sur l’explication de la croissance

Un premier argument en faveur de l’approche "AK" est qu’elle


peut expliquer les taux de croissance du PIB par habitant,
toujours positifs, que nous observons dans la plupart des pays
du monde. Ce taux de croissance dépend de la P mk qui peut
différer d’un pays à l’autre à cause des politiques économiques,
des infrastructures etc...

Le modèle néoclassique ne peut pas expliquer la croissance par


tête sans progrès technique. Or s’il y a du progrès technique
(qui tombe du ciel), il n’y a pas de raisons pour ce taux x
diffère d’un pays à l’autre.
Sur la convergence

Les partisans du modèle néoclassique pensent qu’il est


important de pouvoir expliquer la convergence des pays, états
ou régions soit vers leur état régulier voit entre eux (elles).

Les partisans du modèle "AK" répondent que les études


empiriques sur la convergence sont très mitigées et que par
ailleurs le but est plus d’expliquer les écarts de croissance entre
les pays plutôt que de savoir s’ils vont ou ne vont pas converger
vers le même niveau de vie.
Les partisans du modèle "AK" vont utiliser trois
arguments importants :

I Les données empiriques montrent que A ≈ K η et donc qu’il


existe bien des externalités qui justifient un tel modèle.
I Si les partisans du modèle néoclassiques mettent avant la
convergence, ils le font en utilisant un modèle qui donne
une vitesse de convergence trop élevée
β = (1 − α)(n + x + δ). Pour réduire cette vitesse de
convergence, il faut augmenter α. Pourquoi ne pas
admettre que α = 1 ?
I Si c’est la formulation "AK" qui dérange, il existe d’autres
moyens d’obtenir un modèle équivalent i) en introduisant
l’accumulation du capital humain, ii) un secteur de la R&D
et le iii) le capital public.
Les modèles que l’on va développer dans le cours

Nous allons aborder 3 types de modèles :


I Le modèle de Lucas (1988) avec un secteur d’accumulation
du capital humain. Le capital humain permet de mieux
utiliser le capital physique.
I Une version simplifié du modèle de Romer 1990(le modèle
de Jones) avec un secteur d’accumulation des idées (R&D).
Un nouvelle idée rend plus productif le capital.
I Le modèle de Barro 1990, qui introduit les dépenses
publiques productives. Ainsi la P mk ne baisse pas parce
que l’état fait des dépenses d’infrastructures qui augmente
la rentabilité du capital.

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