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Busseyroux Noeud Borromeen PDF
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Le Neubo de Lacan
Vue d’ensemble sur la clinique borroméenne
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Topologie générale et topologie des nœuds
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La topologie ensembliste reste cependant présente dans la
topologie borroméenne avec D.I., la droite infinie, que Lacan
avec Desargues fait strictement équivaloir avec le cercle des
ronds de ficelles. La D.I. écrit le trou réel, un trou que rien ne
cerne et qui est celui auquel on ne pense pas car nous sommes
dedans, ce trou étant tout ce qu’il y a autour de la droite infini et
donc autour de l’infini des nombres réels.
La D.I. et le trou
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Fig 2 : Le nœud borroméen restauré de Joyce
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moyen lui apparaîtra finalement la meilleur façon de présenter
l’inconscient (cf. l’ouverture de La topologie et le temps à Sainte
Anne chez le Pr. Deniker). Et pourtant, c’est le nouage RSI avec
le symbolique pour moyen que Lacan va privilégier et retenir
pour les deux séminaires R.S.I. et Le sinthome. C’est qu’il y
réexamine la question du Nom-du-Père et de sa fonction de
quatrième rond. En fait il y a 16 façons de dessiner un nœud
borroméen orienté aplati mais elles correspondent à un seul et
même objet. La figuration est donc trompeuse. On croit que
c’est pas le même alors que c’est le même. Par contre, si on
différencie les 3 ronds par une couleur et si on oriente ne serait-
ce qu’un rond, on peut distinguer deux objets borroméens à 3
ronds, impossibles à confondre (on dit non automorphes).
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tore, soit la topologie de la passe qu’il avait proposé dans
« L’étourdit ». Mais quand Lacan introduit ce noeud dans Le
sinthome du 16 décembre 1975 c’est pour le présenter comme le
nœud de la paranoïa : « En tant qu’un sujet noue à trois
l’imaginaire, le symbolique et le réel, il n’est supporté que de leur
continuité. L’imaginaire, le symbolique et le réel sont une seule et
même consistance, et c’est en cela que consiste la psychose
paranoïaque. »
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tore produit la doublure, alors qu’en 75 il lui donne consistance,
substance d’Un.
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Une clinique borroméenne des psychoses serait donc à
concevoir à partir de là comme une clinique des indistinctions
produites par mise en continuité des consistances boroméennes,
la perte de réalité dans la psychose étant borroméennement à
concevoir comme perte du « borroméen pépère », soit la
chaînœud borroméenne au quatrième rond qui seule assure que
le borroméen à trois ne tombe pas dans le trèfle de la psychose.
Car ce nœud à quatre que Lacan dit pépère, c’est le nœud de la
Realität dite par Freud psychique et par Lacan religieuse, d’être
celle que fait tenir le quatrième rond du Nom-du-Père par lequel
Freud soutient l’hypothèse de l’inconscient.
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est celui de la chaîne de Withehead que Lacan présente dans
Encore comme celui du fantasme. Cette chaîne a pour propriété
l’interchangeabilité par déformation continue de sa consistance
en forme de huit (le sujet divisé) avec sa consistance en forme de
rond (l’objet).
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va-et-vient de la Mort. Et qu’en est-il de la mise en continuité de
l’Imaginaire et du Symbolique ? Là où tout le symbolique est
imaginaire, là où tout le langage est jouissance du sens et est
interchangeable avec le réel de la vie, n’est-ce pas dans la manie,
comme irréelisation du fantasme ?
Remborroméaniser la psychose
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J’ai jusqu’ici abordé la structure des psychoses en terme de
perte du borroméen par mises en continuité, mais celle-ci n’est pas la
seule façon de penser la psychose, pour laquelle d’ailleurs Lacan
n’exclut pas un retour au borroméen, non seulement comme on
l’a vu pour Joyce mais aussi pour le paranoïaque. Il examine en
effet la possibilité d’emborroméaniser le trèfle paranoïaque en
l’ouvrant en une natte à 2 fils qu’il tresse borroméennement avec
trois autres (Le sinthome, p. 47). Ainsi tressés à quatre, trois
paranoïaques peuvent être noués par un quatrième qui se spécifie
d’être sinthome névrotique On pourrait ainsi concevoir certaines
guérisons ou rémissions de délires paranoïaques à trois ou folies
simultanées, comme disait déjà Lacan avec Claude, et Mignault
en 1931, grâce à leur emborroméanisation par la fonction-
sinthome d’un proche. C’est à cette place de fonction-sinthome
névrotique, comme l’expose fort bien Jean Allouch, qu’est
venue, dans la paranoïa à trois d’Aimée (Marguerite Anzieu) avec
sa mère et sa tante, la sœur aînée d’Aimée, Élise, auprès de
laquelle elle alla vivre à 18 ans et qui, loin d’être la véritable
persécutrice qu’en fait Lacan dans sa thèse, para un temps au
rapport sexuel avec la mère, jusqu’au moment où, en 1921,
Aimée tomba enceinte d’une fille dont elle accouche mort-née et
déclencha un délire d’infanticide d’abord cristallisé sur M elle C. de
la N. Par la suite, Lacan prendra pour Marguerite, par l’acte de la
nommer Aimée dans sa thèse, cette fonction de sinthome
jusqu’en 1953 où, Didier Anzieu rompant son analyse avec
Lacan, c’est le Christ qui en assura la fonction, si bien que
Marguerite ne re-délirera plus.
