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Valorisat ion du patrimo ine et renouvellement urbain Enseignante :Boudjabi Naouel

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CHAPITREI : Généralités sur le Patrimoine et le renouvellement urbain

I.2 Le Renouvellement urbain…

La thématique du renouvellement urbain devient de plus en plus présente en milieu


professionnel ; on pourrait presque prendre cela pour une sorte d'effet de mode. Mais la
réalité est toute autre, car cette notion concerne des pans ou des morceaux de ville,
voire des quartiers entiers qui semblent bloqués et qui n'arrivent plus à se renouveler
spontanément. Il s'agit de territoires qui ne s'adaptent plus à la fonctionnalité
contemporaine de la ville, dégradés et dépéris, ils se retrouvent en marge de la réalité
urbaine surtout dans un contexte actuel voué à la grande mobilité et aux transformations de
toute sorte. Désormais leur cadre de vie ne répond plus aux exigences de ses habitants.
Il s'agit entre autres : de la multiplication des friches urbaines, de la dévalorisation des
quartiers centraux, d'ensembles urbains qui souffrent de problèmes d'exclusion, d'une
mauvaise insertion des équipements, d'un dépérissement économique et de la perte
progressive de valeurs que connaissent ces zones. A tout cela s'ajoute le phénomène des
ghettos dans les villes développées et ce que l'on nommerait une clochardisation et une
bidonvilisation de l'urbain dans les villes du tiers monde.
‘Refaire la ville et la renouveler’ concerne évidement les tissus historiques et
les patrimoines, ces espaces marqués par les usages des hommes, leur culture, leur
histoire, autrement dit un héritage chargé de valeurs et d'expérience, mériterait d'être
conservé et protégé contre les aléas du temps et les mauvais usages. Dans la
perspective de la ville renouvelée, ces espaces devraient être reconquis, en tant que
contexte et référence à la fois, par la conception d'une sorte d'alliance entre passé et avenir.
Depuis prés d'une trentaine d'années les discours et les actions multiples fusent
de toute part dans le noble but de venir en aide aux quartiers et ensembles dits difficiles par
leurs: revitalisation, réhabilitation, restructuration, démolition - reconstruction…etc. Mais ce
qu'il conviendrait plutôt aujourd'hui de faire est de les inscrire dans un
processus de renouvellement urbain. En fait il s'agit de renouveler visions et
ambitions, méthodes et moyens, pratiques et action
I. C’est quoi le renouvellement urbain ?
D'abord quelques définitions d'après le Larousse
:
Renouveler une chose : c'est la remplacer quand elle a subi une altération, quand elle
est usée, cela veut dire aussi la changer et lui apporter des transformations profondes,
renouveler un usage ou une mode c'est les faire revivre, leur donner une nouvelle vie.
Le renouvellement des arts : c'est leur prorogation, synonyme également de renouveau et
de
retour.
D'après un article de Marion Desjardins : « Le renouvellement urbain désigne
l'ensemble des interventions mis en œuvre dans les quartiers en crise, en vue d'améliorer
leur fonctionnement et favoriser leur insertion dans la ville. Ces interventions empruntent
plusieurs voies et vont de la restructuration des immeubles de logement, l'amélioration des
dessertes de transport, la création de nouveaux services publics, à l'implantation des
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changer la ville, de la renouveler, de modifier fondamentalement et durablement la
physionomie des quartiers en difficulté, c'est également pour changer la vie de ses
habitants, car il est impossible de dissocier l'urbain du social, l'idée est de mettre le projet
urbain au service du projet social. Renouveler la ville sur elle-même revient dans un sens
d'imaginer une nouvelle urbanité, pour redonner l'envie aux habitants d'y vivre, de s'y
déplacer, d'y consommer, diminuer aussi dans une certaine mesure d'avoir recours à la
voiture et revenir à des échelles humaines du cadre de vie ».
Dans ce même contexte, François- Xavier Roussel fait si bien remarquer que : « la
ville renouvelée, c'est le réaménagement, la recomposition de la ville au sens de l'urbain,
mais c'est tout autant s'attacher à créer ou à développer de meilleures conditions
d'insertion, d'intégration de vie sociale, de multiculturalisme, d'urbanité, de civilité… ».
Il est vrai que l'urbanisme de renouvellement se caractérise par une méthode permettant de
traduire un projet à finalité avant tout sociale. Hormis cette dimension, il est aussi question
d'un renouveau politique, car une politique de renouvellement urbain ne peut pas
s'appuyer sur la politique dominante de l'action publique visant à l'extension urbaine, au
traitement des quartiers difficiles et aux procédures et modes d'action nationaux peut
modulables
localement. Il serait plus judicieux donc, de mettre en œuvre une sorte de volonté
politique qui permettrait une transformation profonde de ces territoires, en articulant
différentes échelles dans une vision globale, inclusive également de tous les acteurs
concernés par la production urbaine : état, autorité locale, acteurs privés, citoyens…visant
ainsi une logique démocratique, de participation et de concertation.
Cette nouvelle vision devra donc inclure des montages financiers, des
partenariats…etc, car des opérations d'une telle envergure sont onéreuses et il est clair que
les investisseurs préfèrent acquérir des achats immobiliers en zone périphérique (site
ouvert, moins cher, favorisant la standardisation et la rentabilité) plutôt que de s'impliquer
dans des problèmes fonciers et de nombreux risques financiers. Tout cela, nous mène à
déduire que le renouvellement urbain est en quelque sorte : mener une véritable entreprise de
transformation urbaine, sociale et économique.
Roger Cavalier définit le concept de renouvellement dans un de ces rapports comme
suit : « le renouvellement urbain s'intéresse à la fois au traitement des quartiers victimes de
processus combinés, de relégation sociale et de dévalorisation urbaine et au delà, dans le
temps le plus long de production de ville et dans l'espace le plus large de la zone
agglomérée, la fabrication patiente d'une ville plus équilibrée et dont l'aspect et l'usage
serait pour chacun plus équitable ».

