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PLANIFICATION ET AMÉNAGEMENT SPATIAL 1

Etude pittoresque

Université Abderrahmane Mira. Département d’Architecture, Béjaïa.


ETUDE PITTORESQUE

Dans les années 60 et 70, en réaction aux impacts destructifs du Modernisme


face à la ville et à la vie urbaine, Kevin Lynch, Jane Jacobs, Christopher
Alexander et d’autres encore, ont essayé de redonner une lisibilité à la ville en
reconstituant les fonctions sociale et symbolique de la rue et autres
espaces publics.
Ils ont critiqué la perte de dimension humaine sur les villes modernes.
Ainsi leurs travaux s’appuient sur la perception qu’a l’habitant de la ville,
en se basant sur des enquêtes scientifiques ( entrevues et questionnaires).
ETUDE PITTORESQUE

L‘étude pittoresque est l’analyse du paysage urbain. Cette étude ne s'interroge


aux structures et à leur genèse que dans un second temps. Elle enregistre d'abord
la vision et la perception que peut avoir un promeneur attentif, ensuite
elle passe au stade de l’interprétation.
Sa méthode consiste à inventorier et à classer les différentes figures du
paysage urbain, particulièrement des espaces publics, et à en analyser les
qualités; (telle figure provoque tel effet, effet potentiellement utile pour telle
activité ou telle attitude urbaine.)
L'analyse pittoresque n'est donc pas seulement descriptive et explicative, elle
est surtout appréciative. Elle n'est donc pas seulement une méthode
d'évaluation des paysages urbains existants, mais aussi un mode de contrôle de la
justesse des formes par leur perception, à toutes les phases du projet.

A. Benammar .Professeur à l'université de MHB ORAN


L’ANALYSE SÉQUENTIELLE

Après la seconde guerre mondiale, l'analyse pittoresque a été


considérablement renouvelée par des architectes anglais,
particulièrement par Gordon Cullen, inventeur de la notion de
'TOWNSCAPE' (paysage urbain).

Gordon Cullen (1914-1994) était un architecte et urbaniste anglais, il a


beaucoup œuvré pour le mouvement « townscape »et a écrit et publié
«the concise townscape» en 1961. Il a été un facteur de motivation et
un activiste dans le développement des théories britanniques de design
urbain dans la période d'après-guerre.

Le « Townscape » apprécie la continuité et la diversité, en opposition à


la discontinuité (urbaine) et à l'uniformité (architecturale) de l'urbanisme
issu du mouvement moderne.
A. Benammar .Professeur à l'université de MHB ORAN
L’ANALYSE SÉQUENTIELLE

L’analyse séquentielle s’appuie sur le principe que la perception de la ville


n’est pas « statique » mais « dynamique» ; elle s’effectue dans le cadre d’un
déplacement à l’intérieur de la ville. La ville est donc appréhendée de l’intérieur
par une succession de déplacements.

«L’analyse séquentielle étudie donc les


successions du champ visuel d’un
parcours découpé en séquences. »

Cullen pense que l'appréhension du paysage


urbain se fait à partir des critères suivants :
- le mouvement et la vision sérielle dans
lesquels s'enchaînent la « vue de l’existant »
et la « perception de l’émergent »;
-Le contenu: caractère, identité, style…
L’ANALYSE SÉQUENTIELLE

Pour un observateur progressant selon


une direction déterminée, le parcours
pourra se découper en un certain
nombre de séquences, chacune étant
constituée par une succession de «
plans » dans lesquels le champ visuel
est déterminé de façon constante.