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du Réel par dessus celui du Symbolique, la fonction d’exception
de l’Au-moins-un assurant avec S de A barré cette primauté
structurale de R sur S. La preuve qu’il y a bien ce point d’erreur de
la structure chez Joyce, Lacan va la chercher avec Jacques Aubert.
Et il la trouve. Il en trouve le signe clinique dans son récit de la
raclée qu’il reçut d’un nommé Héron et où il dit avoir ressenti le
dégoût de son corps qui foutait le camp comme une pelure :
c’est à ce lâchage du rond de l’Imaginaire que l’ego d’artiste de
Joyce est venu suppléer.
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compte Lacan le 11 mars 75, supposer ses ronds dénoués. Le nouage
au quatrième du Père-symptôme présuppose que le nœud R.S.I. soit
défait, c’est-à-dire que les trois ronds soient libres et empilés pour qu’un
quatrième les renoue. Et qu’il soit défait pas n’importe comment, pas
comme chez Freud où R est sous I et I sous S qui les domine.
Lacan choisit le 11 mars 57 Ŕ et ce sera décisif pour la suite,
jusqu’à Joyce Ŕ de défaire R.S.I., de le faire rater en ne faisant
plus passer S deux fois devant I, de sorte que S se retrouve tout
au dessous avec, empilés dessus, R, puis I. Moyennant quoi, il
place une quatrième corde Σ qui, en passant sous S, sur R et sous
I, refait le nœud à quatre, le nœud fait de la façon que Lacan dit
« pépère » : celui du symptôme comme suppléant à ce ratage choisi,
voulu du Symbolique comme ne primant pas sur l’Imaginaire.
Lacan choisit donc comme point d’erreur de la structure la
défaillance du symbolique à primer sur l’imaginaire et pose le
symptôme comme ce qui nomme le Symbolique là où il défaille.
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Σ circularité, nous donnons son plein exercice à ce qui peut se
supporter de lalangue ».
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J’ai fait l’hypothèse ailleurs, dans une conférence à Naples, que
cette nomination de l’imaginaire avait opéré chez Kurt Gödel.
On sait qu’il était en proie à un délire paranoïaque, avec un
thème récurrent d’empoisonnement, et que son invention du
théorème d’incomplétude lui a permis, contre la régression au
trèfle de sa paranoïa, de maintenir une chaînœud borroméenne à
trois, comme le soutient Gabriel Lombardi. Et puis, dès 1939, et
alors qu’il consulte à New York un psychanalyste, ancien
dadaïste et proche de Arp, le Dr Hulbeck, Gödel pose dans un
cours de logique à une université catholique près de Chicago,
parmi quarante propositions, celle-ci : « Il existe des anges ».
Comme nos corps habitent le monde sensible, les anges, êtres
incarnés dans les idéalités mathématiques, habitent le monde
mathématique où ils survolent toute l’extension des ensembles
infinis et leurs puissances. Car les ensembles infinis exigent, pour
exister, ce survol. Dans une conversation avec Wang, Gödel en
pose l’axiome : « Pour tout ensemble, il y a quelque esprit qui
peut le survoler dans le sens le plus strict ». Donc, les anges
existent : ils vivent dans la réalité mathématique où ils parcourent
du regard, passent en revue, grâce à un organe incorporel qu’il
appelle l’œil mathématique, les différents infinis que nous, qui
avons un corps, ne pouvons parcourir !
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Fig 9 : les anges nominateurs de l’Imaginaire mathématique de Gödel
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Et si d’aventure, c’était ce nouage au cinquième rond de
l’angoisse qui venait à péter, il y aurait encore la possibilité d’un
nouage borroméen au sixième rond du fantasme, qui alors peut
venir faire couple avec le Réel dans le dessin qu’en présente
Lacan le 20 décembre 1977 dans Le moment de conclure.
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Fig 10 : L’Homme aux six chevreaux
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l’hypothèse fort intéressante qu’avance Marcel Czermak dans
Patronymies (Masson, 1998) à propos du cas extraordinairement
complexe de celui qu’on pourrait appeler « l’homme aux paroles
imposées et au nom d’oiseau rare », avec lequel Lacan s’était
entretenu à Sainte Anne, le 12 février 1976, et dont il parla
comme d’une « psychose lacanienne, enfin vraiment
caractérisée ».
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Fig 11 : la satisfaction de fin comme nomination d’ICSR par
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