II. Le renouvellement urbain dans son contexte historique :

II.1. Le renouvellement urbain : un phénomène spontané


La ville est un perpétuel inachèvement, toujours en effervescence, changeante,
vivante, elle se modifie et s'adapte souvent aux mouvances du temps, de la nature et de
l'homme. Depuis les époques antiques, les villes sont en continuelle reconstruction,
une reconstruction qui n'est souvent autre que le produit de facteurs déterminants. En effet, la
ville s’est toujours reconstruite sur elle-même, cette affirmation découle de l’histoire des
villes. Quand on étudie sur des plans, l’évolution de la structure des villes au cours des
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voit bien que parallèlement au développement naturel de l’urbanisation le long des voies de
communication, des reconstructions ont forgé l’image de la ville, en affirmant le pouvoir
d’un dirigeant, d’une armée ou autre.
II-1-1. Les conquêtes successives et les guerres :
Les conquêtes successives des territoires citadins apparaissent comme l'un des
principaux éléments de ces modifications. Chaque civilisation détruisait ou modifiait
les constructions de celle qui la précédait. Les guerres qu'on se livrait offraient un
contexte adapté aux nombreuses
déstructurations. Une fois le territoire acquis, on implantait des espaces qui
convenaient mieux au mode de vie des nouveaux habitants. Ce processus formait aussi une
manière d'exprimer sa force, sa dominance, une intention d’affirmer ou bien de propager
son image. Tel était le cas des Romains qui ont pu marquer le monde par leur cités,
devenues aujourd'hui des vestiges se conjuguant aux paysages des villes
contemporaines telles que: Rome, Carthage, Tébessa…etc. Les conquêtes musulmanes
quant à elles, n'ont pas engendré de grandes démolitions dans les villes existantes ; on s'était
plutôt penché vers des modifications et suppressions de tout édifice qui touchait à la religion
musulmane. Il était donc plus question de juxtaposition que d'appropriation, bon nombre de
villes ont connu cet essor notamment en Afrique du nord. Il n'en reste pas moins que toutes
ces successions, de l'antiquité au temps du colonialisme des époques plus modernes, ont
engendré des villes qui conservent jusqu'à nos jours un véritable condensé d'évolutions
historiques, des pratiques et des arts de bâtir; essor considérable de la civilisation humaine
et surtout un renouvellement constant des styles architecturaux et urbains.
II-1-2. Les progrès technologiques et modernités :
L’avènement d'une modernité, de nouvelles techniques, ou de nouveaux matériaux se
répercutaient instantanément sur l'image de la ville et sur ses éventuelles
reconstructions. C'est ainsi qu'au début du 19ème siècle, cette dernière a carrément subi
des réformes, aussi bien urbaine que sociale. La situation ne s'est pas limitée à l'Europe,
comme on n'aime bien à penser, mais elle a aussi inclus des villes Ottomanes. L’exemple que
nous pourrons citer est la ville du Caire sous le Khédive Ismail, qui connaîtra à cette même
époque le remaniement de plus de sa moitié, par la destruction et ouverture de quelques axes
de pénétration. Le but était l'embellissement du Caire à l'image des villes européennes. Le
Caire n'est pas une exception, puisque Tunis connaîtra entre 1837 et 1875 des travaux
semblables de modernisation par Ahmed Bey et le premier ministre Khirédine, la Mecque
aussi poursuivra des opérations de réaménagement et d'embellissement.
II-1-3. Les catastrophes naturelles et les accidents :
Les catastrophes naturelles et les accidents aussi comptent parmi les effets qui ont fait
écroulé des parties, voir des villes entières et qui ont fait ressurgir d'autres. Les exemples que
nous pourrions citer sont multiples, tels que : le séisme d’El Asnam (actuelle Chlef,
Algérie) en 1980, l’incendie de Chicago en 1871[4]. L’incendie de Rome en l’an 64 après
Jésus Christ et sa reconstruction, par l’empereur Néron et ses architectes, lesquels en ont
profité pour remettre de l’ordre dans ses rues insalubres.