L’idée consiste à isoler et à reconnaître,


dans une séquence, des tableaux
représentant des dispositions
schématiques et codifiées du paysage.
Concept de « vision sérielle » chez Cullen
Philipe Panerai (1999) a « introduit l’analyse séquentielle du paysage afin de
permettre d’étudier les modifications du champ visuel d’un parcours. Le passage
d’un plan à un autre peut être décrit par divers critères qualificatifs. »

« L’idée consiste à isoler et reconnaître dans une séquence des « tableaux » qui
sont […] des dispositions schématiques et codifiées du paysage, et à les
nommer. » (Panerai, 1999 : 41).
L’ANALYSE SÉQUENTIELLE

Apports de Cullen

 Analyse de l’urbain à l’aide d’images illustrant de


multiples points de vue.
 Analyse perceptuelle des composantes du cadre bâti et
de leurs effets.
 Exploration graphique (dessin comme outil de
l’architecte)
 Méthode illustrée par des études de cas
 Accorde la place à la notion de site ainsi qu’à la
perception
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Kevin Lynch

K. Lynch dans son ouvrage « L’Image de la Cité », souhaite mettre en évidence

la conscience d’habiter. Il étudie comment la ville en tant qu’entité matérielle est

perçue par les habitants.

Pour cela, il utilise « l’analyse visuelle et perceptuelle » de la ville comme

approche fondamentale afin d’aborder la question de la qualité visuelle de l’espace

urbain.

Il tente de relier l’analyse du paysage à la perception qu’en ont les

habitants afin de découvrir une image collective de la ville.

Philippe Pannerai & col. Eléments d’analyse urbaine. P.111.


L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Kevin Lynch

Pour Kevin Lynch, l’image que l’on se fait du paysage urbain est forgée par des

sentiments ou des besoins pratiques différents : tels que le besoin de se repérer,

le sentiment d’appartenance à son milieu, et les impératifs esthétiques, etc.

D’après ce même auteur, une agglomération est satisfaisante lorsqu’elle est

facilement lisible. Il s’oppose ainsi aux grands ensembles modernistes qui

malgré leur simplicité apparente, induisent une perte de repères due aux

nombreuses répétitions et à la monotonie qui s’en dégage.

Marie de Geuser. La troisième ville. P.29


L’ANALYSE PAYSAGÈRE

1- La lisibilité

C'est la clarté du paysage, c’est-à-dire la facilité avec laquelle on peut


reconnaître ses éléments, les organiser et les structurer en un schéma
cohérent. Cette clarté permet de s'orienter, grâce aux indications
sensorielles, assurant ainsi la "sécurité émotive" des habitants. De plus,
elle fournit du sens, en permettant l'élaboration de symboles et de
souvenirs collectifs. P. 03-05

Une ville lisible


C’est celle dont les quartiers, les points de repères ou les voies sont facilement
identifiables et aisément combinés en un schéma d’ensemble . P. 03

K. Lynch. L’image de la cité.


L’ANALYSE PAYSAGÈRE

2- Bâtir l’image

Les images sont le résultat d'une


opération de va-et-vient entre le
milieu et l'observateur, qui reconnaît
facilement les objets familiers et les
objets imposants.
Chaque individu crée et porte en lui sa
propre image mais il semble qu’il y ait
une grande concordance entre les
membre d’un même groupe.
La tâche des urbanistes consiste à modeler un espace destiné à de nombreux
habitants, c'est l'image collective qui les intéresse.
K. Lynch. L’image de la cité. P. 07-09
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

3- Structure , identité et signification

Composantes de l’image
L’image de l’environnement peut s’analyser à travers trois composantes :
•l’identité : c’est l’identification de l’objet, qu’on distingue des autres objets, et
qu’on reconnait comme identité séparée.
•la structure : c’est la relation spatiale ou paradigmatique de l’objet avec
l’observateur et les autres objets.
•la signification : l’objet doit avoir une signification pratique ou émotive pour
l’observateur.
Exemple: La porte
• Entité distincte
• Relation spatiale avec l’observateur
• Sa signification comme « trou pour sortir »
K. Lynch. L’image de la cité. P. 09
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

4- L’Imagibilité (ou visibilité)

Image mentale commune


Lynch conclut que, pour n'importe quelle ville donnée, il existe une image
collective qui « envelopperait » un grand nombre d'images individuelles, et
propose le terme d’imagibilité pour rendre compte de la capacité d’un
espace à véhiculer une forte identité qualitative chez les gens.

L’imagibilité : c’est « la qualité qu’a


un objet de produire une image mentale
chez l’observateur » grâce à la continuité
de sa structure et à la clarté de ses
éléments.
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

4- L’imagibilité (ou visibilité)

Le rôle de l’imagibilité

Rôle social
L’environnement familier fournit des souvenirs communs et des symboles
qui lient les groupes entre eux et les fait communiquer les uns avec les
autres.

Rôle d’orientation

Il s’agit d’orienter et de guider les habitants tout en leur donnant un


sentiment de sécurité et de familiarité, c’est-à-dire de retrouver facilement
son chemin grâce aux indications sensorielles et aux souvenirs.
=>L’image joue le rôle de carte.
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

A partir d'une série d'enquêtes menées auprès d’habitants et de visiteurs de


trois villes américaines, K. Lynch cherche à comprendre comment l’espace
urbain est « lu », comment les « messages » que les formes « envoient » sont
interprétées et comment une image mentale se forme.

Boston Jersey city Los Angeles


L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Après l’enquête effectuée sur ces trois villes


américaines, Lynch dresse des éléments-clés
dans la lecture d’une ville.

Pour K. Lynch l’identification des voies, des


points de repères, des limites, des nœuds, et
des quartiers est déterminante pour la
représentation mentale et la compréhension de
ses espaces.
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

1- Les voies

« Les voies sont les chenaux le long desquels l’observateur se déplace


habituellement, occasionnellement, ou potentiellement. Ce peut être des rues, des
allées piétonnières, des voies de métropolitain, des canaux, des voies de chemin
de fer. » K. Lynch. L’image de la cité. P. 54

L'imagibilité des voies s’amplifie en fonction de


plusieurs critères : la continuité, la direction,
l’étalonnage, le caractère en ligne.
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville Un troisième attribut se rapporte à la voie, celui


d’être « en ligne », dans ce cas, il s’agira de
1- Les voies
déterminer si la direction de la voie peut être
« Les voies peuvent avoir une qualité rapportée à un système plus étendu.
directionnelle qui permette de distinguer
facilement le long de l’axe de la voie, une Il y a beaucoup d’exemples de

direction de la direction opposée. » P. 61 voies qui ne sont pas en ligne,


cela est dû en général à des
« La voie peut avoir un deuxième attribut, celui
tournants subtils et trompeurs.
d’être étalonnée : on peut être capable de se
situer le long de la voie, de se rendre compte du Les changements de direction
chemin parcouru ou de ce qui reste encore à brusques peuvent renforcer la
faire. […] Il semble que, le plus souvent, clarté visuelle en limitant l’effet «
l’étalonnement se faisait en utilisant une couloir » et en attribuant à des
séquence de points de repère ou de nœuds structures bien différenciées des
connus et situés le long de la voie. » P. 64 emplacements marquants P. 65
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

1- Les voies

Pour devenir des caractéristiques importantes de l'image, les voies peuvent se


particulariser de plusieurs façons.
Les activités qui bordent les voies
Le rassemblement de certaines utilisations du sol ou
d’activités particulières le long d’une rue peuvent la mettre
en avant dans l’esprit de l’observateur, notamment dans le
renforcement de son image.
K. Lynch. L’image de la cité. P. 58

Les caractéristiques des façades


Les caractéristiques des façades ont une
grande importance dans l’identité des voies.
K. Lynch. L’image de la cité. P. 59
Rue à Los Angeles
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

1- Les voies

Des qualités spatiales caractéristiques peuvent renforcer l’image de


certaines voies. Par exemple, des rues se caractérisent par leur extrême largeur ou
leur extrême étroitesse P. 59

Washington
Street à Boston

Boulevard du
colonel LOTFI
à Bab el oued
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

1- Les voies

Le revêtement de la chaussée et plantation


Le revêtement de la chaussée semble moins
important que certaines caractéristiques citées plus
haut , excepté dans certains cas particuliers. (Olvera
Street à Los Angeles).
Olvera Street