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II-2. ‘Un renouveau urbain’ : d’origine Américaine
Le renouveau urbain est une traduction de : urban renewal, qui peut également être
traduit par renouvellement urbain. Le mot anglais interpelle donc des significations telles
que renouvellement, renouement, reprise, en bref cela sous-entend une continuité avec le
passé. L'expression urban renewal est souvent traduite en Français par ‘la rénovation
urbaine’ ce qui en change totalement le sens, puisque la rénovation, en France, par exemple,
est réglementée par le décret du 31 décembre 1958, puis par la loi de 1956 concernant
l'éradication des bidonvilles et par celle de 1970 sur la démolition des logements insalubres.
D'après une étude pionnière d’Henri Coing, les observateurs démontrèrent que la rénovation
urbaine provoquait, l'éviction d'une population ‘populaire’ et la transformation sociologique
du quartier rénové.
Aux Etats-Unis, la ‘housing act’ (venue dans le cadre du urban renewal) de 1949
permet aux autorités municipales d'entreprendre au centre ville la démolition des slums, de
reconstruire de nouveaux bâtiments et équipements et de bénéficier de financements
nationaux. De nombreuses villes ont ainsi pu embellir leur centre tout en éloignant
des habitants aux situations précaires, des noirs pour la majorité. De 1949 à 1968, on
voit promulguer une nouvelle Housing Act, les préoccupations de cette dernière étaient
plutôt la construction de logements sociaux ainsi que plusieurs amendements à travers
lesquels on a essayé de corriger la politique de bulldozer, tout en associant des habitants
dans le réaménagement de leurs quartiers. Malheureusement, ces tentatives n'ont pas eu le
succès escompté. L’Urban Renewal correspond donc à une
politique technocratique d'accompagnement de la transformation de
l'Amérique urbaine. Cette politique de renouvellement urbain a montré ses
limites et ses problèmes mais aussi ses atouts, car de nombreux quartiers de grands
ensembles et des centres anciens ont été réurbanisés et ré- architecturés de manière très
satisfaisante en maintenant sur place une population sociologiquement composite.
Depuis la fin des années quatre vingt, un terme : le ‘New Urbanism’ est devenu le centre des
débats sur le renouvellement urbain américain. Il a vu le jour en réaction à la forme et aux
pratiques néfastes existant dans les agglomérations modernes et leurs banlieues sans âme. Ce
sont donc les nouveaux urbanistes tels : Elisabeth Plater- Zyberk, Andres Dauny, Jonathan
Barnett, Peter Calthorpe et James Rouse, qui ont initié en 1993 le congrès du New
Urbanism. Leurs objectifs étaient : de revaloriser leurs villes et quartiers, à promouvoir
l’accès à la rue et à l’espace public, ainsi que l’écologie urbaine, en prônant le retour à
l’urbanisme d’avant- guerre avec sa petite ville USA. Le mouvement du New Urbanism
tente en fait d’impulser une modification des comportements par l’intermédiaire d’une
architecture et d’un urbanisme passéiste. C’est pourquoi il ne remporte pas
l’adhésion en tant que méthode de renouvellement urbain, en plus qu’il a été
surtout appliqué pour l’habitat des classes moyennes blanches. Sa mise en pratique pose
aussi une certaine problématique.

II-3. Le renouvellement urbain : un phénomène de plus en plus


répandu.

Quarante ans plus tard (depuis son apparition aux Etat Unies en 1949), le
terme renouvellement ressurgit mais cette fois en Europe, pas avec le même sens, ni les
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En France, par exemple, le renouvellement urbain, dérive de la politique de démolition

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reconstruction (la rénovation) menée depuis plusieurs années déjà (1958). Mais très vite elle
a été confrontée à des problèmes urbains d'une autre échelle. Sur le plan administratif, les
opérations sont devenues trop lourdes à monter, sur le plan budgétaire elles se sont
avérées trop coûteuses, et elles sont devenues carrément impopulaires tant auprès des
propriétaires expropriés que les habitants relogés et ayant perdu leurs emplois. La politique
de rénovation perdis de sa vigueur en 1970, mais comme les problèmes existaient toujours,
elle a continué sous d’autres nominations (exemple de la RHI : Résorption de l’Habitat
Insalubre, gérée par la direction de la construction).
C’est alors que George Constantin (directeur du fond d'épargne à la caisse des
dépôts) plaide pour la formule de ‘renouvellement’ beaucoup moins traumatisante que la
démolition – reconstruction et bien sûr plus générale. L'essentiel de cette approche selon Pierre
René Lamas (directeur général de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction au ministère de
l'équipement) est qu'elle soit globale, celle-ci doit articuler plusieurs éléments dont la prise en
compte des conséquences de la moindre décision quelle qu’en soit l’échelle. La question de
relogement, le choix d'un projet urbain pluriel, l'intégration et la nécessaire participation des
habitants sont autant de sujets traités au préalable de toute intervention.

Le renouvellement, le recyclage et la régénération urbaines révèlent la


naissance d’un nouveau type d'urbanisme à travers le monde (en Angleterre - régénération
urbaine et renouvellement des quartiers défavorisées, au Canada, dans les Pays-Bas, au
Maroc…etc.), qui ne concerne pas seulement le présent et sa conception, mais participe au
destin du territoire, comme à la vie sociale et inclus par la même une continuité avec
l'existant.

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