Les détails de plantation semblaient aussi


relativement sans importance, mais une grande masse
de plantations, peut renforcer très efficacement
l’image de la voie.
K. Lynch. L’image de la cité. P. 59
Commonwealth Avenue
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

2- Les limites

« Ce sont des éléments linéaires que l’observateur n’emploie pas ou ne considère pas
comme des voies. Ce sont les frontières entre deux phases, les solutions de
continuité linéaires : rivages, tranchées de voies ferrées, limites d’extension, murs.
Elles servent de références latérales plutôt que d’axes de coordonnées. Elles peuvent
être des barrières plus ou moins franchissables, qui isolent une région d’une autre. »
Kevin Lynch. L’image de la cité. P. 54
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

3- Les quartiers

« Les quartiers sont des parties de la ville, d’une taille assez grande, qu’on se
représente comme un espace à deux dimensions, où un observateur peut
pénétrer par la pensée, et qui se reconnaissent parce qu’elles ont un caractère
général qui permet des les identifier. » (p. 55)

Par exemple, à Jersey City,


ses quartiers sont basés sur
des critères de classes
sociales ou des critères
ethniques et peu sur des
Sous-quartier de Bacon Hill
distinctions physiques. P. 78
La zone du marché
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

4- Les nœuds

« Les nœuds sont des points, lieux stratégiques d’une ville, pénétrables par un
observateur, et des points focaux intenses vers et à partir desquels il voyage.
Cela peut être essentiellement des points de jonction, endroits où on change de
système de transport, croisements ou points de convergence de voies, lieux de
passage d’une structure à une autre. […]

Certains nœuds de concentration sont le


foyer et le résumé d’un quartier, sur lequel
rayonne leur influence, et où ils se dressent
comme un symbole : on peut les appeler
centres. »
Kevin Lynch. L’image de la cité. P. 55
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

4- Les nœuds

Images illustrant les différents types de nœud

Boston Boston Place St Pierre


croisements ou points de Points de rassemblement qui
Lieux de passage d’une tient son importance du fait
structure à une autre. Ex: convergence de voies
qu’il soit une concentration de
Places, quartiers, gares (à certaines fonctions ou de
l’échelle régionale, nationale caractères physiques.
ou internationale)
L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

5- Les points de repère


« Les points de repère sont un autre type de référence ponctuelle, dans ce cas, l’observateur n’y pénétrant
pas, ces points sont externes. Ce sont habituellement des objets physiques définis assez simplement :
immeuble, enseigne, boutique ou montagne. » K. Lynch. L’image de la cité. P. 24

« Certains points de repère sont des objets éloignés, dont la


caractéristique est d’être vus sous de nombreux angles et à des distances
variées, dépassant le sommet des éléments plus petits, et servant de
points de référence radiale.

D’autres points de repère ont surtout une utilité locale,


quand on ne peut les voir qu’à partir d’un nombre limité
d’endroits, ou sous certains angles. Ce sont les signaux La state House, Boston
innombrables, vitrines de boutiques, arbres, poignées de
portes, ou autres détails du paysage urbain qui
remplissent l’image de la plupart des observateurs. »

K. Lynch. L’image de la cité. P. 55-56 La tour Eiffel, Paris


L’ANALYSE PAYSAGÈRE

Les éléments de la ville

Un même élément peut avoir plusieurs fonctions. Par exemple, les autoroutes sont des
voies pour la plupart des automobilistes, mais deviennent des limites pour les piétons.
De même, ce qui est un quartier commercial à une échelle rapprochée peut devenir, à
une échelle plus large, un nœud.

Apports de Lynch
• Développement d’une méthode systématique d’analyse du cadre bâti lu comme entité
paysagère
•Importance de l’analyse perceptuelle pour l’analyste
•Développement d’entrevues pour valider les conclusions de l’analyste et prétendre à «
l’image collective »
•La notion d’« imagibilité » donne un statut à la capacité d’évocation du cadre bâti
•Développement des notions de parcours, de nœuds, de secteurs (avec limites et
repères) en lecture 3D.

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